Read Ebook: Si Klegg Complete Books 1-6 by McElroy John
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Ebook has 196 lines and 27145 words, and 4 pages
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Agit? par ces fi?vreuses secousses, Berlioz s'?chappait dans la campagne pour oublier les tourments qui le consumaient; Liszt et Chopin le suivirent, toute une nuit, ? travers la plaine Saint-Ouen. Dans une de ces p?r?grinations, un soir, avant son d?part pour l'Italie, il s'?tait endormi sur l'herbe gel?e, scintillante de perles, en face de l'?le de la Grande Jatte et du parc de Neuilly. Une autre fois les gar?ons du caf? Cardinal n'osaient le r?veiller, pendant qu'il sommeillait, ?puis?, le front sur une table de marbre. Pendant une semaine enti?re, on crut ? son suicide; il n'avait pas donn? signe de vie, avait disparu de son domicile et on ignorait o? il ?tait all?. La m?re et la soeur de miss Harriett faisaient, comme on pense bien, une opposition formidable aux projets des deux amants; la famille de la C?te-Saint-Andr? ne voulait pas davantage de ce mariage. Pour comble d'infortune, la malheureuse Oph?lie se ruina et se cassa la jambe en descendant d'un cabriolet. Quoique les ressources p?cuniaires d'Hector fussent des plus minces ? ce moment-l?, il ne balan?a plus ? accomplir son dessein. Si mademoiselle Smithson ?tait rest?e riche et c?l?bre, il aurait peut-?tre renonc? ? ses projets; pauvre et malade, il n'h?sita plus: il l'?pousa.
L'allusion est on ne peut plus claire.
Paganini assistait au concert; deux jours apr?s, il ?crivit ? son prot?g? le billet suivant:
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Voici la r?ponse de Berlioz:
< >>Comment vous exprimer ma reconnaissance!!! Je ne suis pas riche, mais, croyez-moi, le suffrage d'un homme de g?nie tel que vous me touche mille fois de plus que la g?n?rosit? royale de votre pr?sent. >>Les paroles me manquent, je courrai vous embrasser d?s que je pourrai quitter mon lit, o? je suis encore retenu aujourd'hui.>> H. BERLIOZ.>> Jules Janin, un ami de la premi?re et de la derni?re heure, ?crivit de son c?t? la lettre qu'on va lire: < >>Cher Berlioz, je vous embrasse bien tendrement, dans toute la joie de mon coeur. >>JULES JAMIN. >>20 d?cembre, 1838.>> Paganini n'avait pas affaire ? un ingrat. < >>Vains d?sirs! l'homme ne se d?livre point du poids qui l'attache ? la terre; l'aile rapide du son ne saurait ?tre li?e... Que le souvenir nous charme encore, puisqu'il est tout ce que nous pouvons conserver. Lui, du moins, sera imp?rissable, ? Paganini! et les symphonies divines ?chapp?es de tes cordes ?mues retentiront dans nos coeurs et dans notre m?moire comme un bien qui n'est plus, mais que l'on sent toujours!... >>Les nations qui sont par del? les Alpes et par del? les mers s'?tonnaient, et la m?re des chants, l'Italie elle-m?me, au bruit de ces m?lodies inou?es, s'?tonnait, comme firent les Thraces, quand, guid?s par la lyre divine, faveur d'une d?esse, ils serr?rent entre eux les premiers noeuds fraternels. Oui, tous ?taient frapp?s d'?tonnement, car des mains habiles et c?lestes avaient pos? si loin les bornes de l'art, qu'il ne semblait plus possible de les reculer. Tous admiraient la puissance cr?atrice et souveraine donn?e ? un archet, et quand ils voulurent comparer, toutes les cordes qui, jusque-l?, avaient vibr? devant eux, leur parurent sourdes et inertes.... >>Tout ce que la terre et le ciel et les flots ont de voix, tout ce que la douleur, la joie et la col?re ont d'accents, tout est l? dans le sein de ce bois creux; c'est la harpe qui fr?mit et m?le ses soupirs aux nocturnes soupirs de la lyre d'?olie, aux plaintes du vent parmi les branches et les feuilles; c'est le p?tre entonnant sa chanson rustique en rassemblant son troupeau; c'est le m?nestrel invitant ? la danse; c'est la vierge se plaignant de ses peines ? la lune silencieuse; c'est le cri d'angoisse d'un coeur s?par? du coeur qu'il aime; c'est le badinage, c'est le charme, c'est la vie, c'est le baiser.... >>Sur cette corde sont d'autres notes.... que peut seul conna?tre le g?nie audacieux qui la tend et la mod?re; mais l'Italie un jour avec transport les entendra...>> Mais Berlioz n'aimait pas Mozart? Leipzig, 2 f?vrier 1843. Au chef Mendelssohn. < >>Les Squaws seules et les Visages-P?les aiment les armes orn?es. Sois mon fr?re, et, quand le Grand-Esprit nous aura envoy?s chasser dans le pays des ?mes, que nos guerriers suspendent nos tomawacks amis ? la porte du conseil.>> Apr?s l'Allemagne du Nord, Berlioz visita l'Autriche. < < Nostrum desiderium Tandem implevisti: Venit nobis gaudium Quia tu venisti. Sicuti coloribus Pingit nobis pictor; Pictor es eximius, Harmoniae victor. Vives, crescas, floreas, Hospes Germanorum Et amicus maneas Neo-Wimarorum. Du peuple entier les ?mes triomphantes Ont tressailli, comme au cri du destin, Quand des canons les voix retentissantes Ont amen? le jour qui vient de luire enfin!... Ce fut une sc?ne digne de Moli?re. < L'institut nomma Clapisson. H?las! bizarrerie du sort: Adam mourut. Le pays fit une grande perte. Le premier fauteuil vacant fut le sien et ce fut Berlioz qui l'occupa. Il fut ?lu par dix-neuf voix contre six donn?es ? Niedermeyer, six ? Charles Gounod et deux ? Panseron. MM. Leborne, Vogel et F?licien David s'?taient pr?sent?s aussi. Ce dernier ?chec de F?licien David contre Berlioz rendit Azevedo, ce critique de mauvais aloi, furieux contre Berlioz. >>Carvalho, oubliant tout pour une aussi grande question artistique, fit des sacrifices tels, qu'ils pes?rent sur sa vie enti?re. Voil? ce qu'il ne faut pas oublier.>> Ce n'est pas ? nous ? le lui reprocher et personne n'oserait le faire. Vainement essayait-on de lui proposer des distractions: < Le s?jour ? Nice ne fut pas le dernier voyage de Berlioz. Quelque temps apr?s sa chute dans les rochers, il fut invit? ? se rendre ? un festival orph?onique qui se donnait dans sa province natale, ? Grenoble. Ce dernier ?pisode rappelle vraiment le d?no?ment des pi?ces de Shakespeare et l'homme qui avait le mieux compris le g?nie du po?te anglais devait avoir une fin assez semblable ? celle du roi Lear, de Macbeth ou d'Othello. Pour bien peindre cette sc?ne supr?me, il faudrait que l'histoire emprunt?t les couleurs du drame. Qu'on se figure une salle resplendissante de lumi?res, orn?e de tentures officielles, une table charg?e de mets d?licats, une r?union de joyeux convives attendant un des leurs qui tarde ? venir. Tout ? coup, une draperie s'entr'ouvre et un fant?me appara?t: le spectre de Banquo? non; mais Berlioz ? l'?tat de squelette, le visage p?le et amaigri, les yeux vagues, le chef branlant, la l?vre contract?e par un amer sourire. On s'empresse autour de lui, on l'acclame, on lui serre les mains,--ces mains tremblantes qui ont conduit ? la victoire des arm?es de musiciens. Un assistant d?pose une couronne sur les cheveux blancs du vieillard. Celui-ci contemple d'un oeil ?tonn? les amis, les compatriotes qui l'accablent d'hommages tardifs mais sinc?res. On le f?licite, il ne para?t s'apercevoir de rien. Machinalement, il se l?ve pour r?pondre ? des paroles qu'il n'a pas comprises; ? ce moment, un vent furieux, venu des Alpes, s'engouffre dans la salle, soul?ve les rideaux, ?teint les bougies; des rafales soufflent au dehors et des ?clairs d?chirent la nue, illuminant d'un fauve reflet les assistants muets et terrifi?s. Au milieu de la temp?te, Berlioz est rest? debout; il ressemble, environn? de lueurs, au g?nie de la symphonie, auquel la puissante nature ferait une apoth?ose, dans un d?cor de montagnes et avec l'aide du tonnerre, musicien gigantesque. D?s lors, tout fut fini. Le lundi, 8 mars 1869, dans la matin?e, Hector Berlioz, de retour ? Paris, rendait le dernier soupir. Ses obs?ques eurent lieu ? l'?glise de la Trinit?, le jeudi suivant; l'Institut avait envoy? une nombreuse d?putation, les cordons du po?le ?taient tenus par MM. Camille Doucet, Guillaume, Ambroise Thomas, Gounod, Nogent Saint Laurens, Perrin, le baron Taylor; la musique de la garde nationale pr?c?dait le cort?ge jouant des fragments de la Symphonie en l'honneur des victimes de Juillet. Sur le cercueil ?taient les couronnes donn?es par la Soci?t? Sainte-C?cile, par la jeunesse hongroise, par la noblesse russe, et enfin les derniers lauriers de la ville de Grenoble. Il ?tait mort!... la r?paration commen?ait... Il dort maintenant sur cette haute colline qui vit couler le sang des martyrs; l?-bas, au-dessus de nous, ?coutant peut-?tre les bruits tumultueux de l'immense ville. Aux anniversaires, de pieuses mains viennent d?poser sur son tombeau des bouquets de fleurs promptement fan?es par l'intemp?rie des saisons; j'y ai vu des roses blanches, aussi blanches que le lys, et des violettes r?pandues en pluie odorif?rante, sur la pierre, sur le fer, et jusque dans la boue qu'avait produite le pi?tinement des passants. Il se repose l? des tracas de sa vie agit?e, attendant l'heure de la justice, lente ? venir. Aucune rue ne porte son nom, aucun th??tre ne poss?de sa sombre effigie, aucun minist?re n'a song? ? lui rendre des honneurs quelconques; de toutes les gloires musicales de la France, la France n'en oublie qu'une, celle dont elle peut le mieux se glorifier devant le monde entier. D'autres musiciens passeront; que dis-je? ils ne sont d?j? plus... Berlioz est rest? et son souvenir grandit, comme ces ombres qui, ? mesure que d?cro?t le soleil et que le temps s'?coule, deviennent plus accus?es, plus nettes, et s'allongent sur le sable d'or. DANIEL BERNARD. CORRESPONDANCE IN?DITE HECTOR BERLIOZ A IGNACE PLEYEL. La C?te-Saint-Andr? , 6 avril 1819. Monsieur,
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