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Read Ebook: Le Tour du Monde; Croquis Hollandais Journal des voyages et des voyageurs; 2e Sem. 1905 by Various Charton Douard Editor

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Ebook has 899 lines and 41523 words, and 18 pages

Je poussai le long du grand canal. Les ?cluses, ouvertes ? tout instant, laissaient passer des chalands lents, qui hissaient leurs voiles en ciseaux et s'?loignaient, encadr?s de vert, devant l'?cran du ciel instable. De gros nuages s'enfuyaient toujours. Des chariots, pr?s de l?, d?versaient des monceaux de betteraves. Un vieil homme gardait des moutons sur la pente des remblais. Du silence toujours,... puis la nuit.

Je poss?de trois bateaux, et je fais campagne entre Goes et les villes des ?les, jusqu'? Rotterdam. Je passe tous les deux ou trois jours ? Wemeldingen, et cela sera tr?s commode, car je trouverai pour m'attendre, une jolie m?nag?re. La noce doit se c?l?brer dans un mois; on fera une bombance s?rieuse; nous aurons des violons, des rubans, du geni?vre, du boeuf et de la bi?re noire.

Reneetje tricote toujours. En Hollande, on ne tricote pas comme en France, du bout des doigts. Les travailleuses ont ? la ceinture un ?tui en bois cisel?; elles y adaptent une aiguille, et la laine se transforme en mailles avec une rapidit? d?concertante, accompagn?e d'un ronflement continu.... Reneetje tricote. J'esquisse son portrait. Elle s'arr?te par moment, pour reposer ses phalanges, et regarde candidement, sans hardiesse ni timidit?, le Monsieur fran?ais dont la barbe l'impressionne.

L'a?n?e, une belle blonde, survient, et me fait signe de la suivre. Elle me conduit ? une salle, et me montre la table o? s'alignent cinq plats de porcelaine ? couvercles, du lait, du th? et du beurre.

Je soul?ve en tremblant ces couvercles trompeurs, et je d?faille ? l'odeur parfum?e qu'exhalent les douceurs confectionn?es ? mon intention. Mais il faut ?tre brave, car, ? tout instant, la porte s'entrouvre, et l'un des cinq minois vient jeter un coup d'oeil sur mes op?rations. Je me sens environn? de regards.... S?rement qu'aux serrures, ? la fen?tre, ils luisent, pour me forcer ? avaler ces choses-l?. Je cherche ? me r?signer, mais je suffoque et je me contente de manger le bifteck, la bouillie et le pain, dont le go?t est rationnel.

La soir?e s'?coule pesamment. Un jeune instituteur, sachant des bribes de fran?ais, d'anglais et d'allemand, m'a entretenu de ses projets d'avenir, de sa libre pens?e et de sa famille. ? onze heures, les clients se l?vent et sortent. Seul, un petit vieux tout rond, dont j'avais remarqu? l'entrain au billard, demeure assis, ronflant sereinement.

L'aubergiste le secoue; peine perdue. On lui crie ? l'oreille; il ne bouge pas. On le met debout; il ouvre des paupi?res molles, et manque de s'?crouler. On le dirige vers la porte; mais il fait trois pas et s'?tale sur le plancher, comme frapp? de mort. Son cr?ne blanc, orn? de m?ches jaunes, heurte le parquet brutalement, et il demeure raide, retomb? dans le sommeil....

Le lendemain, apr?s une ample distribution de poign?es de main ? toute la maisonn?e, all?g? de quelques florins, je montais sur le premier vapeur de passage, et je voguais sur les canaux serpentins, entre des bordures de moulins, de p?turages et de digues, vers le Noord-Holland.

Ce vapeur, en v?rit?, avait un air familial ? ravir, et je sentis, en mettant le pied sur le roof, que j'allais pouvoir y dormir ? ma guise sans crainte d'interruption. Le capitaine, sentencieux et sec, m'invita, pour ?viter la brise fra?chissante, ? descendre ? la cabine. Sa femme, jeune blonde aux yeux bleus, ? qui des boucles fris?es, un petit tablier ros? donnaient une allure enfantine, y ?tait assise, caressant un chat minuscule. Elle se leva sur un signe de son mari, elle entra dans une exigu? cuisine dissimul?e derri?re un panneau, apporta des rafra?chissements, et, tandis que la fum?e des cigarettes mettait ? ses prunelles candides un bleu plus att?nu?, vaporeux comme l'?me de sa race, je me laissai aller mollement au va-et-vient du bateau.

Sur le soir, au moment o? les fanaux s'allumaient, des docks apparurent, ainsi que des ponts, des m?ts enchev?tr?s; des carillons sonn?rent; glissant comme une libellule au pied de choses g?antes, le petit vapeur salua Rotterdam de sa sir?ne indolente....

Lud. Georges HAM?N.

Droits de traduction et de reproduction r?serv?s.

CROQUIS HOLLANDAIS

Par M. LUD. GEORGES HAM?N.

Quand on veut voir des p?cheurs, ce n'est point en Z?lande, malgr? le mouvement de Vlissingen, qu'il faut s'attarder. Prendre le bateau, faire escale ? Kortgene, ? Stavenisse, ? Zierikzee, passer Rotterdam, la Haye, Harlem, Amsterdam, et s'en aller tout doucement ? Volendam, sur les bords du Zuiderzee, c'est la bonne mani?re.

Volendam est situ? ? 16 kilom?tres d'Amsterdam, par la route. C'est un rendez-vous de peintres de tous pays, qui se sont empar?s de ce petit port, et en ont fait un de leurs fiefs de productions.

Costumes, gens et maisons s'accordent du reste pour flatter un oeil d'artiste, ?pris de pittoresque.

Les logis, construits ? la d?bandade, le long de la jet?e, contournent des lacs, des mers inf?rieures, des canaux, des mares, des ruisseaux, sur lesquels ils assoient leurs pilotis. Par l'eau grasse, appesantie de d?tritus, d'excr?ments, de d?chets vari?s, des canards bruyants, impudents et rapaces, plongent avec d?lices, voguent et s'?brouent, ? peine d?rang?s par les pirogues qui m?nent au bourg prochain les n?gociants locaux.

Au del?, l'horizon gris, plat, brumeux, s'orne de moulins aux croix agiles, et de rubans d'argent qui sont des affluents.

Aux jours de lessive, des linges et v?tements multicolores flottent partout, drapent les maisons, ornent les bordures de pieux, se gonflent avec des frissonnements de drapeaux.

Volendam n'est vraiment complet que par un ciel orageux, en un jour de lessive. Tout le monde est dehors. ? l'encontre des villes terriennes, o? l'on ne sort que par n?cessit?, on fl?ne ici avec bonheur, ? l'instar de tous les ports de p?che; on m?ne, entre deux embarquements, la bonne vie qui?te, ch?re aux rentiers solides; on s'assoit en rond; on sabote, les talons veules, ramen? par la cloche du magasin des cri?es sonnant le ralliement.

V?tu d'un pantalon d?mesur?, d'une veste, d'un foulard et d'une toque de fourrure, le p?cheur de Volendam a une allure personnelle qu'on ne saurait d?crire. Il tient du Russe, du Lapon et du Mongol, et se montre hollandais par les mille d?tails de ses attitudes, de ses gestes, de ses paroles.

En dehors des moments o? il croise dans le golfe, promenant ses filets sur les vagues peu m?chantes, ses occupations sont peu vari?es. Sa lenteur est une habitude. Il fl?ne, et c'est tout dire. Il n'a point, comme en d'autres contr?es, de menus soucis de jardinage, de r?colte ou d'industrie, et la femme suff?t aux soins m?nagers.

Il fl?ne donc, tout en pr?parant sans h?te ses app?ts ou ses carrelets; il s'accroupit au soleil avec des amis, pour fumer b?atement, semblant peser de tout son poids massif sur ces jet?es de briques et ces quais de bois pos?s enti?rement sur la mer par des anc?tres disparus.

Il agit pourtant, mais avec calme, et go?te voluptueusement le repos des heures mortes.

Ce croquis le symbolise: <>.

Quelques marins cependant, en tr?s petit nombre, se montrent plus guillerets, se font envoyer des l?gumes et des denr?es de la ville prochaine, et prom?nent tranquillement des voitures ? bras, charg?es de ces choses, pour approvisionner les m?nag?res....

Les enfants r?dent par bandes, ? grand bruit de sabots sonores, mais sans cris, comme en Z?lande. Les petites filles sont coiff?es du casque en dentelle, ? forme de <> renvers?e; les petits gar?ons, de m?me que leurs p?res, ont la large culotte, la veste ?triqu?e et le bonnet de loutre.

Ici, c'est le r?gal des yeux. Quand ils s'enfilent par bandes sur les planches des jet?es, ou trottent gaillardement, leurs figures rondes ?panouies de contentement, on se trouve, ma foi! fort int?ress?, et l'on ressent un d?sir aigu de les emporter avec soi, les marmots de Volendam, pour les montrer au pays, ainsi que bibelots rares.

Il y a des couples ravissants, tout pareils aux personnages de vieux tableaux, qui am?nent le sourire, tant ils respirent la bonne humeur, la sant? et le calme.

Les femmes s'agitent beaucoup, ? Volendam, comparativement aux autres lieux. Elles sont moins claquemur?es en leurs logis, et se livrent davantage aux mouvements ext?rieurs. Les unes lavent leur linge domestique dans l'eau marine, au bord des bateaux rang?s par hordes; d'autres les tendent sur les poteaux disponibles, cependant que le vent souffle.

? l'encontre de nos femmes de p?cheurs qui baguenaudent durant des heures, le tricot aux doigts, celles-ci cependant ne sortent que par besoin. O? iraient-elles baguenauder?... De tous les c?t?s, il n'y a que de l'eau, des mares et des ruisseaux. ? part la jet?e, les deux routes de Edam et Monnekendam, tout n'est que lagune, cloaque ou mar?cage.

Les canards, parqu?s par milliers en des enclos de bois, assourdissent de leurs cris saccad?s, et la vie locale se concentre sur le m?le, o? les hommes d?ambulent autour du b?timent des cri?es.

Selon la nature des poissons qui fr?quentent les parages de chaque port, la p?che se divise en plusieurs branches. Le hareng, toutefois, par son abondance et par son renom pass?, semble bien ?tre, avec la tourbe et la tulipe, un produit national.

Cette derni?re cat?gorie est la plus int?ressante, car elle est la grande ressource des p?cheurs de Volendam, des autres ports du littoral, des habitants des ?les d'Urk et de Marken.

? Hoorn, en 1416, enfin, se fabriqua le premier grand filet, dont l'utilit? s'ajouta ? celle des salaisons pour d?velopper ? l'infini le rendement des flots.

Ces filets, v?ritables ?perviers marins, font songer malgr? soi aux milliards de poissons d?vor?s depuis cinq si?cles par les nations voisines, et l'on comprend comment la Hollande, malgr? la pauvret? de son sol, a pu devenir un pays riche, solide et serein.

Le hareng n?erlandais d?fia ainsi pendant longtemps les concurrences ?trang?res, et fit plus pour la grandeur du pays que les meilleurs canons.

Immobilis?s dans leur opulence, ceux-ci n'eurent point l'esprit de suivre le mouvement, et virent peu ? peu s'?teindre leurs d?bouch?s. Les affaires baiss?rent m?me si bien, que le Gouvernement dut ? son tour abolir les primes.

Aujourd'hui la p?che au hareng n'a plus d'importance nationale, et si elle est encore pour le p?cheur une source honn?te de revenus, elle ne fait plus le sujet des pr?occupations g?n?rales.

Le vrai p?cheur de hareng passe ? terre le moins de temps possible. La mer pour lui est tout, sa fianc?e, son ?pouse, son berceau. Muni de sa bible et de sa pipe, il irait au bout du monde, et d?couvrirait des terres nouvelles, s'il en existait encore de nouvelles. On parle avec orgueil, ? Volendam, d'un patron, Hans Ouderke, ? qui on avait dit un jour dans une salle de billard: <>. Le brave homme ?quipa son dogger les jours suivants et y alla.... Une autre fois, il trouva la route de Californie, sans autre indication que sa boussole.

Quand le p?cheur ne rentre pas au logis, on le consid?re comme perdu, et sa femme peut, apr?s trois ann?es r?volues, convoler en nouvelles noces. Autrefois, la loi ordonnait un intervalle de dix ann?es; comme les moeurs en souffraient, on adoucit la convention.

Le fils du p?cheur devient p?cheur. D?s l'?ge de quinze ans, il conna?t ? fond le m?tier de tirer des bord?es, de hisser la voile et d'agiter le gouvernail.

Tr?s ind?pendant, tr?s religieux, tr?s attach? ? ses coutumes, il suit l'exemple de son p?re, qui lui-m?me imita le sien. En mer, il ne boit jamais; ? terre, il boit relativement peu, sauf aux jours de kermesse, qui sont de v?ritables orgies animales. En ces jours, les aubergistes enl?vent les meubles de leurs salles, et ne laissent qu'une table, des chaises et des brocs. Jour et nuit, vautr? en une torpeur inqui?tante, secou? de crises actives durant lesquelles il danse avec fr?n?sie, le marin s'absorbe un peu trop dans l'ivresse et le sommeil.

Il se marie jeune.

La p?che au poisson frais ne n?cessite que des excursions assez courtes. Aussit?t de retour, les matelots d?barquent leur butin et le vendent sur la gr?ve m?me, aux marchands de la r?gion, ou le portent ? la cri?e, s'il en existe une. Le poisson est ensuite dirig? sur les villes voisines dans des voitures attel?es de chiens robustes qui font leur service avec un entrain remarquable.

La p?che au poisson frais cesse ? la fin des beaux jours et fait place ? celle du hareng jusqu'en d?cembre.

Ensuite, c'est le ch?mage forc?; et, comme le p?cheur est rarement ais?, il s'ensuit des mis?res profondes que les Autorit?s sont oblig?es de secourir.

Le Zuiderzee, comme l'on sait, forme un v?ritable bassin de la mer du Nord. La masse de ses eaux occupe un espace de 54 lieues carr?es, et s'avance sur les provinces de la Frise, de la Gueldre, d'Utrecht et du Noord-Holland, qu'elles divis?rent jadis par de terribles coups de ressac, jetant sur toutes les c?tes la mort et la destruction.

Au large, les ?les d'Urk et de Marken forment les derniers vestiges des terrains engloutis.

Marken, la plus grande, est situ?e en face de la ville de Monnekendam. En une heure, avec un bon vent, une barque y conduit.

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