Read Ebook: A Valiant Ignorance; vol. 3 of 3 A Novel in Three Volumes by Dickens Mary Angela
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Ebook has 254 lines and 26941 words, and 6 pages
La lunette dont ils se servoient pour observer ?toit tr?s-imparfaite. Depuis le tems de sa construction, l'optique avoit fait de grands progr?s. Je leur offris un excellent t?lescope que je portois dans tous mes voyages a?riens. Ils l'accept?rent avec grand plaisir; ils furent ?merveill?s des nouvelles d?couvertes astronomiques dont je les instruisis.
Ils s'occupent aussi de l'?tude de l'agriculture, et de cette partie de la botanique qui a pour objet la connoissance des plantes salutaires dans diff?rentes maladies. Cette branche de la mati?re m?dicale, la seule que la nature ait indiqu?e aux animaux et qui leur suffit pour pr?venir ou gu?rir leurs maux, suffisoit ?galement ? ces hommes qui, menant une vie simple et frugale, exempte de toute esp?ce de passions, n'?toient assuj?tis qu'aux maladies communes ? tous les ?tres qui ont re?u l'existence, et avec elle le germe de la mort.
Les arts auroient ?t? seuls capables de r?concilier les habitans du Vallon a?rien avec la terre. Les ouvrages d'art qui leur avoient ?t? transmis par leurs anc?tres, ?toient la plupart comme dans le tems de leur invention. Plusieurs autres avoient ?t? d?couverts depuis. La perfection des premiers, l'invention des autres excitoient leur admiration. Ils me firent voir les montres des fondateurs de la colonie qui ?toient suspendues depuis cent quarante ans, enti?rement d?traqu?es et sans mouvement, et me demand?rent si nous avions maintenant quelque chose de mieux. Je leur pr?sentai pour r?ponse les deux que je portois; l'une ?toit une montre marine de Berthould; l'autre ?toit de Breguier, ? r?p?tition, quanti?me, seconde, etc. Le gouverneur ne put contenir sa joie ? la vue de ces effets pr?cieux; il les prit aussit?t de mes mains et les suspendit dans sa chambre. Il s'appropria ?galement mon barom?tre, mon thermom?tre, ma boussole et quelques autres instrumens utiles ? mes voyages. Il ne faisoit, en agissant ainsi, que suivre l'usage re?u dans le Vallon a?rien, o? tout en g?n?ral est commun, sans qu'il soit reconnu aucune propri?t? distincte. Cependant, mes regards fix?s avec ?tonnement sur les siens, rappel?rent ? son esprit que notre usage ?toit bien diff?rent du sien; alors, il voulut tout me rendre, un peu confus de son action; mais je me h?tai de le tranquilliser en lui en faisant pr?sent.
L'heure du repas du soir ?tant arriv?e, je me mis ? table avec le gouverneur, sa famille, et quelques habitans du Vallon qui sont tous invit?s successivement chacun ? leur tour, ? moins de quelque faute qui les exclue pour un tems de la table du chef, et cette punition est la plus sensible qu'on puisse infliger. Du poisson, des l?gumes, du laitage, des fraises, composoient le souper; les plats et tous les autres ustenciles de cette nature ?toient faits d'une terre tr?s-convenable ? cet usage, qu'on trouvoit dans la gorge d'une des montagnes. La boisson ?toit une petite bierre assez agr?able. J'avois dans ma nacelle quelques liqueurs; mais je me gardai bien de leur en offrir; c'est la seule richesse de notre monde dont la connoissance e?t ?t? un malheur pour celui-ci. Si leur raison n'en e?t pas ?t? troubl?e pour le moment, la privation de ce doux breuvage leur e?t tout au moins pr?par? pour l'avenir d'impuissans regrets.
Quelque tems apr?s la fin du souper, les airs furent remplis du plus beau concert que j'aie entendu de ma vie. C'?toit le cantique du soir, chant? en choeur par tous les habitans r?unis. Une modulation c?leste marioit la voix des hommes de la montagne, naturellement forte et harmonieuse, ? la voix douce et fra?che de leurs compagnes; un accident vint encore augmenter la solemnit? de ce chant religieux. La soir?e avoit ?t? orageuse, et le tonnerre qui grondoit dans le lointain, s'approcha par degr?s; il sembloit ?tre l'organe de la Divinit? qui applaudissoit ? l'hommage de ses enfans bien-aim?s.
Rien ne dispose mieux qu'une belle musique ? un paisible sommeil. Avant de nous s?parer pour en jouir, nous nous entret?nmes pendant quelque tems du majestueux orage qui avoit produit une si belle basse ? leur concert. Je leur appris que, graces aux nouvelles d?couvertes, ce m?t?ore n'?toit plus redoutable sur notre terre. Ils entendirent avec beaucoup d'int?r?t l'historique des paratonnerres du c?l?bre Franklin. Cet instrument auroit ?t? absolument inutile dans leur Vallon; car il est inoui que la foudre y ait jamais caus? le moindre ravage. Tous les ph?nom?nes de l'?lectricit?, du galvanisme, en g?n?ral, de la physique, que je leur racontai, ne captiv?rent pas moins vivement leur curiosit? et leur admiration.
Mon lit avoit ?t? pr?par? dans une chambre voisine de celle du gouverneur. Une musique et des chants appropri?s ? la naissance du jour, comme ceux de la veille l'?toient ? sa fin, vinrent terminer agr?ablement mon sommeil. Apr?s avoir salu? le gouverneur, je lui proposai une promenade. La puret? de l'air, le calme du ciel, le parfum des montagnes inspiroient dans tous les sens une douce s?r?nit?. Il me sembloit ?tre transport? ? la cr?ation du monde, et dans ce lieu de d?lices o? la course du tems n'?toit marqu?e que par la vari?t? des plaisirs. Ah! m'?criai-je, voil? le paradis.
LE GOUVERNEUR.
Vous avez raison, mon ami; mais la diff?rence de notre paradis ? celui d'Adam, c'est que la vanit? a fait sortir le premier homme du sien, et que c'est ? la m?chancet? de vos p?res que nous devons l'heureuse rencontre du n?tre. Ici, notre esp?ce s'est relev?e de sa chute originelle; ici, elle a recouvr? les avantages qu'elle avoit perdus et dont vous ?tes encore priv?s. Nous sommes au premier rang des ?tres par notre bonheur comme par notre intelligence, tandis que dans votre monde d?g?n?r?, vous n'?tes au-dessus des animaux que par vos connoissances; ils sont moins intelligens, mais ils sont plus heureux que vous. Etrange renversement produit par vos passions! la plus noble des cr?atures en est la plus infortun?e.
M. DE MONTAGNAC.
Oui; c'est un fait certain; notre monde est rest? sous le coup de la mal?diction. La facult? de se rappeler le pass? et de voir dans l'avenir qui augmente le bonheur de l'homme vertueux, fait le supplice du coupable; il vaudroit bien mieux pour lui qu'il f?t born? comme l'animal ? la jouissance du pr?sent. J'ai pens? autrefois que les progr?s de la civilisation et des lumi?res contribueroient ? l'am?lioration ainsi qu'au perfectionnement du genre humain. L'exp?rience et la r?flexion m'ont d?tromp?.
LE GOUVERNEUR.
Mon ami, votre opinion ?toit juste, et vous avez eu tort d'en changer. Les lumi?res ?l?vent l'homme et l'ignorance le d?grade; mais il faut pour cet effet que ces lumi?res soient permanentes, et que la masse enti?re en soit p?n?tr?e. L'inconstance de vos gouvernemens ne permet pas cette stabilit?. Vous avez aujourd'hui un roi qui prot?ge la litt?rature et les sciences; il est remplac? par un autre qui n'a que la passion des conqu?tes; un troisi?me succ?de sans caract?re, sans go?t et sans id?e. De ce changement continuel r?sulte une l?g?ret? d'esprit incapable de percer jusqu'? la v?rit?. On prend au lieu d'elle quelques prestiges s?duisans, quelques lueurs mensong?res que l'on suit et qui ?garent. Mieux vaudroit l'ignorance et rester ? la m?me place; mais que l'?tude soit constamment suivie, que le flambeau des sciences brille toujours de la m?me lumi?re, et vous verrez l'esp?ce humaine marcher d'un pas lent, mais s?r, vers la perfectibilit?. C'est ? ce seul avantage que nous devons celle dont vous ?tes ?tonn?. Toutes les facult?s intellectuelles dont nous sommes dou?s ont ?t? constamment dirig?es vers notre bonheur. C'est ? ce seul but qu'elles doivent tendre; telle est l'intention de la nature en nous les accordant. Et c'est se rendre indigne de ses faveurs que d'occuper son tems d'?tudes sp?culatives qui ne produiroient aucun fruit utile, quand m?me on seroit assur? d'y avoir le plus grand succ?s.
Tout ce que je voyois m'annon?oit qu'en effet le bonheur de ce peuple n'?toit point comme le n?tre, un ?clair rapide qui brille et s'?teint presqu'aussit?t au milieu d'?paisses et longues t?n?bres; ici, il commence avec la vie et ne finit qu'avec elle. Le travail, loin de l'interrompre, est un nouveau plaisir. Ce travail, entrem?l? de sourires, de propos agr?ables, de chants joyeux, est une image vivante de celui dont s'occupoient nos premiers p?res dans leur magnifique jardin, suivant la belle description de Milton. Il contribue pareillement ? faire mieux go?ter la volupt? du repos, les d?lices d'un salubre repas. Durant tout l'?t?, ce repas est pris en plein air, sur un tapis de fleurs au bord du ruisseau, ? l'ombre de l'avenue de tilleuls qui serpente comme lui dans la prairie, et qui forme un lit de verdure parall?le ? celui des eaux. Les vieillards, chancelans sous le poids des ann?es, sont port?s par leurs enfans ? la salle du banquet champ?tre. Ils arrivent en triomphe, et tout le monde se l?ve ? leur approche. La petite quantit? de vin qui est recueillie dans le Vallon est r?serv?e pour cette derni?re p?riode de la vie o? le sang glac? a besoin d'une chaleur auxiliaire. Les bons vieillards retrouvent dans la liqueur bienfaisante quelques souvenirs de leur jeune ?ge; ils se rappellent la vieille chanson qui accompagnoit la danse de leur tems.
Lorsque le repas est fini, d'autres plaisirs succ?dent ? celui du festin. Chacun se livre ? l'amusement qui est le plus de son go?t: les uns forment des danses dont la joie marque tous les pas; les autres s'occupent ? diff?rens jeux, soit d'exercice, soit d'adresse. Dans tous ces ?bats r?gne la d?cence sans ?tude et sans art. Les vertus sont si naturelles chez ce peuple, qu'il lui en co?teroit plus pour s'en d?tacher qu'? tel peuple corrompu pour les pratiquer.
C'est ainsi que s'?coulent tous les jours des habitans du Vallon a?rien. Jouissant d'un travail sans fatigue, et d'un repos sans oisivet?, leur f?licit? est bien sup?rieure ? celle du c?l?bre vallon de Temp? dont la monotone bergerie devoit cacher bien des momens d'ennui.
J'ai dit qu'il ne manquoit ? ce bon peuple que d'avoir la connoissance des sciences et des arts de l'Europe. Lorsque l'entretien vint ? rouler sur cette mati?re, le gouverneur me fit observer qu'aucune nouveaut? ne pouvoit ?tre communiqu?e ? ses fr?res qu'apr?s avoir ?t? soumise ? l'examen et obtenu l'approbation du conseil. En parcourant les annales qu'il m'a communiqu?es, j'ai vu que cette loi ?toit motiv?e sur l'extr?me danger que courut la soci?t? en recevant dans son sein un ?tranger nomm? Renou, et en adoptant quelques-unes de ses opinions. Le gouverneur n'?toit anim? que du d?sir de faire le bonheur de ses fr?res; mais, rendu circonspect par l'exemple du pass?, il me pria de lui dire franchement ce que je pensois moi-m?me sur le r?sultat de nos doctes acquisitions. <
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