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Read Ebook: La psychologie comme science naturelle son présent et son avenir Application de la méthode expérimentale aux phénomènes de l'âme by Delboeuf Joseph Remi Leopold

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Ebook has 256 lines and 38203 words, and 6 pages

LA PSYCHOLOGIE

COMME SCIENCE NATURELLE

BRUXELLES

IMPRIMEUR DU ROI

PSYCHOLOGIE

COMME SCIENCE NATURELLE

SON PR?SENT & SON AVENIR

PAR

J. DELBOEUF

APPLICATION

DE LA M?THODE EXP?RIMENTALE

AUX PH?NOM?NES DE L'AME.

PARIS

LIBRAIRIE GERMER BAILLI?RE & Cie

LA PSYCHOLOGIE COMME SCIENCE NATURELLE

SON PR?SENT & SON AVENIR

NOTIONS DE L'AME & DU CORPS

<> avait dit le plus sage des oracles au plus sage des hommes. En donnant ? Socrate ce pr?cepte, Apollon n'avait fait que traduire en formule le besoin instinctif qui, du premier jour o? l'homme intelligent apparut sur cette terre, l'a pouss? ? s'?tudier lui-m?me pour se rendre compte de sa place dans l'univers.

Cette t?che quotidienne, l'humanit? l'a accomplie jusqu'aujourd'hui avec une conscience de plus en plus s?re d'elle-m?me; dans ce si?cle surtout, elle semble enfin avoir trouv? la v?ritable voie qui m?ne ? la v?rit?. D?passant de beaucoup la pens?e socratique, l'homme ne se contente plus de s'adresser ? lui-m?me pour avoir l'explication de sa nature, mais il interroge les annales de son pass?, en remontant aussi loin que possible dans la nuit des temps m?me pr?historiques, et, pour s'?clairer, il demande ? l'univers, dont il fait partie, les ?l?ments qu'il rec?le et qui peuvent conduire ? la solution du probl?me. Langues, mythologies, religions, moeurs, institutions politiques, litt?ratures, l?gislations, histoire; astronomie, g?ologie, physique, chimie; botanique, zoologie, anatomie humaine et compar?e, physiologie, embryog?nie, nosologie: voil? le rapide aper?u de toutes les branches de l'activit? humaine dont chacune tend ? jeter un peu de lumi?re dans l'obscurit? myst?rieuse qui nous enveloppe.

La mise ? contribution de toutes les sciences est ?videmment le seul moyen rationnel pour aboutir dans ces recherches; car, si elles partent toutes de l'homme, elles ont l'homme pour objet, et la connaissance de nous-m?mes ne peut progresser qu'avec la connaissance du monde qui nous entoure.

Cependant, aujourd'hui encore, peu de philosophes de profession l'entendent de cette fa?on. Beaucoup s'en tiennent souvent ? l'empirisme, ? la m?thode pure et simple de l'observation ext?rieure, contre laquelle Socrate avait d?j? r?agi; d'autres, au contraire, interpr?tant dans un sens ?troit la pens?e de l'oracle, comme d'ailleurs Socrate aussi l'avait fait, s'en rapportent uniquement ? l'intuition ou ? la m?thode sp?culative. Les premiers arborent, en g?n?ral, la banni?re du mat?rialisme; les seconds, celle du spiritualisme. La lutte entre les deux syst?mes est plus ardente que jamais et engag?e de part et d'autre avec toutes les armes dont on peut disposer. L'un appelle ? son secours toutes les d?couvertes des sciences naturelles et en fait un grand ?talage; l'appareil de ses forces augmente de jour en jour; l'autre se retranche dans sa vieille forteresse et compte sur la valeur de ses vieux soldats, se contentant tout au plus d'attaquer directement les auxiliaires les plus r?cents de son ?ternel ennemi, parmi lesquels il range, comme le plus redoutable, le darwinisme.

La tactique des uns et des autres est assez curieuse. Les mat?rialistes voient des arguments en faveur de leur th?se dans chaque progr?s des sciences physiques et biologiques. Les spiritualistes, agissant en cela souvent ? l'?tourdie, commencent toujours par repousser avec indignation et col?re les r?sultats nouveaux de la science, mais ils finissent par s'en accommoder, et essayent m?me de les faire tourner ? leur avantage. Ainsi les avons-nous encore vus se conduire dans ces derniers temps.

Darwin venait d'assurer la pr?pond?rance de la doctrine de l'?volution, en d?montrant que la variabilit? des types sp?cifiques est une cons?quence n?cessaire de faits scientifiques indiscutables: la s?lection naturelle et la concurrence vitale. Des esprits clairvoyants, plus hardis que ne le fut d'abord Darwin dans l'expression compl?te de leur pens?e, avaient indiqu? nettement la question de l'origine de l'homme comme devant recevoir une solution conforme au principe du transformisme. Le spiritualisme attaqua l'oeuvre de Darwin et les travaux de ses disciples; il d?fendit avec acharnement la notion de l'esp?ce invariable et, par cons?quent, cr??e tout d'une pi?ce. Mais on ne peut nier que le darwinisme ne fasse des progr?s de plus en plus marqu?s, et que le jour n'est pas ?loign? o? il faudra admettre, sinon toutes, du moins une grande partie des id?es du naturaliste anglais. Le spiritualisme pressent ce moment et se montre d?s maintenant dispos? ? sacrifier ses notions et ses convictions ant?rieures sur l'esp?ce, r?servant toutes ses forces pour d?fendre l'origine particuli?re de l'homme. Et plus tard, sans aucun doute, f?t-il d?montr? ? l'?vidence que l'homme est fr?re ou cousin du singe, qu'il descend comme l'orang-outang ou le gorille d'un primate anthropomorphe, le spiritualisme reprendra sa th?se favorite et pourra soutenir, non sans raison, que cette origine reconnue ne d?truit en rien le caract?re distinctif de l'homme; que, parmi toutes les formes animales, la forme humaine a ?t? choisie par Dieu pour ?tre le tabernacle d'une ?me raisonnable et immortelle. C'est ainsi que nous voyons le texte de la Gen?se recevoir une interpr?tation d'abord litt?rale, puis insensiblement une explication de plus en plus ?lastique qui permette de l'accommoder aux d?couvertes in?branlables de l'astronomie et de la g?ologie.

Depuis des milliers d'ann?es ces deux doctrines sont en pr?sence, se combattent opini?trement, essayent de se terrasser, chantent victoire, sans qu'on puisse dire avec quelque raison que l'une ou l'autre ait d?finitivement triomph?. Quand on se demande quelle est la cause de l'inanit? de leurs efforts, on s'aper?oit bient?t que les deux champions choisissent s?par?ment le terrain du combat, qu'ils se d?fient de loin, luttent parfois contre une ombre, en croyant attaquer le v?ritable adversaire, et que jamais ils ne se rencontrent s?rieusement. Un large fleuve les s?pare; ce fleuve, c'est la diff?rence de la m?thode, du point de d?part, des faits primordiaux observ?s et d'o? l'on tire les cons?quences. Les mat?rialistes partent de la nature sensible, des min?raux, des plantes, des animaux, d?couvrent des lois g?om?triques, physiques, chimiques, physiologiques; ils ne se pr?occupent en aucune fa?on des faits intellectuels et moraux. La grammaire, les litt?ratures, les l?gislations, les religions ne les touchent gu?re et, s'ils en parlent, c'est pour affirmer gratuitement que ces faits doivent s'expliquer de m?me par la chimie et la physique, car hors de l? il n'y a pas de salut. Le spiritualiste, au contraire, le philosophe, sp?culatif, part des ph?nom?nes qu'il observe dans sa pens?e, constate en lui les notions du vrai, du beau, du bien, de la libert?, du droit, du devoir, de Dieu, toutes notions qui, jusqu'? preuve du contraire , ont des caract?res, semble-t-il, incompatibles avec ceux des ph?nom?nes mat?riels.

Il y a donc lieu de d?terminer le champ du d?bat, de poser nettement la question, de critiquer les r?ponses qui y sont pr?matur?ment donn?es, d'indiquer la voie ? suivre pour en faciliter la solution, et l'on arrivera ? cette conviction que ce probl?me, le plus redoutable de tous, laisse tout au plus soulever un des coins du voile qui le recouvre, et tout juste assez pour nous en faire entrevoir la myst?rieuse profondeur. Nous essayerons de d?montrer, par l'analyse m?me de ses termes, que, pour ?tre abord? avec fruit, non seulement il r?clame l'alliance des deux proc?d?s, mais encore qu'il doit emprunter de ses donn?es aux autres sciences, et qu'il exige en outre l'emploi d'une m?thode propre.

Dans tous les temps, dans tous les pays, et sous tous les degr?s de civilisation, les hommes ont toujours distingu? en eux l'esprit et le corps. Toutes les langues, depuis les plus informes, celles des sauvages, jusqu'? celles des peuples vou?s au mat?rialisme le plus raffin?, ont des mots r?pondant plus ou moins ? ceux d'?me et d'esprit, et puisqu'ils ont le mot, ils ont n?cessairement l'id?e correspondante. On peut cr?er un mot pour d?signer une chose imaginaire, une chose impossible m?me, mais non pour d?signer une chose dont on n'aurait aucune id?e. Voil? le fait; et ce fait a en soi une port?e incontestable.

De plus, tout ?tre sensible, en g?n?ral, nous appara?t, ? premi?re vue, comme renfermant une double nature, une nature corporelle se manifestant par des ph?nom?nes corporels, une nature psychique se manifestant par des ph?nom?nes psychiques; en d'autres termes, il se pr?sente ? nous comme compos?, lui aussi, d'une ?me et d'un corps. La Fontaine comprenait Descartes, et Descartes se comprenait lui-m?me quand il niait que les b?tes eussent de l'esprit.

C'est assez le dire: en d?pit des th?ories diverses souvent oppos?es ou contradictoires qu'on ?met sur la nature et m?me sur l'existence de l'?me ou du corps, ces mots ont une signification suffisamment nette et accessible ? tout esprit.

Mais cette d?finition, ? son tour, n'est possible que si nous remontons au principe de la distinction. La marche ? suivre est, d?s lors, tout indiqu?e.

La distinction est-elle primitive?

Si elle ne l'est pas, quelle est la distinction primitive ou le premier acte de la connaissance?

Comment est-elle possible, ou quelle est la condition fondamentale de la connaissance?

La distinction entre l'?me et le corps n'est pas primitive. L'enfant--ni probablement l'animal--ne distingue pas en lui une double nature. Il se sent un et s'oppose comme tel ? ce qui n'est pas lui. C'est ce qui ressortira davantage ? mesure que nous avancerons dans notre ?tude.

La distinction primitive est celle du moi et du non-moi. La distinction entre l'?me et le corps est cons?cutive. Sur quoi repose cette distinction premi?re?

Cette propri?t? contribue ? coup s?r ? me faire conna?tre l'?tendue de mon ?tre. Mais si le corps humain ?tait construit de mani?re ? ne pouvoir se toucher, comme le corps de certains mammif?res, celui d'un grand nombre de l?zards, de la plupart des poissons et des esp?ces animales inf?rieures, si l'on naissait sans bras ni jambes, serait-on incapable de distinguer le moi du non-moi? On ne pourrait s?rieusement le soutenir. De plus, il y a l? une p?tition de principe; car il ne nous a pas ?t? dit ? quoi je reconnais que la partie que je touche est moi-m?me, et c'est pourtant par l? qu'on doit commencer. Enfin, nous verrons plus tard que cette explication est inexacte, et que l'?tre sensible doit parfois, dans certaines conditions, regarder comme ?tant lui, ce qui est autre que lui.

Avant de d?velopper cette proposition, expliquons-la par un exemple sur lequel nous devrons revenir, parce que, clair et simple en apparence, il est au fond assez compliqu?. L'enfant crie et il a le sentiment des efforts qu'il fait pour crier; en m?me temps, il a une sensation auditive. Comme celle-ci vient toujours ? la suite de ces m?mes efforts, il ne tarde pas ? s'apercevoir qu'il a le pouvoir de se donner une sensation auditive d'une nature particuli?re, et il pourra en venir ? s'amuser de ses propres cris.

Maintenant que nous avons ?clairci le sens de notre proposition, nous avons ? la reprendre dans toute sa g?n?ralit?.

Les plantes se meuvent, puisqu'au moins elles croissent et qu'elles cherchent par leurs feuilles, la lumi?re, par leurs racines, l'humidit?. Mais si nous admettons qu'elles ne s'aper?oivent pas de leurs mouvements, nous ne pouvons dire qu'elles appartiennent au r?gne animal.

On voit maintenant pourquoi, en donnant l'exemple de l'enfant qui crie et qui entend ses propres cris, nous avons annonc? que nous devions y revenir parce que, au fond, il est plus compliqu? qu'en apparence. Car le cri, en supposant que l'enfant f?t sourd, n'en serait pas moins pour lui une occasion de se douter de l'empire qu'il a sur lui-m?me. L'?mission de la voix, en effet, est pr?c?d?e d'un d?ploiement de force provoqu? par la faim, la soif, la douleur, peu importe, et ce d?ploiement de force, il le sent, et il sent en m?me temps une modification de son individu produite par les contractions de son larynx, sensation qu'il apprend bient?t ? reconna?tre comme ayant sa cause imm?diate dans sa volont?.

Enfin, derni?re observation, il n'est pas n?cessaire que ce soit l'individu lui-m?me qui fasse ces exp?riences et commence son ?ducation. L'exp?rience, transmise par les parents, peut se manifester chez lui sous forme d'instinct. C'est ainsi que nous voyons les poulets, au sortir de l'oeuf, se conduire et chercher d?j? par eux-m?mes leur nourriture. Comme toute g?n?ration se r?duit, en derni?re analyse, ? une division, on con?oit sans peine que la partie poss?de en r?alit? ou virtuellement les propri?t?s du tout.

Cela ?tabli, voyons comment l'animal obtient la connaissance de l'?tendue de son propre individu.

Une observation curieuse que me signale mon coll?gue, ?douard Van Beneden, justifie pleinement cette mani?re de voir. On sait que les ?tres les plus ?l?mentaires connus, ceux dont l'organisation est plus simple que la cellule m?me, et qui, ?tant priv?s de toute partie diff?renci?e n'ont, ? proprement parler, pas d'organisation, sont les mon?res. Ce sont de petits amas d'un liquide albumino?de dou?s de mouvement. Ces esp?ces de gouttelettes se remuent dans le fluide qu'elles habitent, en changeant leur forme, en projetant de leur propre substance des prolongements en guise de bras. Or, si par suite d'une cause quelconque deux bras d'une m?me mon?re viennent ? se toucher, il arrive qu'ils se soudent par leurs extr?mit?s et ils forment ainsi un anneau de substance albumino?de; puis, sous l'influence des contractions de la mati?re qui les constitue, le diam?tre de l'anneau diminue progressivement, et le vide central finit par s'effacer. Si, au contraire, deux bras appartenant ? deux mon?res se rencontrent, jamais il n'y a confusion, jamais la substance de l'une ne coule dans l'autre.

Admettons que la mon?re soit un animal, et analysons le fait. La mon?re, en projetant ses bras, se heurte parfois ? des corps ?trangers. La sensation qu'elle ?prouve lui a ?t? donn?e, ? ce quelle croit d'abord, par elle-m?me; mais lorsque, ? la suite d'un pareil mouvement, la barri?re n'?tant plus l?, l'impression ne s'est pas produite, elle a fini par reconna?tre que cet obstacle n'?tait pas elle. Il n'en est pas de m?me quand deux de ses bras s'arr?tent mutuellement. La sensation qu'elle ?prouve dans ce cas, elle peut la reproduire tant qu'elle veut, et elle acquiert ainsi peu ? peu une connaissance suffisante de l'?tendue de son ?tre. On voit maintenant que si deux mon?res se mettent en contact, elles ne peuvent, en tant qu'individus distincts, se m?langer en aucune fa?on, car chacune d'elles est ?trang?re ? l'autre, et leurs volont?s se contrarient.

Rapprochons-nous maintenant du point qui nous int?resse principalement, la distinction de l'?me et du corps, qui doit, avons-nous dit, r?sulter de celle du moi et du non-moi.

De la distinction premi?re entre le moi et le non-moi va d?couler la distinction de l'?me et du corps.

Pour le d?montrer, il nous faut rechercher comment nous parvenons ? la connaissance de ce que nous appellerons plus tard notre corps.

Or, il remarque avec le temps qu'il y a des choses en lui, et des actes produits par lui, qu'il per?oit comme il per?oit les choses en dehors de lui. Il se voit, en partie du moins, comme il voit les choses ext?rieures. Il y a, en outre, des choses en lui et des actes ?man?s de lui qu'il per?oit d'une autre fa?on, au moyen d'une facult? particuli?re qui ne se laisse pas appliquer aux choses du dehors. Il s'assure, par exemple, qu'il a deux bras, deux jambes, qu'il est grand ou petit, qu'il a la peau noire, de la m?me mani?re qu'il s'assure que les autres hommes ont des bras et des jambes, qu'ils sont grands ou petits, qu'ils ont la peau noire ou blanche. Ses moyens de connaissance ? l'?gard des objets ext?rieurs, il peut les appliquer ? certaines choses qui sont en lui. Sans doute, il sait qu'il a des membres par d'autres voies encore que la vue et le toucher, mais la vue et le toucher les lui font remarquer comme ils lui font remarquer les membres des autres animaux. Ainsi encore, quand il marche et quand il court, des modifications int?rieures l'avertissent sans doute qu'il n'est pas en repos; mais il peut, en outre, constater sa course et sa marche par les moyens dont il use pour juger de la marche et de la course d'autrui.

Il est facile d'appliquer les m?mes observations aux cas suivants: je suis pinc?, je suis br?l?, je marche, je cours, je me remue, je suis tomb?, je suis immobile, je suis frapp?, etc. Inutile de faire observer ici le grand r?le que vient jouer le miroir dans la vie de l'homme. Il d?double pour ainsi dire mon individu et m'apprend, sur ce qui me concerne, une foule de choses que je ne conna?trais pas sans lui.

Telles sont les d?finitions cherch?es de l'?me et du corps; elles ne pr?jugent rien quant ? la nature de l'?me, ni quant ? ses rapports avec le corps; elles sont en concordance avec le langage de tous les temps et de tous les peuples, et enfin elles rendent aussi fid?lement que possible l'id?e qu'?veillent en nous ces mots tels qu'on les emploie ordinairement.

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