Read Ebook: L'Émigré by S Nac De Meilhan Gabriel
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Ebook has 593 lines and 70859 words, and 12 pages
Note de transcription: L'orthographe d'origine a ?t? conserv?e et n'a pas ?t? harmonis?e. Seuls quelques mots ont ?t? modifi?s. La liste des modifications se trouve ? la fin du texte.
L'auteur a utilis? les abr?viations suivantes:
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L'?MIGR?
PUBLI?
PAR
M. DE MEILHAN
TOME PREMIER.
A. BRUNSVICK
chez P. F. FAUCHE et COMPAGNIE.
AVERTISSEMENT
On ne doit pas perdre de vue que les lettres qui composent ce recueil ont ?t? ?crites en 1793. La plupart des tableaux et des sentimens qu'elles renferment sont relatifs ? cette ?poque affreuse et unique dans l'histoire. La sombre horreur qui r?gnait dans les esprits, semblait ne permettre alors aucune conjecture favorable. Un syst?me de mod?ration a succ?d? au plus barbare r?gime, et pour la seconde fois Rome a vu un g?n?ral, ma?tre de l'Italie, se contenter d'un tribut, lorsqu'il pouvait livrer sa capitale au pillage. Le sang e?t coul? dans Rome en 1793, le sanctuaire e?t ?t? profan? et les monuments les plus pr?cieux d?truits. Royaliste ou R?publicain, tout ami de l'humanit? doit applaudir ? un changement de syst?me qui ?pargne la vie des hommes, et les victimes errantes de la R?volution doivent peut-?tre en attendre l'adoucissement de leur sort.
L'?MIGR?.
PR?FACE.
L'?MIGR?.
LETTRE PREMI?RE.
LA Cesse DE LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
Enfin vous voil?, ma ch?re Emilie, d?barrass?e des Fran?ais. Que je vous ai plaint pendant que vous ?tiez sous leur domination, et combien j'ai craint pendant le si?ge pour ma tendre amie, pour tout ce qui l'int?resse. Que de fois je me suis r?veill?e la nuit en sursaut, les yeux remplis de larmes! Enfin je respire, Emilie est hors de tout danger, et se porte bien; elle est ? pr?sent au milieu des f?tes, et le bruit du canon est remplac? par le son des instrumens. On dit que le roi de Prusse a ?t? re?u comme un dieu descendu du ciel pour le bonheur des humains. C'est votre lib?rateur, et je d?fie aucun de ses sujets d'avoir autant que moi d'attachement pour sa personne. J'ai pens? dire d'amour, car on emploie ce terme pour les rois comme pour Dieu; mais le roi de Prusse, d'apr?s ce qu'on en dit, serait homme ? prendre une femme au mot. Je ne pourrai pas d'ici ? quelques jours aller embrasser mon Emilie, mon oncle doit revenir ce soir, et son retour est d?termin? par une circonstance singuli?re, dont je vous ferai part demain. Adieu mon aimable Emilie. Le fr?re de Jenny, qui part pour Mayence, ne me donne pas un quart d'heure de plus, pour vous faire un r?cit int?ressant, et me livrer ? tous les transports de ma joie. Je vous embrasse mille fois du plus profond de mon coeur que vous remplissez enti?rement.
LA Cesse DE LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
Melle EMILIE
LA Cesse DE LOEWENSTEIN.
Je crois que le Marquis, que vous avez ramass?, doit se trouver, dans son d?sastre, bien heureux d'?tre ainsi soign?, dans un bon ch?teau, par de belles et illustres princesses. Ce d?but m'int?resse; dites-moi ses avantures, que son ?cuyer vous aura sans doute racont?es en partie. Je suis bien aise qu'il ait de la naissance, cela lui vaudra l'int?r?t de votre cher oncle, et les pauvres Emigr?s ont besoin de tout le monde. Il y a quelque temps que nous lisions qu'un roi d'Espagne ayant perdu ses cheveux, il f?t question de lui faire une perruque, et que le conseil, compos? de Grands, s'assembla pour d?lib?rer sur ce sujet; il f?t d?cid? unanimement dans cette auguste assembl?e qu'il fallait faire grande attention ? ce qu'il ne f?t employ? que des cheveux d'hommes et de femmes de qualit?. Nous nous regardames tous en riant, et il n'y e?t pas un de nous qui ne songe?t en cet instant ? votre bon oncle. Pardonnez-moi cette plaisanterie, ma ch?re Victorine, je rends d'ailleurs toute justice ? ses excellentes qualit?s. Adieu, adieu, ?crivez-moi et faites mieux, venez. Je vous embrasse mille fois.
LA Cesse LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
Je suis bien contrari?e, ma ch?re amie, en voyant retarder l'heureux moment o? je pourrai vous embrasser, et je suis forc?e de para?tre gaie, car mon oncle accoutum? ? ?tre ob?i dans sa maison, craint de ses vassaux, veut ?tendre son empire sur les esprits et les visages; il faut rire, avoir l'air content quand on est aupr?s de lui. Ma m?re, que son tendre int?r?t pour moi rend attentive ? tous ses mouvemens, me fait souvent signe de relever la conversation languissante, de l'amuser, de chanter. Ce serait une g?ne insupportable, si la bont? qui le caract?rise et la g?n?rosit? de son ame n'inspiraient le d?sir de lui plaire, et de contribuer au bonheur d'un homme qui passe sa vie ? faire des heureux. Il est fort occup? de notre h?ros bless?; mais il faut que je l'appelle par son nom puisque nous le savons. Mon oncle lui a fait des questions sur sa naissance, son grade et ses parens, qui nous ont mis ? port?e d'?tre instruits de tout de qui le concerne. Il a eu soin aussi de faire parler son valet de chambre, qui a confirm? tout ce que son ma?tre avait dit; il parle avec un enthousiasme touchant de sa bont?, de sa g?n?rosit?. C'est une tr?s-bonne marque d'?tre aim? et estim? de ses domestiques; car enfin ils nous voient de plus pr?s que les autres, et dans ce temps o? les Fran?ais croient que tous les hommes sont ?gaux, ce n'est pas peu pour un valet de cette nation de parler de son ma?tre avec respect; il faut qu'il y soit en quelque sorte forc? par ses grandes qualit?s. Le marquis de St. ALBAN souffre toujours beaucoup; il garde sa chambre et nous allons tous les soirs passer deux heures avec lui pour le distraire. Mon oncle se pla?t ? l'entendre; il dit qu'il n'a jamais vu un Fran?ais si modeste, et je ne puis m'emp?cher d'?tre de son avis, sans conna?tre autant que lui les Fran?ais, parce qu'il ne me para?t pas possible d'avoir des mani?res plus simples, de parler de soi avec plus de r?serve, et des autres avec plus d'indulgence. Il y a deux jours que souffrant moins, il fit l'effort de venir prendre du th? dans le sallon; il y avait beaucoup d'Etrangers qui ?taient venus d?ner chez ma m?re, et tous en furent infiniment satisfaits. La baronne de Blenem, dont vous connaissez le discernement, dit ? ma m?re en s'en allant, votre Emigr? me para?t fort aimable; c'est un homme qui ne para?t jamais avoir envie de faire un effet, et qui a le don de fixer l'attention de tous ceux qui se trouvent avec lui. Mon oncle qui l'entendit, lui dit, bravo, madame la Baronne, et cela me rappelle ce que dit un ancien, , en parlant je crois de CATON, plus il cherchait ? se d?rober ? sa gloire, et plus elle s'attachait ? lui. Adieu, ma ch?re Emilie, je crains bien que mon voyage ne soit encore retard?.
Melle EMILIE
LA Cesse DE LOEWENSTEIN.
LA Cesse DE LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
LA Cesse DE LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
Lorsque j'ai ?crit hier une si longue lettre ? mon Emilie, je ne croyais pas l'embrasser sit?t; mais le soir, il a pris tout d'un coup ? mon oncle un acc?s de tendresse pour vous: je parlais de votre sant?; il m'en demanda, avec beaucoup d'int?r?t, des d?tails, parut craindre pour votre personne, et apr?s un ?loge fait avec brusquerie et sinc?rit?: mais pourquoi, ma ni?ce, ne pas aller la voir?--Quand vous ?tes ici!...--Oh! cela est bon quand je fais un petit voyage de deux jours; mais il ne faut pas se g?ner lorsque je reste ici quelque temps, et ce brave homme qui est malade m'int?resse, je ne puis le quitter; il ne faut pas tarder plus long-temps ? aller voir votre aimable Emilie; nous avons trembl? pour elle pendant le si?ge, et si je ne vous en ai pas parl? souvent, c'est que je craignais de faire conna?tre mes inqui?tudes; ne tardez pas davantage, demain, ma ni?ce, c'est moi qui vous en prie; dites-lui combien nous l'aimons tous, et combien nous aurons de plaisir ? la revoir. A de si douces paroles, j'ai embrass? mon oncle bien tendrement; je l'ai assur? que je reviendrais apr?s-demain au soir pour faire le th?, et que j'aurais soin de rassembler toutes les nouvelles. Le frere de JENNY qui part ? l'instant pour Mayence vous rendra cette lettre. Adieu, ma ch?re Emilie, le plaisir m'emp?chera de dormir cette nuit, il est bien juste qu'il domine ? son tour; le chagrin et la crainte n'ont r?gn? que trop long-temps.
Melle EMILIE
LA Cesse DE LOEWENSTEIN.
Je suis plus affect?e que vous de la diminution de fortune de votre mari, non que je croie que la fortune soit n?cessaire pour ?tre heureux; mais le passage d'une aisance consid?rable ? une situation ?troite et g?n?e, dispose souvent ? l'aigreur, et n?cessite une attention soutenue sur les plus petits d?tails domestiques. Un mari attribue quelquefois au d?faut d'?conomie de sa femme l'insuffisance de ses moyens; enfin il me semble que, dans un m?nage o? le contentement ne vient pas uniquement de l'?troite union des ames, l'abondance ?loigne une foule de sujets d'humeur et rel?che les noeuds trop ?troits de la d?pendance d'une femme; la m?diocrit? de la fortune, au contraire, les ress?re, multiplie les rapports journaliers entre deux ?poux, et il est presque n?cessaire, si vous y prenez garde, que l'un des deux devienne absolument le ma?tre pour ?viter les discussions et les querelles. Dans les d?penses d'une maison, il faut faire la part ? la vanit?, et elle est en raison de ce qu'on est moins heureux par le sentiment. On n'a peut-?tre jamais mis l'?conomie au nombre des avantages que procure la sensibilit?, rien n'est cependant plus vrai; plus on est capable d'aimer, plus le coeur est rempli d'un sentiment profond, et plus il est facile de se suffire ? soi-m?me; ce sont les coeurs vides qui ont besoin de distractions ?trang?res; ce sont ceux que la vanit? remplit, et le cercle de leurs besoins est un horizon sans bornes. Monsieur de G. et moi n'avons jamais song? ? la fortune. Quel moyen pourrait-elle nous procurer pour trouver un temps aussi court, que celui d'?tre ensemble?... Que nous fait qu'on loue nos meubles, nos vins, nos chevaux, quand tout occup?s de nous, ? peine nous y faisons attention. Cet ?tat de m?diocrit? o? nous serons nous rapprochera sans cesse; nous n'aurons qu'un carosse! que sert d'en avoir quatre ? ceux qui veulent ?tre dans le m?me? Adieu, ma ch?re Victorine.
LE MiS DE ST. ALBAN
Pdt DE LONGUEIL.
LA Cesse DE LOEWENSTEIN
Melle EMILIE DE WERGENTHEIM.
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