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Read Ebook: London in the Time of the Stuarts by Besant Walter

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Ebook has 73 lines and 14863 words, and 2 pages

Editor: Paul Janet

MONTESQUIEU

ESPRIT DES LOIS

LIVRES I-V

PR?C?D?S D'UNE INTRODUCTION DE L'?DITEUR

et suivis d'un Appendice

CONTENANT DES EXTRAITS DE MONTESQUIEU

et des Notes explicatives

PAR

PAUL JANET MEMBRE DE L'INSTITUT PROFESSEUR A LA FACULT? DES LETTRES

PARIS

LIBRAIRIE CH. DELAGRAVE

L'ESPRIT DES LOIS

INTRODUCTION

N?anmoins Montesquieu a tr?s bien saisi la diff?rence des monarchies europ?ennes et des monarchies asiatiques. Il montre admirablement comment le pouvoir des monarques europ?ens est en r?alit? plus grand que celui des despotes asiatiques, pr?cis?ment parce qu'il est plus limit?.

Mais d?j? on voit poindre dans Montesquieu le go?t d'un autre ?tat politique que celui de la monarchie absolue. D?j? la libert? anglaise exerce ?videmment un grand prestige sur son esprit. Il parle, non sans admiration secr?te, <>; et qui, se trouvant les plus forts contre un de leurs rois, ont d?clar? <>. Il ne saisit pas bien encore les ressorts du gouvernement anglais, qu'il d?couvrira plus tard avec une merveilleuse profondeur: mais il est frapp? du spectacle ?trange qu'offre ? ses yeux un pays <> A c?t? de ce noble tableau, Montesquieu en ajoute d'autres, tous favorables aux r?publiques: <>... <>. Il fait remarquer que la Hollande et la Suisse, qui sont <>. La sup?riorit? morale des r?publiques ?clate enfin dans ces paroles: <>.

On voit que le gouvernement anglais est d?j? devenu pour lui l'objet d'un examen plus attentif; car il le cite, pr?cis?ment ? l'appui de la loi pr?c?dente, comme ?tant toujours capable de correction: <>

Aussi pour lui la lutte des pl?b?iens et des patriciens n'est point du tout, comme l'ont pens? tous les auteurs, la cause de la perte de la r?publique. Cette vraie cause, ce fut la grandeur exag?r?e de la ville et de l'empire. Ces divisions au contraire ?taient n?cessaires ? Rome: <>

Ce n'est pas, bien entendu, que Montesquieu soit un partisan de l'anarchie et un ennemi de l'ordre: personne ne le supposera: il n'entend parler bien ?videmment que des divisions pacifiques, tout au plus de ces retraites volontaires du peuple qui amenaient les nobles ? composition sans effusion de sang. Ce qu'il combattait, c'?tait l'ordre mensonger des ?tats despotiques, sous l'apparence duquel <>.

Mais, poursuit-on, si Montesquieu a vu que les lois civiles et politiques ne sont que l'expression de la raison humaine en g?n?ral, pourquoi ne s'est-il pas appliqu? ? d?terminer d'abord les conditions absolues du juste, afin de montrer ensuite comment les lois positives s'en ?loignent, et comment elles peuvent s'en approcher? Au contraire, ? peine a-t-il pos? les principes qu'il abandonne les cons?quences, et que, renon?ant ? la m?thode rationnelle pour la m?thode historique et exp?rimentale, il n'examine plus que ce qui est, et n?glige ce qui devrait ?tre.

Aug. Comte a bien vu le grand m?rite de Montesquieu, et le consid?re comme le vrai cr?ateur de la science sociale.

La philosophie des lois dans Montesquieu repose sur cette formule c?l?bre: <> Cette d?finition a ?t? souvent critiqu?e comme abstraite et obscure. Destutt de Tracy a dit: <> Helv?tius a dit de son c?t? que les lois n'?taient pas des rapports, mais des r?sultats de rapports. Ce sont l? des chicanes. Suivant Tracy, l'id?e de loi implique l'id?e d'autorit? positive, et c'est par analogie que l'on a transport? cette id?e ? la nature en disant que les choses se passent comme si un l?gislateur y e?t ?tabli des lois. Cela est possible, quant ? l'origine de l'id?e; car il est certain que l'homme a commenc? par personnifier la nature. Mais s'il est vrai que ce soit par analogie avec nos lois positives que l'homme ait appel? lois non ?crites les lois de la morale, et plus tard lois de la nature les rapports constants et r?guliers des ph?nom?nes naturels, cependant, par l'analyse et la r?flexion, il a pu arriver ? reconna?tre plus tard que ces rapports constants et r?guliers ?taient le r?sultat de la nature des choses. Par exemple, la g?om?trie lui offrait des rapports constants entre les figures ou les ?l?ments des figures; de m?me la morale lui montrait certains rapports constants entre les hommes; enfin la physique, des rapports constants entre les corps. G?n?ralisant cette id?e, on a pu dire qu'une chose quelconque n'existe qu'? la condition d'avoir une certaine nature, et des rapports qui r?sultent de cette nature, et c'est ce qu'on appelle des lois. Revenant ensuite ? l'ordre civil d'o? l'on ?tait parti, on peut dire alors avec Montesquieu que les lois civiles elles-m?mes sont des rapports n?cessaires d?rivant de la nature des choses, c'est-?-dire qu'elles ne d?rivent pas de la fantaisie des l?gislateurs, mais qu'elles tiennent aux conditions sociales, historiques, climat?riques, etc.; c'est ainsi que la d?finition de Montesquieu se rapporte ? la pens?e g?n?rale de son livre.

<>

Cet int?ressant et instructif ouvrage est de 1796.

On peut distinguer, dans les l?gislations diverses qui sont parmi les hommes, trois caract?res principaux. Dans certains ?tats, les lois semblent inspir?es par le sentiment de la vertu publique et ?tre faites par des hommes ou pour des hommes qui savent ou doivent savoir se commander ? eux-m?mes; elles exigent et supposent une certaine force du citoyen ? sacrifier ses passions ? la patrie; une frugalit? qui emp?che chaque homme de d?sirer plus qu'il n'a besoin, et qui, ?tant le superflu, ?te le principe de la domination des hommes les uns sur les autres et les met tous dans un m?me rang; un amour naturel et volontaire de cette ?galit?, qui ne va pas jusqu'au refus d'ob?ir aux magistrats, mais n'est au contraire assur?e que par le respect de tous pour la loi; enfin un d?sint?ressement qui fait rechercher la vertu pour elle-m?me et non pour la gloire qui l'accompagne.

Dans un autre ordre d'?tats, les lois favorisent l'amour naturel des distinctions qui est dans l'homme, et paraissent inspir?es par cet amour; elles semblent prescrire particuli?rement tout ce qui tend ? rendre certains hommes respectables aux autres hommes; elles mettent des degr?s entre les citoyens; elles introduisent des privil?ges, des exceptions honorables pour ceux qui en sont l'objet: elles rendent l'autorit? presque divine, et lui donnent non ce caract?re de force terrible qui abat et humilie, mais au contraire cette majest? qui rel?ve ceux qui s'en approchent; elles laissent ? chaque citoyen une certaine s?curit? et lui permettent m?me une certaine grandeur, non pas la grandeur h?ro?que qui na?t de la simple pratique de la vertu, mais celle qui vient de l'?clat attach? ? certaines actions r?put?es belles.

Enfin, il y a des ?tats o? les lois traitent les hommes comme les brutes, ne leur demandent aucune vertu, aucun sacrifice, mais une mat?rielle ob?issance; qui ne laissent aucune dignit? m?me ni aucune s?curit? aux sujets; qui les obligent au bien, c'est-?-dire ? ce qu'une certaine personne d?clare arbitrairement ?tre le bien, non par un sentiment de gloire, ni m?me par un noble amour des honneurs et de l'?l?vation, mais par la force seule: ces lois avilissantes ne gouvernent que par la terreur.

En un mot, il y a des peuples dont les lois reposent sur la vertu et p?rissent avec elle; d'autres o? l'empire de la loi est plus fort que l'empire du bien, et o? les lois ne commandent qu'au nom de ce sentiment brillant et chevaleresque que Montesquieu appelle l'honneur; enfin, il est des peuples qui n'ob?issent qu'? la force et ? la crainte.

Un gouvernement ainsi constitu? est une d?mocratie; mais il ne suffit pas d'?tre, il faut vivre, et la d?mocratie la mieux organis?e peut p?rir si elle n'a un principe int?rieur d'action et de conservation qui est la vertu. Lorsque tous font les lois, les lois sont inutiles s'il n'y a pas de vertu publique; car le peuple sait d'avance qu'il portera lui-m?me le poids des lois qu'il aura faites; il les fera donc faciles, complaisantes, corruptrices. Et d'ailleurs qu'importe que le peuple, comme monarque, fasse des lois, si, comme sujet, il ne les ex?cute pas?

Avertissement.

Ce qui constitue le gouvernement monarchique, c'est l'empire d'un seul sur tous, conform?ment ? des lois stables et fixes. Or, ces lois, conditions de la monarchie, ne sont rien s'il n'existe en dehors du prince, non des pouvoirs ind?pendants, mais des pouvoirs subordonn?s, interm?diaires entre le prince et le peuple, et qui sont comme des canaux moyens par o? coule la puissance. Ces pouvoirs, malgr? leur d?pendance du monarque, le mettent lui-m?me dans une certaine d?pendance des lois et des ?tablissements traditionnels, puisqu'il ne peut agir que par leur interm?diaire.

La monarchie ne subsiste donc pas sans noblesse, sans pr?rogatives, sans privil?ges. Privil?ges des nobles, du clerg?, des villes, juridiction seigneuriale, eccl?siastique, etc., autant de limites au pouvoir arbitraire du prince ou ? l'envahissement du peuple. ?tez ces rangs et ces pr?rogatives, l'?tat devient n?cessairement despotique ou populaire. Outre ces rangs interm?diaires, il faut un d?p?t de lois pour que les limites de l'autorit? monarchique soient sans cesse pr?sentes au prince et aux sujets, et un certain corps politique qui annonce les lois lorsqu'elles sont faites et les rappelle lorsqu'on les oublie.

A ce syst?me si admirablement organis? pour concilier la toute-puissance du monarque et la s?curit? des sujets, il faut un ressort, un principe de mouvement. Ce n'est pas la vertu, c'est l'honneur: c'est-?-dire le pr?jug? de chaque personne et de chaque condition. En effet, la vertu peut bien se rencontrer dans un gouvernement monarchique. Mais cela n'a rien de n?cessaire. Ce qui est n?cessaire pour que l'?tat ne p?risse pas, c'est que le prince ait un certain pr?jug? de sa propre grandeur et de ses pr?rogatives, et qu'il confonde cette grandeur avec celle de l'?tat, en un mot une certaine opinion d'imagination qui lui fasse rechercher le bien, non pour le bien en lui-m?me, mais pour r?aliser cet id?al de grandeur qu'il porte en soi. Seulement cette opinion de sa grandeur d?g?n?rerait facilement chez le prince en adoration de soi-m?me, en m?pris des sujets, en indiff?rence des int?r?ts publics, et l'?tat deviendrait despotique, si tous les corps de l'?tat n'avaient chacun leur pr?jug?, comme le prince lui-m?me, si la noblesse, le clerg?, la magistrature, les villes, n'opposaient au pr?jug? du prince des pr?jug?s contraires; cet ensemble de pr?jug?s qui se limitent et se respectent les uns les autres, fonde la hi?rarchie sociale, et tient lieu du droit qui est la base des r?publiques: c'est l? l'honneur, le principe conservateur des institutions monarchiques.

La r?publique, la monarchie ont une constitution, une structure, un m?canisme particulier. Le despotisme, par cela seul qu'il ne repose que sur la volont? d'un seul, ne peut avoir rien de d?termin? et d'assur?; il n'a donc point de constitution. La seule constitution, c'est que les hommes n'y sont rien, que le prince y est tout. Mais le prince ?tant tout, et ?tant le ma?tre de tout, il serait ?trange qu'il pr?t de la peine pour un peuple qui n'est rien; aussi ne garde-t-il que le plaisir et la force de la puissance, et il en laisse ? un autre l'emploi. Ce repr?sentant du prince est absolu comme lui, pour que celui-ci soit tranquille; mais tout absolu qu'il est, il n'en est pas moins toujours entre les mains du prince, qui peut abattre quand il veut et comme il lui pla?t, ceux qu'il ?l?ve quand il veut et comme il lui pla?t. Le principe d'un tel gouvernement ne peut ?tre la vertu ni l'honneur, car l'un et l'autre s'opposent ? un tel pouvoir et ? une telle ob?issance: le despotisme ne repose que sur la crainte. La crainte du souverain est ? la fois le frein du peuple et sa protection; car le peuple ?tant trop faible pour que le prince le craigne, c'est surtout contre les grands que s'exerce sa puissance, et la crainte des grands fait seule la s?curit? des petits.

Nous avons consid?r? deux choses dans les gouvernements: d'abord ce qui les fait ?tre, leur structure; ensuite ce qui les fait agir, ou leurs principes. Il reste ? ?tudier ce qui les perd, c'est-?-dire leur corruption.

La corruption de chaque gouvernement commence toujours par celle des principes. Le principe de la r?publique ?tant la vertu, la r?publique se corrompt lorsqu'elle perd sa vertu. Mais comme il y a deux esp?ces de r?publiques, la corruption n'est pas la m?me pour toutes les deux. La d?mocratie se perd par la perte de l'esprit d'?galit?, ou par l'exag?ration de cet esprit. Le premier de ces maux conduit ? l'aristocratie ou au gouvernement d'un seul, et le second entra?ne d'abord au despotisme de tous, et ensuite au despotisme d'un seul. Le caract?re de la d?mocratie est bien l'?galit?, mais l'?galit? r?gl?e: <> Lorsque la corruption est arriv?e ? ce point que le peuple ne reconna?t plus aucun lien, qu'il n'ob?it plus aux magistrats, qu'il cesse de respecter les vieillards, que le libertinage est partout, la libert? est bien pr?s de p?rir. <> Ce passage de la d?mocratie extr?me ? la tyrannie a ?t? observ? par tous les publicistes. Platon exprimait cette grande v?rit? dans son langage po?tique et figur? quand il disait: <>

Quant ? l'aristocratie, elle se corrompt lorsque la noblesse cesse d'?tre unie avec le peuple, lorsqu'elle ne commande plus par les lois ou par la justice, lorsque le pouvoir se resserre ou se rel?che, et devient ou tyrannique ou faible; enfin quand les nobles sentent plus les d?lices du commandement que ses p?rils, et qu'ils croient n'avoir plus rien ? redouter.

L'?me du gouvernement monarchique ?tant l'honneur ou le pr?jug? de chaque ?tat et de chaque condition, ce gouvernement se perd avec ce pr?jug? m?me, lorsque l'ob?issance se change en servitude, que le peuple et les grands, au lieu de sujets loyaux, deviennent des instruments m?pris?s du prince et d'eux-m?mes; lorsque l'honneur est mis en contradiction avec les honneurs, et que l'on peut ?tre ? la fois charg? d'infamie et de dignit?s; lorsqu'? la place des lois le monarque met sa volont?; lorsque, changeant sa justice en s?v?rit?, il place, comme les empereurs romains, une t?te de M?duse sur sa poitrine; lorsque, supprimant les pouvoirs interm?diaires, il veut tout faire par lui-m?me et ram?ne l'?tat entier ? lui seul, enfin lorsqu'il est plus amoureux de ses fantaisies que de ses volont?s. Quant au gouvernement despotique, il se corrompt sans cesse, puisqu'il est corrompu de sa nature.

CRITIQUE DE LA TH?ORIE DES GOUVERNEMENTS.--Telle est la th?orie c?l?bre des trois gouvernements et de leurs principes. Nous avons expos? les id?es de Montesquieu sans y intervenir, afin qu'on les v?t dans leur suite et dans leur force. Mais il faut les examiner de plus pr?s.

Selon Montesquieu, il y a trois gouvernements primitifs, qui se distinguent par leur nature et par leur principe: c'est le r?publicain, le monarchique et le despotique. Cette division a soulev? beaucoup d'objections qui nous paraissent fond?es.

Mais c'est un autre d?faut de la th?orie de Montesquieu de s?parer absolument, comme deux genres ? part, le despotisme de la monarchie. Il a raison, sans doute, de distinguer le gouvernement d'un seul, limit? par des lois fondamentales, et le gouvernement d'un seul livr? au seul caprice. Mais cette distinction peut avoir lieu dans tous les gouvernements. Il y a des d?mocraties o? le peuple ne commande que par ses caprices, au lieu de gouverner par les lois; il y a aussi des aristocraties o? la volont? des nobles tient lieu de lois fondamentales. De l? la distinction antique des six gouvernements, trois bons et trois mauvais: les premiers ob?issant aux lois et voulant le bien des sujets, les seconds n'ob?issant qu'? leur fantaisie et ne cherchant que leur propre bien. On peut choisir, sans doute, ce principe de division et commencer par reconna?tre deux grandes classes de gouvernements, selon qu'ils ob?issent ou n'ob?issent pas ? des lois, et diviser ensuite chacune de ces classes en trois esp?ces, selon que le pouvoir est entre les mains d'un, de plusieurs et de tous; on peut, au contraire, prendre pour principe de division la distribution de la souverainet?, et obtenir ainsi trois gouvernements fondamentaux, que l'on subdivisera ensuite chacun en deux esp?ces. Mais on ne peut pas m?ler ces deux principes, et distinguer la monarchie de la d?mocratie par l'un, et la monarchie du despotisme par l'autre.

En outre, si on y regarde de plus pr?s, on verra que la diff?rence de la monarchie et du despotisme n'est pas aussi grande que le dit l'auteur. Car, dans la monarchie pure , dans la monarchie, dis-je, le prince, except? un tr?s petit nombre de lois fondamentales, peut toujours changer les lois; s'il ne les change pas, c'est qu'il ne le veut pas. Sa volont? est la supr?me loi: c'est l? le principe m?me du despotisme. Pour qu'il ne p?t absolument pas changer les lois, il faudrait qu'elles fussent prot?g?es et garanties par un pouvoir ou par certains pouvoirs d?termin?s. Mais c'est alors une monarchie limit?e, aristocratique, parlementaire, repr?sentative, selon la nature des limites qui sont oppos?es au pouvoir royal. C'est un gouvernement mixte; ce n'est plus la monarchie proprement dite. Sans doute, il y a des monarchies o? le monarque gouverne selon les lois, et cela est ordinaire dans les pays ?clair?s et civilis?s; mais en droit, la monarchie, si elle est absolue, peut toujours changer la loi; et si elle n'est pas absolue, elle n'est plus la monarchie dont il est question; elle est une de ces innombrables transactions, qui s'?tablissent dans la pratique entre les formes ?l?mentaires de la politique, mais qui ne doit pas entrer dans une division abstraite et scientifique, o? l'on prend les id?es dans leur g?n?ralit?.

D'ailleurs, s'il n'est pas exact de dire que la monarchie soit n?cessairement soumise ? des lois fixes, est-il plus exact de dire que le despotisme n'est soumis absolument ? aucune loi? A qui fera-t-on croire que le gouvernement des Turcs, des Persans et des Chinois soit absolument sans r?gle, sans frein, sans usages, sans quelque chose enfin qui limite la volont? arbitraire du prince ou de ses subordonn?s? Qu'une telle forme de gouvernement se rencontre par hasard, lorsqu'un Caracalla ou un H?liogabale occupe le tr?ne, cela ne peut pas se nier; mais que ce soit l? une forme normale et vraiment essentielle de gouvernement parmi les hommes, c'est ce qui est contraire ? la nature des choses. Je veux que, dans les gouvernements orientaux, il y ait moins de lois que parmi nous, moins de respect de la personne et des biens, et surtout rien qui ressemble ? ce que nous appelons une constitution; enfin, il y a sans doute des diff?rences entre les gouvernements barbares et les gouvernements civilis?s; mais cette diff?rence n'ira pas jusqu'? faire que les hommes ne soient que des brutes. C'est ce qui arriverait, s'il pouvait exister un gouvernement semblable ? celui que d?peint Montesquieu sous le nom de despotisme. En un mot, il n'y a point de diff?rence essentielle entre le despotisme et la monarchie: <>

Si la diff?rence que Montesquieu signale entre la monarchie et le despotisme n'est pas essentielle, si la monarchie ne gouverne pas n?cessairement selon des lois fixes, et si le despotisme n'est pas n?cessairement priv? de toutes lois, il s'ensuit que le despotisme n'est qu'une forme abusive de la monarchie, comme la d?magogie est une forme abusive de la d?mocratie, et l'oligarchie de l'aristocratie. Nous revenons donc ? la division d'Aristote, qui nous para?t simple, rigoureuse, scientifique, et qui suffit parfaitement ? toutes les th?ories.

De la division des gouvernements selon leur nature, passons ? l'examen de leurs principes. Il y a l? sans doute une id?e originale et profonde. Un gouvernement existe, il dure. Pourquoi dure-t-il? N'est-ce pas en vertu d'un ressort int?rieur, qui l'anime, qui le meut, qui le fait agir, et qui enfin le fait vivre jusqu'? ce que, s'usant lui-m?me, il entra?ne l'?tat avec lui? Cette recherche philosophique du principe des gouvernements est donc une des innovations heureuses de Montesquieu dans la science politique; et quoiqu'elle soit souvent paradoxale et arbitraire, peut-?tre m?me insuffisante, elle est cependant digne d'admiration.

Parmi les trois, ou plut?t les quatre principes reconnus par Montesquieu, il y en a deux qui sont vrais: c'est le principe de la vertu et le principe de la crainte. Nous y reviendrons tout ? l'heure. Il y en a deux autres qui paraissent vagues et mal d?finis: c'est le principe de l'honneur et celui de la mod?ration.

Ce dernier surtout est certainement ce qu'il y a de plus faible dans la th?orie de Montesquieu. La mod?ration n'est qu'une limite, elle n'est pas un principe d'action; elle emp?che de se perdre, mais elle ne donne ni la vie ni le mouvement. Elle n'est d'ailleurs pas plus propre au gouvernement aristocratique qu'? tout autre. Il est ?vident qu'elle est n?cessaire ? tout gouvernement qui veut vivre. La monarchie sans mod?ration tombe dans le despotisme, et la d?mocratie sans mod?ration tombe dans la d?magogie ou dans la tyrannie. La mod?ration est le principe conservateur de tous les ?tats et de toutes les formes de gouvernement; elle n'est pas le principe particulier d'aucune d'elles.

L'honneur est un principe ing?nieusement trouv? pour expliquer la diff?rence de la monarchie et du despotisme. Mais c'est un principe vague et mal expliqu?. <> Mais en quoi consiste ce pr?jug?? <> L'honneur semble donc ?tre la m?me chose que la vanit?. <> Voici l'honneur qui devient l'ambition. Plus loin, Montesquieu d?finit l'honneur: <> Rien n'est plus vague. Il le d?termine un peu plus quand il dit <>; et <> Enfin, lorsqu'il ajoute que <>, il est ?vident qu'ici l'honneur n'est plus seulement le pr?jug? de chaque personne et de chaque condition; il est d?j? une sorte de vertu et une partie de la vertu.

Reprenons la th?orie de Montesquieu, et nous inspirant librement de ses principes, cherchons ? lui donner plus de clart? et de pr?cision.

Il y a deux principes naturels dans l'homme, et qui donnent naissance aux deux formes principales de gouvernement, ? celles que Platon appelle les deux constitutions m?res, la monarchie et la d?mocratie. Ces deux principes sont l'amour du repos et de la libert?. Ces deux principes sont identiques: car, aimer la libert?, est-ce autre chose que vouloir jouir en repos et en paix de toutes les forces de notre nature qui ne sont point contraires au bonheur des autres? Et aimer le repos n'est-ce pas vouloir ne pas ?tre troubl? dans l'usage l?gitime de sa libert?? Mais quoique ces deux principes soient identiques par leur nature, ils se distinguent cependant dans leurs effets. Car l'un a plus de rapport avec le go?t du mouvement, et l'autre avec le go?t de l'inertie et de l'immobilit?. L'un demande ? agir, ? se d?velopper dans tous les sens, ? tenter toujours de nouvelles aventures; l'autre aime ? demeurer dans certaines limites consacr?es, ? tourner dans un cercle toujours le m?me, et ? ne pas s'affranchir de certaines habitudes et de certains liens. L'un pr?f?re la nouveaut? ? la s?curit?. L'autre craint la nouveaut?, comme ennemie de toute s?curit?. L'un se contente peu du bien-?tre mat?riel, et se repa?t toujours d'un bien-?tre d'imagination. L'autre craint l'inconnu, et aime ? jouir tranquillement de ce qu'il poss?de certainement. L'un aime ? critiquer, censurer, discuter, et ne veut pas se soumettre sans savoir pourquoi. L'autre ne veut pas se troubler d'examiner ce qu'il ne comprend pas, ce qu'il ne tient pas ? comprendre: il abandonne volontiers le soin des affaires, et ne s'en m?le que le moins qu'il peut.

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