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Read Ebook: Amis by Haraucourt Edmond

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Ebook has 2290 lines and 57786 words, and 46 pages

age s'?vasait. Elle resta sans bouger, le visage de profil, se d?tachant en clart? sur la p?nombre d'une fen?tre. Oui, vraiment belle, elle l'?tait!

Georges, fascin?, s'approcha. Elle inclina la t?te. Ses v?tements paraissaient dress?s autour d'elle; il semblait qu'en la saisissant au col, comme on empoigne un glaive, on l'e?t d?gain?e toute nue!

Pierre un peu jaloux des hommes qui la verraient ainsi, voulait parler, quand un domestique cria des noms: avec force r?v?rences, les trois promeneurs du parc arriv?rent en file indienne, inquiets sur le parquet glissant: ils s'assirent, les genoux tendus, en cachant leurs pieds sous les fauteuils.

--Mais tr?s bien, je vous remercie, disaient-ils. Et l'on parla de la saison.

Puis, des roulements de voitures, des grelots, des coups de fouet, des cris; des pas couraient devant le perron, des roues grin?aient sur le sable. En un quart d'heure le salon s'emplit. D'Arsemar pr?sentait les hommes ? son ami; Jeanne s'empressait ? toutes les dames, qui s'avan?aient rigidement, avec des gestes pr?par?s pour ?tre naturels. L'arc-en-ciel des robes se d?ploya sur les fauteuils, au bruit des soies froiss?es.

Les invit?es regardaient la comtesse de c?t?, avec un oeil arrondi; quelques cavaliers chuchotaient un juron admiratif, vers l'oreille d'un intime.

La noblesse arriva plus tard; les noms sonnaient; ? chacun d'eux, on voyait toutes les t?tes de femmes converger d'ensemble sur la porte, avec l'exactitude d'une manoeuvre militaire; on causait ? voix basse. Georges, debout pr?s du piano, ?tait magnifique. Les m?res contemplaient comme les filles.

--C'est un Parisien.

--Il est tr?s riche.

--Il est tr?s bien.

--C'est un artiste.

--Oh!

Mais l'h?tesse rappelait tous les yeux,

--Peut-on?

--Un mari peut-il?

--Oh!

De petits sifflements satiriques susurraient sur les bouches. Une froideur r?gnait encore. Mais l'atmosph?re s'?chauffa; la sous-pr?f?te parut; les dialogues s'animaient.

Sous les fen?tres du salon, des accords se modul?rent et tout un orchestre chanta: les dames immobiles avaient de tendres airs pensifs; les demoiselles arrangeaient d'un coup de main les plis de leurs jupes; les messieurs, raides contre les chambranles, s'?tudiaient ? ?couter. Un petit mouvement de t?te signalait parfois les plus apparents connaisseurs; il entra?nait aussit?t beaucoup d'autres mouvements de t?tes. L'orchestre s'enleva, dans une brusque col?re de cuivres, et tout le monde se redressa en souriant de plaisir.

--Quelle jolie installation!

Les dialogues reprirent discr?tement; mais la comtesse ayant parl? tout haut, chacun parla.

Jeanne traversa le salon, seule, sous l'?clat des lustres; ? sa droite et ? sa gauche les faces tournaient comme dans un sillage. Maintenant, l'orchestre soutenait les conversations, et quand il se tut, on fut g?n? pour parler encore.

Les hommes s'approch?rent des fauteuils comme des automates de salutations.

--Madame!

--Monsieur!

Le baron de Valtors se multipliait aupr?s des plus jeunes; bon nombre en ?taient flatt?es.

--Ne chanterez-vous pas quelque chose?

--Vous nous direz des vers! Le baron dit si bien, madame!

--Je sais, madame!

--Oh, monsieur de Valtors, je disais tout ? l'heure ? madame... et vous me comprendrez, vous qui ?tes po?te: n'est-ce pas qu'avec une pendule et des fleurs une chambre n'est jamais d?serte?

M. Moulin exposait ? Georges ses th?ories sur la peinture.

--... A moins que le bitume n'ait pas dit son dernier mot...

Toutes les phrases faisaient tous les sourires.

--Vous n'avez pas amen? votre demoiselle?

--Elle est si jeune!

--Et si jolie!

Un p?re qui appelait sa fille cria: <> Pierre se retourna brusquement.

--C'est plus fort que moi, dit-il ? Georges: il me semble que nulle femme ne peut porter son nom...

Desreynes fut pr?sent? ? la sous-pr?f?te, Parisienne blonde, qui riait. Il s'amusa de son humour.

La fille du percepteur vocalisa une romance d'amour; l'orchestre lan?a un galop qui fit fr?mir les robes claires.

Le baron avait pr?par? quelque chose, et sut avec tant de gr?ce se trahir, qu'il fallut le prier de prendre la parole. Mais il se r?cusait, indigne; de nobles personnes insist?rent; il allait c?der, puisqu'on l'y obligeait, quand la musique d'un quadrille pr?cipita les danseurs au travers de la salle; les jeunes filles se levaient en posant leur ?ventail, et le baron s'assit au bord d'une douairi?re.

Desreynes avait engag? la sous-pr?f?te, et la comtesse fut leur <>. Puis ce furent des polkas et des valses; les robes s'envolaient dans des tourbillons de lumi?re. Jeanne, en rencontrant Georges, lui souriait: ses l?vres ?taient fort rouges sur ses dents blanches.

La premi?re heure s'?coula; Pierre ne dansait point; Desreynes, au milieu de ces visages inconnus, se sentait dans sa propre maison et recevait les gens comme ses h?tes, Merizette l'en remercia.

--Vous ne m'invitez pas, ami?

Il avait peur un peu; et lorsque, dans une valse, il l'eut entre ses bras, il crut concevoir qu'il faisait l? quelque chose de mal. Elle se serrait contre lui. L'?toile de diamant ?tincelait sur son ?paule: sa chair avait des tons chauds et des courbes douces qu'il voyait se perdre et se rejoindre; de son corps montait l'odeur d'aucune autre femme; ses yeux ardaient, et quand elle les ?levait vers lui, il se sentait trop proche d'elle. Le rythme se pr?cipita. Jeanne, press?e plus fort contre son cavalier, l'entra?na dans une cadence exalt?e. Elle avait ferm? les yeux. Accroch?e ? lui, elle le for?ait ? tourner; ils pivotaient vertigineusement, les genoux aux genoux. Il sentait ? travers son plastron la chaleur et le battement d'une poitrine de femme; il ?treignit sa danseuse et tourna plus vite; mais soudain: <> dit-il. Ils s'arr?t?rent.

Les couples s'?taient lass?s depuis longtemps, et, rang?s autour du salon vide, contemplaient froidement, comme des bancs d'inquisiteurs.

Georges, d'un coup d'oeil circulaire, vit ces figures impassibles. Il dressa le front, dans une hautaine impertinence, et tendit ? la comtesse un bras qu'elle prit en riant.

La foule, muette, ?changeait des coups d'oeil; les plus politiques inventaient une banalit? pour en sourire.

Il reconduisit Jeanne ? son fauteuil: il avait un remords et se promit de ne plus valser avec elle.

--Peut-on?

--Oh!

Il invita des jeunes filles; toutes avaient ordre de le refuser.

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