Read Ebook: Les vivants et les morts by Noailles Anna De
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Ebook has 1234 lines and 50439 words, and 25 pages
COMTESSE DE NOAILLES
LES VIVANTS ET LES MORTS
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Platon.
PARIS
DU M?ME AUTEUR
POESIES
LE COEUR INNOMBRABLE 1 vol.
L'OMBRE DES JOURS 1 vol.
LES EBLOUISSEMENTS 1 Vol.
ROMANS
LA NOUVELLE ESPERANCE 1 vol.
LE VISAGE EMERVEILLE 1 vol.
LA DOMINATION 1 vol.
COMTESSE DE NOAILLES
LES VIVANTS ET LES MORTS
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PLATON.
PARIS
ARTH?ME FAYARD & Cie, EDITEURS 18-20, rue du Saint-Gothard, 18-20
LES PASSIONS
EUPHORION.--Je ne veux pas plus longtemps tenir ? terre; laissez mes mains, laissez mes boucles, laissez donc mes v?tements, ils sont ? moi...
HEL?NE ET FAUST.--O p?tulance! ? d?lire! On dirait un cor qui sonne sur la vall?e et sur le bois. A peine un jour serein donn? tu tends ? t'?lancer, du point o? le vertige t'a pris, dans un espace plein de douleurs...
Goethe.
TU VIS, JE BOIS L'AZUR...
Tu vis, je bois l'azur qu'?panche ton visage, Ton rire me nourrit comme d'un bl? plus fin, Je ne sais pas le jour, o?, moins s?r et moins sage, Tu me feras mourir de faim.
Solitaire, nomade et toujours ?tonn?e, Je n'ai pas d'avenir et je n'ai pas de toit, J'ai peur de la maison, de l'heure et de l'ann?e O? je devrai souffrir de toi.
M?me quand je te vois dans l'air qui m'environne, Quand tu sembles meilleur que mon coeur ne r?va, Quelque chose de toi sans cesse m'abandonne, Car rien qu'en vivant tu t'en vas.
Tu t'en vas, et je suis comme ces chiens farouches Qui, le front sur le sable o? luit un soleil blanc, Cherchent ? retenir dans leur errante bouche L'ombre d'un papillon volant.
Tu t'en vas, cher navire, et la mer qui te berce Te vante de lointains et plus br?lants transports. Pourtant, la cargaison du monde se d?verse Dans mon vaste et tranquille port.
Ne bouge plus, ton souffle impatient, tes gestes Ressemblent ? la source ?cartant les roseaux. Tout est aride et nu hors de mon ?me, reste Dans l'ouragan de mon repos!
Quel voyage vaudrait ce que mes yeux t'apprennent, Quand mes regards joyeux font jaillir dans les tiens Les soirs de Galata, les for?ts des Ardennes, Les lotus des fleuves indiens?
H?las! quand ton ?lan, quand ton d?part m'oppresse, Quand je ne peux t'avoir dans l'espace o? tu cours, Je songe ? la terrible et fun?bre paresse Qui viendra t'engourdir un jour.
Toi si gai, si content, si rapide et si brave, Qui r?gnes sur l'espoir ainsi qu'un conqu?rant, Tu rejoindras aussi ce grand peuple d'esclaves Qui g?t, muet et tol?rant.
Je le vois comme un point d?licat et solide Par del? les instants, les horizons, les eaux, Isol?, fascinant comme les Pyramides, Ton ?troit et fixe tombeau;
Et je regarde avec une affreuse tristesse, Au bout d'un avenir que je ne verrai pas, Ce mur qui te r?siste et ce lieu o? tu cesses, Ce lit o? s'arr?tent tes pas!
Tu seras mort, ainsi que David, qu'Alexandre, Mort comme le Th?bain lan?ant ses javelots, Comme ce danseur grec dont j'ai pes? la cendre Dans un mus?e, au bord des flots.
--J'ai vu sous le soleil d'un antique rivage Qui subit la chaleur comme un c?leste affront, Des squelettes l?gers au fond des sarcophages, Et j'ai touch? leurs faibles fronts.
Et je savais que moi, qui contemplais ces restes, J'?tais d?j? ce mort, mais encor palpitant, Car de ces ossements ? mon corps tendre et preste Il faut le cours d'un peu de temps...
Je l'accepte pour moi ce sort si noir, si rude, Je veux ?tre ces yeux que l'infini creusait; Mais, palmier de ma joie et de ma solitude, Vous avec qui je me taisais,
Vous ? qui j'ai donn?, sans m?me vous le dire, Comme un prince remet son ?p?e au vainqueur, La gr?ce de r?gner sur le mystique empire O?, comme un Nil, s'?pand mon coeur,
Vous en qui, flot mouvant, j'ai bris? tout ensemble, Mes r?ves, mes d?fauts, ma peine et ma ga?t?, Comme un palais debout qui se d?fait et tremble Au miroir d'un lac agit?,
Faut-il que vous aussi, le Destin vous enr?le Dans cette arm?e en proie aux livides torpeurs, Et que, r?duit, le cou rentr? dans les ?paules, Vous ayez l'aspect de la peur?
Que plus froid que le froid, sans regard, sans oreille, Germe qui se rendort dans l'oeuf universel, Vous soyez cette cire ?cre, dont les abeilles Ecartent leur vol fraternel!
N'est-il pas suffisant que d?j? moi je parte, Que j'aille me m?ler aux fant?mes hagards, Moi qui, plus qu'Andromaque et qu'H?l?ne de Sparte, Ai vu guerroyer des regards?
Mon enfant, je me hais, je m?prise mon ?me, Ce d?testable orgueil qu'ont les filles des rois, Puisque je ne peux pas ?tre un rempart de flamme Entre la triste mort et toi!
Mais puisque tout survit, que rien de nous ne passe, Je songe, sous les cieux o? la nuit va venir, A cette ?ternit? du temps et de l'espace Dont tu ne pourras pas sortir.
--O beaut? des printemps, alacrit? des neiges, Rassurantes parois du vase immense et clos O?, comme de joyeux et fid?les arp?ges, Tout monte et chante sans repos!...
J'AI TANT R?VE PAR VOUS...
J'ai tant r?v? par vous, et d'un coeur si prodigue, Qu'il m'a fallu vous vaincre ainsi qu'en un combat; J'ai construit ma raison comme on fait une digue, Pour que l'eau de la mer ne m'envahisse pas.
J'avais tant confondu votre aspect et le monde, Les senteurs que l'espace ?changeait avec vous, Que, dans ma solitude ?parse et vagabonde, J'ai partout retrouv? vos mains et vos genoux.
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