Read Ebook: Victor ou L'enfant de la forêt by Ducray Duminil M Fran Ois Guillaume
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Ebook has 1209 lines and 159774 words, and 25 pages
VICTOR,
L'ENFANT DE LA FOR?T.
AVIS.
DUCRAY-DUMINIL, LE PRIEUR.
CHAPITRE PREMIER.--La Veuve et l'Orphelin
Premi?re nuit de la for?t
IIe Nuit de la for?t
IVe Nuit de la for?t
Ve Nuit de la for?t
TABLE DES CHAPITRES: second volume.
CHAPITRE PREMIER.--Combats; le nouvel OEdipe
TABLE DES CHAPITRES: troisi?me volume.
CHAPITRE PREMIER.--Pr?sent d'amour qui doit jouer un r?le
TABLE DES CHAPITRES: quatri?me volume.
CHAPITRE PREMIER.--La For?t enchant?e
CHAP. VI, qui divise, ? dessein, l'int?r?t.
CONCLUSION
VICTOR,
L'ENFANT DE LA FOR?T;
PAR
M. DUCRAY-DUMINIL,
Qui le consolera, l'infortun??.... Sa vertu!
TOME PREMIER.
? PARIS,
Chez LE PRIEUR, Libraire, rue de Savoie,
n?. 12.
UN MOT AU LECTEUR.
VICTOR,
L'ENFANT DE LA FOR?T.
CHAPITRE PREMIER.
LA VEUVE ET L'ORPHELIN.
Minuit sonne!.... Un silence religieux succ?de au tumulte des villes, au hennissement des chevaux, aux chants joyeux des agriculteurs.... Le sommeil appesantit ses ailes noires sur la surface de notre h?misph?re: il en secoue les pavots et les songes; les songes!.... qui ne font souvent que prolonger les peines de l'infortun?, tandis qu'ils rappellent ? l'homme heureux les images riantes dont il a joui dans la journ?e. C'est le moment du repos pour tous les mortels; c'est le moment de la douleur pour le jeune Victor.
Il est seul dans son appartement, l'int?ressant Victor. Les deux coudes appuy?s sur sa fen?tre, sa t?te enfonc?e dans ses mains, il se livre aux plus tristes r?flexions. La lune ?claire la campagne: elle r?fl?chit son disque argent? dans l'eau limpide du canal qui entoure le ch?teau de Fritzierne; un l?ger z?phyr balance mollement la cime des arbres: les rossignols, les fauvettes, tous ces Orph?es des bois sont endormis; le cri lugubre de l'oiseau de Minerve trouble seul la tranquillit? dont veut jouir la nature; tout dispose ? la m?lancolie, tout invite au recueillement.
Victor, occup? de mille pensers divers, fixe ses regards distraits sur les objets qui l'environnent; il regarde tout, et ne voit rien; il pense ? mille choses, et n'a pas une seule id?e. Ses yeux sont humides de larmes que ses paupi?res, immobiles, n'expriment point de ses yeux. Son coeur bat, ses genoux fl?chissent; il semble qu'il ne puisse plus se soutenir, et voil? plus d'une heure qu'il est dans la m?me position!.... Un l?ger nuage cependant obscurcit le disque argent? de l'astre de la nuit; il en affaiblit la clart?; mais il en diverge les rayons sur des bois, des plaines, des rivi?res, des fortifications. L'absence de la lumi?re tire Victor de sa r?verie; il prom?ne ses regards avec plus d'attention sur les objets qu'il peut distinguer encore: il les a vus cent fois; mais il ne les a jamais fix?s avec autant de volupt?: tout lui para?t nouveau, parce qu'il sent davantage. Les vastes for?ts de la Boh?me, qu'il habite, se pr?sentent en masse ? ses yeux ?tonn?s. Au pied du mont des G?ants, aupr?s duquel est situ? le ch?teau de Fritzierne, il apper?oit l'Elbe sortant de sa source avec imp?tuosit?, courant, au milieu de mille sinuosit?s, arroser les plaines, les villes et les hameaux. Il voit en imagination ce fleuve majestueux se grossir dans son cours, traverser la Misnie, la Saxe, et porter ? la mer, au-dessus de Hambourg, le tribut de ses eaux gonfl?es, dans leur cours, par mille torrens divers. Il apper?oit la haute tour de Buntzlau, o? Boleslas-le-Cruel-massacra son fr?re Vinceslas qui venait lui demander un asyle. Enfin, baissant les yeux sur les fortifications du ch?teau de Fritzierne, il le voit flanqu? de bastions, de tourelles, de contre-forts, et d?fendu par un large foss?, qu'un pont-levis permet seul de franchir.
Ce spectacle imposant doit ?tre familier ? Victor; mais il ne lui a jamais procur? autant de jouissances. Eh quoi! s'?crie-t-il, ces tableaux magnifiques, ces superbes campagnes, ce ch?teau o? l'on ?leva mon enfance; je quitterais tout cela!.... je fuirais un protecteur, un p?re!.... j'aurais l'ingratitude de l'abandonner, quand il compte sur moi pour adoucir les ennuis de sa vieillesse!.... Non, Victor, non, tu t'auras point cette barbarie; tu vaincras une funeste passion, tu respecteras la fille de ton protecteur, tu lui cacheras tes sentimens; tu triompheras de l'amour, et tu jouiras du bonheur d'une famille qui t'a re?u dans son sein au sortir de ton berceau, qui te regarde comme un ami que le ciel lui a envoy?.... Mais, dieux! Cl?mence! tu ne sauras donc jamais que je t'aime, que je t'adore.... jamais!.... L'ai-je pu former ce cruel projet! Cl?mence! fille adorable! si tu savais, si j'osais dire ? ton p?re!.... Ton p?re pourrait-il bl?mer un amour vertueux, un amour d?licat fond? sur la reconnaissance, sur l'admiration dont tes rares vertus m'ont p?n?tr?!.... Pourrait-il me repousser de son sein, apr?s m'avoir cent fois accabl? des bont?s les plus touchantes! Non, non, le baron de Fritzierne est un philosophe, un sage; il fait peu de cas de la naissance, de la fortune, de tous les dons du hasard; il n'estime que l'honneur, la probit?: il me jugera digne de la main de sa fille. Oui, Cl?mence, oui, tu conna?tras mon amour; j'ose esp?rer que tu le partageras: tu m'as donn? tant de fois l'espoir d'?tre aim?! Nous nous jetterons aux pieds du meilleur des p?res; il nous embrassera, nous unira. ? Victor! quelle f?licit? t'attend!.... Que dis-tu, insens?? o? va s'?garer ton imagination? toi, malheureux enfant trouv? dans une for?t; toi, infortun?, sans parens, sans amis, sans appui sur la terre, tu deviendrais le gendre du baron de Fritzierne, d'un des plus puissans seigneurs de l'Allemagne! tu oserais rapprocher la distance....
Non, Victor, non; cesse d'esp?rer, cesse de r?ver, ce bonheur n'est pas fait pour toi. Fuis, Victor, fuis, d?robe-toi aux traits du malheur qui t'attend; crains d'?tre accus? d'ingratitude, de s?duction: tu le serais, Victor, tu le serais, et tu en mourrais!.... C'en est fait, son p?re m'a refus? aujourd'hui la permission de voyager loin de lui; il a fait de vains efforts pour m'arracher le secret de mon coeur; demain, je me pr?cipite de nouveau ? ses genoux; je le presse, je le conjure de me laisser partir, et s'il se refuse encore ? mes voeux.... S'il s'y refuse, que ferai-je? que deviendrai-je? Ah! malheureux!....
C'est ainsi que Victor flottait dans une mer de pens?es plus douloureuses les unes que les autres. Il devait tout ? M. de Fritzierne, il adorait sa fille Cl?mence; mais son amour ?tait respectueux; jamais il ne lui ?tait ?chapp? un mot qui p?t le d?celer; jamais aucune de ses d?marches n'avait d?voil? le secret de son coeur; Cl?mence elle-m?me ignorait que sa tendresse ?tait pay?e de retour; car Cl?mence aimait Victor, et Cl?mence, par des agaceries bien naturelles ? un enfant, avait allum? cette funeste passion dans le coeur du homme. Cl?mence avait dix-sept ans; elle ?tait vive, et simple comme l'innocence; son ame ignorait ces d?tours qui g?nent le sentiment, qui en arr?tent l'explosion. Victor avait dix-huit ans; il ?tait grand, bien fait, dou? de toutes les qualit?s de l'esprit et du coeur. Cl?mence, ?lev?e avec lui, n'avait pu r?sister au charme que sa pr?sence, ses discours, ses talens, lui avaient inspir?. Elle l'aimait donc; mais elle croyait n'aimer qu'un fr?re: son p?re l'avait ?lev?e dans cette douce illusion. Cl?mence se croyait attach?e ? Victor par les liens du sang, et Cl?mence se livrait sans contrainte ? toute l'effusion d'un sentiment qu'elle regardait comme celui de la tendresse fraternelle. Victor, lui Victor, ne pouvait se livrer ? cette douce erreur. Victor savait bien qu'il n'?tait point le fr?re, de Cl?mence.... Il ne connaissait qu'une partie de l'histoire de sa naissance; mais il en savait assez pour d?sesp?rer de jamais obtenir la main de son amante. Le baron de Fritzierne, vieillard de soixante-cinq ans, apr?s avoir brill? long-temps dans les emplois politiques et militaires, apr?s avoir ?prouv? une foule de malheurs, s'?tait retir? dans son ch?teau, o? il vivait retir? du commerce des hommes. L?, il avait ?lev? Cl?mence et Victor: il aimait ce dernier comme son propre fils; mais il ?tait extr?mement riche; sa naissance ?tait des plus distingu?es; il n'y avait pas d'apparence qu'il voul?t jamais donner sa fille ? un inconnu. Victor le craignait, Victor pr?voyait les suites funestes de sa fatale passion, et il s'?tait d?termin? ? voyager jusqu'au moment de l'?tablissement de Cl?mence. Il en avait parl? ? son p?re, sans lui donner les v?ritable raisons qui le for?aient ? s'?loigner. Mais Fritzierne s'?tait attendri; le bon Fritzierne lui avait reproch?, en versant quelques larmes, l'esp?ce d'abandon o? il voulait le plonger. Victor n'avait pu r?sister aux pleurs de son bienfaiteur: il s'?tait tu; son coeur avait g?mi. Il ?tait remont? dans son appartement, l'ame oppress?e, le feu sur les joues, et les paupi?res charg?es de larmes. Loin de chercher un repos qui l'aurait fui, il avait ouvert sa crois?e, et le spectacle de la nature venait d'encha?ner ses facult?s, de suspendre, pour un moment, l'ex?cution de son projet. Tant?t il se proposait de fuir sans voir le baron ni sa fille; et tant?t il voulait ?crire ? Cl?mence pour lui faire ses tristes adieux. Il allait se mettre ? son secr?taire dans cette intention; mais les beaut?s des sites que la lune ?clairait ? ses yeux, le retenaient ? sa fen?tre; il admirait, reprenait le cours de ses r?flexions, admirait encore et ne pouvait rien faire....
Quiconque a voyag? dans la Boh?me, quiconque a vu les montagnes, les bois, les hameaux, les vieux ch?teaux qu'elle renferme, se fera ais?ment une id?e de la situation de manoir de Fritzierne: c'?tait un ch?teau-fort dans toute l'?tendue du terme. Plac? au milieu d'une colline qui, par une suite d'?l?vations, formait le dernier monticule de la cha?ne des montagnes des G?ants, il dominait sur un pays raboteux, h?riss? de vieilles tours, de masures, de c?teaux bois?s, de prairies et de ruisseaux. Il ?tait fortifi? tout autour, ? l'exception d'une petite porte perc?e dans un des cr?neaux de la muraille, et qui donnait de plain-pied sur la campagne. Sur le devant de la fa?ade ?tait situ? le pont-levis, jet? sur un large foss? plein d'eau. Les jardins, ?lev?s en amphith??tres, ?taient immenses, entour?s de fortes murailles, flanqu?s d'?normes contre-forts; en un mot, il ?tait impossible de craindre, d'aucun c?t?, l'attaque de brigands qui infestaient depuis long-temps les vastes for?ts d'alentour. Ce ch?teau avait autrefois soutenu des si?ges, et il ?tait encore capable de se d?fendre contre toute surprise.
C'?tait l? le s?jour que, depuis vingt ans, le baron de Fritzierne habitait paisiblement; c'?tait l? que la compassion avait tendu une main protectrice ? la jeunesse de Victor, dont les malheurs les plus cruels avaient marqu? la naissance, ainsi que nous le verrons par la suite....
Victor connaissait toutes les obligations qu'il avait au vieux baron; mais Victor, combattu par l'amour, la reconnaissance et la d?licatesse, ne pouvait r?pondre aux bont?s dont on l'avait accabl?, que par une fuite pr?cipit?e: c'?tait m?me le seul moyen qu'il e?t de prouver sa gratitude ? son bienfaiteur; il fallait, par ?gard pour ses bienfaits, qu'il s'arrach?t de ses bras....
Victor venait de prendre cette r?solution. N? ferme et courageux, il ?tait incapable d'en changer. Son ame ?tait plus calme, son coeur moins agit?, ses pens?es avaient repris leur cours; une heure enti?re, pass?e dans la fluctuation des id?es les plus tristes, avait ?puis? ses facult?s morales et physiques; le sommeil commen?ait ? lui faire ?prouver son besoin imp?rieux, il allait fermer sa fen?tre pour go?ter quelques heures de repos, d?j? il s'en ?loignait, lorsque des cris affreux le rappellent au balcon. Il ?coute.... Plus rien.... Le silence seul frappe son oreille attentive. Il va s'?loigner de nouveau; les m?mes cris recommencent; mais ils sont plus aigus.... Victor entend distinctement ces mots, prononc?s dans la campagne, presque au-dessous de lui: ?, qui que vous soyez, ne prenez que ma vie; n'arrachez point celle du malheureux orphelin que vous voyez; c'est mon fils, c'est mon fils, je l'ai adopt?.... Barbares! que vous a-t-il fait?.... Eh! ne se trouvera-t-il point quelque ame g?n?reuse qui vienne nous secourir!....
Les trois brigands allaient consommer leur forfait sur l'enfant, que la m?re pressait contre son coeur; d?j? m?me ils venaient de lui arracher cette innocente cr?ature, qui jetait des cris affreux.... Victor s'?lance, Victor s'?crie: Arr?te, sc?l?rat, re?ois la punition de tes crimes!....
Un coup de pistolet ?tend un des brigands ? ses pieds. Un second veut fuir, Valentin, le domestique de Victor, le poursuit, et le prive ? son tour de la vie. Le troisi?me brigand se sauve ? toutes jambes et dispara?t.... Le fid?le serviteur revient joindre son ma?tre, qu'il trouve occup? ? rappeler les sens de l'inconnue qui s'est ?vanouie. Valentin la prend dans ses bras, Victor serre l'enfant dans les siens; et tous deux, charg?s de ces pr?cieux fardeaux, regagnent la petite porte, l'ouvrent, la referment soigneusement, et portent dans leur appartement les infortun?s ? qui ils viennent de sauver la vie.
Qu'on se repr?sente la situation d'un homme sensible, d'un homme comme Victor, qui vient de commettre une bonne action. En est-il de plus douce? Comme son coeur bat d?licieusement! comme son sang est rafra?chi par l'id?e agr?able qu'il vient de secourir l'humanit?!
Victor fait asseoir l'inconnue, qui est un peu revenue ? elle; il prend l'enfant sur ses genoux, le presse, le caresse, et voit avec satisfaction cet int?ressant enfant lui sourire, et jeter sur lui des regards o? se peignent d?j? la tendresse et la reconnaissance.... La m?re a recouvr? l'usage de la parole. Qui ?tes-vous, lui demande doucement Victor? Par quel hasard vous trouvez-vous seule, ? une heure du matin, dans un lieu aussi d?sert?--Homme g?n?reux, ne me demandez pas qui je suis; n'exigez pas que je vous fasse le r?cit des malheurs qui ont travers? ma vie? Ce r?cit douloureux, je ne pourrais le faire; je ne le ferai jamais: je me suis impos? la loi de cacher mes aventures ? tout le monde; la mort seule me les fera oublier; mais personne, non personne ne les conna?tra.... Qu'il vous suffise de savoir que je suis une pauvre femme, sans asyle, sans parens, sans amis, qui...--Sans parens, sans ami! Oh! parlez, parlez, vous m'int?ressez ? un point....--Je m'?tais retir?e dans un petit village ? quelques lieues de Prague. L?, je vivais tranquillement du travail de mes mains et des dons que les ames sensibles voulaient bien me faire. Un vieux laboureur, plus pauvre encore que moi, venait de perdre son fils, l'espoir de sa vieillesse; l'?pouse de ce fils ?tait morte en donnant le jour ? cet enfant que vous voyez. Le laboureur ne put r?sister ? tant de coups; il expira dans mes bras, et moi je me chargeai de l'orphelin, persuad?e que le ciel ne m'abandonnerait pas. Mais, h?las! le sort ardent ? me pers?cuter voulait me chasser une seconde fois de mes foyers. L'avant-derni?re nuit, le feu prit au village et consuma une grande partie des masures. Des m?chans accus?rent ma n?gligence de ce malheur.... J'avais perdu mon asyle, j'avais perdu la tendresse de ceux au milieu desquels je vivais; je pris l'enfant dans mes bras, et je partis, r?solue d'aller implorer la compassion d'une vieille parente que j'ai en Sil?sie, mais dont je n'appr?hende que trop la duret?, s'il faut vous l'avouer.... Hier soir je me suis ?gar?e dans ces routes tortueuses qui environnent votre ch?teau; la nuit m'a surprise au milieu de mes inqui?tudes.... Que faire dans cette cruelle extr?mit?! Je recommande cet enfant ? Dieu; je m'enfonce dans un vallon, o? j'engage le petit ? dormir sur un tertre de gazon, bien d?termin?e ? veiller toute la nuit aupr?s de lui. L'enfant reposait depuis pr?s de deux heures environ, et je me croyais absolument seule dans cet endroit ?cart?, lorsque j'entends distinctement ces mots qu'on prononce ? voix basse, et tout pr?s de moi: As-tu assez dormi, Morgan? Allons, allons, r?veille-toi, voil? l'heure d'aller ? la d?couverte. Tu sais que Roger doit camper aujourd'hui entre Kingratz et Sarwitz: c'est le passage des voitures publiques; il y a l? de bons coups ? faire.... ? ces mots, ? ce nom de Roger, qui me retrace des souvenirs trop douloureux, la frayeur s'empare de moi; je prends l'enfant dans mes bras, je me l?ve, et nous fuyons; mais le petit ne peut retenir ses cris; les deux sc?l?rats nous d?couvrent, nous poursuivent, nous atteignent, et.... vous savez le reste.... G?n?reux mortel! je vous dois ma vie, je vous dois plus!.... vous avez conserv? les jours de cet enfant qui m'est bien cher, puisqu'il n'a plus que moi dans le monde! comment ferai-je pour acquitter jamais tant de bienfaits!....--Comment vous ferez, ange du ciel! Ah! continuez de donner vos soins ? cet enfant, et vous aurez reconnu au-del? tout ce que j'ai eu le bonheur de faire pour vous et pour lui: c'est m?riter tous les bienfaits des hommes, qu'?tre utile ? un seul infortun?!....
Victor ?tait charm? de voir que la personne qu'il venait de secourir ?tait digne de son estime. Il regardait avec d?lices cette femme vertueuse, qui faisait pour un enfant ?tranger ce que le baron avait fait pour lui; il trouvait, dans la situation de l'inconnue, une sorte de rapprochement avec la sienne propre, et son ame jouissait...... Cependant il pense que ces infortun?s n'ont rien pris depuis douze heures. Personne n'est ?veill? dans le ch?teau.... Comment faire? C'est Valentin qui va le tirer de cette sollicitude. Valentin, ce bon gar?on que nous conna?trons un peu mieux par la suite, a toujours en r?serve chez lui une armoire remplie de petites provisions. Valentin apporte ? l'inconnue de quoi r?tablir un peu ses forces; et comme il est trop honn?te pour ne pas tenir compagnie ? tout le monde et ? toute heure, il boit un verre de vin, dont il faut convenir qu'il a un peu besoin......... Victor regarde avec plaisir ce tableau touchant; Victor oublie et son amour, et ses projets: tant il est vrai que le sentiment de l'humanit? est le seul qui puisse remplir un coeur sensible sans douleur, sans serremens, sans toutes ces affections p?nibles qui accompagnent toujours les passions!
LE SONGE ET L'HOSPITALIT?.
Madame Wolf a fini son repas frugal; son fils, Hyacinthe, s'est d?j? endormi sur un si?ge. Victor engage madame Wolf ? se reposer dans son propre lit: elle r?siste d'abord; enfin elle c?de. L'enfant est mis ? c?t? d'elle, et Victor se propose de passer le reste de la nuit dans un fauteuil, ? c?t? de ses h?tes. Valentin veut rester avec son ma?tre; mais Victor lui ordonne de se retirer, et le domestique ob?it.
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