Read Ebook: La passagère by Chantepleure G Guy
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Ebook has 526 lines and 12837 words, and 11 pages
-- Mais, par mon nom de bapt?me... Guillaume.
-- C'est vrai!... ai-je dit encore. Guillaume le Taciturne! Mais cela me para?tra si dr?le de vous appeler Guillaume... Vous ne me gronderez pas si je me trompe?...
Il a dit: "Enj?leuse!"
-- Et vous m'aimerez autant qu'autrefois?
Tout ? coup, je n'avais plus envie de rire. J'ai dit:
-- Kerjean, il faut m'aimer beaucoup...
Bruges, 11 d?cembre.
On! C'est trop d?sastreux! Je n'aurai jamais le courage d'?crire...
Si j'?cris, ce n'est pas pour noter les impressions que j'attendais de Bruges, que j'y venais chercher, l'esprit et le coeur hant?s de doux r?cits...
Il pleut!... Une pluie implacable qui tombait d?j? ce matin au moment o? j'ai ouvert les yeux, qui tombe encore ce soir, tandis que je veille dans le silence endormi... Mon d?sespoir a ?t? si violent que Kerjean m'a trouv?e effondr?es dans un fauteuil avec un visage de car?me.
Ma premi?re vision ma premi?re sensation de Bruges ?tait ? l'avance d?flor?e... Oh! que c'?tait triste!
Il a essay? de me consoler. Mais on dirait, je ne sais pourquoi, que cette pluie lui d?pla?t moins qu'? moi...
Nous avons pass? dans le hall de l'h?tel -- car je n'ai pas voulu sortir -- une soir?e assommante.
Moi, je me distrayais de temps ? autre, en observant du coin de l'oeil un jeune couple arriv? ? Bruges en m?me temps que Kerjean et moi... De nouveaux mari?s, ils se parlent bas, ils se regardent d'un air b?te, on croit tout le temps qu'ils vont s'embrasser...
La jeune femme est ravissante, brune, un teint blanc tr?s pur et le plus fin, le plus d?licat profil... un cam?e antique...
Je me demande si Kerjean me trouve aussi jolie que cette jeune femme brune?
Bruges, 12 d?cembre.
Visit? l'h?pital Saint-Jean, beau, grave, recueilli.
Kerjean m'a conduite devant le grand r?table du "Mariage mystique". Moi, assise sur la longue banquette, lui debout derri?re moi, nous avons contempl?. Kerjean jouissait de mon ravissement.
Quand mon grand ami regarde une chose belle, il a des yeux bleus qui s'?clairent et dont la douceur charm?e rit...
Au sortir de l'h?pital Saint-Jean, j'ai voulu me promener ? pied. Nous avons ouvert nos parapluies...
Dans une vieille rue paisible et d?labr?e, avec ses petites maisons jaunes, toutes pareilles, ses murs bas, ses ?troits pignons... une angoisse ind?finissable m'oppressa. J'ai pris le bras de Kerjean.
-- Guillaume, ai-je murmur? , Guillaume, Bruges m'ennuie... Voulez-vous que nous retournions ? Paris?
Dans le train
Quelques notes griffonn?es pour clore ce journal.
Promenade matinale. Nous suivons des rues aux noms ?vocateurs. Nous p?n?trons dans la rue Cour-de-Gand ? la recherche de vieilles maisons int?ressantes. Et voil? que, soudain, nous nous trouvons devant celle qui porte -- ind?ment, para?t-il -- le nom de "Maison de Memling".
-- Oh! ai-je dit, quelle belle vieille chose! J'aurais regrett? de ne pas voir cette maison...
Mais cette r?plique est arriv?e sur moi, vite, comme si elle s'?chappait:
-- Elle est historique... Fabrice de mauve y a fait des achats...
-- Comment le savez-vous?
-- Vous me l'avez dit vous-m?me, ? Vichy, en me racontant que de Mauve vous avait beaucoup parl? de Bruges... et que votre r?ve ?tait d'y aller un jour... -- Vous avez bonne m?moire... ai-je murmur?.
C'?tait m?chant de m'avoir parl? de Fabrice de Mauve!... Kerjean l'a compris. Il s'est approch? de moi doucement et a pass? son bras sous le mien.
...Je n'aime plus Bruges... Oh! Fabrice, pourquoi me l'aviez-vous fait aimer?
Le train court dans la nuit. Depuis qu'install?s en t?te ? t?te dans un wagon o? la complaisance r?mun?r?e du chef de train nous d?fend des intrus, nous roulons vers Paris, je retrouve mon grand ami Kerjean. Il a son bon visage souriant... du temps o? il n'?tait pas encore Guillaume.
Adieu! Bruges... sans regrets!
Paris, 31 d?cembre.
Dans la chambre bretonne qui, avant d'?tre la mienne, fut celle d'une autre Mme Kerjean, je me suis assise ? ma table devant le petit cahier d?laiss? depuis Bruges... Et j'?cris...
Depuis quinze jours, je suis de retour ? Paris, et la ch?re vieille maison de la rue Boursault est ma demeure... J'y suis ? l'abri du monde qui s'agite, sous la protection tendre et forte de Guillaume Kerjean, mon ami, mon fr?re... aussi heureuse, je pense, que peut l'?tre une femme qui a renonc? au bonheur.
Le surlendemain de notre arriv?e, Guillaume m'a d?clar? que nous devions avoir une conversation d'affaires... J'ai ouvert de grand yeux.
-- Petite Phyl, a repris mon ami, vous voici ma?tresse de maison... ministre des finances...
Il parlait doucement, gentiment, gardant entre ses doigts, par distraction, quatre ou cinq billets de banque qu'il venait de prendre au fond d'un tiroir...
En v?rit?, je me sens impuissante ? exprimer ce que j'ai ressenti.
Oui, j'avais oubli? qu'on ne mange pas, qu'on ne s'habille pas sans argent! Je n'avais pas pens?, moi qui souhaitais de lui ?tre douce, d'apporter de la joie, de la gaiet? dans sa maison, je n'avais pas pens? que j'allais ?tre une charge tr?s lourde... Son argent, durement gagn?, je le lui prenais!
Ces petits billets bleus qui fr?missaient dans la longue main adroite et que, tout ? coup, je regardais avec respect...
La r?v?lation fut brusque, foudroyante... Et je me vis si coupable que, tout ? coup, sans un mot, tandis que Guillaume continuait une phrase que je n'entendais plus, je fondis en larmes...
Mon vieux Kerjean fut saisi. Il m'interrogea anxieusement. Je sanglotais toujours sans r?pondre.
Quand j'eus dit tant bien que mal mon souci, mon remords, Guillaume se mit ? rire.
-- Oh! Kerjean, m'?criai-je.
Il souriait:
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