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Read Ebook: Don Juan ou le Festin de pierre by Moli Re

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Ebook has 1338 lines and 22985 words, and 27 pages

Je crois que vous jugez assez ce qui le peut inqui?ter.

- Don Juan -

Notre d?part, sans doute ?

- Sganarelle -

Le bonhomme en est tout mortifi?, et m'en demandait le sujet.

- Don Juan -

Et quelle r?ponse as-tu faite ?

- Sganarelle -

Que vous ne m'en aviez rien dit.

- Don Juan -

Mais encore, quelle est ta pens?e l?-dessus, que t'imagines-tu de cette affaire ?

- Sganarelle -

Moi ! Je crois, sans vous faire tort, que vous avez quelque nouvel amour en t?te.

- Don Juan -

Tu le crois ?

- Sganarelle -

Oui.

- Don Juan -

Ma foi, tu ne te trompes pas, et je dois t'avouer qu'un autre objet a chass? Elvire de ma pens?e.

- Sganarelle -

H? ! mon Dieu ! je sais mon don Juan sur le bout du doigt, et connais votre coeur pour le plus grand coureur du monde ; il se pla?t ? se promener de liens en liens, et n'aime gu?re ? demeurer en place.

- Don Juan -

Et ne trouves-tu pas, dis-moi, que j'ai raison d'en user de la sorte ?

- Sganarelle -

H? ! Monsieur...

- Don Juan -

Quoi ? Parle.

- Sganarelle -

Assur?ment que vous avez raison, si vous le voulez ; on ne peut pas aller l? contre. Mais si vous ne vouliez pas, ce serait peut-?tre une autre affaire.

- Don Juan -

Et bien, je te donne la libert? de parler, et de me dire tes sentiments.

- Sganarelle -

En ce cas, Monsieur, je vous dirai franchement que je n'approuve point votre m?thode, et que je trouve fort vilain d'aimer de tous c?t?s comme vous faites.

- Don Juan -

Quoi ! tu veux qu'on se lie ? demeurer au premier objet qui nous prend, qu'on renonce au monde pour lui, et qu'on n'ait plus d'yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se piquer d'un faux honneur d'?tre fid?le, de s'ensevelir pour toujours dans une passion, et d'?tre mort d?s sa jeunesse ? toutes les autres beaut?s qui nous peuvent frapper les yeux ! Non, non, la constance n'est bonne que pour des ridicules ; toutes les belles ont droit de nous charmer, et l'avantage d'?tre rencontr?e la premi?re ne doit point d?rober aux autres les justes pr?tentions qu'elles ont toutes sur nos coeurs. Pour moi, la beaut? me ravit partout o? je la trouve ; et je c?de facilement ? cette douce violence dont elle nous entra?ne. J'ai beau ?tre engag?, l'amour que j'ai pour une belle n'engage point mon ?me ? faire injustice aux autres ; je conserve des yeux pour voir le m?rite de toutes, et rends ? chacune les hommages et les tributs o? la nature nous oblige. Quoi qu'il en soit, je ne puis refuser mon coeur ? tout ce que je vois d'aimable ; et d?s qu'un beau visage me le demande, si j'en avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes, apr?s tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l'amour est dans le changement. On go?te une douceur extr?me ? r?duire, par cent hommages, le coeur d'une jeune beaut?, ? voir de jour en jour les petits progr?s qu'on y fait, ? combatre, par des transports, par des larmes et des soupirs, l'innocente pudeur d'une ?me qui a peine ? rendre les armes ; ? forcer pied ? pied toutes les petites r?sistances qu'elle nous oppose, ? vaincre les scrupules dont elle se fait un honneur, et la mener doucement o? nous avons envie de la faire venir. Mais lorsqu'on en est ma?tre une fois, il n'y a plus rien ? dire, ni rien ? souhaiter ; tout le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquillit? d'un tel amour, si quelque objet nouveau ne vient r?veiller nos d?sirs, et pr?senter ? notre coeur les charmes attrayants d'une conqu?te ? faire. Enfin, il n'est rien de si doux que de triompher de la r?sistance d'une belle personne ; et j'ai, sur ce sujet, l'ambition des conqu?rants, qui volent perp?tuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se r?soudre ? borner leurs souhaits. Il n'est rien qui puisse arr?ter l'imp?tuosit? de mes d?sirs ; je me sens un coeur ? aimer toute la terre ; et, comme Alexandre, je souhaiterais qu'il y e?t d'autres mondes, pour y pouvoir ?tendre mes conqu?tes amoureuses.

- Sganarelle -

Vertu de ma vie ! comme vous d?bitez ! Il semble que vous ayez appris cela par coeur, et vous parlez tout comme un livre.

- Don Juan -

Qu'as-tu ? dire l?-dessus ?

- Sganarelle -

Ma foi, j'ai ? dire... Je ne sais que dire ; car vous tournez les choses d'une mani?re, qu'il semble que vous avez raison ; et cependant il est vrai que vous ne l'avez pas. J'avais les plus belles pens?es du monde, et vos discours m'ont brouill? tout cela. Laissez faire ; une autre fois, je mettrai mes raisonnements par ?crit, pour disputer avec vous.

- Don Juan -

Tu feras bien.

- Sganarelle -

Mais, Monsieur, cela serait-il de la permission que vous m'avez donn?e, si je vous disais que je suis tant soit peu scandalis? de la vie que vous menez ?

- Don Juan -

Comment, quelle vie est-ce que je m?ne ?

- Sganarelle -

Fort bonne. Mais par exemple, de vous voir tous les mois vous marier comme vous faites !

- Don Juan -

Y a-t-il rien de plus agr?able ?

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