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Read Ebook: Le roi Jean by Shakespeare William Guizot Fran Ois Translator

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Ebook has 578 lines and 28532 words, and 12 pages

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Fort bien; mais cela ne fait pas que vous puissiez, monsieur, vous emparer de mon bien; il faut que vous nous disiez comment il employait ma m?re.

ROBERT FAULCONBRIDGE.--Une fois il l'envoya en ambassade en Allemagne pour y traiter avec l'empereur d'affaires importantes de ce temps-l?. Le roi se pr?valut de son absence, et tout le temps qu'elle dura, il s?journa chez mon p?re. Vous dire comment il y r?ussit, j'en ai honte, mais la v?rit? est la v?rit?. De vastes ?tendues de mer et de rivages ?taient entre mon p?re et ma m?re, , lorsque ce vigoureux gentilhomme que voil? fut engendr?. A son lit de mort il me l?gua ses terres par testament, et jura par sa mort que celui-ci, fils de ma m?re, n'?tait point ? lui; ou que s'il l'?tait, il ?tait venu au monde quatorze grandes semaines avant que le cours du temps f?t accompli. Ainsi donc, mon bon souverain, faites que je poss?de ce qui est ? moi, les biens de mon p?re, suivant la volont? de mon p?re.

LE ROI JEAN.--Jeune homme, ton fr?re est l?gitime; la femme de ton p?re le con?ut apr?s son mariage; et si elle n'a pas jou? franc jeu, ? elle seule en est la faute; faute dont tous les maris courent le hasard du jour o? ils prennent femme. Dis-moi, si mon fr?re, qui, ? ce que tu dis, prit la peine d'engendrer ce fils, avait revendiqu? de ton p?re ce fils comme le sien, n'est-il pas vrai, mon ami, que ton p?re aurait pu retenir ce veau, n? de sa vache, en d?pit du monde entier; oui, ma foi, il l'aurait pu: donc, si ?tant ? mon fr?re, mon fr?re ne pouvait pas le revendiquer, ton p?re non plus ne peut point le refuser, lors m?me qu'il n'est pas ? lui.--Cela est concluant.--Le fils de ma m?re engendra l'h?ritier de ton p?re; l'h?ritier de ton p?re doit avoir les biens de ton p?re.

ROBERT FAULCONBRIDGE.--La volont? de mon p?re n'aura donc aucune force, pour d?poss?der l'enfant qui n'est pas le sien?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Pas plus de force, monsieur, pour me d?poss?der que n'en eut sa volont? pour m'engendrer, ? ce que je pr?sume.

?L?ONORE.--Qu'aimerais-tu mieux: ?tre un Faulconbridge et ressembler ? ton fr?re, pour jouir de ton h?ritage, ou ?tre r?put? le fils de Coeur de Lion, seigneur de ta bonne mine, et pas de biens avec?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Madame, si mon fr?re avait ma tournure et que j'eusse la sienne, celle de sir Robert, ? qui il ressemble, si mes jambes ?taient ces deux houssines comme celles-l?, que mes bras fussent ainsi rembourr?s comme des peaux d'anguille, ma face si maigre, que je craignisse d'attacher une rose ? mon oreille, de peur qu'on ne d?t: voyez o? va cette pi?ce de trois liards, et que je fusse, ? raison de cette tournure, h?ritier de tout ce royaume, je ne veux jamais bouger de cette place, si je ne donnais jusqu'au dernier pouce pour avoir ma figure. Pour rien au monde je ne voudrais ?tre sir Rob.

?L?ONORE.--Tu me plais: veux-tu renoncer ? ta fortune, lui abandonner ton bien et me suivre? Je suis un soldat et sur le point de passer en France.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Fr?re, prenez mon bien, je prendrai, moi, la chance qui m'est offerte. Votre figure vient de gagner cinq cents livres de revenu; cependant, vendez-la cinq sous, et ce sera cher.--Madame, je vous suivrai jusqu'? la mort.

?L?ONORE.--Ah! mais je voudrais que vous y arrivassiez avant moi.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--L'usage ? la campagne est de c?der ? nos sup?rieurs.

LE ROI JEAN.--Quel est ton nom?

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Philippe, mon souverain, c'est ainsi que commence mon nom. Philippe, fils a?n? de la femme du bon vieux sir Robert.

LE ROI JEAN.--D?s aujourd'hui porte le nom de celui dont tu portes la figure. Agenouille-toi Philippe, mais rel?ve-toi plus grand, rel?ve-toi sir Richard et Plantagenet.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Fr?re du c?t? maternel, donnez-moi votre main; mon p?re me donna de l'honneur, le v?tre vous donna du bien.--Maintenant, b?nie soit l'heure de la nuit ou du jour o? je fus engendr? en l'absence de sir Robert!

?L?ONORE.--La vraie humeur des Plantagenets!--Je suis ta grand'm?re, Richard; appelle-moi ainsi.

PHILIPPE FAULCONBRIDGE.--Par hasard, madame, et non par la bonne foi. Eh bien, quoi? l?g?rement ? gauche, un peu hors du droit chemin, par la fen?tre ou par la lucarne: qui n'ose sortir le jour marche n?cessairement de nuit; tenir est tenir, de quelque mani?re qu'on y soit parvenu; de pr?s ou de loin a bien gagn? qui a bien vis?; et je suis moi, de quelque fa?on que j'aie ?t? engendr?.

LE ROI JEAN.--Va, Faulconbridge, tu as maintenant ce que tu voulais: un chevalier sans terre te fait ?cuyer terrier.--Venez, madame, et vous aussi Richard, venez. H?tons-nous de partir pour la France, pour la France, cela est plus que n?cessaire.

LADY FAULCONBRIDGE.--O? est ce mis?rable, ton fr?re? o? est celui qui pourchasse en tous sens mon honneur?

LADY FAULCONBRIDGE.--Le fils de sir Robert! Oui, enfant irrespectueux, le fils de sir Robert: pourquoi ce m?pris pour sir Robert? Il est le fils de sir Robert, et toi aussi.

LE BATARD.--Jacques Gourney, voudrais-tu nous laisser pour un moment?

GOURNEY.--De tout mon coeur, bon Philippe.

LE BATARD.--Philippe! le pierrot!--Jacques, il court des bruits.... Tant?t je t'en dirai davantage. --Madame je ne suis point le fils du vieux sir Robert; sir Robert aurait pu manger un vendredi saint toute la part qu'il a eue en moi, sans rompre son je?ne; Sir Robert pouvait bien faire, mais de bonne foi, avouez-le, a-t-il pu m'engendrer? Sir Robert ne le pouvait pas; nous connaissons de ses oeuvres.--Ainsi donc, ma bonne m?re, ? qui suis-je redevable de ces membres? Jamais sir Robert n'a aid? ? faire cette jambe.

LADY FAULCONBRIDGE.--T'es-tu ligu? avec ton fr?re, toi, qui pour ton propre avantage devrais d?fendre mon honneur? Que veut dire ce m?pris, varlet indisciplin??

LE BATARD.--Chevalier, chevalier, ma bonne m?re, comme Basilisco. Je viens d'?tre arm?; et j'ai le coup sur mon ?paule. Mais, ma m?re, je ne suis plus le fils de sir Robert; j'ai renonc? ? sir Robert et ? mon h?ritage; nom, l?gitimit?, tout est parti; ainsi, ma bonne m?re, faites-moi conna?tre mon p?re; c'est quelque homme bien tourn?, j'esp?re: qui ?tait-ce, ma m?re?

LADY FAULCONBRIDGE.--As-tu ni? d'?tre un Faulconbridge?

LE BATARD.--D'aussi grand coeur que je renie le diable.

LADY FAULCONBRIDGE.--Le roi Richard Coeur de Lion fut ton p?re; s?duite par une poursuite assidue et pressante, je lui donnai place dans le lit de mon mari. Que le ciel ne me l'impute point ? p?ch?! Tu fus le fruit d'une faute qui m'est encore ch?re, et ? laquelle je fus trop vivement sollicit?e, pour pouvoir me d?fendre.

LE BATARD.--Maintenant, par cette lumi?re, si j'?tais encore ? na?tre, madame, je ne souhaiterais pas un plus noble p?re. Il est des fautes privil?gi?es sur la terre, et la v?tre est de ce nombre: votre faute ne fut point folie. Il fallait bien mettre votre coeur ? la discr?tion de Richard, comme un tribut de soumission ? son amour tout-puissant; de Richard dont le lion intr?pide ne put soutenir la furie et la force incomparable, ni pr?server son coeur royal de la main du h?ros. Celui qui ravit de force le coeur des lions, peut facilement s'emparer de celui d'une femme. Oui, ma m?re, de toute mon ?me je vous remercie de mon p?re! Qu'homme qui vive ose dire que vous ne f?tes pas bien, lorsque je fus engendr?, j'enverrai son ?me aux enfers. Venez, madame, je veux vous pr?senter ? mes parents; et ils diront que le jour o? Richard m'engendra, si tu lui avais dit non, c'e?t ?t? un crime. Quiconque dit que c'en fut un en a menti; je dis, moi, que ce n'en fut pas un.

FIN DU PREMIER ACTE.

La sc?ne est en France.--Devant les murs d'Angers.

LOUIS.--Soyez les bien arriv?s devant les murs d'Angers, vaillant duc d'Autriche.--Arthur, l'illustre fondateur de ta race, Richard qui arracha le coeur ? un lion et combattit dans les saintes guerres en Palestine, descendit pr?matur?ment dans la tombe par les mains de ce brave duc; et lui, pour faire r?paration ? ses descendants, est ici venu sur notre demande d?ployer ses banni?res pour ta cause, mon enfant, et faire justice de l'usurpation de ton oncle d?natur?, Jean d'Angleterre: embrasse-le, ch?ris-le, souhaite-lui la bienvenue.

ARTHUR.--Dieu vous pardonne la mort de Coeur de Lion, d'autant mieux que vous donnez la vie ? sa post?rit?, en ombrageant ses droits sous vos ailes de guerre. Je vous souhaite la bienvenue d'une main sans pouvoir, mais avec un coeur plein d'un amour sinc?re: duc, soyez le bienvenu devant les portes d'Angers.

LOUIS.--Noble enfant! qui ne voudrait te rendre justice?

L'ARCHIDUC--Je d?pose sur ta joue ce baiser plein de z?le, comme le sceau de l'engagement que prend ici mon amiti?, de ne jamais retourner dans mes ?tats jusqu'? ce qu'Angers, et les domaines qui t'appartiennent en France, en compagnie de ce rivage p?le et au blanc visage, dont le pied repousse les vagues mugissantes de l'Oc?an et s?pare ses insulaires des autres contr?es; jusqu'? ce que l'Angleterre, enferm?e par la mer dont les flots lui servent de muraille, et qui se flatte d'?tre toujours hors de l'atteinte des projets de l'?tranger, jusqu'? ce que ce dernier coin de l'Occident t'ait salu? pour son roi: jusqu'alors, bel enfant, je ne songerai pas ? mes ?tats et ne quitterai point les armes.

CONSTANCE.--Oh! recevez les remerciements de sa m?re, les remerciements d'une veuve, jusqu'au jour o? la puissance de votre bras lui aura donn? la force de s'acquitter plus dignement envers votre amiti?!

L'ARCHIDUC.--La paix du ciel est avec ceux qui tirent leur ?p?e pour une cause aussi juste et aussi sainte.

PHILIPPE.--Eh bien! alors, ? l'ouvrage: dirigeons notre artillerie contre les remparts de cette ville opini?tre.--Assemblons nos plus habiles tacticiens, pour dresser les plans les plus avantageux.--Nous laisserons devant cette ville nos os de roi; nous arriverons jusqu'? la place publique, en nous plongeant dans le sang des Fran?ais, mais nous la soumettrons ? cet enfant.

CONSTANCE.--Attendez une r?ponse ? votre ambassade, de crainte de souiller inconsid?r?ment vos ?p?es de sang. Ch?tillon peut nous rapporter d'Angleterre, par la paix, la justice que nous pr?tendons obtenir ici par la guerre. Nous nous reprocherions alors chaque goutte de sang que trop de pr?cipitation et d'ardeur aurait fait verser sans n?cessit?.

PHILIPPE.--Chose ?tonnante, madame!--Voil? que sur votre d?sir est arriv? Ch?tillon, notre envoy?.--Dis en peu de mots ce que dit l'Angleterre, brave seigneur; nous t'?coutons tranquillement: parle, Ch?tillon.

CHATILLON.--Retirez vos forces de ce mis?rable si?ge, et pr?parez-les ? une t?che plus grande. Le roi d'Angleterre, irrit? de vos justes demandes, a pris les armes; les vents contraires dont j'ai attendu le bon plaisir, lui ont donn? le temps de d?barquer ses l?gions aussi t?t que moi: il marche pr?cipitamment vers cette ville; ses forces sont consid?rables, et ses soldats pleins de confiance. Avec lui est arriv?e la reine m?re, une At?, qui l'excite au sang et au combat; elle est accompagn?e de sa ni?ce, la princesse Blanche d'Espagne: avec eux est un b?tard du feu roi, et tous les esprits turbulents du pays, intr?pides volontaires pleins de fougue et de t?m?rit?, qui, sous des visages de femmes, portent la f?rocit? des dragons. Ils ont vendu leurs biens dans leur pays natal, et apportent fi?rement leur patrimoine sur leur dos, pour courir ici le hasard de fortunes nouvelles. En un mot, jamais plus brave ?lite de guerriers invincibles que celle que viennent d'amener les vaisseaux anglais ne vogua sur les flots gonfl?s, pour porter la guerre et le ravage au sein de la chr?tient?.--Leurs tambours incivils qui m'interrompent m'interdisent plus de d?tails: ils sont ? la porte pour parlementer ou pour combattre; ainsi pr?parez-vous.

PHILIPPE.--Combien peu nous ?tions pr?par?s ? une telle diligence!

L'ARCHIDUC--Plus elle est impr?vue, plus nous devons redoubler d'efforts pour nous d?fendre. Le courage cro?t avec l'occasion: qu'ils soient donc les bienvenus; nous sommes pr?ts.

LE ROI JEAN.--Paix ? la France, si la France permet que nous fassions en paix notre entr?e juste et h?r?ditaire dans ce qui nous appartient. Sinon, que la France soit ensanglant?e, et que la paix remonte au ciel! Tandis que nous, agents du Dieu de col?re, nous ch?tierons l'orgueil m?prisant qui chasse la paix vers le ciel.

PHILIPPE.--Paix ? l'Angleterre, si ces guerriers retournent de France en Angleterre pour y vivre en paix. Nous aimons l'Angleterre; et c'est ? cause de cet amour pour l'Angleterre que notre sueur coule ici sous le faix de notre armure. Ce labeur que nous accomplissons ici devrait ?tre ton oeuvre; mais tu es si loin d'aimer l'Angleterre que tu as supplant? son roi l?gitime, rompu la ligne de succession, renvers? la fortune d'un enfant et profan? la puret? virginale de la couronne. Jette ici les yeux sur le visage de ton fr?re Geoffroy.--Ces yeux, ce front furent model?s sur les siens: ce petit abr?g? contient toute la substance de ce qui est mort dans Geoffroy; et la main du temps tirera de cet abr?g? un volume aussi consid?rable. Geoffroy ?tait ton fr?re a?n?, et voil? son fils; Geoffroy avait droit au royaume d'Angleterre, et cet enfant poss?de les droits de Geoffroy. Au nom de Dieu, comment advient-il donc que tu sois appel? roi, lorsque le sang de la vie bat dans les tempes ? qui appartient la couronne dont tu t'empares?

LE ROI JEAN.--De qui tires-tu, roi de France, la haute mission d'exiger de moi une r?ponse ? tes interrogations?

PHILIPPE.--Du Juge d'en haut, qui excite dans l'?me de ceux qui ont la puissance, la bonne pens?e d'intervenir partout o? il y a fl?trissure et violation de droits. Ce juge a mis cet enfant sous ma tutelle; et c'est en son nom que j'accuse ton injustice, et avec son aide que je compte la ch?tier.

LE ROI JEAN.--Mais quoi! c'est usurper l'autorit?.

PHILIPPE.--Excuse-moi! C'est abattre un usurpateur.

?L?ONORE.--Qu'appelles-tu usurpateur, roi de France?

CONSTANCE.--Laissez-moi r?pondre:--l'usurpateur, c'est ton fils.

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