Read Ebook: Geofroy Tory Painter and engraver; first royal printer; reformer of orthography and typography under François I. by Bernard Auguste Ives George Burnham Translator
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Ebook has 129 lines and 5025 words, and 3 pages
- Non pas ? m'arr?ter, mon ami, car tu l'as fait avec une cr?ne d?sinvolture, il faut l'avouer! Tout au plus as-tu h?sit? ? me questionner pour t'assurer de mon identit?. Je b?nis le hasard qui me fait te rencontrer justement le jour de ton arriv?e ici quand moi-m?me j'y suis pour quelques heures seulement. Je retourne apr?s-demain ? Paris, mais je viens voir ma m?re toutes les fois qu'il m'est possible de m'arracher ? mes occupations.
Les deux jeunes gens avaient tout en causant remont? la rue. Robert s'arr?ta devant une vieille maison ? laquelle on arrivait par un perron de trois marches, profond?ment us?es au milieu par les pas de nombreuses g?n?rations. De chaque c?t? une rampe en fer offrait un appui pour les gravir. Le docteur sonna, et se tournant ensuite vers Jacques, il lui dit:
- Sois le bienvenu dans cette ch?re demeure qui m'a vu na?tre apr?s avoir abrit? un nombre consid?rable de Martelac, peu fortun?s, je crois, si j'en juge par l'aspect de la maison qu'ils m'ont l?gu?e.
Cette maison, en effet, ne pouvait donner une haute id?e de la fortune de ses propri?taires pass?s et pr?sents. Humblement retir?e, un peu en arri?re de l'alignement de la rue, elle semblait faire timidement place ? deux constructions neuves qui s'?taient ?lev?es de chaque c?t? d'elle et l'?crasaient de leur jeunesse arrogante. Son toit affaiss? ?tait couvert de tuiles brunies par le temps et ses fen?tres s'ouvraient, les unes larges au-del? de l'ordinaire, les autres longues et ?troites comme des meurtri?res, suivant le go?t capricieux de l'architecte charg? de la construire. La lumi?re tremblotante des becs de gaz rev?tait sa fa?ade noircie d'une teinte jaune, tandis qu'elle faisait briller par instants la blancheur neuve de ses voisines.
Madame Martelac ?tait venue habiter l? aussit?t apr?s son mariage; son fils y ?tait n?, son mari y ?tait mort et pour rien au monde elle n'e?t consenti ? abandonner cette demeure impr?gn?e de ses souvenirs.
Le jeune docteur avait appris de sa m?re ? aimer la vieille demeure des Martelac, et appuy? sur la rampe de l'escalier, il jeta sur elle un regard d'affection.
- Elle est laide, vieille et pauvre d'apparence, dit-il en souriant, trois qualit?s avec lesquelles on ne r?ussit gu?re en ce monde! Et pourtant, je l'aime, car c'est pour moi la maison.
La porte, en s'ouvrant, emp?cha Jacques de r?pondre. Il suivit son ami dans le long corridor ?troit et sombre qui servait de vestibule et dont la lumi?re tenue par la domestique ne pouvait ?clairer les profondeurs lointaines.
Le salon, ouvrant sur ce corridor, ?tait d'une simplicit? presque monacale. Il ?tait grand, assez bas d'?tage et entour? de si?ges raides et froids sous leurs housses de bazin gris ray? de rouge.
Autour des murs, quelques portraits de famille offraient d'honn?tes et parfois d'intelligentes physionomies des Martelac d?funts, braves gens de moyenne condition qui s'?taient fait peindre, fiers et dignes, dans leurs habits de gala. Leurs ?pouses, en beaux atours, minaudaient, les unes avec une fleur ? la main, les autres avec un trousseau de clefs, symbole de leurs attributions de m?nag?res.
On respirait dans cette pi?ce cette vague odeur de moisi et de renferm?, particuli?re aux anciennes maisons de province habit?es depuis des si?cles par des familles enserr?es dans les humbles pr?occupations d'une ?conomie obligatoire ou voulue. Mme Martelac a?rait pourtant l'appartement lorsque son fils venait ? Poitiers; car d'ordinaire le salon restait ferm?, la bonne dame se tenant dans sa chambre et y recevant ses connaissances intimes. Mais lorsque le docteur annon?ait son arriv?e, on permettait au soleil d'entrer et de venir caresser les murs tendus de papier ? fleurs bleues que l'humidit? faisait tourner au jaune ou au vert en certains endroits.
Connaissant les go?ts artistiques de son fils et ayant entrevu le luxe raffin? qui p?n?tre les plus s?v?res int?rieurs parisiens, elle avait essay? de donner ? cette pi?ce une apparence plus ?l?gante. Sa t?che ?tait difficile, surtout pour elle, dont la vie s?v?re et uniquement remplie par d'obscurs devoirs l'avait rendue inhabile en ces sortes de choses.
Au-dessus de la chemin?e, un grand christ attestait les id?es chr?tiennes de Mme Martelac; au-dessous ?taient suspendues les photographies de son mari et de son fils. Devant la pendule ? colonnes recouverte d'un globe, se voyait une petite statue de sainte Radegonde, reine de France et patronne de Poitiers, o? son culte demeure populaire malgr? la diminution de la foi dans notre temps.
Certainement, l'aspect de ce salon ?tait peu agr?able, pour suite de sa nudit? mesquine. Mais la paisible physionomie de Mme Martelac mettait un rayon adouci au milieu de cette pauvret?.
- Ma m?re, je vous pr?sente mon ami, Jacques Hilleret, dit Robert en entrant.
La t?te de la ma?tresse de maison, pench?e sur son ouvrage, se releva et son sourire fut ?clair? par la lumi?re de la lampe pr?s de laquelle elle travaillait. Jacques ne vit plus cette pi?ce froide et sombre, mais seulement ce sourire bienveillant, et il se sentit imm?diatement conquis.
La m?re du docteur ?tait une femme de cinquante ans dont le visage presque diaphane laissait entrevoir au regard attentif une partie des privations et des souffrances qu'elle avait endur?es. D'un caract?re calme et fort, elle avait support? les longues ?preuves d'une vie difficile, non seulement sans se plaindre, mais sans para?tre m?me les remarquer, courageusement, le regard vers Dieu, demandant peu de chose aux autres et beaucoup ? elle-m?me. Bien qu'elle f?t tr?s intelligente, elle ne s'?tait jamais d?partie du r?le effac? que la plupart des femmes de sa classe jouent dans la famille. Son mari, tr?s inf?rieur ? elle sous le rapport de l'instruction, ne s'en ?tait jamais dout?, tant il avait confiance en lui et tant elle savait mettre d'affectueuse humilit? ? entretenir cette confiance.
- Pardonnez-moi de me pr?senter ? pareille heure, Madame, dit Jacques en s'avan?ant dans le cercle de lumi?re circonscrit par l'abat-jour de la lampe. Arriv? dans la journ?e, je me promenais avant d'aller me renfermer dans une chambre d'h?tel lorsque j'ai eu le bonheur de rencontrer Robert. Il a insist? pour m'amener ici et je me suis laiss? tenter.
Mme Martelac tendit la main au jeune homme:
- Je suis enchant?e de vous recevoir, Monsieur, et Robert sait combien je suis heureuse de faire la connaissance d'un ami dont je lui ai souvent entendu prononcer le nom.
Elle pria son fils de sonner afin de pr?venir Catherine qu'elle e?t ? pr?parer la chambre du lieutenant.
- Je ne sais si vous vous trouverez mieux chez moi que dans une chambre d'h?tel, mais, du moins, vous dormirez sous un toit ami.
- Demain, afin de ne pas abuser de votre hospitalit?, Madame, dit Jacques, je me mettrai en qu?te d'un logement; mais je suis on ne peut plus reconnaissant d'?chapper ce soir ? la banalit? de l'h?tel, gr?ce ? votre aimable invitation. Dans notre vie de campements souvent transport?s d'une endroit ? l'autre, c'est un vrai plaisir pour nous de saisir au passage une soir?e de famille.
- Peut-?tre trouvera-t-on ? te loger dans nos environs, dit le docteur.
- Il y a un petit appartement ? louer chez Nicolas Larousse, le marchand de vieux meubles, dit Mme Martelac. J'ai vu l'affiche ces jours-ci en passant.
- C'est assez pr?s de nous, au bas de la rue. Si tu veux, Jacques, nous pourrons aller voir ensemble s'il te convient? demanda Robert.
- Volontiers. Je serai heureux d'habiter dans votre voisinage.
- Mais rien ne presse, reprit la ma?tresse de la maison. Restez avec nous jusqu'? ce que vous trouviez ? vous caser ? votre fantaisie.
A peine les deux jeunes gens ?taient-ils dans le salon qu'on sonna de nouveau ? la porte de la rue, et un instant apr?s une jeune fille, grande, belle et fra?che comme la jeunesse elle-m?me, entra dans l'appartement. Elle embrassa Mme Martelac en la nommant sa tante, donna une poign?e de main ? Robert, dont le regard se leva vers elle avec une expression qui n'?chappa point ? Jacques et salua celui-ci, tandis que la m?re du docteur les pr?sentait l'un ? l'autre.
Comme vous avez bien fait de venir, Anne! dit Robert en s'empressant pour lui offrir un fauteuil.
- Mon p?re m'a amen?e en allant ? son cercle. Je n'?tais pas ? la maison tant?t quand vous y ?tes venu et j'ai voulu vous voir un moment ce soir.
Le visage du docteur s'illumina ? cette r?ponse, et profitant d'un moment o? Mme Martelac d?tournait l'attention du lieutenant en lui adressant une question, il se pencha vers sa voisine et demanda ? voix basse:
- Vous ?tes venue pour moi, alors? Merci, Anne.
Celle-ci sourit sans r?pondre et ses grands yeux bleus se d?tourn?rent du regard reconnaissant qu'ils semblaient refuser de comprendre.
La soir?e se passa gaiement jusqu'au moment o? M. Duplay vint reprendre sa fille. Anne plaisantait, causait, brillait et paraissait ravie. Les yeux de Jacques s'arr?taient involontairement sur ce beau visage resplendissant, et la jeune fille, ? laquelle n'?chappait point cette admiration, semblait l'agr?er comme un tribut auquel elle ?tait accoutum?e.
- Ma tante, dit-elle tout ? coup, mon p?re consent ? m'emmener ? Royan cette ann?e. Nous y passerons un mois et je suis en ce moment fort occup?e de mes toilettes.
- Ceci est une grave question! dit Mme Martelac en souriant.
- Oh! tr?s grave, r?p?ta Anne en frappant ses deux mains l'une contre l'autre.
- Ne serez-vous pas toujours la plus belle? dit Robert, regardant le fin visage auquel la lumi?re laissait des ombres adoucies et vaporeuses.
Un sourire le remercia de ce compliment ?chapp? ? sa gravit? habituelle.
- Peut-?tre! r?pondit Anne, avec un doute m?lang? pourtant d'une na?ve confiance. Toutefois, il faut venir en aide ? la nature et j'ai pass? de longues heures ? combiner mes costumes.
- Et qu'as-tu choisi, ch?re enfant?
- Une toilette rose, une bleue et une... Oh! mais je n'ose pas vous le dire! Cela va vous sembler absurde.
En disant ce dernier mot, elle parut s'adresser, non pas ? Mme Martelac, ? laquelle elle r?pondait, mais ? Robert. Pench? devant elle et paraissant sous le charme, il ?coutait ? peine le babillage de sa cousine, absorb? qu'il ?tait par la contemplation de sa beaut?. Il revint ? lui en voyant son regard devenu subitement interrogateur.
- N'est-ce pas, Robert, vous allez bl?mer mon go?t?
- Pourquoi cela?
- Parce que vous ?tes la raison m?me, vous! dit-elle avec une l?g?re expression de raillerie.
- Eh bien! la troisi?me? demanda Mme Martelac.
- La troisi?me est rouge des pieds ? la t?te! Et m?me au-dessus de la t?te, car l'ombrelle est assortie. Robe, chapeau, voile, tout d'un rouge ?clatant! Ce sera d?licieux!
- Vous porterez cela? dit Robert.
- Certainement. Pourquoi ne le ferais-je pas?
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