Read Ebook: Vie de Benjamin Franklin écrite par lui-même - Tome 2 suivie de ses œuvres morales politiques et littéraires by Franklin Benjamin Cast Ra Jean Henri Translator
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Ebook has 854 lines and 70692 words, and 18 pages
Translator: Jean Henri Cast?ra
VIE DE B. FRANKLIN, SUIVIE DE SES OEUVRES POSTHUMES.
VIE DE BENJAMIN FRANKLIN, ?CRITE PAR LUI-M?ME, SUIVIE DE SES OEUVRES MORALES, POLITIQUES ET LITT?RAIRES, Dont la plus grande partie n'avoit pas encore ?t? publi?e.
TRADUIT DE L'ANGLAIS, AVEC DES NOTES, PAR J. CAST?RA.
Eripuit coelo fulmen sceptrumque tyrannis.
TOME SECOND.
? PARIS, Chez F. BUISSON, Imp.-Lib. rue Hautefeuille, N?. 20.
AN VI DE LA R?PUBLIQUE
OEUVRES MORALES, POLITIQUES ET LITT?RAIRES DE BENJAMIN FRANKLIN, DANS LE GENRE DU SPECTATEUR.
LETTRE SUR LES INNOVATIONS DANS LA LANGUE ANGLAISE, ET DANS L'ART DE L'IMPRIMERIE.
? NO? WEBSTER, ? HARTFORD.
Philadelphie, le 26 d?cembre 1789.
J'ai re?u depuis quelque temps, monsieur, votre dissertation sur la langue anglaise. C'est un excellent ouvrage, et qui sera tr?s-utile ? nos compatriotes en leur fesant sentir la n?cessit? d'?crire correctement. Je vous remercie de l'envoi de ce pamphlet et de l'honneur, que vous m'avez fait, de me le d?dier. J'aurois d? vous offrir plut?t ces remerciemens: mais j'en ai ?t? emp?ch? par une forte indisposition.
Je ne puis qu'applaudir ? votre z?le, pour conserver la puret? de notre langue, soit dans l'expression, soit dans la prononciation, et pour corriger les fautes, qui ont rapport ? l'une et ? l'autre, et que commettent sans cesse les habitans de plusieurs des ?tats-Unis. Permettez-moi de vous en citer quelques-unes, quoique vraisemblablement vous les connoissiez d?j?. Je voudrois que dans quelqu'un des ?crits que vous publierez par la suite, vous prissiez la peine de les improuver, de mani?re ? en faire abandonner l'usage.
Si vous pensez comme moi sur ces innovations, vous ne manquerez pas de vous servir de tous les moyens qui sont en votre pouvoir pour les faire proscrire.
La langue latine, qui a long-temps servi ? r?pandre les connoissances parmi les diff?rentes nations de l'Europe, est chaque jour plus n?glig?e; et une des langues modernes, la langue fran?aise, l'a remplac?e et est devenue presqu'universelle. On la parle dans toutes les cours de l'Europe; et la plupart des gens de lettres, de tous les pays, ceux m?me qui ne savent pas la parler, l'entendent assez bien pour pouvoir lire ais?ment les livres fran?ais. Cela donne un avantage consid?rable ? la nation fran?aise. Ses ?crivains peuvent r?pandre leurs sentimens, leurs opinions, sur les points importans qui ont rapport aux int?r?ts de la France, ou qui peuvent servir ? sa gloire, et contribuer au bien g?n?ral de l'humanit?.
La langue anglaise a droit d'obtenir la seconde place. L'immense collection d'excellens sermons imprim?s dans cette langue et la libert? de nos ?crits politiques, sont cause qu'un grand nombre d'eccl?siastiques de diff?rentes sectes et de diff?rentes nations, ainsi que beaucoup de personnes qui s'occupent des affaires publiques, ?tudient l'anglais et l'apprennent au moins, assez bien pour le lire; et si nous nous efforcions de faciliter leurs progr?s, notre langue pourroit devenir d'un usage beaucoup plus g?n?ral.
Ceux qui ont employ? une partie de leur temps ? apprendre une langue ?trang?re, doivent avoir souvent observ?, que lorsqu'ils ne la savoient encore qu'imparfaitement, de petites difficult?s leur paroissoient consid?rables, et retardoient beaucoup leurs progr?s. Par exemple, un livre mal imprim?, une prononciation mal articul?e, rendent inintelligible une phrase qui, lorsqu'elle est imprim?e d'une mani?re correcte, ou prononc?e distinctement, est aussit?t comprise. Si nous avions donc voulu avoir l'avantage de voir notre langue plus g?n?ralement r?pandue, nous aurions d? ne pas n?gliger de faire disparo?tre des difficult?s qui, toutes l?g?res qu'elles sont, d?couragent ceux qui l'?tudient. Mais depuis quelques ann?es, je m'apper?ois avec peine qu'au lieu de diminuer, ces difficult?s augmentent.
En examinant les livres anglais imprim?s depuis le r?tablissement des Stuards sur le tr?ne d'Angleterre, jusqu'? l'av?nement de Georges II, nous voyons que tons les substantifs commencent par une lettre capitale, en quoi nous avons imit? notre langue m?re, c'est-?-dire, la langue allemande. Cette m?thode ?toit sur-tout tr?s-utile ? ceux qui ne savoient pas bien l'anglais; car un nombre prodigieux de mots de cette langue, sont ?-la-fois verbes et substantifs, et on les ?pelle de la m?me mani?re, quoiqu'on les prononce diff?remment. Mais les imprimeurs de nos jours ont eu la fantaisie de renoncer ? un usage utile, parce qu'ils pr?tendent que la suppression des lettres capitales fait mieux ressortir les autres caract?res, et que les lettres qui s'?l?vent au-dessus d'une ligne, emp?chent qu'elle n'ait de la grace et de la r?gularit?.
L'effet de ce changement est si consid?rable, qu'un savant fran?ais, qui, quoiqu'il ne s?t pas parfaitement la langue anglaise, avoit coutume de lire les livres anglais, me disoit qu'il trouvoit plus d'obscurit? dans ceux de ces livres, qui ?toient modernes, que dans ceux de l'?poque dont j'ai parl? plus haut, et il attribuoit cela ? ce que le style de nos ?crivains s'?toit g?t?. Mais je le convainquis de son erreur, en mettant une lettre capitale ? tous les substantifs d'un paragraphe, qu'il entendit aussit?t, quoiqu'auparavant il n'e?t pu y rien comprendre. Cela montre l'inconv?nient qu'a ce perfectionnement pr?tendu.
D'apr?s ce go?t pour la r?gularit? et l'uniformit? de l'impression, on en a aussi, depuis peu, banni les caract?res italiques, qu'on avoit coutume d'employer pour les mots auxquels il importoit de faire attention, pour bien entendre le sens d'une phrase, ainsi que pour les mots qu'il falloit lire avec une certaine emphase.
Ajoutez ? tous ces changement, qui ont fait reculer l'art, une autre fantaisie moderne, l'encre grise, qu'on trouve plus belle que l'encre noire. Aussi, les livres anglais sont imprim?s d'une mani?re si confuse, que les vieillards ne peuvent les lire qu'au grand jour, ou avec de tr?s-bonnes lunettes. Quiconque fera la comparaison d'un volume d'un journal imprim? depuis 1731 jusqu'? 1740, avec ceux qui ont paru depuis dix ans, sera convaincu que l'impression faite avec de l'encre noire est infiniment plus facile ? lire que celle qui est faite avec de l'encre grise.
Lord Chesterfield fit plaisamment la critique de cette nouvelle m?thode. Apr?s avoir entendu Faulkener, imprimeur de Dublin, vanter pompeusement sa propre gazette, comme la plus parfaite qu'il y e?t dans le monde.--<
D'apr?s toutes ces raisons, je d?sirerois que nos imprimeurs am?ricains ne se piquassent pas d'imiter ces perfectionnemens imaginaires, et que par cons?quent ils rendissent les ouvrages qui sortiront de leurs presses, plus agr?ables aux ?trangers, et avantageux ? notre commerce de librairie.
Souvent cinq ou six de nos dames se r?unissent pour faire de petites parties de travail, o? tandis que chacune est occup?e de son ouvrage, une personne de la compagnie leur fait la lecture: certes, un usage si louable m?rite que les ?crivains et les imprimeurs cherchent ? le rendre le plus agr?able possible au lecteur et ? l'auditoire.
Recevez avec les assurances de mon estime, mes voeux pour votre prosp?rit?.
B. FRANKLIN.
Improved.
De pareilles innovations se sont quelquefois introduites dans l'assembl?e nationale de France; et s'il y en a eu d'heureuses, il y en a eu aussi de tr?s-ridicules. Cet abus mena?oit m?me de corrompre la puret? de notre langue: mais le bon go?t en a fait justice.
Quand Franklin ?crivoit ceci, les Fran?ais n'avoient pas encore l'inappr?ciable avantage de la libert? de la presse.
The Gentleman's Magazine.
TABLEAU DU PRINCIPAL TRIBUNAL DE PENSYLVANIE, LE TRIBUNAL DE LA PRESSE.
POUVOIR DE CE TRIBUNAL.
Il peut recevoir et publier les accusations de toute esp?ce contre toutes personnes, quelque rang qu'elles occupent, et m?me contre tous les tribunaux inf?rieurs. Il peut juger et condamner ? l'infamie, non-seulement des particuliers, mais des corps entiers, apr?s les avoir entendus, ou sans les entendre, comme il le juge ? propos.
Il est ?tabli en faveur d'environ un citoyen sur cinq cents, parce que grace ? son ?ducation, ou ? l'habitude de griffonner, il a acquis un style assez correct et le moyen de faire des phrases assez bien tourn?es, pour supporter l'impression; ou bien parce qu'il poss?de une presse et quelques caract?res. Cette cinq centi?me partie des citoyens a le privil?ge d'accuser et de calomnier ? son gr? les autres quatre cent dix-neuf parties; ou elle peut vendre sa plume et sa presse ? d'autres pour le m?me objet.
USAGES DE CE TRIBUNAL.
Il ne suit aucun des r?glemens des tribunaux ordinaires. Celui qui est accus? devant lui n'obtient point un grand jury, pour juger s'il y a lieu ? accusation avant qu'elle soit rendue publique. On ne lui fait pas m?me conno?tre le nom de son accusateur, ni on ne lui accorde l'avantage d'?tre confront? avec les t?moins qui ont d?pos? contre lui, car ils se tiennent dans les t?n?bres, comme ceux du tribunal de l'inquisition d'Espagne.
Il n'a pas non plus un petit jury, form? de ses pairs, pour examiner les crimes qu'on lui impute. L'instruction du proc?s est quelquefois si rapide, qu'un bon et honn?te citoyen peut tout-?-coup, et lorsqu'il s'y attend le moins, se voir accuser, et dans la m?me matin?e ?tre jug?, condamn?, et entendre prononcer l'arr?t qui le d?clare un coquin et un sc?l?rat.
Cependant, si un membre de ce tribunal re?oit la plus l?g?re r?primande, pour avoir abus? de sa place, il r?clame aussit?t les droits que la constitution accorde ? tout citoyen libre, et il demande ? conno?tre son accusateur, ? ?tre confront? avec les t?moins, et ? ?tre jug? loyalement par un jury compos? de ses pairs.
SUR QUOI EST FOND?E L'AUTORIT? DU TRIBUNAL.
Cette autorit? est, dit-on, fond?e sur un article de la constitution de l'?tat, qui ?tablit la libert? de la presse, libert? pour laquelle tous les Pensylvaniens sont pr?ts ? combattre et ? mourir, quoique fort peu d'entr'eux aient, je crois, une id?e distincte de sa nature et de son ?tendue. En v?rit?, elle ressemble tant soit peu ? celle que les loix anglaises accordent aux criminels avant leur conviction; c'est-?-dire, ? celle d'?tre forc?s ? mourir ou ? ?tre pendus.
Si par la libert? de la presse nous entendons simplement la libert? de discuter l'utilit? des mesures du gouvernement et des opinions politiques, jouissons de cette libert? de la mani?re la plus ?tendue: mais si c'est au contraire, la libert? d'insulter, de calomnier, de diffamer, je d?clare que d?s que nos l?gislateurs le jugeront ? propos, je renoncerai volontiers ? la part qui m'en revient; et que je consentirai de bon coeur ? changer la libert? d'outrager les autres, pour le privil?ge de n'?tre point outrag? moi-m?me.
QUELLES PERSONNES ONT INSTITU? CE TRIBUNAL, ET EN NOMMENT LES OFFICIERS.
Il n'est point institu? par un acte du conseil supr?me de l'?tat. Il n'y a point de commission ?tablie par lui, pour examiner pr?alablement les talens, l'int?grit?, les connoissances des personnes ? qui est confi? le soin important de d?cider du m?rite et de la r?putation des citoyens; car le tribunal est au-dessus de ce conseil, et peut accuser, juger et condamner ? son gr?. Il n'est point h?r?ditaire, comme la cour des pairs en Angleterre. Mais tout homme, qui peut se procurer une plume, de l'encre et du papier, avec quelques caract?res, une presse et une paire de grosses balles, peut se nommer lui-m?me chef du tribunal, et il a aussit?t la pleine possession et l'exercice de tous ses droits. Si vous osez alors vous plaindre, en aucune mani?re, de la conduite du juge, il vous barbouille le visage avec ses balles partout o? il peut vous rencontrer; et en outre, mettant en lambeaux votre r?putation, il vous signale comme l'horreur du public, c'est-?-dire, comme l'ennemi de la libert? de la presse.
DE CE QUI SOUTIENT NATURELLEMENT CE TRIBUNAL.
Il est soutenu par la d?pravation de ces ames, ? qui la religion n'impose aucun frein, et que l'?ducation n'a point perfectionn?es.
De son voisin, publier les sottises, Est un plaisir ? nul autre pareil.
Aussi,
? l'immortalit? la m?disance vole. Mais la triste vertu ne na?t que pour mourir.
Quiconque ?prouve quelque peine ? entendre bien parler des autres, doit sentir du plaisir lorsqu'on en dit du mal. Ceux qui, en d?sesp?rant de pouvoir se distinguer par leurs vertus, trouvent de la consolation ? voir les autres raval?s ? c?t? d'eux, sont assez nombreux dans toutes les grandes villes, pour fournir aux frais n?cessaires d'un des tribunaux de la libert? de la presse.
Un observateur assez ing?nieux disoit une fois, qu'en se promenant le matin dans les rues, lorsque le pav? ?toit glissant, il distinguoit ais?ment o? demeuroient les bonnes gens, parce qu'ils avoient soin de jeter des cendres sur la glace qui ?toit devant leur porte. Probablement il auroit port? un jugement tout diff?rent du caract?re de ceux qui fournissent aux frais du tribunal dont nous parlons.
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