Read Ebook: La Samaritaine évangile en trois tableaux en vers by Rostand Edmond
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Ebook has 1599 lines and 34264 words, and 32 pages
ABRAHAM, ? Isaac.
Pourquoi baises-tu la poussi?re De la route, pieusement?
ISAAC.
Je me sens contraint de le faire Par un obscur pressentiment!
ABRAHAM, ? Jacob.
Pourquoi baises-tu la margelle Du puits que tu creusas ici?
JACOB.
Une force surnaturelle M'oblige ? l'adorer ainsi!... --Toi-m?me, pourquoi, ce silence, Si tendrement le respirer?
ABRAHAM.
Je baise dans cet air, d'avance, La Voix qui le fera vibrer!
ISAAC.
Une voix, dis-tu, Patriarche?
ABRAHAM.
Il vient, il vient, il est en marche, Et tenez-le pour assur?; Car ce soir, au Sch?ol farouche, Quand j'ai pass? pr?s de sa couche, En mettant un doigt sur sa bouche, Mo?se me l'a murmur?!
JACOB, se prosternant avec Isaac.
Nos coeurs, tout bas, chantent des psaumes!
ABRAHAM.
Bien avant que sur l'or des chaumes Ne retombe le bleu des nuits, Ce seront, l? m?me o? je suis, Des soupirs plus doux que des baumes, Des mots plus grands que des royaumes!... Voil? pourquoi nos trois fant?mes Viennent errer pr?s de ce puits.
JACOB, ? Isaac.
Est-il possible, sur la terre, Qu'entre tous les puits des humains Le Seigneur ait choisi, mon P?re, Pour je ne sais quel grand myst?re, Celui que creus?rent mes mains?
ISAAC.
Mon fils, que ton ombre soit fi?re! C'est toi l'ouvrier qu'il voulut Pour creuser le puits de salut O? le bl?me avenir va boire; Et c'est si beau, que l'honneur seul D'?tre ton p?re ou ton a?eul Fait qu'on sent soudain son linceul Se draper en manteau de gloire!
JACOB.
Mais voici tous ceux qui, depuis Que ma main plus jamais ne puise, Sont venus puiser ? ce puits!... Une ombre, et puis une ombre, et puis Une longue file ind?cise D'ombres, qui, lente, a sinu?, Pour venir, saintement ?prise, Baiser cette margelle grise! Toute la Tombe a remu?: Je vois Joseph et Josu?.
ABRAHAM.
Ombres dont tressaillent ces routes, Tombez ? genoux, toutes, toutes, Devant la Citerne d'amour!...
Mais voici que d?j? le jour A dor? la ville et sa tour... Nos formes vont ?tre dissoutes!
JACOB.
Et bient?t il ne restera Des trois ombres qui furent l? Que trois blancheurs diminu?es, Trois grandes barbes voltigeant, Puis trois petits flocons d'argent Qui fondront comme trois bu?es!...
ISAAC.
Une foule vient du lointain: C'est le peuple samaritain Qui, dans le secret du matin, Vient s'entretenir de ses craintes.
ABRAHAM.
Ce sont les hommes de Sichem Qui viennent ?clater en plaintes Et parler, sous les t?r?binthes, De leurs haines jamais ?teintes Contre Rome et J?rusalem!
JACOB.
Disparaissons ? leur approche!... Et vous, choses, t?moins r?vants, Terre aux souvenirs ?mouvants, Ciel dont les astres sont savants, Monts sur lesquels ? chaque roche La robe du Pass? s'accroche, Et toi, puits que creusa ma pioche, Vous qui venez d'ou?r, fervents, Comment, lorsque d?j? les vents Propagent les pas arrivants D'un second Mo?se plus tendre, Comment les morts savent l'attendre, Maintenant, vous allez entendre Comment l'attendent les vivants!
SC?NE II
LE PR?TRE, AZRIEL, JEUNES GENS, VIEILLARDS, MARCHANDS, ETC.
Ils viennent, avec une lenteur de deuil, s'arr?ter devant le puits, et ils se lamentent.
UN HOMME.
Voici le puits, avec sa margelle et sa marche, Que creusa dans ce champ le tr?s saint patriarche Jacob, fils d'Isaac, fils d'Abraham, lequel Fut un sage, vers? dans les choses du Ciel.
UN AUTRE.
Tristesse de Lia, dans ces fleurs, tu nous restes!
UN AUTRE.
Cette poussi?re aima les ombres de tes gestes, Rachel!
UN AUTRE.
Ce mont sentit s'arr?ter sur son flanc L'Arche que les porteurs pos?rent, en soufflant!
UN AUTRE.
Le jour ou la pi?t? d'Abraham fut sans bornes, Ce buisson accrocha le b?lier par ses cornes!
UN AUTRE.
Ce long parfum, parfois, qu'apporte un souffle bref, Vient des br?le-parfums du tombeau de Joseph!
UN VIEILLARD.
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