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Read Ebook: Le roi Jean by Shakespeare William Guizot Fran Ois Translator

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Ebook has 578 lines and 28532 words, and 12 pages

Translator: Fran?ois Pierre Guillaume Guizot

Note du transcripteur.

OEUVRES COMPL?TES DE SHAKSPEARE

TRADUCTION DE M. GUIZOT

NOUVELLE ?DITION ENTI?REMENT REVUE AVEC UNE ?TUDE SUR SHAKSPEARE DES NOTICES SUR CHAQUE PI?CE ET DES NOTES

PARIS A LA LIBRAIRIE ACAD?MIQUE DIDIER ET Cie, LIBRAIRES-?DITEURS 35, QUAI DES AUGUSTINS 1863

LE ROI JEAN

TRAG?DIE

NOTICE SUR LE ROI JEAN

Mais apr?s avoir exactement indiqu? l'ordre chronologique de la composition des drames historiques de Shakspeare, il faut, pour en bien appr?cier le caract?re et l'encha?nement dramatique, les replacer comme nous le faisons dans l'ordre vrai des ?v?nements; ainsi seulement on assiste au spectacle du g?nie de Shakspeare d?roulant et ranimant l'histoire de son pays.

En choisissant pour sujet d'une trag?die le r?gne de Jean sans Terre, Shakspeare s'imposait la n?cessit? de ne pas respecter scrupuleusement l'histoire. Un r?gne o?, dit Hume, <> ne pouvait ?tre repr?sent? dans toute sa v?rit? devant un public anglais et une cour anglaise; et le seul souvenir du roi Jean auquel la nation doive attacher du prix, la grande Charte, n'?tait pas de ceux qui devaient int?resser vivement une reine telle qu'?lisabeth. Aussi la pi?ce de Shakspeare ne pr?sente-t-elle qu'un sommaire des derni?res ann?es de ce r?gne honteux; et l'habilet? du po?te s'est employ?e ? voiler le caract?re de son principal personnage sans le d?figurer, ? dissimuler la couleur des ?v?nements sans les d?naturer. Le seul fait sur lequel Shakspeare ait pris nettement la r?solution de substituer l'invention ? la v?rit?, ce sont les rapports de Jean avec la France; il faut assur?ment toutes les illusions de la vanit? nationale pour que Shakspeare ait pu pr?senter et pour que les Anglais aient support? le spectacle de Philippe-Auguste succombant sous l'ascendant de Jean sans Terre. C'est tout au plus ainsi qu'on aurait pu l'offrir ? Jean lui-m?me lorsqu'enferm? ? Rouen, tandis que Philippe s'emparait de ses possessions en France, il disait tranquillement: <> Tout ce qui, dans la pi?ce de Shakspeare, est relatif ? la guerre avec la France, semble avoir ?t? invent? pour la justification de cette gasconnade du plus l?che et du plus insolent des princes.

Dans le reste du drame, l'action m?me et l'indication des faits qu'il n'?tait pas possible de dissimuler, suffisent pour faire entrevoir ce caract?re o? le po?te n'a pas os? p?n?trer, o? il n'e?t pu m?me p?n?trer qu'avec d?go?t; mais ni un pareil personnage, ni cette mani?re g?n?e de le peindre n'?taient susceptibles d'un grand effet dramatique; aussi Shakspeare a-t-il fait porter l'int?r?t de sa pi?ce sur le sort du jeune Arthur; aussi a-t-il charg? Faulconbridge de ce r?le original et brillant o? l'on sent qu'il se compla?t, et qu'il ne se refuse gu?re dans aucun de ses ouvrages.

Shakspeare a pr?sent? le jeune duc de Bretagne ? l'?ge o? pour la premi?re fois on eut ? faire valoir ses droits apr?s la mort de Richard, c'est-?-dire environ ? douze ans. On sait qu'Arthur en avait vingt-cinq ou vingt-six, qu'il ?tait d?j? mari? et int?ressant par d'aimables et brillantes qualit?s lorsqu'il fut fait prisonnier par son oncle; mais le po?te a senti combien ce spectacle de la faiblesse aux prises avec la cruaut? ?tait plus int?ressant dans un enfant; et d'ailleurs, si Arthur n'e?t ?t? un enfant, ce n'est pas sa m?re qu'il e?t ?t? permis de mettre en avant ? sa place; en supprimant le r?le de Constance, Shakspeare nous e?t peut-?tre priv?s de la peinture la plus path?tique qu'il ait jamais trac?e de l'amour maternel, l'un des sentiments o? il a ?t? le plus profond.

En m?me temps qu'il a rendu le fait plus touchant, il en a ?cart? l'horreur en diminuant l'atrocit? du crime. L'opinion la plus g?n?ralement r?pandue, c'est qu'Hubert de Bourg, qui ne s'?tait charg? de faire p?rir Arthur que pour le sauver, ayant en effet tromp? la cruaut? de son oncle par de faux rapports et par un simulacre d'enterrement, Jean, qui fut instruit de la v?rit?, tira d'abord Arthur du ch?teau de Falaise o? il ?tait sous la garde d'Hubert, se rendit lui-m?me de nuit et par eau ? Rouen, o? il l'avait fait renfermer, le fit amener dans son bateau, le poignarda de sa main, puis attacha une pierre ? son corps et le jeta dans la rivi?re. On con?oit qu'un v?ritable po?te ait ?cart? une semblable image. Ind?pendamment de la n?cessit? d'absoudre son principal personnage d'un crime aussi odieux, Shakspeare a compris combien les l?ches remords de Jean, quand il voit le danger o? le plonge le bruit de la mort de son neveu, ?taient plus dramatiques et plus conformes ? la nature g?n?rale de l'homme que cet exc?s d'une brutale f?rocit?; et, certes, la belle sc?ne de Jean avec Hubert, apr?s la retraite des lords, suffit bien pour justifier un pareil choix. D'ailleurs le tableau que pr?sente Shakspeare saisit trop vivement son imagination et acquiert ? ses yeux trop de r?alit? pour qu'il ne sente pas qu'apr?s la sc?ne incomparable o? Arthur obtient sa gr?ce d'Hubert, il est impossible de supporter l'id?e qu'aucun ?tre humain porte la main sur ce pauvre enfant, et lui fasse subir de nouveau le supplice de l'agonie ? laquelle il vient d'?chapper; le po?te sait de plus que le spectacle de la mort d'Arthur, bien que moins cruel, serait encore intol?rable si, dans l'esprit des spectateurs, il ?tait accompagn? de l'angoisse qu'y ajouterait la pens?e de Constance; il a eu soin de nous apprendre la mort de la m?re avant de nous rendre t?moin de celle du fils; comme si, lorsque son g?nie a con?u, ? un certain degr?, les douleurs d'un sentiment ou d'une passion, son ?me trop tendre s'en effrayait et cherchait pour son propre compte ? les adoucir. Quelque malheur que peigne Shakspeare, il fait presque toujours deviner un malheur plus grand devant lequel il recule et qu'il nous ?pargne.

LE ROI JEAN

TRAG?DIE

PERSONNAGES

SEIGNEURS, DAMES, CITOYENS D'ANGERS, OFFICIERS, SOLDATS, H?RAUTS, MESSAGERS, ET AUTRES GENS DE SUITE.

La sc?ne est tant?t en Angleterre, et tant?t en France.

ACTE PREMIER

SC?NE I

Northampton.--Une salle de repr?sentation dans le palais.

LE ROI JEAN.--Eh bien, Ch?tillon, parlez; que veut de nous la France?

CHATILLON.--Ainsi, apr?s vous avoir salu?, parle le roi de France, par moi son ambassadeur, ? Sa Majest?, ? Sa Majest? usurp?e d'Angleterre.

?L?ONORE.--?trange d?but! Majest? usurp?e!

LE ROI JEAN.--Silence, ma bonne m?re, ?coutez l'ambassade.

CHATILLON.--Philippe de France, suivant les droits et au nom du fils de feu Geoffroy votre fr?re, Arthur Plantagenet, fait valoir ses titres l?gitimes ? cette belle ?le et son territoire, l'Irlande, Poitiers, l'Anjou, la Touraine, le Maine, vous invitant ? d?poser l'?p?e qui usurpe la domination de ces diff?rents titres, et ? la remettre dans la main du jeune Arthur, votre neveu, votre royal et vrai souverain.

LE ROI JEAN.--Et que s'ensuivra-t-il si nous nous y refusons?

CHATILLON.--L'imp?rieuse entremise d'une guerre sanglante et cruelle, pour ressaisir par la force des droits que la force seule refuse.

LE ROI JEAN.--Ici nous avons guerre pour guerre, sang pour sang, hostilit? pour hostilit?: c'est ainsi que je r?ponds au roi de France.

CHATILLON.--D?s lors recevez par ma bouche le d?fi de mon roi, dernier terme de mon ambassade.

LE ROI JEAN.--Porte-lui le mien, et va-t'en en paix.--Sois aux yeux de la France comme l'?clair; car avant que tu aies pu annoncer que j'y viendrai, le tonnerre de mon canon s'y fera entendre. Ainsi donc, va-t'en! sois la trompette de ma vengeance et le sinistre pr?sage de votre ruine.--Qu'on lui donne une escorte honorable; Pembroke, veillez-y.--Adieu, Ch?tillon.

?L?ONORE.--Eh bien, mon fils! n'ai-je pas toujours dit que cette ambitieuse Constance n'aurait point de repos qu'elle n'e?t embras? la France et le monde entier pour les droits et la cause de son fils? Quelques faciles arguments d'amour auraient pu cependant pr?venir et arranger ce que le gouvernement de deux royaumes doit r?gler maintenant par des ?v?nements terribles et sanglants.

LE ROI JEAN.--Nous avons pour nous notre solide possession et notre droit.

?L?ONORE.--Votre solide possession bien plus que votre droit; autrement cela irait mal pour vous et moi; ma conscience confie ici ? votre oreille ce que personne n'entendra jamais que le ciel, vous et moi.

LE ROI JEAN.--Qu'elles approchent.--Nos abbayes et nos prieur?s payeront les frais de cette exp?dition. Quelles gens ?tes-vous?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Je suis moi, votre fid?le sujet, un gentilhomme n? dans le comt? de Northampton, et fils a?n?, comme je le suppose, de Robert Faulconbridge, soldat fait chevalier sur le champ de bataille par Coeur de Lion, dont la main conf?rait l'honneur.

LE ROI JEAN.--Et toi, qui es-tu?

ROBERT FAULCONBRIDGE.--Le fils et l'h?ritier du m?me Faulconbridge.

LE ROI JEAN.--Celui-ci est l'a?n?, et tu es l'h?ritier? Vous ne veniez donc pas de la m?me m?re, ce me semble.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Tr?s-certainement de la m?me m?re, puissant roi; cela est bien connu, et du m?me p?re aussi, ? ce que je pense; mais pour la connaissance certaine de cette v?rit?, je vous en r?f?re au ciel et ? ma m?re; quant ? moi j'en doute, comme peuvent le faire tous les enfants des hommes.

?L?ONORE.--Fi donc! homme grossier, tu diffames ta m?re et blesses son honneur par cette m?fiance.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Moi, madame? Non, je n'ai aucune raison pour cela; c'est la pr?tention de mon fr?re, et non pas la mienne; s'il peut le prouver, il me chasse de cinq cents bonnes livres de revenu au moins. Que le ciel garde l'honneur de ma m?re, et mon h?ritage avec!

LE ROI JEAN.--Un bon gar?on tout franc.--Pourquoi ton fr?re, ?tant le plus jeune, r?clame-t-il ton h?ritage?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Je ne sais pas pourquoi, si ce n'est pour s'emparer du bien. Une fois il m'a insolemment accus? de b?tardise: que je sois engendr? aussi l?gitimement que lui, oui ou non, c'est ce que je mets sur la t?te de ma m?re; mais que je sois aussi bien engendr? que lui, mon souverain , comparez nos visages, et jugez vous-m?me, si le vieux sir Robert nous engendra tous deux, s'il fut notre p?re;--que celui-l? lui ressemble. O vieux sir Robert, notre p?re, je remercie le ciel ? genoux de ce que je ne vous ressemble pas!

LE ROI JEAN.--Quelle t?te ? l'envers le ciel nous a envoy?e l?!

?L?ONORE.--Il a quelque chose du visage de Coeur de Lion, et l'accent de sa voix le rappelle; ne d?couvrez-vous pas quelques traces de mon fils dans la robuste structure de cet homme?

LE ROI JEAN.--Mon oeil a bien examin? les formes et les trouve parfaitement celles de Richard. Parle, dr?le, quels sont tes motifs pour pr?tendre aux biens de ton fr?re?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Parce qu'il a une moiti? du visage semblable ? mon p?re; avec cette moiti? de visage il voudrait avoir tous mes biens. Une pi?ce de quatre sous ? demi face, cinq cents livres de revenu!

ROBERT FAULCONBRIDGE.--Mon gracieux souverain, lorsque mon p?re vivait, votre fr?re l'employait beaucoup.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Fort bien; mais cela ne fait pas que vous puissiez, monsieur, vous emparer de mon bien; il faut que vous nous disiez comment il employait ma m?re.

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