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Read Ebook: Histoire de St. Louis Roi de France by Bury Richard Girard De

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Ebook has 646 lines and 100504 words, and 13 pages

Le comte ?tant de retour et assur? d'un tel appui, ne m?nagea plus rien: il eut la hardiesse de publier une d?claration, dans laquelle il se plaignait de n'avoir jamais pu obtenir justice ni du roi ni de la r?gente, sur les justes requ?tes qu'il avait pr?sent?es plusieurs fois. Apr?s avoir exag?r? l'injustice qu'on lui avait faite par l'arr?t donn? ? Melun contre lui, la violence avec laquelle on lui avait enlev? le ch?teau de Bellesme et les domaines qu'il poss?dait en Anjou, il protestait qu'il ne reconnaissait plus le roi pour son seigneur, et qu'il pr?tendait n'?tre plus d?sormais son vassal. Cette d?claration fut pr?sent?e au roi, ? Saumur, de la part du comte, par un chevalier du temple. C'?tait porter l'audace et la f?lonie aussi loin qu'elles pouvaient aller.

Sa t?m?rit? ne demeura pas impunie. D?s le mois de f?vrier le roi vint assi?ger Angers, et le prit, apr?s quarante jours de si?ge. Il aurait pu pousser plus loin ses conqu?tes, et m?me accabler le comte de Bretagne; mais les seigneurs dont les troupes composaient une partie de son arm?e, qui n'aimaient pas que le roi f?t de si grands progr?s, lui demand?rent apr?s ce si?ge leur cong?, qu'il ne put se dispenser de leur accorder. Il retira le reste de ses troupes, et fut oblig? de demeurer dans l'inaction jusqu'? l'ann?e suivante.

Mais, pendant cet intervalle, la r?gente ne fut pas oisive: elle regagna le comte de la Marche, et conclut avec lui un nouveau trait? ? Clisson, par lequel le roi s'obligea de donner en mariage sa soeur Elisabeth au fils a?n? de ce comte. Elle traita avec Raimond, nouveau comte de Thouars. Ce seigneur fit hommage au roi des terres qu'il tenait en Poitou et en Anjou, et s'engagea de soutenir la r?gence de la reine contre ceux qui voudraient la lui disputer; et enfin, elle remit dans les int?r?ts du roi plusieurs seigneurs qui promirent de le servir envers et contre tous. Elle leva des troupes, et mit le roi en ?tat de s'opposer vigoureusement au roi d'Angleterre, qui faisait des pr?paratifs pour passer en France.

Effectivement, ce prince ?tant parti de Portsmouth le dernier avril de l'an 1230, vint d?barquer ? St-Malo, o? il fut re?u avec de grands honneurs par le comte de Bretagne, qui, soutenant parfaitement sa nouvelle qualit? de vassal de la couronne d'Angleterre, lui ouvrit les portes de toutes ses places.

Louis n'eut pas plut?t appris ce d?barquement, qu'ayant assembl? son arm?e, il se mit ? la t?te, vint se poster ? la vue de la ville d'Angers, o? il demeura quelque temps, pour voir de quel c?t? le roi d'Angleterre tournerait ses armes. Louis ?tait alors dans la seizi?me ann?e de son ?ge. La r?gente lui avait donn?, pour l'accompagner et l'instruire du m?tier de la guerre, le conn?table Mathieu de Montmorency, et plusieurs autres seigneurs qui lui ?taient inviolablement attach?s. Louis, voyant que les ennemis ne faisaient aucun mouvement, s'avan?a jusqu'? quatre lieues de Nantes, et fit le si?ge d'Ancenis. Plusieurs seigneurs de Bretagne, qui s'?taient fortifi?s dans leurs ch?teaux ? l'arriv?e des Anglais, dont ils ha?ssaient la domination, vinrent trouver le roi pour lui offrir leurs services et lui rendre hommage de leurs terres.

Le roi, avant de recevoir ces hommages, avait tenu, comme on le voit par ces actes, une assembl?e des seigneurs et des pr?lats, o? le comte de Bretagne, pour peine de sa f?lonie, avait ?t? d?clar? d?chu de la garde du comt? de Bretagne, qu'il ne poss?dait qu'en qualit? de tuteur de son fils et de sa fille Iolande, auxquels le comt? de Bretagne appartenait, du chef de leur m?re.

Cependant Ancenis fut pris, et les Anglais ne firent aucun mouvement pour le secourir. Le roi s'avan?a encore plus pr?s de Nantes, et fit insulter les ch?teaux d'Oudun et de Chanteauceau, qu'il emporta aussi sans que l'arm?e ennemie s'y oppos?t. On e?t dit que le roi d'Angleterre n'?tait venu en Bretagne que pour s'y divertir; car ce n'?tait que festins, que r?jouissances, que f?tes dans la ville de Nantes, tandis que les ennemis ?taient aux portes. Rien n'?tait plus propre que cette inaction pour confirmer le soup?on qu'on avait depuis long-temps, que le favori du roi d'Angleterre ?tait pensionnaire de la r?gente de France.

Comme la saison s'avan?ait, et que l'on voyait bien que les Anglais, parmi lesquels les maladies et la disette commen?aient ? se faire sentir, ne pouvaient d?sormais ex?cuter rien d'important, la r?gente pensa ? mettre la derni?re main ? un ouvrage qu'elle avait d?j? fort avanc?, et qui ?tait de la derni?re importance pour le bien de l'?tat. C'?tait la r?conciliation des grands du royaume entre eux, et leur r?union enti?re avec le roi. On laissa sur la fronti?re autant de troupes qu'il en fallait pour arr?ter l'invasion de l'ennemi, et la cour se rendit ? Compi?gne au mois de septembre 1230. Ce fut l? qu'apr?s beaucoup de difficult?s, tant les int?r?ts ?taient compliqu?s, la r?gente, bien convaincue que de l? d?pendaient le repos du roi son fils, et la tranquillit? de l'?tat, eut le bonheur de r?ussir. Les comtes de Flandre et de Champagne se r?concili?rent avec le comte de Boulogne, ? qui l'on donna une somme d'argent pour le d?dommager des d?g?ts qui avaient ?t? faits sur ses terres par ordre de la cour. Jean, comte de Ch?lons, reconnut le duc de Bourgogne pour son seigneur, et promit de lui faire hommage. Le duc de Lorraine et le comte de Bar furent r?concili?s par le comte de Champagne et par la r?gente. Tous les seigneurs promirent au roi de lui ?tre fid?les, apr?s que ce prince et la r?gente leur eurent assur? la confirmation de leurs droits et de leurs privil?ges, suivant les r?gles de la justice, les lois et les coutumes de l'?tat.

Le roi d'Angleterre ne voulant pas qu'il f?t dit qu'il n'?tait pass? en France que pour y donner des f?tes, se livrer au plaisir et y ruiner ses affaires, prit l'occasion de l'?loignement du roi, pour conduire ce qui lui restait de troupes en Poitou et en Gascogne, o? il re?ut les hommages de ceux de ses sujets qui relevaient de lui ? cause de son duch? de Guyenne. Etant ensuite revenu en Bretagne, et voyant que son s?jour en France lui serait d?sormais inutile, apr?s ce qui venait de se passer ? Compi?gne, il repassa la mer et arriva ? Portsmouth au mois d'octobre, fort chagrin d'avoir fait une excessive d?pense, et perdu par les maladies beaucoup de ses officiers.

Le d?part du roi d'Angleterre laissait le comte de Bretagne expos? ? toute la vengeance du roi; mais le comte de Dreux, fort empress? ? tirer son fr?re du danger o? il ?tait, obtint sa gr?ce du roi, qui voulut bien, par bont?, accorder au comte de Bretagne une tr?ve de trois ann?es, qui fut conclue au mois de juillet 1231.

Le roi et l'?tat firent, cette ann?e, deux grandes pertes par la mort des deux seigneurs les plus illustres et les plus distingu?s pour leur valeur dans les arm?es, et dans les conseils par leur prudence. Je veux parler de Mathieu II de Montmorency, qui exer?a la charge de conn?table sous trois rois avec la plus grande fid?lit?, et du c?l?bre Garin, chancelier de France.

Montmorency avait accompagn? Philippe-Auguste dans l'exp?dition qu'il fit en Palestine avec Richard, roi d'Angleterre, contre les infid?les. Il contribua beaucoup ? la fameuse victoire que Philippe remporta ? Bouvines, dans laquelle Montmorency prit seize banni?res, en m?moire de quoi, au lieu de quatre al?rions qu'il portait dans ses armoiries, Philippe voulut qu'il en m?t seize.

La France commen?a donc ? respirer, apr?s tant de desordres caus?s par les guerres civiles. La r?gente n'oublia rien pour r?tablir l'ordre et la tranquillit? dans tout le royaume; elle continua ses soins pour accommoder encore les diff?rends de quelques seigneurs, qu'on n'avait pu terminer dans le parlement de Compi?gne.

Elle fit revenir ? Paris les professeurs de l'universit?, qui s'?taient tous retir?s de concert, ? l'occasion d'une querelle que quelques ?coliers, ? la suite d'une partie de d?bauche, avaient eue avec des habitans du faubourg Saint-Marceau, et sur laquelle le roi n'avait pas donn? ? l'universit? la satisfaction qu'elle avait demand?e avec trop de hauteur et peu de raison.

On tint la main ? l'ex?cution d'une ordonnance publi?e quelque temps auparavant contre les Juifs, dont les usures excessives ruinaient toute la France. On fit fortifier plusieurs places sur les fronti?res; et enfin on renouvela les trait?s d'alliance avec l'empereur et le roi des Romains, pour maintenir la concorde entre les vassaux des deux ?tats, et emp?cher qu'aucuns ne prissent des liaisons trop ?troites avec l'Angleterre.

Les interdits ?taient depuis long-temps fort en usage. Les papes les jetaient sur les royaumes entiers, et les ?v?ques, ? leur exemple, d?s qu'ils croyaient avoir re?u quelque tort ou du roi, ou de ses officiers, ou de leurs dioc?sains, faisaient cesser partout le service divin, et fermer les ?glises, si on leur refusait satisfaction. Cela fut regard? par la r?gente, et avec raison, comme un grand d?sordre. Milon, ?v?que de Beauvais, et Maurice, archev?que de Rouen, en ayant us? ainsi, leur temporel fut saisi au nom du roi, et ils furent oblig?s de lever l'interdit. Ce prince, tout saint qu'il ?tait, tint toujours depuis pour maxime de ne pas se livrer ? un aveugle respect pour les ordres des ministres de l'?glise, qu'il savait ?tre sujets aux emportemens de la passion comme les autres hommes. Il balan?ait toujours, dans les affaires de cette nature, ce que la pi?t? et la religion d'un c?t?, et ce que la justice de l'autre, demandaient de lui. Le sire de Joinville, dans l'Histoire de ce saint roi, en rapporte un exemple, sans marquer pr?cis?ment le temps o? le fait arriva, et qui m?rite d'avoir ici sa place.

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Le roi ?tant entr? dans sa dix-neuvi?me ann?e, la r?gente pensa s?rieusement ? le marier. Il est ?tonnant que la pi?t? solide de ce prince, et la vie exemplaire qu'il menait d?s lors, ne l'aient point mis ? couvert des traits de la plus noire calomnie. Les libertins, dont les cours ne manquent jamais, et dont le plaisir est de pouvoir fl?trir la vertu la plus pure, ? quoi ils joignirent encore la jalousie qu'ils avaient de la prosp?rit? dont la France jouissait sous la conduite de la r?gente, os?rent faire courir le bruit que ce jeune prince avait des ma?tresses, que sa m?re ne l'ignorait pas, mais qu'elle n'osait pas trop l'en bl?mer, afin de n'?tre point oblig?e de le marier sit?t pour se conserver plus longtemps l'autorit? enti?re du gouvernement.

La r?gente, avec sa grandeur d'ame ordinaire, m?prisa ces calomnies, et ceux qui les r?pandaient n'eurent pas la satisfaction de l'en voir touch?e; mais elle confondit leur malignit? sur ce qui la regardait, en mariant le roi son fils, et en lui faisant ?pouser la fille a?n?e du comte de Provence.

Il s'appelait Raymond B?renger. Il ?tait de l'illustre et ancienne maison des comtes de Barcelone, dont on voyait les commencemens sous les premiers rois de la seconde race. Le royaume d'Aragon y ?tait entr? depuis pr?s de cent ans par une h?riti?re de cet ?tat. Le comt? de Provence, d?membr? de la couronne de France, du temps de Charles-le-Simple, ?tait aussi venu par alliance dans la maison de Barcelone, au moins pour la plus grande partie; car les comtes de Toulouse y avaient des terres et des places, et se disaient marquis de Provence. Ce comt? fut le partage de la branche cadette dont Raymond B?renger ?tait le chef, et cousin-germain de Jacques r?gnant actuellement en Aragon.

Raymond B?renger eut de B?atrix, sa femme, quatre filles, qui, toutes quatre, furent reines. El?onore, la seconde, fut mari?e ? Henri II, roi d'Angleterre. Ce prince fit ?pouser la troisi?me, nomm?e Sancie, ? Richard, son fr?re, qui fut roi des Romains. B?atrix, la cadette de toutes, ?pousa Charles, comte d'Anjou, depuis roi de Sicile, fr?re de Louis. Enfin, Marguerite, l'a?n?e, ?pousa le roi de France. Ce prince la fit demander par Gaulthier, archev?que de Sens, et par le sire Jean de Nesle. Le comte de Provence, tr?s-sensible ? cet honneur, en accepta la proposition avec la plus grande joie. Il confia sa fille aux ambassadeurs avec un cort?ge convenable pour la conduire ? la cour de France.

La naissance et la beaut? de Marguerite la rendaient ?galement digne de cet honneur. Ses parens lui avaient fait donner une ?ducation assez semblable ? celle que Louis avait re?ue de la reine sa m?re. Ce prince l'?pousa ? Sens, o? elle fut en m?me temps couronn?e par l'archev?que.

Cependant la tr?ve de trois ann?es, que Louis avait accord?e au comte de Bretagne, ?tait sur le point de finir: le comte y avait m?me fait des infractions par plusieurs violences exerc?es sur les terres de Henri d'Avaugour, ? cause de l'attachement que ce seigneur avait fait para?tre pour la France. Le comte, toujours en liaison avec le roi d'Angleterre, avait obtenu de lui deux mille hommes qu'il avait mis dans les places les plus expos?es de sa fronti?re. Le roi, instruit de ses intrigues, r?solut de le pousser plus vivement qu'il n'avait encore fait. Le comte de Dreux et le comte de Boulogne ?taient morts pendant la tr?ve. Le comte de Bretagne avait perdu, dans le premier, qui ?tait son fr?re, un m?diateur dont le cr?dit e?t ?t? pour lui une ressource en cas que ses affaires tournassent mal; et dans le second, un homme toujours assez dispos? ? seconder ses mauvais desseins. Le roi, ayant assembl? ses troupes, s'avan?a sur les fronti?res de Bretagne avec une nombreuse arm?e. On y porta le ravage partout; de sorte que le comte, se voyant sur le point d'?tre accabl?, envoya au roi pour le prier d'?pargner ses sujets, et d'?couter quelques propositions qu'il esp?rait lui faire agr?er. Le comte lui repr?senta que les engagemens qu'il avait avec le roi d'Angleterre, tout criminels qu'ils ?taient, ne pouvaient ?tre rompus tout d'un coup: il le supplia de vouloir bien lui donner le temps de se d?gager avec honneur, et de lui accorder une tr?ve jusqu'? la Toussaint, pendant laquelle il demanderait au roi d'Angleterre une chose qu'assur?ment ce prince n'?tait pas en ?tat de lui accorder; savoir: qu'avant le mois de novembre il v?nt ? son secours en personne, avec une arm?e capable de r?sister ? celle des Fran?ais, et promit que, sur son refus, il renoncerait ? sa protection et ? l'hommage qu'il lui avait fait, et remettrait entre les mains du roi toute la Bretagne. Le roi, qui savait qu'en effet le roi d'Angleterre ne pourrait jamais en si peu de temps faire un armement de terre et de mer suffisant pour une telle exp?dition, accorda au comte ce qu'il lui demandait; mais ? condition qu'il lui livrerait trois de ses meilleures places, et qu'il r?tablirait dans leurs biens les seigneurs bretons, partisans de la France. Le comte de Bretagne accepta ces conditions. Peu de temps apr?s il passa en Angleterre, o? il exposa ? Henri l'?tat o? il ?tait r?duit, le pria de venir en Bretagne avec une arm?e, lui demanda l'argent n?cessaire pour soutenir la guerre contre un ennemi aussi puissant que celui qu'il avait sur les bras, et lui dit que, faute de cela, il serait oblig? de faire sa paix ? quelque prix que ce f?t.

Le roi d'Angleterre lui r?pondit qu'il lui demandait une chose impossible, lui reprocha son inconstance, et lui fit avec chagrin le d?tail des grosses d?penses que l'Angleterre avait faites pour le soutenir, sans qu'il en e?t su profiter. Il lui offrit n?anmoins encore quelque secours de troupes s'il voulait s'en contenter. Le comte, de son c?t?, se plaignit qu'on l'abandonnait apr?s qu'il s'?tait sacrifi? pour le service de la couronne d'Angleterre, qu'il ?tait enti?rement ruin?, et que le petit secours qu'on lui offrait ?tait moins pour le d?fendre, que pour l'engager ? se perdre sans ressources; et l'on se s?para fort m?content de part et d'autre. Apr?s ce que nous avons rapport? de la derni?re exp?dition du roi d'Angleterre en Bretagne, il serait bien difficile de d?cider lequel de lui ou du comte s'?tait conduit avec le plus d'imprudence.

Le comte de Bretagne n'eut pas plut?t repass? la mer, qu'il vint se jeter aux pieds du roi pour lui demander mis?ricorde, en confessant qu'il ?tait un rebelle, un tra?tre, qu'il lui abandonnait tous ses ?tats et sa propre personne pour le punir comme il le jugerait ? propos.

Le roi, touch? de la posture humiliante o? il voyait le comte, fit c?der ses justes ressentimens ? sa compassion; et, apr?s lui avoir fait quelques reproches sur sa conduite pass?e, il lui dit que, quoiqu'il m?rit?t la mort pour sa f?lonie, et pour les maux infinis qu'il avait caus?s ? l'?tat, il lui donnait la vie; qu'il accordait ce pardon ? sa naissance, qu'il lui rendait ses ?tats, et qu'il consentait qu'ils passassent ? son fils, qui n'?tait pas coupable des crimes de son p?re. Le comte, p?n?tr? de la bont? du roi, lui promit de le servir envers tous, et contre tous. Il lui remit ses forteresses de Saint-Aubin, de Chanteauceaux et de Mareuil pour trois ans, et s'obligea de plus ? servir ? ses frais pendant cinq ans en Palestine, et ? r?tablir la noblesse de Bretagne dans tous ses privil?ges.

La soumission du comte de Bretagne fut de la plus grande importance pour affermir l'autorit? du jeune roi. La vigueur avec laquelle il l'avait pouss?, retint dans le respect les autres grands vassaux de la couronne; mais il ne fut pas moins attentif ? pr?venir les occasions de ces sortes de r?voltes, que vif ? les r?primer.

Les alliances que les vassaux contractaient par des mariages avec les ennemis de l'?tat, et surtout avec les Anglais, y contribuaient beaucoup: aussi une des pr?cautions que prenaient les rois, ? cet ?gard, ?tait d'emp?cher ces sortes d'alliances autant qu'il ?tait possible, et dans les trait?s qu'ils faisaient avec leurs vassaux, cette clause ?tait ordinairement exprim?e, que ni le vassal, ni aucun de sa famille ne pourrait contracter mariage avec ?trangers, sans l'agr?ment du prince. Louis ?tait tr?s-exact ? faire observer cet article important. Le roi d'Angleterre, dans le dessein d'acqu?rir de nouvelles terres et de nouvelles places en France, demanda en mariage ? Simon, comte de Ponthieu, Jeanne, l'a?n?e de ses quatre filles, et sa principale h?riti?re. Le trait? du mariage fut fait; elle fut ?pous?e au nom du roi d'Angleterre par l'?v?que de Carlile, et le pape m?me y avait contribu?. Malgr? ces circonstances, Louis s'opposa ? ce mariage, dont il pr?voyait les suites dangereuses pour l'int?r?t de l'?tat. Il mena?a le comte de Ponthieu de confisquer toutes ses terres, s'il l'accomplissait, et tint si ferme, que le comte, sur le point de se voir beau-p?re du roi d'Angleterre, fut oblig? de renoncer ? cet honneur. Mais un autre mariage, qui fut conclu cette m?me ann?e, r?compensa la comtesse Jeanne de la couronne que Louis lui avait fait perdre, en l'obligeant de refuser la main du roi d'Angleterre. Ferdinand, roi de Castille, ?crivit au monarque fran?ais pour le prier d'agr?er la demande qu'il voulait faire de cette vertueuse princesse: ce qu'il obtint d'autant plus ais?ment, qu'il en avait plus co?t? au coeur de Louis pour arracher un sceptre des mains d'une personne du plus grand m?rite, et sa proche parente; car elle descendait d'Alix, fille de Louis-le-Jeune. On le vit encore, quelque temps apr?s, consoler la comtesse Mathilde d'avoir ?t? contrainte de pr?f?rer le bien de l'?tat ? son inclination pour un gentilhomme. Il lui fit ?pouser le prince Alphonse, fr?re de Sanche, roi de Portugal, neveu de la reine Blanche, qui avait fait ?lever cette jeune demoiselle ? la cour de France.

Le roi tint la m?me conduite ? l'?gard de Jeanne, comtesse de Flandre, veuve du comte Ferrand. Simon de Montfort, comte de Leicester, et fr?re cadet d'Amauri de Montfort, conn?table de France, s'?tait ?tabli en Angleterre pour y poss?der le comt? de Leicester, dont il ?tait h?ritier du chef de sa grand'm?re, et dont le roi d Angleterre n'aurait pas voulu lui accorder la jouissance s'il ?tait demeur? en France. Ce seigneur, homme de beaucoup de m?rite, ?tait en ?tat, par ses grands biens et par le cr?dit o? il ?tait parvenu en Angleterre, d'?pouser la comtesse de Flandre. Le roi, dans un trait? fait ? P?ronne avec elle, quelques ann?es auparavant, n'avait pas manqu? d'y faire ins?rer un article par lequel elle s'engageait de ne point s'allier avec les ennemis de l'?tat. Ce fut en vertu de ce trait?, qu'il l'obligea de rompre toute n?gociation sur ce mariage. Il emp?cha aussi Mathilde, veuve du comte de Boulogne, oncle du roi, dont nous avons d?j? parl?, d'?pouser le m?me Simon de Montfort.

Cette conduite de Louis faisait conna?tre ? toute la France combien il avait profit?, dans l'art de r?gner, des instructions que lui avait donn?es la reine sa m?re. Cette princesse cessa de prendre la qualit? de r?gente du royaume, sit?t que le roi eut vingt et un ans accomplis, et ce fut le cinq d'avril 1236. Ce terme de la minorit? fut avanc? depuis par une ordonnance de Charles V, suivant laquelle les rois de France sont d?clar?s majeurs d?s qu'ils commencent leur quatorzi?me ann?e.

La premi?re affaire importante que Louis eut en prenant le gouvernement de son ?tat, lui fut suscit?e par le comte de Champagne, que sa l?g?ret? naturelle ne laissait gu?re en repos. Il se brouillait tant?t avec son souverain, tant?t avec ses vassaux, tant?t avec ses voisins, et une couronne dont il avait h?rit? depuis deux ans ne contribuait pas ? le rendre plus traitable. Il ?tait fils de Blanche, soeur de Sanche, roi de Navarre.

Sanche ?tant mort en 1234, sans laisser d'h?ritiers, Thibaud, son neveu, lui succ?da au tr?ne de Navarre. Il trouva dans le tr?sor de son pr?d?cesseur 1,700,000 livres, somme qui, r?duite au poids de notre monnaie d'aujourd'hui, ferait environ 15,000,000. Avec ces richesses et cet accroissement de puissance, il se crut moins oblig? que jamais de m?nager le roi.

Il pr?tendit que la cession qu'il avait faite des comt?s de Blois, de Chartres, de Sancerre et des autres fiefs dont il avait trait? avec le roi pour les droits de la reine de Chypre, n'?tait point une vente, mais seulement un engagement de ces fiefs avec pouvoir de les retirer en rendant la somme d'argent que le roi avait pay?e pour lui: il entreprit donc de l'obliger ? les lui rendre. Outre son humeur inqui?te, il fut encore anim? par le comte de la Marche, et encore plus par la comtesse sa femme, qui, apr?s avoir rabaiss? sa qualit? de reine d'Angleterre en ?pousant un simple vassal du roi de France, conservait n?anmoins toujours sa fiert? ? ne pouvoir plier sous le joug de la d?pendance.

Le roi, plus ?clair? sur cet article que plusieurs de ses pr?d?cesseurs, et qui connaissait parfaitement ce qu'il pouvait et ce qu'il devait faire en conscience en cette mati?re, n'eut pas beaucoup d'?gard aux lettres du pape, mal inform? des intrigues et des mauvais desseins du roi de Navarre: il assembla son arm?e au bois de Vincennes, dans la ferme r?solution de fondre incessamment sur la Brie et sur la Champagne.

Le roi de Navarre, fort embarrass?, car le roi avait r?solu de le punir, prit le parti de la soumission, qui lui avait d?j? r?ussi. Il envoya promptement un homme de confiance, qui vint t?moigner au roi le regret que le roi de Navarre avait de lui avoir donn? lieu de soup?onner sa fid?lit?, et le supplier de lui pardonner sa faute.

Le roi, toujours port? ? la douceur, pourvu que son autorit? n'en souffr?t pas, r?pondit qu'il ?tait pr?t de recevoir les soumissions du roi de Navarre ? ces conditions: la premi?re, qu'il renon??t ? ses injustes pr?tentions sur les fiefs qu'il lui avait c?d?s par un trait? solennel; la seconde, que, pour assurance de sa fid?lit?, il lui rem?t incessamment entre les mains quelques places de ses fronti?res de Brie et de Champagne; la troisi?me, qu'il accompl?t au plut?t son voeu d'aller ? la Terre-Sainte; et la quatri?me, que, de sept ans, il ne rem?t le pied en France.

L'envoy? consentit ? tout, et le roi de Navarre vint, peu de jours apr?s, trouver le roi, auquel il livra Bray-sur-Seine et Montereau Faut-Yonne: c'est l? ce que son infid?lit? et son imprudence lui valurent. Peu de temps apr?s, la reine r?gente lui envoya ordre de sortir de la cour, choqu?e sans doute de la libert? qu'il prenait de lui t?moigner toujours de la tendresse, lui faisant conna?tre par cette conduite le m?pris qu'elle faisait d'un homme aussi frivole que lui.

Cette visible protection du Ciel fut un nouveau motif au roi pour redoubler sa ferveur et sa pi?t?. Il les fit para?tre quelque temps apr?s, en d?gageant ? ses frais la couronne d'?pines de Notre-Seigneur, un morceau consid?rable de la vraie croix, et d'autres pr?cieuses reliques qui avaient ?t? engag?es par Baudouin, empereur de Constantinople, pour une tr?s-grosse somme d'argent. Ces pr?cieuses reliques furent apport?es en France et re?ues au bois de Vincennes par le roi, qui les conduisit de l? ? Paris, marchant nu-pieds, aussi bien que les princes ses fr?res, tout le clerg? et un nombre infini de peuple. Ces reliques furent ensuite plac?es dans la Sainte-Chapelle, o? on les conserva comme un des plus pr?cieux tr?sors qu'il y e?t dans le monde.

Ce qui contribua beaucoup ? entretenir la paix dans le royaume, fut la r?solution que prirent quelques-uns des vassaux du roi, les plus difficiles ? gouverner, d'accomplir le voeu qu'ils avaient fait d'aller ? la Terre-Sainte. Le roi de Navarre, le comte de Bretagne, Henri, comte de Bar, le duc de Bourgogne, Amauri de Montfort, conn?table de France, et quantit? d'autres seigneurs, pass?rent en Palestine, o? plusieurs d'entre eux p?rirent sans avoir rien fait de m?morable, ni de fort avantageux pour la religion.

Pendant que ces seigneurs ?taient occup?s dans la Palestine ? faire la guerre aux infid?les, les ?tats de Louis ?taient dans la plus grande tranquillit?. Ce prince, occup? tout entier de la religion et du bonheur de ses peuples, partageait ?galement ses soins entre l'une et les autres. Les mariages des grands ?taient alors l'objet le plus important de la politique de nos souverains. Mathilde, veuve de Philippe, comte de Boulogne, oncle du roi, avait promis par ?crit de ne marier sa fille unique, que de l'agr?ment de Louis. Elle fut fid?le ? sa promesse. Le monarque qui, peu de temps auparavant, s'?tait oppos? ? l'union de la m?re avec le comte de Leicester, seigneur anglais d'une ambition d?mesur?e, consentit que la fille ?pous?t Gaucher IV, chef de la maison de Ch?tillon, seigneur fran?ais, aussi distingu? par sa fid?lit? que par sa haute naissance. Ce fut aussi par le m?me principe qu'apr?s avoir forc? la comtesse de Flandre ? renoncer ? l'alliance du m?me Leicester, il lui permit de s'unir au comte Thomas, cadet de la maison de Savoie, oncle de la reine Marguerite, le cavalier le mieux fait de son temps, plus estimable encore par les qualit?s de l'esprit et du coeur, mais peu avantag? des biens de la fortune.

Mais de tous ces mariages, les plus c?l?bres furent ceux des princes Robert et Alphonse, fr?res du roi. Le premier avait ?t? accord? avec la fille unique du feu comte de Flandre. La mort pr?matur?e de cette riche h?riti?re inspira d'autres vues. Louis choisit, pour la remplacer, Mathilde ou Mahaut, soeur a?n?e du duc de Brabant, princesse en grande r?putation de sagesse. Alphonse, par le trait? qui mit fin aux croisades contre les Albigeois, avait ?t? promis ? la princesse Jeanne, fille unique du comte de Toulouse; mais, comme ils n'?taient alors l'un et l'autre que dans la neuvi?me ann?e de leur ?ge, la c?l?bration de leurs noces avait ?t? diff?r?e jusqu'? ce moment.

Fr?d?ric, outr? de la rigueur dont Gr?goire usait ? son ?gard, ne pensa plus qu'? satisfaire son ressentiment. Outre les manifestes qu'il r?pandit dans toute l'Europe pour justifier sa conduite, par les n?cessit?s pressantes de son ?tat, qui l'obligeaient ? diff?rer son voyage, il mit plusieurs seigneurs romains dans son parti, en achetant toutes leurs terres argent comptant, et les leur rendant ensuite. Il les fit par ce moyen ses feudataires et princes de l'empire, avec obligation de le servir envers tous et contre tous. Le premier service qu'ils lui rendirent, fut d'exciter dans Rome une s?dition contre le pape, qui, ayant ?t? contraint d'en sortir, fut oblig? de se retirer ? P?rouse.

Cependant Fr?d?ric, pour convaincre toute l'Europe de la sinc?rit? de ses intentions, se pr?para pour le voyage de la Terre-Sainte, et partit en effet en l'ann?e 1228, avec vingt gal?res seulement et peu de troupes, mais suffisantes pour sa s?ret?, ayant confi? au duc de Spolette la plus grande partie de celles qu'il laissait en Europe, avec ordre de continuer en son absence la guerre contre le pape.

Je n'entrerai pas dans le d?tail de l'exp?dition de Fr?d?ric dans la Palestine; elle est ?trang?re ? l'histoire du r?gne de saint Louis. Je dirai seulement que Fr?d?ric, ayant fait une tr?ve avec le soudan d'Egypte, alla ? J?rusalem avec son arm?e, qu'il fit ses d?votions dans l'?glise du Saint S?pulcre, et que, pr?tendant avoir accompli son voeu, il revint en Europe. Etant arriv? en Italie, il continua ? faire la guerre au pape. Apr?s diff?rens ?v?nemens, toutes ces dissensions furent termin?es par une paix que ces deux princes firent entre eux, suivie de l'absolution que le pape donna ? Fr?d?ric de l'excommunication qu'il avait fulmin?e contre lui.

Plusieurs ann?es se pass?rent sans aucune rupture ?clatante jusque vers l'ann?e 1239. Fr?d?ric, apr?s avoir soumis plusieurs villes conf?d?r?es de la Lombardie, s'empara de l'?le de Sardaigne, que les papes depuis long-temps regardaient comme un fief relevant de l'?glise de Rome. Il en investit Henri son fils naturel, et ?rigea en royaume feudataire de l'empire cette ?le, qu'il pr?tendait en avoir ?t? injustement d?membr?e. A cette occasion, le pape fulmina une nouvelle excommunication contre Fr?d?ric, et envoya la formule ? tous les princes et tous les ?v?ques de la chr?tient?, avec ordre de la faire publier les dimanches et f?tes pendant l'office divin; et il d?clara tous les sujets de Fr?d?ric relev?s du serment de fid?lit? qu'ils lui avaient fait.

Le pape ?crivit d'Anagnie une lettre au roi de France dans laquelle, apr?s de grands ?loges des rois ses pr?d?cesseurs dont il relevait surtout la pi?t? et le z?le ? d?fendre la sainte ?glise contre ses pers?cuteurs, il priait le roi de ne le pas abandonner, et de l'assister de ses troupes dans la n?cessit? f?cheuse o? il ?tait de prendre les armes contre l'empereur.

Afin de l'y engager plus fortement, il lui fit pr?senter une autre lettre pour ?tre lue dans l'assembl?e des seigneurs de France, parce qu'elle leur ?tait adress?e aussi bien qu'au roi: elle ?tait con?ue en ces termes:

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Le pape se flattait que sa lettre serait re?ue favorablement en France, ? cause de l'offre de l'empire qu'il faisait au fr?re du roi: n?anmoins la proposition du pape fut rejet?e d'une mani?re tr?s-dure, si la r?ponse, rapport?e par l'historien d'Angleterre fut telle qu'il le dit: car cet auteur, indispos? contre les papes, ne doit pas toujours ?tre cru sur ce qui les regarde.

Les termes de cette r?ponse sont tr?s-offensans, et nullement du style du roi, qui, plein de respect pour le chef de l'Eglise, n'aurait jamais us? de ces expressions outrageantes dont elle est remplie. Il est vrai qu'il supportait, beaucoup plus impatiemment que ses pr?d?cesseurs, l'extension de la puissance spirituelle sur la juridiction temporelle; mais on voit par tous les actes de lui sur ce sujet qu'il ne s'emportait jamais contre les papes, ni contre les ?v?ques.

Ainsi cette lettre pourrait bien, au lieu d'?tre la r?ponse du roi, avoir ?t? celle des seigneurs de l'assembl?e, irrit?s la plupart contre les ?v?ques pour leurs entreprises continuelles, et que la d?position d'un empereur aurait indispos?s contre le pape. Telles sont les expressions de cette lettre: <

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