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Read Ebook: Fables et légendes du Japon by Ferrand Claudius Raffin Ferdinand Illustrator

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Ebook has 557 lines and 24650 words, and 12 pages

Taro ne savait que r?pondre. Il se tut. Alors, sur un signe de la d?esse, on le fit asseoir sur un coussin en soie, cousue de fil d'or. On lui apporta une petite table en ivoire, sur laquelle ?taient pos?s, dans des plateaux de vermeil, toutes sortes de mets app?tissants. Taro fit un repas, comme il n'en avait jamais fait depuis qu'il ?tait au monde. Quand il eut fini de manger, la d?esse le conduisit voir les diverses parties de son palais.

Le p?cheur marchait de surprise en surprise, d'?blouissement en ?blouissement. Mais ce qui le frappa le plus, et mit le comble ? son admiration, ce fut le jardin. Il y avait l? quatre parterres immenses; chacun repr?sentait l'une des quatre saisons de l'ann?e.

A l'est, c'?tait le parterre du printemps: d'innombrables pruniers et cerisiers en fleurs s'?levaient au-dessus d'un verdoyant gazon; de nombreux rossignols y modulaient leurs d?licieuses romances; des alouettes y faisaient leur nid.

Au sud s'?tendait le parterre de l'?t?: l?, des pommiers et des poiriers, dont les branches pliaient sous le poids de leurs fruits. Des cigales y remplissaient l'air de leurs cris assourdissants et monotones. Il y r?gnait une grande chaleur, temp?r?e par un doux z?phyr.

L'automne ?tait repr?sent? par le parterre de l'ouest. Le sol y ?tait couvert de feuilles jaunissantes et de bouquets de chrysanth?mes. Enfin, le parterre de l'hiver ?tait au nord: c'?tait un immense tapis de neige, entourant un ?tang de glace...

Taro passa sept jours dans ce palais enchanteur. Fascin? par toutes les merveilles qui s'offraient ? ses regards, charm? de la bont? que lui t?moignait la d?esse, et du bien-?tre qu'il ?prouvait aupr?s d'elle, il avait oubli? son village; il ne songeait plus ? son vieux p?re, ? sa femme, ? ses enfants, ? sa barque, ? ses filets.

Un jour pourtant il s'en souvint, et la tristesse le prit.

--Que doit penser mon p?re, se dit-il, d'une si longue absence? Combien ma femme et mes enfants doivent ?tre inquiets, et attendre mon retour! Ils me croient peut-?tre mort, englouti au fond de l'Oc?an! Et ma barque, qu'est-elle devenue? Et mes filets?...

Alors, Taro r?solut de partir. Il en parla ? la d?esse. Celle-ci essaya bien de le retenir encore, mais toutes ses instances demeur?rent infructueuses. Ce voyant, la belle Otohim? le prit ? part dans sa chambre secr?te et, tirant du fond d'un coffre une petite bo?te en laque, elle la lui donna, en disant:

--Puisqu'? tout prix vous voulez partir, Monsieur Ourashima, je ne vous retiens plus. Tenez! Emportez cette bo?te, comme souvenir de moi et de votre s?jour ici. Mais promettez-moi que, quoiqu'il arrive, vous ne l'ouvrirez jamais. Monsieur, retenez bien mes paroles: le jour o?, c?dant ? une curiosit? coupable, vous ouvrirez cette bo?te, vous ?tes un homme mort.

Taro accepta le pr?sent avec beaucoup de reconnaissance. Il promit que jamais il n'ouvrirait la bo?te, quoiqu'il puisse arriver. Puis la d?esse l'embrassa sur le front, elle l'accompagna jusqu'au seuil de sa porte, et ils se s?par?rent. Le p?cheur remonta sur le dos de la tortue, et celle-ci le ramena au rivage...

Taro est de retour. Mais, comme tout a chang? pendant son absence! Les arbres qui se trouvent ? l'entr?e du bourg ne sont plus ceux qu'il ?tait habitu? ? y voir. Le village s'est agrandi; il y a des maisons nouvelles, des maisons comme il n'en a jamais vu de sa vie. Quel n'est pas son ?tonnement de ne plus retrouver aucune de ses connaissances! Tous les visages qu'il rencontre lui sont enti?rement inconnus!

Ne comprenant plus rien ? cette soudaine m?tamorphose des hommes et des choses, Taro ne sait que penser ni que croire. Il lui tarde de retrouver son p?re, sa femme et ses enfants, pour apprendre de leur bouche le pourquoi de ce qui l'?tonne. Il se dirige vers sa demeure. L?, sa surprise redouble. C'est bien cette maison qu'il a quitt?e, il y a sept jours. Mais elle tombe en ruines. Il s'approche et jette un coup d'oeil ? l'int?rieur. Il n'y voit aucun des objets qui lui ?taient familiers. Il n'y retrouve ni son p?re, ni sa femme, ni ses enfants.

Sur la natte, un vieillard est assis, les bras appuy?s sur le bord du brasero, mais ce vieillard n'est pas son p?re! Taro va d?faillir sous le poids d'une ?motion trop forte. Il se contient pourtant encore.

--Bon vieillard, demande-t-il d'une voix ?touff?e, il y a sept jours que j'ai quitt? ce village. Tout y a chang? depuis. Cette maison est ? moi, et je vous y trouve, vous, un inconnu. O? sont donc mon vieux p?re, ma femme et mes enfants, que j'ai laiss?s ici?

--Jeune homme, r?pond le vieillard, qui croit avoir ? faire ? un fou, je ne sais ce que vous voulez dire. Qui ?tes-vous donc? Quel est votre nom?

--Je suis Ourashima Taro, le p?cheur.

--Ourashima Taro! s'?crie le vieillard au comble de la surprise, mais alors, vous ?tes... un fant?me... un revenant... une ombre!... J'ai souvent, en effet, entendu parler d'un certain Ourashima Taro. Mais, voil? bien longtemps qu'il n'est plus de ce monde. Il y a sept cents ans qu'Ourashima Taro est mort!

--Sept cents ans! s'?crie le p?cheur.

Aussit?t il p?lit et chancelle. Ces derni?res paroles du vieillard sont pour lui comme un trait de lumi?re. Il a compris! Il a compris qu'il a pass? sept cents ans dans le palais de la d?esse Otohim?, et que ces sept cents ans lui ont sembl? sept jours...

Une profonde tristesse envahit son ?me. Il quitte ce village inhospitalier, qui n'est plus le sien, et o? il n'a personne. Tout pensif, il se rend ? la gr?ve. Instinctivement, ses regards cherchent ? apercevoir la tortue: car il voudrait bien maintenant retourner au palais... Mais la tortue a disparu, probablement pour toujours...

Taro s'assied sur le sable, et verse des larmes br?lantes. Tout ? coup, ses yeux se portent sur la bo?te, la bo?te myst?rieuse qu'Otohim? lui a donn?e au d?part, et ? laquelle, dans son trouble, il n'avait plus song?.

--Que contient cette bo?te?... La d?esse m'a dit, en me la remettant: le jour o?, par une curiosit? coupable, vous ouvrirez cette bo?te, vous ?tes un homme mort... Une d?esse ne ment point... et pourtant, qui sait?... Peut-?tre est-ce pour m'?prouver qu'elle m'a dit cela!... Peut-?tre cette bo?te contient-elle mon bonheur!... Et puis, apr?s tout, que m'importe la mort, ? cette heure?... Ne suis-je pas seul au monde, sans parents, sans amis, sans connaissances, sans fortune?... Oui, mieux vaut cent fois la mort, qu'une existence aussi malheureuse!...

Ainsi pense Taro. Alors, d'un mouvement nerveux, il entr'ouvre la bo?te. Il en sort un nuage ?pais, qui l'enveloppe des pieds ? la t?te. Soudain, ses cheveux deviennent blancs comme la neige, son front se ride, ses membres se dess?chent et il tombe mort sur la plage.

Le lendemain, des p?cheurs d?couvrirent sur la gr?ve le corps d'un homme qui avait v?cu sept cents ans...

La petite Voleuse

Mademoiselle Aki ?tait une jeune fille de dix-sept ans. Ses parents l'avaient g?t?e. Comme toutes les jeunes filles qui sont g?t?es par leurs parents, elle ?tait vaniteuse, capricieuse et m?chante. Elle avait un tr?s vilain d?faut. Aki ?tait voleuse. Elle volait partout, elle volait toujours, elle volait tant qu'elle pouvait. Et, chose assez curieuse, elle ne se faisait jamais prendre. La coquine ?tait d'une habilet? rare. Du reste, vous allez en juger.

Un beau matin, elle prend un panier, le remplit de poissons, et quitte la maison, sans rien dire. Ses parents lui donnant malheureusement toute libert? de suivre ses caprices, et ne s'informant jamais de ses all?es et venues, la laissent sortir, sans m?me lui demander o? elle va avec ce panier.

Aki longe un moment la rue, tourne ? droite, traverse une longue place, enfile une vaste avenue et arrive devant une maison d'apparence bourgeoise. C'est l? que demeure le tr?s honorable et tr?s distingu? ministre Sanjo.

La jeune fille entre par la porte coch?re, traverse la cour, comme une habitu?e de la maison, tourne sur la gauche et se dirige vers la cuisine. Mme Osandon, la digne et repl?te cuisini?re de M. le ministre, est en train de pr?parer le d?jeuner de son ma?tre.

--Bonjour, Madame Osandon, lui dit Aki en la saluant, je suis la fille de M. Takeyoshi, le marchand de soieries qui habite la rue de Hongo. Hier soir, votre ma?tre a rendu ? mon p?re un service important. Et mon p?re m'envoie le remercier en son nom, en attendant qu'il se pr?sente lui-m?me. Il m'a charg? de remettre ? M. le ministre ce panier de poissons. Quoique ce soit peu de chose, veuillez prier votre ma?tre de l'accepter comme un faible t?moignage de notre reconnaissance.

La brave cuisini?re n'a aucun motif de mettre en doute la sinc?rit? de cette jeune fille. Elle accepte le panier, va trouver le ministre qui faisait sa toilette, et lui r?p?te les paroles d'Aki.

Le ministre, apr?s avoir ?cout?, r?fl?chit un instant, puis il r?pond:

--Je ne connais personne du nom de Takeyoshi; j'ignore s'il y a un marchand de soieries de ce nom dans la rue de Hongo; je n'ai pas souvenance d'avoir rendu hier soir un service quelconque ? qui que ce soit. La chose m'e?t ?t? difficile, vu que je ne suis pas sorti hier de toute la journ?e. Il y a l? une erreur; cette jeune fille se trompe d'adresse; reporte-lui son panier.

Pendant que se tenait ce petit bout de conversation dans la chambre du ministre Mlle Aki, rest?e seule ? la cuisine, avait jet? un coup d'oeil sur les ?tag?res; elle avait aper?u une petite tasse de valeur, et tr?s d?licatement, l'avait gliss?e dans les profondeurs de sa manche. Mais, cela ?tant en dehors du programme, et n'?tant arriv? que par hasard, ne nous y arr?tons pas, et continuons.

Mme Osandon redescend donc ? la cuisine, et rend le panier ? la jeune fille, en lui rapportant les paroles de son ma?tre.

--C'est curieux! r?pond Aki, en reprenant le panier... C'est pourtant bien ici!... Aurais-je mal entendu?... Je suis si sotte!... Je vais retourner ? la maison, et demander de nouveau ? mon p?re. Voudriez-vous ?tre assez aimable pour me permettre de d?poser mon panier ici? Je reviendrai dans tous les cas le prendre.

--Il n'y a pas d'inconv?nient, Mademoiselle.

Aki d?pose donc son panier dans un coin de la cuisine; puis, saluant profond?ment Mme Osandon, elle reprend le chemin par lequel elle est venue.

Vous vous demandez peut-?tre pourquoi la rus?e jeune fille a laiss? l? son panier? Pourquoi? Je vous le donne en mille. Inutile de vous creuser la t?te. Vous ne devinerez pas. Mais vous allez comprendre tout ? l'heure, et vous ne pourrez vous emp?cher de penser: quelle petite coquine!

D'abord, elle ne retourne pas chez elle, tout naturellement. La voil? qui remonte l'avenue, enfile la rue de Sakanacho et s'arr?te devant la boutique d'un horloger.

--Pardon! dit-elle en entrant. Je viens de la part de Mme Sanjo, la femme du ministre. Est-ce que vous avez de belles montres en or?

--Mais parfaitement, Mademoiselle. En d?sirez-vous de grandes ou de petites?

--Voici. Ma ma?tresse voudrait en voir quelques-unes de dimensions diff?rentes, pour pouvoir faire son choix. Elle est tr?s fatigu?e aujourd'hui et ne peut quitter la chambre. Il lui faut cependant une montre pour ce soir. Ne voudriez-vous pas en confier quelques-unes ? votre apprenti, et le prier de m'accompagner chez ma ma?tresse?

--Je n'ai pas l'habitude de confier des montres ? mon apprenti. Mais, si vous n'y voyez pas d'inconv?nient, je puis vous accompagner moi-m?me.

--Ce sera encore mieux!

L'horloger, lui non plus, n'a aucune raison de soup?onner la jeune fille. Il choisit douze belles montres, les introduit dans une bo?te, enveloppe la bo?te d'un beau foulard de soie, met son manteau et part avec Aki.

Ils arrivent chez M. le ministre, entrent par la porte coch?re, et p?n?trent dans la cour. Arriv?s l?, la petite rus?e dit ? son compagnon:

--Comme Madame est couch?e, elle serait peut-?tre contrari?e de vous recevoir chez elle. Passez-moi les montres; je vais les lui porter. Et attendez-moi ici, ce ne sera pas long.

L'horloger sans m?fiance passe la bo?te ? Aki, et les montres vont rejoindre la tasse de tout ? l'heure dans les profondeurs de sa manche...

La jeune fille se rend ? la cuisine, o? elle retrouve Mme Osandon:

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