Read Ebook: The Leader of the Lower School: A Tale of School Life by Brazil Angela Campbell John Illustrator
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Ebook has 1658 lines and 63795 words, and 34 pages
Aussit?t que sa femme fut partie, le patron se fit aider par la petite Duretour, pour d?barrasser les planches des bouts de chiffons et mettre de l'ordre un peu partout.
La petite Duretour n'?tait pas tr?s bonne ouvri?re malgr? ses dix-huit ans, mais Mme Dalignac la gardait ? cause de sa grande ga?t?. Elle prenait toujours les choses du bon c?t?, et son entrain nous emp?chait souvent de sentir la fatigue.
C'?tait elle qui faisait les courses et qui ouvrait la porte aux clientes. Sa taille ?tait si menue et ses cheveux si n?glig?s que beaucoup la prenaient pour une apprentie. Cela la vexait un peu et lui faisait dire:
--Lorsque je serai mari?e, elles me prendront encore pour une petite fille.
Son fianc? n'?tait gu?re plus ?g? qu'elle. Chaque soir il venait l'attendre ? la sortie et tous deux ne tenaient pas plus de place qu'un seul sur le trottoir.
Maintenant elle vidait les casiers et brossait les planches. De temps en temps, elle lan?ait un paquet en l'air et le rattrapait comme une balle, ou bien elle s'amusait ? d?former les noms des clientes en faisant des r?v?rences aux mannequins. C'?taient surtout Mmes Belauzaud et Pellofy qui recevaient ses compliments. Elle s'inclinait tr?s bas en prenant un air ravi:
--Bonjour, Madame Bel-oiseau.
--Bonjour, Madame Pelle ? feu.
Les rires s'?chappaient tous ensemble par la fen?tre, et les ma?ons d'en face levaient la t?te pour voir d'o? ils sortaient.
J'?tais la derni?re venue dans la maison.
J'y ?tais entr?e peu de temps avant la morte-saison d'?t?, et quoique toutes se fussent montr?es bonnes camarades pour moi, une timidit? m'emp?chait de prendre part ? leur ga?t?. Cependant, depuis que j'?tais ? Paris, c'?tait le premier atelier o? je me sentais ? l'aise. La voix querelleuse du patron ne m'effrayait gu?re, et la douceur de sa femme me donnait une grande tranquillit?.
A mon arriv?e, le patron avait tout de suite coup? mon nom en deux. Ses joues s'?taient gonfl?es pour accentuer la moquerie pendant qu'il disait:
--Marie-Claire? Deux noms ? la fois? Eh b?... vous ?tes ?patante, vous.
Et en rejetant son souffle comme s'il ?loignait de lui une chose trop compliqu?e, il avait ajout? d'un ton s?rieux:
--On vous appellera Marie. Cela sera bien suffisant.
Mais cela ne fut pas suffisant. Je r?pondis si mal ? ce nom qu'il fallut bien rendre au mien sa premi?re forme.
Mme Dalignac revint plus t?t qu'on ne s'y attendait. Elle rapportait un ?norme carton dont le couvercle se soulevait malgr? les ficelles qui le retenaient.
Le patron s'empressa de l'ouvrir. Il toucha les tissus avec une petite grimace de contentement.
--De la soie, rien que de la soie, disait-il. Sa femme l'?loigna:
--Laisse... tu vas tout embrouiller.
Puis en s'adressant ? nous:
--C'est pour un mariage.
Elle s'assura que le carton reposait tout entier sur la table et elle sortit une ? une, les pi?ces d'?toffes, en d?signant leur emploi.
--Une robe noire pour la m?re de la mari?e... Deux robes bleues pour les grandes soeurs... Des robes roses pour les petites soeurs... Et des dentelles noires, et des dentelles blanches, et des pi?ces de ruban, et des taffetas pour doublures, et des satins pour jupon...
Elle sortit avec pr?caution le dernier tissu soigneusement pli? dans du papier:
--Et voil? du cr?pe de chine pour la robe de la mari?e.
Et sans prendre le temps d'enlever son manteau, elle attira un mannequin et prit les ?toffes ? pleines mains pour les draper autour du buste. Elle d?pliait les dentelles et les disposait, elle tournait les rubans en coque sur ses doigts et les piquait d'une ?pingle. Puis elle rejeta le tout sur la table et ce ne fut bient?t plus qu'un fouillis de toute couleur.
Mes quatre compagnes avaient cess? de coudre et regardaient avec int?r?t. Leurs yeux allaient d'une couleur ? l'autre et leurs mains s'avan?aient pour toucher les dentelles et les tissus soyeux.
Tout ? coup la pendule se mit ? sonner.
Bouledogue se leva en disant d'un ton bourru:
--Il est midi.
C'?tait vrai, mais la matin?e avait pass? si vite que personne ne se doutait qu'il ?tait l'heure d'aller d?jeuner.
Les autres d?pos?rent leur ouvrage et se lev?rent lentement comme ? regret.
L'apr?s midi fut pleine d'entrain. Duretour, mont?e sur un tabouret, garnissait les planches d'un papier gris que le patron lui passait, apr?s en avoir coup? les bandes de la grandeur n?cessaire.
Quand le patron ne donnait pas les papiers assez vite, Duretour en profitait pour tourner et danser sur son tabouret; puis elle ouvrait et refermait les bras en criant comme une marchande ? la foire:
--Robes et manteaux, robes et manteaux.
Cela nous faisait rire et le patron disait d'un air indulgent:
--S'il n'y avait que vous pour les faire, ma pauvre Duretour.
Les ma?ons d'en face sifflaient comme des oiseaux libres. Ils avaient fini par d?couvrir l'atelier et ils faisaient tout leur possible pour attirer notre attention. L'un d'eux appelait tous les noms de jeunes filles qui lui venaient ? l'id?e, pendant qu'un autre frappait une charpente en fer avec un lourd marteau. Et chaque fois qu'un rire ?clatait ou que l'une de nous se montrait un peu ? la fen?tre, les appels redoublaient, et la charpente sonnait comme une cloche.
Vers le soir, la soeur du patron entra dans l'atelier. C'?tait une femme ? l'air hardi. Elle ?tait couturi?re aussi et on l'appelait Mme Doubl?.
Elle s'assit sur le tabouret du patron et elle dit d'un ton m?prisant:
--Tout le monde travaille d?j??
Son fr?re r?pondit, l'air vex?:
--Je suis s?r que tu n'as pas fini de te reposer, toi!
Elle fit le geste de lancer quelque chose par-dessus son ?paule:
--Oh! moi, je fais comme les clientes, je vais aux bains de mer, et je suis rentr?e seulement ce matin.
Le patron lui montra les tissus:
--Nous avons de l'ouvrage, dit-il.
Mme Doubl? devint attentive, et ses sourcils se rapproch?rent.
Elle avait des yeux noirs comme ceux de son fr?re, mais son regard ?tait plein d'audace et de fermet?. Sa bouche aussi faisait penser ? celle du patron, mais ses l?vres semblaient faites d'une mati?re dure qui les emp?chait de se distendre pour le sourire. Elle marchait sans gr?ce, en bombant la poitrine et on e?t dit qu'elle portait sur toute sa personne quelque chose de satisfait.
A son entr?e le visage de Mme Dalignac avait chang? d'expression. Tout en coupant ses taffetas, elle mordillait sa l?vre comme les gens qui ont une pr?occupation, et on entendait davantage le bruit sec et grin?ant de ses ciseaux.
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