Read Ebook: Cent-vingt jours de service actif Récit Historique Très Complet de la Campagne du 65ème au Nord-Ouest by Daoust Charles R Charles Roger
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Ebook has 671 lines and 53375 words, and 14 pages
Vers minuit le silence commence ? r?gner parmi les promeneurs d?j? fatigu?s de la marche et c'est avec une satisfaction prononc?e qu'on arrive ? "l'h?tel de la For?t" vers une heure du matin. Ici on nous sert ? manger, mais les hommes encore peu habitu?s ? la nourriture qui fut distribu?e, pr?f?rent s'en passer et choisissent leurs places autour d'un feu de camp.
Apr?s une heure de halte au camp, on remonte en "sleighs" et la marche se continue ? travers les bois. A neuf heures du matin, le jour de P?ques, on atteignit la fin de notre p?nible voyage en tra?neaux. Deux tentes furent lev?es ? la h?te en cet endroit appel? vulgairement "Lac aux Chiens."
Ici, un accident des plus d?plorables arriva ? un des hommes de la compagnie No. 2, nomm? Boucher. Cet individu, fatigu? sans doute par la longueur et les mis?res de la route et d?courag? de la vie militaire, se jeta sur le chemin de fer au moment o? notre train reculait, mais perdant tout ? coup courage devant la mort cruelle qu'il s'?tait choisie, il essaya au dernier moment de se sauver. Il ?tait trop tard. Les roues lui pass?rent sur le pied et le bless?rent douloureusement. Il fut imm?diatement transport? sous la grande tente sur l'ordre du chirurgien Simard en attendant l'arriv?e du chirurgien major.
Cet accident, bien qu'il f?t l'acte d'un insens?, jeta la consternation parmi le camp. C'?tait; le premier accident s?rieux qui arrivait ? un membre du bataillon, et sa nature ?tait loin de compenser la peine que son ?tat de priorit? lui donnait.
Toute la journ?e se passa ? attendre le colonel qui s'?tait attard? ? Algoma, et la marche forc?e qu'on avait faite pendant la nuit devint inutile. Enfin, vers quatre heures de l'apr?s-midi, on nous servit nos rations, puis on nous fit monter dans de mauvais chars plates-formes dont quelques-uns m?me ?taient d?couverts. On s'installa du mieux que l'on p?t le long des bancs de bois brut en attendant l'heure du coucher. On nous distribua des couvertes de laine; chaque homme en avait une. Elles furent bient?t ?tendues sur le plancher du char et les soldats se plac?rent comme ils purent sous les bancs. On nous donna en m?me temps des tuques en laine; il ?tait temps! car notre figure ?tait des plus comiques avec nos petits k?pis sur le coin, de l'oreille.
Tout alla assez bien pendant une demi-heure mais bient?t la fra?cheur des gla?ons transperce les couvertes et le sommeil devient impossible. Plusieurs, Pour ne pas dire tous, se l?vent et passent le reste de la nuit, coll?s les uns contre les autres le long des bancs. La nuit ?tait des plus froides et le vent qui s'engouffrait par les fentes du char rendait la situation des soldats intol?rable. Avec quelle anxi?t? chacun attendait en silence le premier village o? l'on pourrait enfin descendre!
Enfin ? six heures du matin le train arr?ta ? la Baie du H?ron, En moins de cinq minutes tout le bataillon ?tait descendu en ligne. Pour la premi?re fois une pauvre ration de rhum fut donn?e ? chaque homme, et sans rien exag?rer, elle avait ?t? richement gagn?e. Bient?t apr?s on nous servit ? d?jeuner dans les chantiers du Pacifique. Certains journaux anglais, entr'autres le News de Toronto, ont rapport? qu'en cet endroit les soldats avaient d?valis? les magasins de la compagnie et bien d'autres histoires toutes aussi mensong?res et inf?mes les unes que les autres. C'est ici l'endroit de r?futer ces sots rapports et de leur donner un d?menti formel. Jamais un r?giment dans de pareilles circonstances ne s'est aussi bien comport? et c'est m?me ?tonnant qu'aucun des mauvais rapports qui ont ?t? faits n'ait le moindre fondement de v?rit?.
Apr?s un copieux d?jeuner, le bataillon remonta ? bord et l'on continua dans les m?mes chars jusqu'? Port Munroe, o? l'on arriva vers neuf heures de l'avant midi. Ici, on laissa les chars et la marche ? pied commen?a. Chaque soldat portait sur lui, outre sa carabine et ses munitions, toutes les parties de son accoutrement, havresac et autres. Apr?s une aussi mauvaise nuit, la marche le long de la rive nord du Lac Sup?rieur, vingt-cinq milles, faite en moins de dix heures, tient du prodige.
Peu d'hommes, m?me de vieux militaires auraient pu r?sister aussi bravement ? une aussi forte ?tape, et chose plus ?tonnante encore, pas un seul homme ne fut malade. Une seule halte fut faite pendant la marche, ? Little Peak, o? l'on fit une distribution de rations, fromage et "hard tacks." Si la fatigue fut grande, on eut une faible compensation par le magnifique coup d'oeil pr?sent? par le coucher du soleil sur le lac. L'astre du jour tomba comme un immense globe d'or dans le rideau, aux couleurs vari?es, que lui tendait l'Occident et qui semblait plier sous la masse qui s'y engouffrait; au fur et ? mesure que l'astre disparaissait ? l'horizon, chaque nuage se nuan?ait d'une fa?on grandiose. Que de po?tes auraient fait deux fois la m?me route pour contempler un pareil spectacle!
Vers huit heures du soir tout le bataillon ?tait remont? dans: de nouveaux chars, pires que ceux qu'on venait de laisser. Ceux-ci n'?taient form?s que de plates-formes simples avec une planche chaque c?t? pour servir de garde-fou.
Sur ces planches d'autres plus minces ?taient pos?es aussi pr?s que possible les unes des autres et servaient de si?ges aux soldats fatigu?s. L'on marcha ainsi tout le reste de la nuit et il ?tait une heure du matin quand on descendit ? Jackfish Syndicate.
A peine les soldats ?taient-ils descendus des chars que la, pluie commen?a ? tomber. Malheureusement il n'y avait aucun abri pour recevoir tous les soldats et plusieurs compagnies attendirent au-del? d'une demi-heure expos?es ? l'intemp?rie de la saison. Quelques murmures se firent entendre, mais ?a ne dura pas longtemps, car comme en bien d'autres circonstances semblables plus tard, le bon esprit des soldats reprit le dessus et bient?t des chante joyeux se firent entendre. Quelques-uns, chant?rent ? contre-coeur, mais tout le monde chanta.
A deux heures du matin, apr?s avoir bien mang?, les compagnies 2, 3, 4, 5 et 6 se retir?rent dans les hangars de la compagnie du Pacifique, situ?s aux environs, tandis que les autres, 1, 7 et 8, remont?rent en chars et furent conduites au village de Jackfish, o? un grand hangar avait ?t? pr?par? pour elles. Un bon feu fut entretenu toute la nuit dans les deux po?les de l'habitation et pour la premi?re fois depuis leur d?part de Montr?al, les volontaires dormirent bien et se repos?rent.
? dix heures l'on se r?veilla et les compagnies qui avaient couch? au village retourn?rent en chars au Syndical pour y prendre le d?jeuner.
La maison o? se servaient les repas ?tait encore remplie, les autres compagnies qui avaient couch? au Syndicat n'ayant pas encore fini leur d?jeuner. La pluie continuait ? tomber de plus belle et les soldats furent forc?s de s'entasser les uns sur les autres dans les hangars.
Pendant l'apr?s-midi, les volontaires se r?fugi?rent sous des tentes et l'on s'amusa ? chanter pour passer le temps, car la pluie ne cessait pas. Quelques-uns se dirig?rent vers une vieille masure dont l'enseigne moins pr?tentieuse par la forme que par le nom qu'elle portait avait attir? leur attention. On vendait de la boisson dans ce chantier, la bi?re s'y d?bitait, ? 15 contins, et ce qu'on ?tait convenu d'appeler du "whiskey" ? 25 contins le verre.
A quatre heures, le repas du soir fut servi ? tout le monde, puis chaque compagnie rentra dans ses quartiers.
A sept heures, le coucher fut sonn? et ? huit heures, tout le monde reposait.
D?s quatre heures, le lendemain matin, les trois compagnies qui avaient pass? la nuit au village, se lev?rent et les chars n'arrivant pas, elles se mirent en marche et travers?rent le lac ? pied jusqu'au Syndicat.
Apr?s une heure de marche, ces soldats n'eurent pour tout d?jeuner qu'une tranche de lard entre deux morceaux de pain.
A huit heures a.m. les premiers tra?neaux, charg?s de soldats, se mirent en marche et les autres ne tard?rent pas ? les suivre. Ce nouveau trajet le long du lac Sup?rieur, malgr? qu'il se f?t en voiture, ne fut gu?re plus plaisant que le premier. Le froid ?tait tr?s-grand et les soldats entass?s dans les voitures furent souvent oblig?s de descendre pour ne pas geler des pieds. Enfin, vers deux heures de l'apr?s-midi, le premier tra?neau entra dans une baie profonde dont on ne put conna?tre le nom. Apr?s une halte d'une heure et demie en cet endroit, le bataillon remonta en chars plates-formes et continua jusqu'? McKay Harbour o? il y avait un h?pital. Ici, on laissa notre invalide Boucher, en m?me temps que l'on prenait ? bord le sergent Nelson devenu si fameux depuis l'affaire du "Toronto News." Il fut install? dans notre char, le premier du train, et ne connaissant l'individu que par ce qu'il voulait bien nous dire de lui-m?me, chacun l'entoura de soins et le traita avec une hospitalit? toute canadienne. Apr?s que les soldats eussent mang? quelques galettes et de la viande, le train se mit en mouvement et continua jusqu'? la fin de la ligne du chemin de fer ? Michipicoten. Arriv?s ici a sept heures et demie, les soldats durent traverser de nouveau ? pied une longueur de onze milles sur la Baie du Tonnerre et arriv?rent ? Red Rock ? onze heures du soir.
Ici des chars ? passagers attendaient le r?giment, et vers minuit le train partait.
Cette journ?e fut une des plus rudes pour les soldats. De quatre heures du matin ? onze heures du soir, on n'avait pas cess? de marcher un seul moment. Quatorze milles ? pied, vingt-deux en tra?neaux et plus de cent milles en mauvais chars d?couverts, en tout pr?s de cent cinquante milles parcourus dans la journ?e.
Vers six heures, jeudi matin, l'on entra dans Port Arthur. Les soldats furent bient?t ?veill?s par les cris de la foule qui les attendait ? la gare. Pendant que les compagnies s'?loignaient, chacune de son c?t?, pour d?jeuner dans les diff?rents h?tels de la ville, les officiers se rendirent ? l'h?tel Brunswick. sur l'invitation du maire de la localit?. Apr?s d?jeuner, profitant d'un cong? de quelques heures, les soldats visit?rent les environs de la ville et s'amus?rent beaucoup, ?tant royalement re?us partout o? ils allaient. Enfin, l'heure du d?part sonna. Les diff?rentes compagnies remont?rent chacune dans son char et le train quitta la gare au milieu des acclamations de la foule. De dix heures jusqu'? minuit, la route se continua en chars. Chacun se mit ? tuer le temps du mieux qu'il p?t et n'y r?ussissait qu'? demi.
De minuit ? six heures du matin, la route se continua sans incident remarquable. A six heures le r?veil sonna, et chacun se mit ? nettoyer ses armes et ? brosser ses habits pour ob?ir aux instructions re?ues.
Enfin, quelques minutes avant sept heures, les premi?res maisons de Winnipeg parurent dans le lointain et furent salu?es par des cris de joie. Bient?t le train entra dans la gare. La ville avait rev?tu sa toilette de f?te; les pavillons flottaient partout, et les jeunes filles avaient mis leurs robes des dimanches pour recevoir le bataillon. Parmi la foule qui se pressait dans la gare, on remarqua le juge Dubuc, le Col. Lamontagne, les Messieurs Royal, fils de l'hon. Royal, M. P., et M. Pilet. Le d?jeuner fut aussit?t servi dans la gare m?me et fut aussi vite d?vor? que servi, car tous avaient h?te de visiter la reine de l'Ouest. On nous en avait tant racont? sur les merveilles qui ont entour? la naissance de cette fille des Plaines et sur les sp?culations gigantesques qui s'y ?taient faites, que l'empressement des volontaires, ? se r?pandre dans les rues de la ville ne surprendra personne.
Avant, de partir cependant, chacun signa la liste de paie pour une semaine. Plusieurs officiers se rendirent ? Saint-Boniface et pay?rent une visite ? Sa Grandeur Mgr. Tach? ainsi qu'? quelques amis. A midi, le d?ner fut pris ? la gare. Dans l'apr?s-midi, ayant obtenu un cong? de quatre heures, les soldats retourn?rent ? leurs places de pr?dilection, les uns ? l'h?tel, d'autres chez leurs amis, pendant que quelques-uns allaient chez le photographe se procurer un souvenir qu'on se h?ta d'exp?dier ? sa famille. A trois heures et demie une patrouille fut organis?e et visita tous les quartiers pour en ramener les malades. Heureusement il n'y en avait que deux. Avant le d?part, du tabac ? fumer fut distribu? aux soldats; chacun en re?ut une livre. Ce don ?tait d? ? la g?n?rosit? de la maison de Geo. E. Tucker & Son.
A quatre heures le train partit. Vers une heure du matin l'on arriva ? Brandon. Malgr? l'heure avanc?e de la nuit, les dames de la ville nous attendaient avec des provisions de bouche. Les soldats ? peine ?veill?s crurent continuer quelque beau r?ve en voyant ces jolies jeunes filles et ces bonnes dames leur distribuer ? pleines mains des friandises et des bonbons, sans compter les sourires, et les doux regards servis ? doubles rations. Tous ?taient des plus joyeux except? le quartier-ma?tre qui voyait d'un mauvais oeil une concurrence aussi dangereuse.
Apr?s une heure bien pass?e, le train se remit en marche, emportant avec lui les bons souhaits des habitants de Brandon. Quand les soldats se r?veill?rent, on arrivait ? Broadview. La principale ressource de cette place est le travail fourni aux habitants par les ateliers de la compagnie du Pacifique. On ne la vit qu'en passant. Quelques heures plus tard on arr?tait ? Qu'Appelle, o? ?tait d?j? rendue la Batterie B.
Qu'Appelle est situ?e ? quelques milles au sud du fort du m?me nom. La place pr?sente le plus beau coup-d'oeil possible. Les rues, larges et bien entretenues, se perdent sous les peupliers et s'?tendent sur un parcours de plusieurs milles. C'est d'ici que partent les diligences pour Prince-Albert et les villages du nord. Les bureaux d'immigration du gouvernement y sont Situ?s. Apr?s quelques minutes de halte, le train partit de nouveau et l'on passa bient?t R?gina, la capitale de l'Assiniboine. Ses rues qui ont plusieurs milles de longueur sont larges et bien droites. Ici sont les quartiers-g?n?raux de la police ? cheval et des bureaux des Sauvages.
C'est ici que se trouve le plus grand r?servoir de l'Ouest; nous n'y v?mes que des Sauvages mal v?tus qui nous regard?rent passer de loin. On nous avait promis un bon d?ner en cet endroit, mais on d?t le remplacer par une ration de pain et de fromage, en attendant mieux.
Une heure plus tard, on arr?ta ? Moosejaw. Deux chefs sauvages vinrent ? notre rencontre et ?chang?rent des signes et des protestations d'amiti? contre des biscuits et du tabac. Aussit?t sortis de la gare, on nous distribua dix rondes de cartouches et l'on nous donna l'ordre de dormir sous les armes. Malgr? tant de pr?paratifs, la nuit se passa sans incident.
L'on arriva de bonne heure ? M?decine Hat. Le R?v. P?re Lacombe monta ? bord du train et passa de char en char, r?pandant partout la joie et la consolation sur son passage. Ici l'on traversa le plus grand pont du Nord-Ouest, au-dessus de la Saskatchewan. Puis le trajet se continua ? travers les prairies. De temps ? autre, l'attention des soldats ?tait attir?e par des bandes de chevaux sauvages ou des vol?es d'outardes et chacun faisait des commentaires ? sa fa?on.
Enfin, vers une heure de l'apr?s-midi, le 12 Avril, l'on entra dans Calgarry, le terme de notre long voyage, apr?s avoir parcouru au-del? de deux mille cinq cents milles.
S?JOUR A CALGARRY.
Il ?tait environ une heure de l'apr?s-midi, le 12 du mois d'avril, quand le 65e descendit des chars pour s'installer dans Calgarry. Malgr? la chaleur qu'il faisait, on nous fit parader en uniforme complet comme pendant la marche sur le lac Sup?rieur. Aussit?t le bataillon form?, les compagnies furent s?par?es les unes des autres et conduites aux diff?rents h?tels de la ville. L?, on nous permit de nous d?shabiller, puis apr?s nous avoir fourni de l'eau, du savon et des peignes, et que nous nous f?mes lav?s et peign?s, on nous introduisit dans la salle ? manger. Le repas fut bon et nous rappela le d?jeuner de Port Arthur. Aussit?t le d?ner pris, le bataillon se rendit par compagnies dans une prairie au sud des casernes de la police ? cheval. Les tentes furent bient?t fix?es et la vie de camp commen?a ? dater de ce jour. Vers les six heures, on nous ramena au village o? le souper fut servi dans les m?mes h?tels o? l'on avait pris le d?ner et vers sept heures, tout le monde ?tait de retour au camp. A 9 heures le repos sonna et bient?t tout fut silence dans le camp. Vingt-quatre gardes de nuit furent nomm?es, mais rien n'attira leur attention d'une mani?re particuli?re except? le bruit lointain du "pow-wow" des Sauvages. Le mot de passe ce soir-l? ?tait "Frontenac."
Le lendemain ? six heures du matin le lever fut sonn?. Vers huit heures on alla encore d?jeuner au village. A peine de retour on fit l'exercice, puis on commen?a les pr?paratifs pour faire la cuisine au camp. Des feux furent allum?s ? l'extr?mit? Est du camp et vers une heure la marmite ?tait suspendue. Le d?ner ne fut pr?t que vers trois heures. Aussit?t le d?ner pris, les soldats se retir?rent sous leurs tentes et tout ?tait tranquille quand tout ? coup un courrier apporta la nouvelle que des Sauvages s'?taient camp?s ? deux milles du camp du 65?me.
Apr?s la premi?re excitation pass?e, on choisit vingt sentinelles qu'on envoya sur la montagne voisine sous le commandement du lieutenant Starnes et la compagnie No. 1 re?ut l'ordre de se tenir sous les armes toute la nuit. Le mot de passe cette nuit-l? fut "Montr?al."
Rien d'extraordinaire pendant la nuit. A six heures, mardi matin, nous ?tions debout. Vers onze heures une pluie fine commence ? tomber. Dans l'apr?s-midi le temps se refroidit et la neige tombe toute la journ?e et toute la nuit. Le mot de passe ?tait "Qu?bec."
Le 16 au matin, ? dix heures, une grande inspection fut faite par le major g?n?ral Strange et un exercice eut lieu. Vers midi, le Lt.-col. Ouimet part pour Ottawa.
La temp?te continua toute la journ?e. Vers huit heures, le soir, apr?s le souper, le caporal des postes nous apporta des lettres arriv?es de l'Est par la derni?re malle. La soir?e se passa ? la lecture des lettres. La garde se fit comme d'habitude, le mot de passe ?tant "Alberta."
Le lendemain, le lever eut lieu ? l'heure habituelle. Le temps ?tant devenu beau, on retourna aux tentes. Les soldats se mirent ? nettoyer leurs armes et dans l'apr?s-midi les compagnies 1 et 2 all?rent s'exercer au tir dans un champ situ? ? un mille au nord-ouest du camp. Vers cinq heures, un cong? fut donn? ? plusieurs pour aller porter leurs lettres au bureau de poste.
Une demi-heure plus tard, le 92e bataillon d'infanterie l?g?re de Winnipeg, sous le commandement du Lt.-Col. Osborne Smith, arriva ? Calgarry. Ils all?rent camper de l'autre c?t? de la ligne du chemin de fer, un peu au sud-ouest du 65e. Le mot de passe, cette nuit, fut "London."
Le 18 au matin, lecture fut faite de l'ordre du G?n?ral envoyant une moiti? du bataillon ? Edmonton. Personne ne savait quelles compagnies seraient envoy?es de l'avant et chacun ?tait anxieux de savoir si son ami dans telle autre compagnie serait forc? de le quitter. Vers quatre heures de l'apr?s-midi les waggons pour le transport arriv?rent et furent plac?s pr?s des casernes. Un d?tachement de la police ? cheval arriva aussi vers les cinq heures et alla se loger dans le fort. Un cong? g?n?ral fut donn? pendant la veill?e, et les soldats en profit?rent largement.
La plupart se rendirent au premier restaurant, dont le propri?taire avait offert aux volontaires une esp?ce de th??tre situ? au fond de la b?tisse..
Dimanche matin, ? peine lev?, chacun alla ? la rivi?re se donner un bon lavage, puis proc?da ? sa toilette, car pour la premi?re fois depuis le d?part de Montr?al, on devait avoir une basse-messe. A sept heures et demie tout le monde ?tait pr?t et le bataillon se dirigea vers la mission ? environ deux milles du camp. Apr?s vingt minutes de marche on vit poindre ? une faible distance l'humble croix de bois qui orne l'entr?e de la petite chapelle. Cette maison, oeuvre des pieux missionnaires ?tablis dans cette partie du pays avant m?me que le premier commer?ant y e?t fix? sa baraque, n'est pas un mod?le d'architecture, mais semble plut?t avoir conserv? le cachet d'humilit? qui caract?risait le premier ap?tre qui l'a habit?e. Le rez-de-chauss?e sert de logis au missionnaire, et le second ?tage est la maison du Seigneur. L'impression des volontaires au moment o? ils p?n?tr?rent dans cette modeste chapelle ? peine assez grande pour les contenir tous est difficile ? d?peindre. Habitu?s ? aller adorer Dieu dans des temples o? le peintre rivalise de perfection avec l'architecte, o? la civilisation moderne a fait tailler dans le bronze et le marbre des autels grandioses, ils se sentaient ?mus de voir que Dieu habitait ce faible r?duit; quatre murs blanchis, deux prie-Dieu, un petit ma?tre-autel, ?a et l? quelques statues de la Vierge et de St. Joseph et une: centaine de bancs en bois brut ?taient tout l'ameublement de la Mission.
Mais c'est toujours le m?me Dieu qui y r?side!
Celui qui cr?a le monde, qui le gouverne, le m?me qui si?ge sur nos autels ? Montr?al et qui continue l?-bas sa mission de bont? et de salut. Plus le temple est modeste, plus la grandeur du Tout-Puissant impressionne le coeur du visiteur.
Pendant le service divin, notre aum?nier nous fit une courte adresse. Chacun se sentait ?mu au fond du coeur en ?coutant cette voix grave et solennelle qui nous rappelait avec quelle pompe nos amis de Montr?al recevraient apr?s la campagne ceux qui auraient le bonheur de retourner dans leurs foyers, et d'autre part quel triomphe attendait dans le ciel ceux qui, plus chanceux, succomberaient pendant la campagne.
Imm?diatement apr?s la messe eut lieu le retour au camp. L'on d?jeuna en arrivant. Le reste de la journ?e fut employ? ? charger de provisions les waggons qui devaient accompagner l'aile droite du bataillon. A neuf heures du soir, tous les soldats ?taient retourn?s au camp et ? dix heures chacun sommeillait.
De bonne heure le lendemain matin tout le bataillon ?tait debout. Les compagnies 2, 5, 6 et 7, qui devaient partir ce jour-l?, jet?rent leurs tentes ? terre avant le d?jeuner et ? huit heures elles ?taient pr?tes ? partir. Cependant tout l'avant-midi s'?coula sans que le bataillon ne re?ut aucun ordre.
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