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Read Ebook: The War in Syria Volume 1 (of 2) by Napier Charles

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Ebook has 133 lines and 5080 words, and 3 pages

LETTRES PERSANES

PAR

MONTESQUIEU

AVEC

PR?FACE, NOTES ET VARIANTES,

INDEX

PHILOSOPHIQUE, HISTORIQUE, LITT?RAIRE,

PAR

ANDR? LEF?VRE

TOME II

PARIS

ALPHONSE LEMERRE, ?DITEUR

E. Picard.

IMP. EUG?NE HEUTTE ET Ce, A SAINT-GERMAIN.

A Venise.

A Paris r?gne la libert? et l'?galit?. La naissance, la vertu, le m?rite m?me de la guerre, quelque brillant qu'il soit, ne sauve pas un homme de la foule dans laquelle il est confondu. La jalousie des rangs y est inconnue. On dit que le premier de Paris est celui qui a les meilleurs chevaux ? son carrosse.

Un grand seigneur est un homme qui voit le roi, qui parle aux ministres, qui a des anc?tres, des dettes et des pensions. S'il peut avec cela cacher son oisivet? par un air empress?, ou par un feint attachement pour les plaisirs, il croit ?tre le plus heureux de tous les hommes.

En Perse, il n'y a de grands que ceux ? qui le monarque donne quelque part au gouvernement. Ici, il y a des gens qui sont grands par leur naissance; mais ils sont sans cr?dit. Les rois font comme ces ouvriers habiles qui, pour ex?cuter leurs ouvrages, se servent toujours des machines les plus simples.

La faveur est la grande divinit? des Fran?ois. Le ministre est le grand pr?tre, qui lui offre bien des victimes. Ceux qui l'entourent ne sont point habill?s de blanc: tant?t sacrificateurs, et tant?t sacrifi?s, ils se d?vouent eux-m?mes ? leur idole avec tout le peuple.

A Paris, le 9 de la lune de Gemmadi 2, 1715.

LETTRE XC.

USBEK A IBBEN.

A Smyrne.

Le d?sir de la gloire n'est point diff?rent de cet instinct que toutes les cr?atures ont pour leur conservation. Il semble que nous augmentons notre ?tre, lorsque nous pouvons le porter dans la m?moire des autres: c'est une nouvelle vie que nous acqu?rons, et qui nous devient aussi pr?cieuse que celle que nous avons re?ue du ciel.

Mais comme tous les hommes ne sont pas ?galement attach?s ? la vie, ils ne sont pas aussi ?galement sensibles ? la gloire. Cette noble passion est bien toujours grav?e dans leur coeur; mais l'imagination et l'?ducation la modifient de mille mani?res.

Cette diff?rence, qui se trouve d'homme ? homme, se fait encore plus sentir de peuple ? peuple.

On peut poser pour maxime que, dans chaque ?tat, le d?sir de la gloire cro?t avec la libert? des sujets, et diminue avec elle: la gloire n'est jamais compagne de la servitude.

Un homme de bon sens me disoit l'autre jour: On est en France, ? bien des ?gards, plus libre qu'en Perse; aussi y aime-t-on plus la gloire. Cette heureuse fantaisie fait faire ? un Fran?ois, avec plaisir et avec go?t, ce que votre sultan n'obtient de ses sujets qu'en leur mettant sans cesse devant les yeux les supplices et les r?compenses.

Aussi, parmi nous, le prince est-il jaloux de l'honneur du dernier de ses sujets. Il y a pour le maintenir des tribunaux respectables: c'est le tr?sor sacr? de la nation, et le seul dont le souverain n'est pas le ma?tre, parce qu'il ne peut l'?tre sans choquer ses int?r?ts. Ainsi, si un sujet se trouve bless? dans son honneur par son prince, soit par quelque pr?f?rence, soit par la moindre marque de m?pris, il quitte sur-le-champ sa cour, son emploi, son service, et se retire chez lui.

La diff?rence qu'il y a des troupes fran?oises aux v?tres, c'est que les unes, compos?es d'esclaves naturellement l?ches, ne surmontent la crainte de la mort que par celle du ch?timent; ce qui produit dans l'?me un nouveau genre de terreur qui la rend comme stupide: au lieu que les autres se pr?sentent aux coups avec d?lice, et bannissent la crainte par une satisfaction qui lui est sup?rieure.

Mais le sanctuaire de l'honneur, de la r?putation et de la vertu, semble ?tre ?tabli dans les r?publiques, et dans les pays o? l'on peut prononcer le mot de patrie. A Rome, ? Ath?nes, ? Lac?d?mone, l'honneur payoit seul les services les plus signal?s. Une couronne de ch?ne ou de laurier, une statue, un ?loge, ?toit une r?compense immense pour une bataille gagn?e ou une ville prise.

L?, un homme qui avoit fait une belle action se trouvoit suffisamment r?compens? par cette action m?me. Il ne pouvoit voir un de ses compatriotes qu'il ne ressentit le plaisir d'?tre son bienfaiteur; il comptoit le nombre de ses services par celui de ses concitoyens. Tout homme est capable de faire du bien ? un homme: mais c'est ressembler aux dieux que de contribuer au bonheur d'une soci?t? enti?re.

Mais cette noble ?mulation ne doit-elle point ?tre enti?rement ?teinte dans le coeur de vos Persans, chez qui les emplois et les dignit?s ne sont que des attributs de la fantaisie du souverain? La r?putation et la vertu y sont regard?es comme imaginaires, si elles ne sont accompagn?es de la faveur du prince, avec laquelle elles naissent et meurent de m?me. Un homme qui a pour lui l'estime publique n'est jamais s?r de ne pas ?tre d?shonor? demain: le voil? aujourd'hui g?n?ral d'arm?e; peut-?tre que le prince le va faire son cuisinier, et qu'il n'aura plus ? esp?rer d'autre ?loge que celui d'avoir fait un bon rago?t.

A Paris, le 15 de la lune de Gemmadi 2, 1715.

USBEK AU M?ME.

A Smyrne.

De cette passion g?n?rale que la nation fran?oise a pour la gloire, il s'est form? dans l'esprit des particuliers un certain je ne sais quoi qu'on appelle point d'honneur: c'est proprement le caract?re de chaque profession; mais il est plus marqu? chez les gens de guerre, et c'est le point d'honneur par excellence. Il me seroit bien difficile de te faire sentir ce que c'est; car nous n'en avons point pr?cis?ment d'id?e.

Autrefois les Fran?ois, surtout les nobles, ne suivoient gu?re d'autres lois que celles de ce point d'honneur: elles r?gloient toute la conduite de leur vie; et elles ?toient si s?v?res qu'on ne pouvoit, sans une peine plus cruelle que la mort, je ne dis pas les enfreindre, mais en ?luder la plus petite disposition.

Quand il s'agissoit de r?gler les diff?rends, elles ne prescrivoient gu?re qu'une mani?re de d?cision, qui ?toit le duel, qui tranchoit toutes les difficult?s; mais ce qu'il y avoit de mal, c'est que souvent le jugement se rendoit entre d'autres parties que celles qui y ?toient int?ress?es.

Pour peu qu'un homme f?t connu d'un autre, il falloit qu'il entr?t dans la dispute, et qu'il pay?t de sa personne, comme s'il avoit ?t? lui-m?me en col?re. Il se sentoit toujours honor? d'un tel choix et d'une pr?f?rence si flatteuse; et tel qui n'auroit pas voulu donner quatre pistoles ? un homme pour le sauver de la potence, lui et toute sa famille, ne faisoit aucune difficult? d'aller risquer pour lui mille fois sa vie.

Cette mani?re de d?cider ?toit assez mal imagin?e, car de ce qu'un homme ?toit plus adroit ou plus fort qu'un autre, il ne s'ensuivoit pas qu'il e?t de meilleures raisons.

Aussi les rois l'ont-ils d?fendue sous des peines tr?s-s?v?res; mais c'est en vain: l'honneur, qui veut toujours r?gner, se r?volte, et il ne reconno?t point de lois.

Ainsi les Fran?ois sont dans un ?tat bien violent: car les m?mes lois de l'honneur obligent un honn?te homme de se venger quand il a ?t? offens?; mais, d'un autre c?t?, la justice le punit des plus cruelles peines lorsqu'il se venge. Si l'on suit les lois de l'honneur, on p?rit sur un ?chafaud; si l'on suit celles de la justice, on est banni pour jamais de la soci?t? des hommes: il n'y a donc que cette cruelle alternative, ou de mourir, ou d'?tre indigne de vivre.

A Paris, le 18 de la lune de Gemmadi 2, 1715.

USBEK A RUSTAN.

A Ispahan.

Il paro?t ici un personnage travesti en ambassadeur de Perse, qui se joue insolemment des deux plus grands rois du monde. Il apporte au monarque des Fran?ois des pr?sents que le n?tre ne sauroit donner ? un roi d'Irimette ou de G?orgie; et, par sa l?che avarice, il a fl?tri la majest? des deux empires.

Il s'est rendu ridicule devant un peuple qui pr?tend ?tre le plus poli de l'Europe, et il a fait dire en Occident que le roi des rois ne domine que sur des barbares.

Il a re?u des honneurs qu'il sembloit avoir voulu se faire refuser lui-m?me; et, comme si la cour de France avoit eu plus ? coeur la grandeur persane que lui, elle l'a fait paro?tre avec dignit? devant un peuple dont il est le m?pris.

Ne dis point ceci ? Ispahan: ?pargne la t?te d'un malheureux. Je ne veux pas que nos ministres le punissent de leur propre imprudence, et de l'indigne choix qu'ils ont fait.

De Paris, le dernier de la lune de Gemmadi 2, 1715.

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