Read Ebook: Elémens de la philosophie de Neuton: Mis à la portée de tout le monde by Voltaire
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Ebook has 549 lines and 66579 words, and 11 pages
Enfin, la rapidit? avec laquelle le Soleil darde ses rayons est en proportion avec sa grosseur, qui surpasse environ un million de fois celle de la Terre, & avec la v?tesse dont ce Corps de feu immense roule sur lui-m?me en vingt-cinq jours & demi.
La force, l'illumination, l'intensit?, la densit? de toute lumiere, est calcul?e. Il se trouve par un calcul singulier que cette force est pr?cis?ment en m?me raison, que la force avec laquelle les corps tombent, & avec laquelle Mr. Neuton fait voir que tous les Globes c?lestes s'attirent. Cette proportion est ce qu'on appelle la raison inverse du quarr? des distances. Il faut se familiariser avec cette expression. Elle signifie une chose simple & intelligible: c'est qu'un corps qui sera expos? ? quatre pieds d'un feu quelconque, sera seize fois moins ?clair? & moins ?chauff?, recevra seize fois moins de rayons que le corps qui sera ? un pied; seize est le quarr? de quatre. Or quatre est la distance o? est le corps moins ?clair?, donc la lumiere envoye ? ce corps distant de quatre pieds, non pas quatre fois moins de rayons, mais seize fois moins de rayons. Voil? ce qu'on appelle la raison inverse du quarr? des distances, ce qu'il faut bien entendre; car cette proportion sera un des fondemens de la Nouvelle Philosophie que nous t?chons de rendre familiere.
Nous pouvons en passant conclure de la c?l?rit? avec laquelle la substance du Soleil s'?chappe ainsi vers nous en ligne droite, combien le plein de Descartes est chim?rique. Car 1?. comment une ligne droite pourroit-elle parvenir ? nous, ? travers tant de millions de couches de matiere mues en ligne courbe, & ? travers tant de mouvemens divers? 2?. Comment un corps si d?li? pourroit-il en sept ou huit minutes parcourir l'espace de trente millions de nos lieues, qui est entre le Soleil & nous, s'il avoit ? p?n?trer dans cet espace une mati?re r?sistante? Il faudroit que chaque rayon d?range?t en un moment trente millions de lieues de mati?re subtile. Remarquez encore que cette pr?tendue mati?re subtile r?sisteroit dans le plein absolu, autant que la mati?re la plus compacte. Car une livre de poudre d'or, press?e dans une bo?te, r?siste autant qu'un morceau d'or pesant une livre. Ainsi un rayon du Soleil auroit bien plus d'effort ? faire, que s'il avoit ? percer un cone d'or, dont l'axe seroit trente millions de lieues.
Il y a plus. L'exp?rience, ce vrai Ma?tre de Philosophie, nous apprend que la lumiere en venant d'un El?ment dans un autre El?ment, d'un milieu dans un autre milieu, n'y passe pas toute entiere, comme nous le dirons: une grande partie est r?flechie, l'air en fait rejaillir plus qu'il n'en transmet; ainsi il seroit impossible qu'il nous vint aucune lumiere des Etoiles, elle seroit toute absorb?e, toute r?percut?e, avant qu'un seul rayon p?t seulement venir ? moiti? de notre atmosph?re. Mais dans les Chapitres, o? nous expliquerons les principes de la gravitation, nous verrons une foule d'arguments, qui prouvent que ce plein pr?tendu ?toit un Roman.
Arr?tons-nous ici un moment pour voir combien la V?rit? s'?tablit lentement chez les hommes.
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Cette opinion est pourtant d?montr?e de plus d'une fa?on: & loin de ressentir la vieille Philosophie, elle y est directement contraire; car quoi de plus contraire ? des mots vuides de sens, que des mesures, des calculs, & des exp?riences?
AYANT su ce que c'est que la lumiere, d'o? elle nous vient, comment & en quel tems elle arrive ? nous; voyons ses propriet?s, & ses effets ignor?s jusqu'? nos jours. Le premier de ses effets est qu'elle semble rejaillir de la surface solide de tous les objets, pour en apporter dans nos yeux les images.
Tous les hommes, tous les Philosophes, & les Descartes & les Mallebranches, & ceux qui se sont ?loignez le plus des pens?es vulgaires, ont ?galement cru qu'en effet ce sont les surfaces solides des corps qui nous renvoyent les rayons. Plus une surface est unie & solide, plus elle fait, dit-on, rejaillir de lumiere; plus un corps a de pores larges & droits, plus il transmet de rayons ? travers sa substance. Ainsi le miroir poli dont le fond est couvert d'une surface de vif argent, nous renvoye tous les rayons; ainsi ce m?me miroir sans vif argent ayant des pores droits & larges & en grand nombre, laisse passer une grande partie des rayons. Plus un corps a de pores larges & droits, plus il est diaphane: tel est, disoit-on, le diamant, telle est l'eau elle-m?me; voil? les id?es g?n?ralement re?ues, & que personne ne r?voquoit en doute.
Cependant toutes ces id?es sont enti?rement fausses, tant ce qui est vraisemblable, est souvent ce qui est le plus ?loign? de la v?rit?. Les Philosophes se sont jettez en cela dans l'erreur, de la m?me maniere que le Vulgaire y est tout port?, quand il pense que le Soleil n'est pas plus grand qu'il le paro?t aux yeux. Voici en quoi consistoit cette erreur des Philosophes.
Il n'y a aucun corps dont nous puissions unir v?ritablement la surface. Cependant beaucoup de surfaces nous paraissent unies & d'un poli parfait. Pourquoi voyons nous uni & ?gal ce qui ne l'est pas? La superficie la plus ?gale, n'est par rapport aux petits corps qui composent la lumiere, qu'un amas de montagnes, de cavitez & d'intervales, de m?me que la pointe de l'?guille la plus fine est h?riss?e en effet d'?minences & d'asp?rit?s que le Microscope d?couvre.
Tous les faisceaux des rayons de lumiere qui tomberoient sur ces in?galit?s, se r?flechiroient selon qu'ils y seroient tombez; donc ?tant in?galement tombez ils ne se r?flechiroient jamais r?guli?rement, donc on ne pourroit jamais se voir dans une glace.
La lumiere qui nous apporte notre image de dessus un miroir, ne vient donc point certainement des parties solides de la superficie de ce miroir; elle ne vient point non plus des parties solides de mercure & d'?tain ?tendues derriere cette glace. Ces parties ne sont pas plus planes, pas plus unies, que la glace m?me. Les parties solides de l'?tain & du mercure sont incomparablement plus grandes, plus larges, que les parties solides constituantes de la lumiere; donc si les petites particules de lumiere tombent sur ces grosses parties de mercure, elle s'?parpilleront de tous c?t?s comme des grains de plomb tombant sur des platras. Quel pouvoir inconnu fait donc rejaillir vers nous la lumiere r?guli?rement? Il paro?t d?ja que ce ne sont pas les corps qui nous la renvoyent ainsi. Ce qui sembloit le plus connu le plus incontestable chez les hommes, devient un myst?re plus grand que ne l'?toit autrefois la pesanteur de l'air. Examinons ce Probl?me de la Nature, notre ?tonnement redoublera. On ne peut s'instruire ici qu'avec surprise.
Prenez un morceau, un cube de cristal, par exemple; voici tout ce qui arrive aux rayons du Soleil qui tombent sur ce corps solide & transparent.
Voici une observation plus singuliere & plus d?cisive: Exposez dans une chambre obscure ce cristal A. B. aux rayons du Soleil de fa?on, que les traits de lumiere parvenus ? sa superficie B. fassent un angle de plus de 40. degrez avec la perpendicule.
La pl?part de ces rayons alors ne p?n?tre plus dans l'air, ils rentrent tous dans ce cristal ? l'instant m?me qu'ils en sortent, ils reviennent, comme vous voyez, mais cette courbure est insensible.
Certainement ce n'est pas la surface solide de l'air qui les a repouss?s dans ce verre, plusieurs de ces rayons entroient dans l'air auparavant, quand ils tomboient moins obliquement; pourquoi donc ? une obliquit? de 40 degrez dix-neuf minutes, la pl?part de ces rayons n'y passe-t-elle plus? trouvent-ils ? ce degr? plus de r?sistance, plus de matiere dans cet air, qu'ils n'en trouvent dans ce cristal qu'ils avoient p?n?tr?? trouvent-ils plus de parties solides, dans l'air ? quarante degr?s & un tiers qu'? 40? l'air est ? peu pr?s deux mille quatre cens fois plus rare, moins pesant, moins solide, que le cristal, donc ces rayons devoient passer dans l'air avec deux mille quatre cens fois plus de facilit?, qu'ils n'ont p?n?tr? l'?paisseur du cristal. Cependant, malgr? cette prodigieuse apparence de facilit?, ils sont repoussez; ils le sont donc par une force qui est ici deux mille quatre cens fois plus puissante que l'air, ils ne sont donc point repoussez par l'air; les rayons encore une fois ne sont donc point r?flechis ? nos yeux par les parties solides de la matiere. La lumiere rejaillit si peu dessus les parties solides des corps, que c'est en effet du vuide qu'elle rejaillit.
Vous venez de voir que la lumiere tombant ? un angle de 40. degrez 19. minutes sur du cristal, rejaillit presque toute entiere de dessus l'air qu'elle rencontre ? la surface ult?rieure de ce cristal. Que la lumiere y tombe ? un angle moindre d'une seule minute, il en passe encore moins hors de cette surface dans l'air. Qu'on ?te l'air, il ne passera plus de rayons du tout. C'est une chose d?montr?e.
Or quand il y a de l'eau ? cette surface, beaucoup de rayons entrent dans cette eau au lieu de rejaillir. Quand il n'y a que de l'air, bien moins de rayons entrent dans cet air. Quand il n'y a plus d'air, aucun rayon ne passe; donc c'est du vuide en effet que la lumiere rejaillit.
Voil? donc des preuves indubitables que ce n'est point une superficie solide qui nous renvoye la lumiere: il y a bien d'autres preuves encore de cette nouvelle v?rit?; en voici une que nous expliquerons ? sa place. Tout corps opaque r?duit en lame mince, laisse passer ? travers sa substance des rayons d'une certaine esp?ce, & r?flechit les autres rayons: or, si la lumiere ?toit renvoy?e par les corps, tous les rayons qui tomberoient sur ces lames, seroient r?flechis sur ces lames. Enfin nous verrons que jamais si ?tonnant paradoxe n'a ?t? prouv? en plus de manieres. Commen?ons donc par nous familiariser avec ces V?rit?s.
Ce sera encore un nouveau sujet de surprise pour ceux qui n'ont pas ?tudi? cette Philosophie, d'entendre dire que le secret de rendre un corps opaque, est souvent d'?largir ses pores, & que le moyen de le rendre transparent est de les ?trecir. L'ordre de la Nature paraitra tout chang?: ce qui sembloit devoir faire l'opacit?, est pr?cis?ment ce qui op?rera la transparence; & ce qui paraissoit rendre les corps transparens, sera ce qui les rendra opaques. Cependant rien n'est si vrai, & l'exp?rience la plus grossi?re le d?montre.
Un papier sec, dont les pores sont tr?s-larges, est opaque, nul rayon de lumiere ne le traverse: ?trecissez ses pores en l'imbibant, ou d'eau ou d'huile, il devient transparent; la m?me chose arrive au linge, au sel, &c.
Il y a donc des principes ignor?s qui op?rent ces merveilles, des causes qui font rejaillir la lumiere, avant qu'elle ait touch? une surface, qui la renvoyent des pores du corps transparent, qui la ramenent du milieu m?me du vuide; nous sommes invinciblement oblig?s d'admettre ces faits, quelle qu'en puisse ?tre la cause.
Etudions donc les autres myst?res de la lumiere, & voyons si de ces effets surprenans, on remonte jusqu'? quelque Principe incontestable, qu'il faille admettre aussi-bien que ces effets m?me.
CHAPITRE TROIS.
LA SECONDE propriet? des rayons de la lumiere qu'il faut bien examiner, est celle de se d?tourner de leur chemin en passant du Soleil dans l'air, de l'air dans le verre, du verre dans l'eau, &c. C'est cette nouvelle direction dans ces diff?rens milieux, c'est ce brisement de la lumiere qu'on appelle r?fraction, c'est par cette propriet? qu'une rame plong?e dans l'eau parait courb?e au Matelot qui la manie; c'est ce qui fait que dans une jatte nous appercevrons, en y jettant de l'eau, l'objet que nous n'appercevions pas auparavant en nous tenant ? la m?me place.
Enfin c'est par le moyen de cette r?fraction que nos yeux jou?ssent de la v?e. Les secrets admirables de la r?fraction ?toient ignor?s de l'Antiquit?, qui cependant l'avoit sous les yeux, & dont on faisoit usage tous les jours, sans qu'il soit rest? un seul Ecrit, qui puisse faire croire qu'on en e?t devin? la raison. Ainsi encore aujourd'hui nous ignorons la cause des mouvemens m?me de notre corps, & des pens?es de notre ame; mais cette ignorance est diff?rente. Nous n'avons & nous n'aurons jamais d'Instrument assez fin pour voir les premiers ressorts de nous-m?mes; mais l'industrie humaine s'est faite de nouveaux yeux, qui nous ont fait appercevoir sur les effets de la lumiere, presque tout ce qu'il est permis aux hommes d'en savoir.
Il faut se faire ici une id?e nette d'une exp?rience tr?s-commune. Une pi?ce d'or est dans ce bassin: votre oeil est plac? au bord du bassin ? telle distance, que vous ne voyez point cette pi?ce:
Qu'on y verse de l'eau, vous ne l'apperceviez point d'abord o? elle ?toit: maintenant vous la voyez o? elle n'est pas; qu'est-il arriv??
L'objet A. r?flechit un rayon qui vient frapper contre le bord du bassin, & qui n'arrivera jamais ? votre oeil: il r?flechit aussi ce rayon A. B. qui passe par-dessus votre oeil: or ? pr?sent vous recevez ce rayon A. B. ce n'est point votre oeil qui a chang? de place, c'est donc le rayon A. B.; il s'est manifestement detourn? au bord de ce bassin en passant de l'eau dans l'air, ainsi il frappe votre oeil en C.
Mais vous voyez toujours les objets en ligne droite, donc vous voyez l'objet suivant la ligne droite C. D. donc vous voyez l'objet au point D. au-dessus du lieu o? il est en effet.
Si ce rayon se brise en un sens, quand il passe de l'eau dans l'air, il doit se briser en un sens contraire, quand il entre de l'air dans l'eau.
CHAPITRE QUATRE.
POur connaitre l'oeil de l'homme en physicien qui ne considere que la vision, il faut d'abord savoir que la premiere enveloppe blanche, le rempart & l'ornement de l'oeil, ne transmet aucun rayon. Plus ce blanc de l'oeil est fort & uni, plus il r?flechit de lumiere; & lorsque quelque passion vive porte au visage de nouveaux esprits, qui viennent encore tendre & ?branler cette tunique, alors des ?tincelles semblent en sortir.
Au milieu de cette membrane s'?leve un peu la corn?e, mince, dure & transparente, telle pr?cis?ment que le verre de votre montre que vous placeri?z en cette fa?on sur une boule.
Le rayon perpendiculaire A. le p?n?tre, sans se d?tourner; mais les rayons obliques B & C. se d?tournent dans l'?paisseur du Verre en s'approchant des perpendiculaires, qu'on tireroit sur les endroits o? ils tombent. Ensuite quand ils sortent du Verre pour passer dans l'air, ils se brisent encore en s'?loignant du perpendicule; ce nouveau brisement est pr?cis?ment ce qui les fait converger en D. foyer du Verre lenticulaire.
Une figure, o? chaque partie de l'oeil se voit sous son propre nom, expliquera mieux tout cet artifice, que ne pourroient faire des lignes, des A. & des B. La structure des yeux ainsi d?velopp?e, on peut connaitre ais?ment pourquoi on a si souvent besoin du secours d'un Verre, & quel est l'usage des Lunettes.
Or, tandis que cet oeil est trop rond, il lui faut un Verre qui emp?che les rayons de se r?unir si v?te. Ce Verre fera le contraire du premier, au lieu d'?tre convexe des deux c?t?s, il sera un peu concave des deux c?t?s, & les rayons divergeront dans celui-ci, au lieu qu'ils convergeroient dans l'autre. Ils viendront par cons?quent se r?unir plus loin, qu'ils ne faisoient auparavant dans l'oeil, & alors cet oeil jou?ra d'une v?e parfaite. On proportionne la conv?xit? & la concavit? des Verres aux d?fauts de nos yeux: c'est ce qui fait que les m?mes Lunettes qui rendent la v?e nette ? un Vieillard, ne seront d'aucun secours ? un autre; car il n'y a ni deux maladies, ni deux hommes, ni deux choses au monde ?gales.
L'Antiquit? ne connaissoit point ces Lunettes. Cependant elle connaissoit les Miroirs ardents; une v?rit? d?couverte n'est pas toujours une raison pour qu'on d?couvre les autres v?rit?z qui y tiennent. L'attraction de l'Aimant ?toit connue, & sa direction ?chapoit aux yeux. La d?monstration de la circulation du sang ?toit dans la saign?e m?me que pratiquoient tous les M?decins Grecs, & cependant personne ne se doutoit que le sang circul?t.
Vous venez de voir les effets que la r?fraction fait dans vos yeux, soit que les rayons arrivent sans secours interm?diaire, soit qu'ils ayent travers? des cristaux: vous concevez que sans cette r?fraction op?r?e dans nos yeux, & sans cette r?flexion des rayons de dessus les surfaces des corps vers nous, les organes de la v?e nous seroient inutiles. Les moyens que la Nature employe pour faire cette r?fraction, les loix qu'elle suit, sont des myst?res que nous allons d?veloper. Il faut auparavant achever ce que nous avons ? dire touchant la v?e, il faut satisfaire ? ces questions si naturelles: Pourquoi nous voyons les objets au-del? d'un Miroir, & non sur le Miroir m?me? Pourquoi un Miroir concave rend l'objet plus grand? Pourquoi le Miroir convexe rend l'objet plus petit? Pourquoi les Telescopes rapprochent & agrandissent les choses? Par quel artifice la Nature nous fait connaitre les grandeurs, les distances, les situations? Quelle est enfin la v?ritable raison, qui fait que nous voyons les objets tels qu'ils sont, quoique dans nos yeux ils se peignent renversez? Il n'y a rien l? qui ne m?rite la curiosit? de tout Etre pensant; mais nous ne nous ?tendrions pas sur ces sujets que tant d'illustres Ecrivains ont trait?s, & nous renverrions ? eux, si nous n'avions pas ? faire connaitre quelques v?rit?s assez nouvelles, & curieuses pour un petit nombre de Lecteurs.
CHAPITRE CINQ.
LES RAYONS qu'une Puissance, jusqu'? nos jours inconnue, fait rejaillir ? vos yeux de dessus la surface d'un Miroir, sans toucher ? cette surface, & des pores de ce Miroir, sans toucher aux parties solides; ces rayons, dis-je, retournent ? vos yeux dans le m?me sens qu'ils sont arriv?s ? ce Miroir. Si c'est votre visage que vous regardez, les rayons partis de votre visage parall?lement & en perpendiculaire sur le Miroir, y retournent de m?me qu'une balle qui rebondit perpendiculairement sur le plancher.
Si vous regardez dans ce Miroir M. un objet qui est ? c?t? de vous comme A. il arrive aux rayons partis de cet objet la m?me chose qu'? une balle, qui rebondiroit en B. o? est votre oeil. C'est ce qu'on appelle l'angle d'incidence ?gal ? l'angle de r?flexion.
La ligne A. C. est la ligne d'incidence, la ligne C. B. est la ligne de r?flexion. On sait assez, & le seul ?nonc? le d?montre, que ces lignes forment des angles ?gaux sur la surface de la glace; maintenant pourquoi ne vois-je l'objet ni en A. o? il est, ni dans C. dont viennent ? mes yeux les rayons, mais en D. derriere le Miroir m?me?
La G?om?trie vous dira: c'est que l'angle d'incidence est ?gal ? l'angle de r?flexion: c'est que votre oeil en B. rapporte l'objet en D.; c'est que les objets ne peuvent agir sur vous qu'en ligne droite, & que la ligne droite continu?e dans votre oeil B. jusques derriere le miroir en D. est aussi longue que la ligne A C. & la ligne C B. prises ensemble.
Les faisceaux de rayons qui partent de chaque point de l'objet A, commencent ? diverger d?s l'instant qu'ils partent de l'objet; ils arrivent sur la surface du Miroir: l? chacun de ces rayons tombe, s'?carte, & se r?flechit vers l'oeil. Cet oeil les rapporte aux points D. D. au bout des lignes droites, o? ces m?mes rayons se rencontreroient; mais en se rencontrant aux points D. D. ces rayons feroient la m?me chose qu'aux points A. A. ils commenceroient ? diverger; donc vous voyez l'objet A. A. aux points D. D.
Ces angles & ces lignes servent, sans doute, ? vous donner une intelligence de cet artifice de la Nature; mais il s'en faut beaucoup qu'elles puissent vous apprendre, la raison Physique efficiente, pourquoi votre ame rapporte sans h?siter l'objet au-del? du Miroir ? la m?me distance qu'il est au de??. Ces lignes vous repr?sentent ce qui arrive, mais elles ne vous apprennent point pourquoi cela arrive.
Si vous voulez savoir comment un Miroir convexe diminue les objets, & comment un Miroir concave les augmente, ces lignes d'incidence & de r?flexion vous en rendront la m?me raison.
On vous dit: Ce cone de rayons qui diverge du point A. & qui tombe sur ce Miroir convexe, y fait des angles d'incidence ?gaux aux angles de r?flexion, dont les lignes vont dans notre oeil. Or ces angles sont plus petits que s'ils ?toient tomb?s sur une surface plane, donc s'ils sont suppos?s passer en B. ils y convergeront bien plut?t, donc l'objet qui seroit en B. B. seroit plus petit.
Or votre oeil rapporte l'objet en B. B. aux points d'o? les rayons commenceroient ? diverger, donc l'objet doit vous paraitre plus petit, comme il l'est en effet dans cette figure. Par la m?me raison qu'il parait plus petit, il vous parait plus pr?s, puisqu'en effet les points o? aboutiroient les rayons B. B. sont plus pr?s du Miroir que ne le sont les rayons A. A.
Par la raison des contraires, vous devez voir les objets plus grands & plus ?loign?s dans un Miroir concave, en pla?ant l'objet assez pr?s du Miroir.
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