bell notificationshomepageloginedit profileclubsdmBox

Read Ebook: La Comédie humaine - Volume 09. Scènes de la vie parisienne - Tome 01 by Balzac Honor De

More about this book

Font size:

Background color:

Text color:

Add to tbrJar First Page Next Page

Ebook has 2823 lines and 211728 words, and 57 pages

Au lecteur.

Cette version num?ris?e reproduit, dans son int?gralit?, la version originale. Seules les corrections indiqu?es ? la fin du texte ont ?t? effectu?es.

OEUVRES COMPL?TES DE H. DE BALZAC

LA COM?DIE HUMAINE

NEUVI?ME VOLUME

PREMI?RE PARTIE ?TUDES DE MOEURS

TROISI?ME LIVRE

PARIS--IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2.

SC?NES DE LA VIE PARISIENNE

HISTOIRE DES TREIZE: Ferragus.-- La Duchesse de Langeais.-- La Fille aux yeux d'or.--LE P?RE GORIOT.

PARIS,

FURNE, RUE SAINT-ANDR?-DES-ARTS, 55;

J. J. DUBOCHET ET Cie, RUE DE SEINE, 33;

J. HETZEL, RUE DE SEINE, 33.

TROISI?ME LIVRE,

SC?NES DE LA VIE PARISIENNE.

HISTOIRE DES TREIZE.

PR?FACE.

Il s'est rencontr?, sous l'Empire et dans Paris, treize hommes ?galement frapp?s du m?me sentiment, tous dou?s d'une assez grande ?nergie pour ?tre fid?les ? la m?me pens?e, assez probes entre eux pour ne point se trahir, alors m?me que leurs int?r?ts se trouvaient oppos?s, assez profond?ment politiques pour dissimuler les liens sacr?s qui les unissaient, assez forts pour se mettre au-dessus de toutes les lois, assez hardis pour tout entreprendre, et assez heureux pour avoir presque toujours r?ussi dans leurs desseins; ayant couru les plus grands dangers, mais taisant leurs d?faites; inaccessibles ? la peur, et n'ayant trembl? ni devant le prince, ni devant le bourreau, ni devant l'innocence; s'?tant accept?s tous, tels qu'ils ?taient, sans tenir compte des pr?jug?s sociaux; criminels sans doute, mais certainement remarquables par quelques-unes des qualit?s qui font les grands hommes, et ne se recrutant que parmi les hommes d'?lite. Enfin, pour que rien ne manqu?t ? la sombre et myst?rieuse po?sie de cette histoire, ces treize hommes sont rest?s inconnus, quoique tous aient r?alis? les plus bizarres id?es que sugg?re ? l'imagination la fantastique puissance faussement attribu?e aux Manfred, aux Faust, aux Melmoth; et tous aujourd'hui sont bris?s, dispers?s du moins. Ils sont paisiblement rentr?s sous le joug des lois civiles, de m?me que Morgan, l'Achille des pirates, se fit, de ravageur, colon tranquille, et disposa sans remords, ? la lueur du foyer domestique, de millions ramass?s dans le sang, ? la rouge clart? des incendies.

Depuis la mort de Napol?on, un hasard que l'auteur doit taire encore a dissous les liens de cette vie secr?te, curieuse, autant que peut l'?tre le plus noir des romans de madame Radcliffe. La permission assez ?trange de raconter ? sa guise quelques-unes des aventures arriv?es ? ces hommes, tout en respectant certaines convenances, ne lui a ?t? que r?cemment donn?e par un de ces h?ros anonymes auxquels la soci?t? tout enti?re fut occultement soumise, et chez lequel il croit avoir surpris un vague d?sir de c?l?brit?.

Cet homme en apparence jeune encore, ? cheveux blonds, aux yeux bleus, dont la voix douce et claire semblait annoncer une ?me f?minine, ?tait p?le de visage et myst?rieux dans ses mani?res, il causait avec amabilit?, pr?tendait n'avoir que quarante ans, et pouvait appartenir aux plus hautes classes sociales. Le nom qu'il avait pris paraissait ?tre un nom suppos?; dans le monde, sa personne ?tait inconnue. Qu'est-il? On ne sait.

Maintenant, il lui est permis de commencer le r?cit des trois ?pisodes qui, dans cette histoire, l'ont plus particuli?rement s?duit par la senteur parisienne des d?tails, et par la bizarrerie des contrastes.

Paris, 1831.

FERRAGUS, CHEF DES D?VORANTS.

A HECTOR BERLIOZ.

--Impatiente de quoi? se dit le jeune homme qui se recula pour se coller en espalier sur le mur de l'autre c?t? de la rue. Et il regarda, le malheureux, tous les ?tages de la maison avec l'attention d'un agent de police cherchant son conspirateur.

--Vous ne faites donc attention ? rien, dit une grosse voix. C'?tait la voix d'un ouvrier portant une longue planche sur son ?paule. Et l'ouvrier passa. Cet ouvrier ?tait l'homme de la Providence, disant ? ce curieux:--De quoi te m?les-tu? Songe ? ton service, et laisse les Parisiens ? leurs petites affaires.

Le jeune homme se croisa les bras; puis, n'?tant vu de personne, il laissa rouler sur ses joues des larmes de rage sans les essuyer. Enfin, la vue des ombres qui se jouaient sur ces deux fen?tres ?clair?es lui faisait mal, il regarda au hasard dans la partie sup?rieure de la rue des Vieux-Augustins, et il vit un fiacre arr?t? le long d'un mur, ? un endroit o? il n'y avait ni porte de maison ni lueur de boutique.

Est-ce elle? n'est-ce pas elle? La vie ou la mort pour un amant. Et cet amant attendait. Il resta l? pendant un si?cle de vingt minutes. Apr?s, la femme descendit, et il reconnut alors celle qu'il aimait secr?tement. N?anmoins il voulut douter encore. L'inconnue alla vers le fiacre et y monta.

--La maison sera toujours l?, je pourrai toujours la fouiller, se dit le jeune homme qui suivit la voiture en courant afin de dissiper ses derniers doutes, et bient?t il n'en conserva plus.

Le fiacre s'arr?ta rue de Richelieu, devant la boutique d'un magasin de fleurs, pr?s de la rue de M?nars. La dame descendit, entra dans la boutique, envoya l'argent d? au cocher, et sortit apr?s avoir choisi des marabouts. Des marabouts pour ses cheveux noirs! Brune, elle avait approch? le plumage de sa t?te pour en voir l'effet. L'officier croyait entendre la conversation de cette femme avec les fleuristes.

--Bien. Envoyez-les moi promptement.

Puis la dame tourna lestement vers la rue de M?nars, et rentra chez elle. Quand la porte de l'h?tel o? elle demeurait fut ferm?e, le jeune amant, ayant perdu toutes ses esp?rances, et, double malheur, ses plus ch?res croyances, alla dans Paris comme un homme ivre, et se trouva bient?t chez lui sans savoir comment il y ?tait venu. Il se jeta dans un fauteuil, resta les pieds sur ses chenets, la t?te entre les mains, s?chant ses bottes mouill?es, les br?lant m?me. Ce fut un moment affreux, un de ces moments o?, dans la vie humaine, le caract?re se modifie, et o? la conduite du meilleur homme d?pend du bonheur ou du malheur de sa premi?re action. Providence ou Fatalit?, choisissez.

--Si elle trahit son mari, nous nous vengerons, dit Auguste.

--Bonjour, ma ch?re, dit une voix.

Auguste et madame de Nucingen se retournent. Madame Jules arrivait v?tue de blanc, simple et noble, coiff?e pr?cis?ment avec les marabouts que le jeune baron lui avait vu choisir dans le magasin de fleurs. Cette voix d'amour per?a le coeur d'Auguste. S'il avait su conqu?rir le moindre droit qui lui perm?t d'?tre jaloux de cette femme, il aurait pu la p?trifier en lui disant:--Rue Soly! Mais quand lui, ?tranger, e?t mille fois r?p?t? ce mot ? l'oreille de madame Jules, elle lui aurait avec ?tonnement demand? ce qu'il voulait dire: il la regarda d'un air stupide.

Pour les gens m?chants et qui rient de tout, c'est peut-?tre un grand amusement que de conna?tre le secret d'une femme, de savoir que sa chastet? ment, que sa figure calme cache une pens?e profonde, qu'il y a quelque ?pouvantable drame sous son front pur. Mais il y a certaines ?mes qu'un tel spectacle contriste r?ellement, et beaucoup de ceux qui en rient, rentr?s chez eux, seuls avec leur conscience, maudissent le monde et m?prisent une telle femme. Tel se trouvait Auguste de Maulincour en pr?sence de madame Jules. Situation bizarre! Il n'existait pas entre eux d'autres rapports que ceux qui s'?tablissent dans le monde entre gens qui ?changent quelques mots sept ou huit fois par hiver, et il lui demandait compte d'un bonheur ignor? d'elle, il la jugeait sans lui faire conna?tre l'accusation.

Beaucoup de jeunes gens se sont trouv?s ainsi, rentrant chez eux, d?sesp?r?s d'avoir rompu pour toujours avec une femme ador?e en secret; condamn?e, m?pris?e en secret. C'est des monologues inconnus, dits aux murs d'un r?duit solitaire, des orages n?s et calm?s sans ?tre sortis du fond des coeurs, d'admirables sc?nes du monde moral, auxquelles il faudrait un peintre. Madame Jules alla s'asseoir, en quittant son mari qui fit le tour du salon. Quand elle fut assise, elle se trouva comme g?n?e, et, tout en causant avec sa voisine, elle jetait furtivement un regard sur monsieur Jules Desmarets, son mari, l'Agent de change du baron de Nucingen. Voici l'histoire de ce m?nage.

En ce moment, le jeune officier se trouvait pr?s de sa ma?tresse anonyme, qui ne savait certes pas ?tre doublement infid?le. Madame Jules ?tait l?, na?vement pos?e, comme la femme la moins artificieuse du monde, douce, pleine d'une s?r?nit? majestueuse. Quel ab?me est donc la nature humaine? Avant d'entamer la conversation, le baron regardait alternativement et cette femme et son mari. Que de r?flexions ne fit-il pas? Il recomposa toutes les Nuits d'Young en un moment. Cependant la musique retentissait dans les appartements, la lumi?re y ?tait vers?e par mille bougies, c'?tait un bal de banquier, une de ces f?tes insolentes par lesquelles ce monde d'or mat essayait de narguer les salons d'or moulu o? riait la bonne compagnie du faubourg Saint-Germain, sans pr?voir qu'un jour la Banque envahirait le Luxembourg et s'assi?rait sur le tr?ne. Les conspirations dansaient alors, aussi insouciantes des futures faillites du pouvoir que des futures faillites de la Banque. Les salons dor?s de monsieur le baron de Nucingen avaient cette animation particuli?re que le monde de Paris, joyeux en apparence du moins, donne aux f?tes de Paris. L?, les hommes de talent communiquent aux sots leur esprit, et les sots leur communiquent cet air heureux qui les caract?rise. Par cet ?change, tout s'anime. Mais une f?te de Paris ressemble toujours un peu ? un feu d'artifice: esprit, coquetterie, plaisir, tout y brille et s'y ?teint comme des fus?es. Le lendemain, chacun a oubli? son esprit, ses coquetteries et son plaisir.

--Eh quoi! se dit Auguste en forme de conclusion, les femmes sont donc telles que le vidame les voit? Certes, toutes celles qui dansent ici sont moins irr?prochables que ne le para?t madame Jules, et madame Jules va rue Soly. La rue Soly ?tait sa maladie, le mot seul lui crispait le coeur.

--Madame, vous ne dansez donc jamais? lui demanda-t-il.

--Voici la troisi?me fois que vous me faites cette question depuis le commencement de l'hiver, dit-elle en souriant.

--Mais vous ne m'avez peut-?tre jamais r?pondu.

--Cela est vrai.

--Je savais bien que vous ?tiez fausse, comme le sont toutes les femmes...

Et madame Jules continua de rire.

--?coutez, monsieur, si je vous disais la v?ritable raison, elle vous para?trait ridicule. Je ne pense pas qu'il y ait fausset? ? ne pas dire des secrets dont le monde a l'habitude de se moquer.

--Tout secret veut, pour ?tre dit, une amiti? de laquelle je ne suis sans doute pas digne, madame. Mais vous ne sauriez avoir que de nobles secrets, et me croyez-vous donc capable de plaisanter sur des choses respectables?

--Oui, dit-elle, vous, comme tous les autres, vous riez de nos sentiments les plus purs; vous les calomniez. D'ailleurs, je n'ai pas de secrets. J'ai le droit d'aimer mon mari ? la face du monde, je le dis, j'en suis orgueilleuse; et si vous vous moquez de moi en apprenant que je ne danse qu'avec lui, j'aurai la plus mauvaise opinion de votre coeur.

--Vous n'avez jamais dans?, depuis votre mariage, qu'avec votre mari?

--Oui, monsieur. Son bras est le seul sur lequel je me sois appuy?e, et je n'ai jamais senti le contact d'aucun autre homme.

Add to tbrJar First Page Next Page

 

Back to top