Read Ebook: Les aventures du jeune Comte Potowski Vol. 1 (of 2) Un roman de coeur par Marat l'ami du peuple by Marat Jean Paul Jacob P L Editor
Font size:
Background color:
Text color:
Add to tbrJar First Page Next Page
Ebook has 876 lines and 33996 words, and 18 pages
Editor: Paul Lacroix
UN ROMAN DE COEUR,
PAR MARAT, L'AMI DU PEUPLE;
Publi? pour la premi?re fois, en son entier, d'apr?s le manuscrit autographe, et pr?c?d? d'une notice litt?raire;
Par le bibliophile JACOB.
Imprimerie de Cosson, rue du Four-Saint-Germain, 47.
PR?FACE.
L'authenticit? de cet ouvrage in?dit de Marat est incontestable: le manuscrit original, enti?rement autographe, est rest?, pendant plus d'un mois, expos? dans les bureaux du SI?CLE, o? le public a ?t? admis ? le voir; il n'y avait pas de doute possible pour quiconque conna?t l'?criture de l'auteur. Ce manuscrit, qui depuis dix ans ?tait entr? dans la biblioth?que de M. Aim? Martin, figure sous le n? 713 du catalogue de cette pr?cieuse biblioth?que et doit ?tre vendu aux ench?res publiques, le 25 novembre prochain.
La publication du roman de Marat, faite dans un journal, avait ?t? r?duite aux conditions de la presse p?riodique, c'est-?-dire tronqu?e et m?me alt?r?e: le journal ne pouvait accepter certains d?tails, certaines sc?nes d'un genre un peu trop vif, qui eussent bless? peut-?tre la louable pruderie du feuilleton; mais le livre n'ayant pas de ces r?serves timor?es ? garder avec ses lecteurs, nous avons jug? n?cessaire de r?tablir tout ce que le journal avait supprim? et de ne rien changer au style du manuscrit, sans toutefois en respecter l'orthographe bizarre et souvent incorrecte.
MARAT
PHILOSOPHE ET ROMANCIER.
Il y a six ans ? peine, Marat n'?tait pas tout-?-fait mort sous le poignard de Charlotte Corday, puisque sa soeur, Albertine Marat, vivait encore ? Paris, fid?le h?riti?re des id?es et des doctrines de ce terrible Ami du Peuple.
Mademoiselle Marat semblait avoir recueilli en elle-m?me l'?me forte et passionn?e de son fr?re, qu'elle pleurait sans cesse, comme si elle ne l'e?t perdu que de la veille.
C'?tait une r?publicaine inflexible, que l'?ge n'avait pas refroidie, que les ?v?nements n'avaient pas chang?e; vainement le Directoire, le Consulat, l'Empire, la Restauration et m?me la R?volution de juillet 1830 ?taient venus successivement bouleverser ou m?tamorphoser la face du pays: elle n'y avait pas pris garde, semblable ? une somnambule qui poursuit son r?ve sans tenir compte des objets ext?rieurs, et qu'on n'?veille pas en sursaut, de peur de la voir tomber foudroy?e; elle r?vait donc que l'esprit de 93 planait autour d'elle et que Marat veillait toujours sur son peuple.
Rien ne saurait rendre l'impression profonde et presque douloureuse qu'on ?prouvait ? entendre les pr?dications d?magogiques de cette pr?tresse de notre grande R?volution, et surtout l'?ternelle oraison fun?bre de son h?ros, de son dieu, de ce Marat qu'on ne nomme pas sans horreur et sans effroi.
Il faut l'avouer, elle ne nous montrait pas Marat tel que nous le connaissons, tel que l'histoire nous l'a couvert de boue et de sang; elle en faisait un ?tre exclusivement vertueux, anim? des plus purs sentiments de patriotisme, bon et g?n?reux, que sais-je! simple et candide, un v?ritable philosophe enfin, qui avait mission de r?g?n?rer le monde, ou du moins la France.
Bien des hommes curieux de s'instruire du pass?, bien des esprits pr?occup?s de l'?tude de cette R?volution si pleine de myst?res, bien des vieillards qui avaient vu, bien des jeunes gens qui n'avaient fait que lire, all?rent alors interroger les souvenirs de la soeur de Marat et s'en retourn?rent ?mus ou ?tonn?s, n'osant porter un jugement de r?probation ou d'absolution sur les actes, sur le caract?re de cet ?trange Ami du Peuple.
Aim?-Martin ?tait un esprit doux, tendre et honn?te: il n'avait jamais tourn? les yeux vers la p?riode r?volutionnaire que pour en d?tester les agents et que pour en plaindre les victimes. Le nom de Marat lui inspirait un invincible d?go?t.
Qu'allait-il donc faire dans cette maison?
Allez visiter l'int?ressante collection du v?n?rable colonel Maurin, et vous y verrez les ?preuves de journal que Marat corrigeait dans son bain lorsqu'il fut frapp? par Charlotte Corday: ces ?preuves ont ?t? teintes de son sang; vous y verrez les couronnes civiques que le peuple d?cerna plus d'une fois ? son d?fenseur; vous y verrez les portraits et les bustes qui furent un moment les idoles de la nation.
Aim?-Martin s'?tait toujours refus? ? publier cet ouvrage remarquable ? diff?rents titres, malgr? nos instances: il nous permit, toutefois, de l'examiner, et nous en signala m?me les passages les plus singuliers.
Il voulait, disait-il, avoir seul le privil?ge de conna?tre, de conserver le v?ritable Marat, Marat philosophe, Marat sentimental, Marat ?crivain, Marat romancier.
--Et c'est Marat qui a fait tout cela? interrompis-je; j'avouerai n'avoir rien lu de lui, except? quelques hideuses citations de son journal.
--Le journal du second Marat? mais le premier n'a ?crit que des ouvrages scientifiques, philosophiques et litt?raires; le premier ?tait m?decin des gardes-du-corps du comte d'Artois; il mourut ou plut?t il disparut ? la fin de l'ann?e 1789 pour faire place ? son odieux homonyme.
--Je les ai beaucoup connus l'un et l'autre! reprit Nodier, qui se trouvait l?, et qui avait la manie de se faire contemporain de tous les acteurs de la R?volution, qu'il ne vit pas m?me passer devant son berceau. Mais il me semble que le bourreau devait ?tre fils du m?decin, et que celui-ci, en coupant des t?tes de grenouilles pour ses exp?riences de physique, avait enseign? au second ? couper des t?tes d'hommes.
--Ne parlons pas de ce cannibale, repartit Aim?-Martin; mais de l'autre, tant qu'il vous plaira. C'?tait une belle ?me qui s'ouvrait ? tous les sentiments nobles et g?n?reux; il prit Rousseau et Montesquieu pour mod?les: il e?t m?rit? de se placer ? c?t? d'eux, comme moraliste, comme ?crivain. Par malheur, il osa s'attaquer ? la secte des philosophes, ? Voltaire surtout, ? Helv?tius, ? Diderot: il fut ?cras? ou plut?t ?touff? dans l'obscurit?. Je ne doute pas que l'injustice de ses contemporains ? son ?gard ne l'ait pouss? ? changer de route et ? s'?loigner de la sc?ne des sciences et des lettres: <
--Je ne me suis pas encore rendu compte, dit Charles Nodier, de la transformation du royaliste en d?magogue furieux, de l'?l?ve de Rousseau en s??de de Danton; il y a, entre ces deux personnages, une solution de continuit? immense que je voudrais m'expliquer.
--Dites-moi seulement, r?pliquai-je, vous qui avez connu le premier Marat, s'il ?tait aussi laid, aussi repoussant que le second?
--Il n'?tait pas laid, puisqu'il ?tait aim? et amoureux, objecta Nodier.
--Marat a ?t? aim? par une femme! m'?criai-je.
--Voil? de quoi r?habiliter Marat, repris-je; malheureusement on n'y croira pas.
--En v?rit?, vous me donnez go?t ? ?tudier votre Marat, et s'il se peut faire, nous lui rendrons la place qui lui appartient parmi les philosophes et les ?crivains fran?ais.
Je fus donc amen? sans r?pugnance ? rechercher et ? lire tous les ouvrages du premier Marat, et j'y trouvai, comme Aim?-Martin me l'avait annonc?, le savant profond et hardi, le philosophe sagace et intelligent, le moraliste sensible et passionn?, l'?crivain pittoresque, assez ?l?gant, mais peu correct; enfin, ce que Nodier ni Aim?-Martin n'eussent pas reconnu, le l?gislateur sage et humain.
La jeunesse de Marat s'est pass?e dans l'?tude et la m?ditation.
Il ?tait n? comme Jean-Jacques, au pied des Alpes, ? Baudry, petit village de la principaut? de Neufch?tel, et avant d'?tudier l'homme, il avait ?tudi? la nature.
<>
Cette vertu n'allait pas jusqu'? lui d?fendre d'employer la sensibilit? de son coeur, peut-?tre m?me la sensualit? de son organisation, avant que la politique en e?t fait un fid?le ?poux, sinon une statue de marbre.
<
Marat n'?tait pas mari?, mais il avait une ma?tresse qui vivait maritalement avec lui, ? l'?poque de son assassinat.
Le baron r?pondit en baron, tr?s-poliment, en se f?licitant de ce que son petit livre lui avait valu l'honneur de recevoir une lettre de madame Marat. Il ajouta pourtant en post-scriptum: <
<
Le prospectus parut seul, annon?ant qu'on s'abonnait chez la citoyenne veuve Marat, rue Marat, n? 30, au prix de cinq livres par volume de 480 pages; mais d?s que le premier volume fut mis sous presse, Robespierre fit saisir, dit-on, le mat?riel de l'imprimerie et arr?ta la publication comme dangereuse ? son parti.
La veuve, que plus d'un historien du temps a trait?e de m?g?re, eut l'air en effet de satisfaire un sentiment personnel de jalousie, lorsqu'elle se jeta sur Charlotte Corday et la meurtrit de coups en vomissant contre elle mille sales injures.
On ne supporterait pas maintenant les diff?rents tableaux que lui fournit cette passion peinte d'apr?s nature.
C'est lui, toujours lui qui se pose en sc?ne; ici, il fait un tendre aveu: <
L?, il est s?par? de ce qu'il aime: <
Plus loin, il est inhumain ? l'?gard d'une belle, qui se meurt d'amour pour lui: <
Oui, l'amour embellissait la face de Marat.
Nous avons vu la toile, admirable d'horreur, o? David l'a peint mort dans sa baignoire, et nous doutons que la laideur humaine puisse aller au-del?; mais Marat tombant sous le couteau qui ne lui donna pas le temps de mourir de la maladie qu'il combattait en vain depuis trois ans , Marat n'?tait plus Marat amoureux, philosophe et romancier.
Fabre d'?glantine, du moins, en a trac? un portrait moins horrible et plus ressemblant: <
Ne voil?-t-il pas la laideur de Marat presque r?habilit?e?
Add to tbrJar First Page Next Page