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Ebook has 34 lines and 4974 words, and 1 pages
ZOLA
Par
EMILE FAGUET de l'Acad?mie Fran?aise Professeur ? la Sorbonne
Prix: 10?
?mile Zola
Je ne m'occuperai ici, strictement, que de l'oeuvre litt?raire de l'?crivain c?l?bre qui vient de mourir.
?mile Zola a eu une carri?re litt?raire de quarante ann?es environ, ses d?buts remontant ? 1863 et sa fin tragique et pr?matur?e ?tant survenue,--alors qu'il ?crivait encore et se proposait d'?crire longtemps,--le 29 septembre 1902. Pendant ces quarante ann?es, il a ?crit une quarantaine de volumes, ce qui a fait pousser des cris d'admiration ? ses thurif?raires et ce qui n'est qu'une production normale, beaucoup moins intense que celle de Voltaire, de Corneille, de Victor Hugo, de Guizot, de George Sand ou de Thiers. En g?n?ral, il <
Ses ?tudes, o? il avait brill? surtout en th?me latin, en r?citation et en instruction religieuse, avaient ?t? fort bonnes. Il semble ne les avoir pas compl?t?es par cette ?ducation que l'on se donne ? soi-m?me et qui est la seule qui vaille, ayant, d?s la vingti?me ann?e, ?t? forc? de gagner sa vie d'abord comme employ? de librairie, ensuite comme ?crivain. Il ?crivit trop t?t. Tout homme qui ?crit avant trente ans et qui ne consacre pas l'?ge d'or de la vie, de la vingti?me ann?e ? la trenti?me, ? lire, ? observer et ? r?fl?chir, sans ?crire une ligne, risque de n'avoir pas de cerveau et de n'?tre qu'un ouvrier litt?raire. Il y a des exceptions; mais elles sont rares.
Dans ces productions de jeunesse, qui ne furent point sans attirer l'attention, ce qu'on remarquait, c'?tait le talent de description, qui ?tait tr?s grand. Les objets sollicitaient vivement l'oeil d'?mile Zola, comme celui d'un peintre. Il voyait avec nettet? et surtout dans un grand relief les collines rousses de la Provence, comme les berges vert p?le de la Seine. Les choses avaient pour lui, non pas encore une ?me, mais d?j? une physionomie assez pr?cise et surtout qu'il aimait ? regarder et qu'il s'essayait ? rendre.
Du reste, aucun souci n'apparaissait en lui de se faire des id?es g?n?rales ou de se munir d'observations. Il lisait peu et uniquement des auteurs contemporains pour les traiter avec un m?pris souverain dans quelques essais de critique ou plut?t de pol?mique litt?raire. Il est ?vident que, non seulement il n'a jamais su un mot d'histoire, mais qu'il n'a jamais ouvert un historien, ni un auteur de m?moires. Pas un mot, non plus, de philosophie, ? quoi, je crois, du reste, qu'il n'e?t rien compris.
Cela se ram?ne ? ceci: un romancier qui a pour premier soin de ne pas ?tudier l'homme. On ?tudie l'homme pour en avoir une id?e bien incompl?te, mais encore une id?e; dans les psychologues, dans les moralistes, dans les philosophes, pour voir quelle id?e g?n?rale il se fait de l'ensemble des choses et par cons?quent quelles sont les tendances g?n?rales, tr?s diff?rentes, du reste, de son ?me; dans les historiens, pour voir ce qu'il a ?t? aux diff?rents temps, ce qui ?largit et compl?te et fait plus vraie la notion qu'on peut avoir de lui; en lui-m?me enfin, ce qui n'est qu'une fa?on de parler et ce qui veut dire qu'on regarde avec attention ses amis, ses voisins et les gens que l'on rencontre.
Je ne crois pas que Zola ait jamais employ? un seul de ces moyens d'observation. Il ?tait de ceux qui, soit paresse d'esprit, soit faiblesse intellectuelle, soit orgueil, et je crois qu'il y avait quelque chose de tout cela dans le cas d'?mile Zola, n'aiment que leur m?tier proprement dit et n'aiment rien de ce qui y pr?pare et y rend propre; n'aiment qu'? peindre, qu'? sculpter o? ? ?crire, et n'aiment ni ? regarder longtemps avant de peindre, ni ? ?tudier l'anatomie avant de sculpter, ni ? penser avant d'?crire. Zola ?crivait comme le M?ridional parle, par besoin naturel et sans se pr?occuper de ce qu'il aurait ? mettre dans ses ?critures pour qu'elles eussent de la solidit? et parussent au moins contenir quelque chose. Les ann?es d'apprentissage d'?mile Zola sont, non seulement les moins m?thodiques, ce qui serait peu grave chez un artiste, mais les plus vides, les plus creuses et les plus nulles de toutes les ann?es d'apprentissage des ?crivains connus.
Ainsi d?sarm?, il entra dans le champ de bataille vers 1870. A cette ?poque, il eut une id?e, la seule qu'il ait eue de sa vie. Il s'avisa de l'h?r?dit?. Avec un peu de Taine mal compris et peut-?tre de Claude-Bernard mal lu, et peut-?tre avec le souvenir d'une boutade de Sainte-Beuve: <
Comme dit Joseph Prudhomme, au fond c'?tait superficiel; autrement dit, en r?alit?, ce n'?tait que la fa?ade de son oeuvre. Il avait dans l'id?e de peindre des gens de haute classe, des bourgeois, des ouvriers, des artistes, des paysans, comme tout romancier plus ou moins r?aliste, et il trouvait ing?nieux et de nature ? donner un air scientifique ? ses ouvrages, du moins aux yeux des commis-voyageurs, d'?tablir entre ces diff?rents personnages des liens imaginaires et tout arbitraires de parent? et d'alliances. Personne, du reste, ne fit la moindre attention ? cet arbre g?n?alogique et on lut les diverses histoires des Rougon et des Macquart sans se pr?occuper un seul instant de savoir ? quel degr? tel Macquart ?tait parent de tel Rougon et comment tel Rougon ?tait alli? ? tel Macquart.
De plus, Zola ?mit cette pr?tention que ses romans ?taient des romans <
Mais ce dont on s'aper?ut surtout, c'est que personne ne se trompait plus que M. Zola sur ce qu'il faisait. Il se croyait observateur, documentaire et, en un mot, r?aliste; il ?tait, il restait et il devenait de plus en plus un romantique en retard, mais un romantique effr?n?. Comme les romantiques, il n'avait aucun instrument psychologique ni le moindre souci d'en avoir un, et il disait lui-m?me ce mot ?bouriffant de la part d'un romancier: <
Comme chez les romantiques, la description prenait le pas sur tous les sports litt?raires, envahissait tout, absorbait tout, noyait tout, ruisselait ? travers les pages, se r?pandait en flaques, en ?tangs, en lacs, en oc?ans et en marais. Chateaubriand, Hugo, Lamartine, Balzac ?taient d?pass?s et paraissaient maigres descripteurs, comme Jean-Jacques Rousseau avait paru tel aupr?s d'eux. Le <
Comme chez les romantiques, le pessimisme et la misanthropie coulaient, aussi, ? pleins bords. Le monde entier pouvait dire en se regardant en ce miroir: <
Il ne faut pas s'y tromper. Ceci encore est du romantisme. Malgr? le grand optimisme ing?nu de Victor Hugo, la m?lancolie romantique n'est pas autre chose que misanthropie et pessimisme. La grande ?me contemptrice et d?sol?e de Chateaubriand, si souvent retrouv?e partiellement par Musset, par Gautier, par Vigny, par Lamartine lui-m?me, le temp?rament neurasth?nique des romantiques, est l'?me m?me, intime et profonde, du romantisme; et si Vigny est consid?r? ? pr?sent, plus que tout autre, comme le repr?sentant du romantisme, c'est que du romantisme il a n?glig? le magasin des accessoires, mais exprim? plus fortement que personne l'esprit m?me.
Enfin, comme chez les romantiques, il y avait chez Zola le manque de finesse et l'horreur de la v?rit?. Comme l'a dit spirituellement M. Jules Lema?tre, d?s 1865 M. Zola ?tait ce qu'il devait devenir, <
Et comme les romantiques il avait l'horreur m?me de la v?rit?. Les romantiques vivent dans l'imagination comme le poisson dans l'eau et ont la crainte de la v?rit? comme le poisson de la paille. Elle les g?ne, parce qu'elle les limite, les r?prime, les refoule et les ?touffe. Elle les emp?che d'inventer, de cr?er et comme de produire. C'est leur vocation, leur pr?destination et leur office propre d'?carter la v?rit? apr?s que, pendant une certaine p?riode de temps, des ?crivains, en s'y attachant trop, ont appauvri l'imagination d'un peuple et comme dess?ch? son esprit. Rappelez-vous les impr?cations de Lamartine, vers 1825, contre le temps du premier Empire. Ce n'est pas contre la litt?rature mani?r?e de cette ?poque qu'il invective. Eh! non. Il la m?prise silencieusement et il l'ignore. C'est contre l'esprit scientifique. Ah! l'horrible temps? On n'y faisait que des math?matiques! Le romantisme est un appel ? la libert? du r?ve et une insurrection contre le r?el, la <
Chez Zola, m?me tendance. On a relev? des inadvertances et des ?tourderies de d?tail, la p?che des crevettes roses et le nouvel Op?ra vu des hauteurs du Trocad?ro, ? une ?poque o? il n'existait pas. Mais ce sont des riens. L'horreur de la v?rit? appara?t ? ceci qu'avec une documentation assez consciencieuse et s?rieuse, jamais, non jamais, ni un homme ni une femme ne nous appara?t dans un roman de Zola tel qu'il nous fasse dire: <
Les personnages des romantiques n'ont rien de cela , les personnages des romantiques sont des abstractions vivifi?es, quelquefois magnifiquement, par le r?ve. Les personnages de Zola sont des abstractions encore plus vides, vivifi?es par un r?ve triste de mat?rialiste grossier, au lieu de l'?tre par le r?ve bleu d'un id?aliste en extase. Non seulement ils ne sentent pas la r?alit?, mais ils r?v?lent l'horreur qu'a leur auteur ? l'?gard de la v?rit?. Cela se voit ? l'absence de nuances et ? l'absence de complexit?. La v?rit? humaine n'est que dans les nuances subordonn?es ? une couleur g?n?rale et dans la complexit? subordonn?e ? une tendance ma?tresse qui fait l'unit? du personnage. Julien Sorel est avant tout un ambitieux; mais il est aussi un amoureux, un r?veur, un po?te, un ami et m?me un petit-ma?tre. Dans les personnages de Balzac, d?j? un peu trop; dans ceux de Zola, extraordinairement et mis?rablement, l'?tre humain est r?duit ? une seule passion et cette passion ? une manie et cette manie ? un tic. Et le tic est un geste ?norme, parce que l'auteur a une imagination grossissante en m?me temps qu'elle est pauvre et peu nourrie; mais ce n'est qu'un tic. ?douard Ruel disait bien finement: <
C'?tait donc un romantique de second ordre, qui aurait paru tr?s mince personnage, avec son style gros et lourd et incorrect, aux environs de 1830; mais ce qui est plus int?ressant c'est de voir comment le romantisme s'est d?form? en lui. Il s'est d?form? de telle sorte que Zola sera un document d'histoire litt?raire tr?s int?ressant pour qui se demandera vers quoi le romantisme tendait sans le savoir, ? travers ses essors, ses envol?es et ses splendeurs.
C'est une d?formation moins mis?rable, mais ? peu pr?s semblable, qui s'est produite dans le cerveau d'?mile Zola. Tous les ?l?ments romantiques se sont comme avilis et d?grad?s en lui. Le sens pittoresque est devenu en lui cette couleur grosse et criarde qui fait comme hurler les objets au lieu de les faire chanter, comme disent les peintres, dans une harmonie et comme une symphonie g?n?rale selon leurs rapports avec les autres objets qui les entourent.--L'objet mat?riel anim? d'une vie myst?rieuse, qui est peut-?tre l'invention la plus originale des romantiques et d'o? est venue toute la po?sie symbolique, est devenu chez Zola, souvent, du moins, une v?ritable caricature lourde, grossi?re et pu?rile et la <
Le pessimisme et la misanthropie romantiques, si nobles chez la plupart des grands hommes de 1830, sont devenus chez lui une passion chagrine de d?nigrement syst?matique, une passion d'horreur ? l'endroit de l'humanit?, qui a quelque chose de haineux, d'ent?t?, d'?troit, de sombre et de triste comme une manie, et qui en v?rit? chez Zola n'est qu'une manie d'aveugle ou de myope. On croit sentir chez Zola une mani?re de rancune am?re contre une soci?t?, contre un genre humain plut?t, qui ne lui a pas fait tout de suite la place de premier rang ? laquelle il avait droit comme de plain-pied. Nul homme,--ce qui ne m'irrite point outre mesure, et, apr?s tout, on l'a pardonn? bien facilement ? Byron et ? Henri Heine, mais ce qui me blesse cependant un peu,--n'a plus ?prement et plus injustement calomni? son pays. Une partie du m?pris que professent ? notre ?gard les ?trangers vient des livres d'?mile Zola. Je n'attribue pas ? l'oeuvre d'un romancier populaire tant d'influence internationale que je m'avise de protester ici avec indignation. Je n'ignore pas, non plus, puisque je l'ai dit assez souvent, que la satire est un sel salutaire ou une m?decine am?re, une sorte de tonique qui souvent a son bon office et plus d'efficace que les ?mollients et les solan?es. Mais il faut qu'on sente chez le satirique un d?sir vrai, sinc?re et vif de corriger ses concitoyens en leur peignant leurs d?fauts ou leurs vices; et il faut bien avouer que dans les livres de Zola on ne le sentait nullement, mais seulement une haine cordiale et un m?pris de parti pris pour ceux dont il avait le malheur d'?tre n? le compatriote, ou ? peu pr?s le compatriote; et cela ne laisse pas d'?tre un peu d?sobligeant et un peu coupable.
Soustraction faite de la v?h?mence ins?parable d'une rupture que, du reste, on voulait rendre ?clatante, le jugement est presque juste et la condamnation n'est pas imm?rit?e.
Ainsi s'?tait d?form? et comme avili le romantisme aux mains d'un homme qui n'?tait pas capable d'en comprendre les parties hautes et qui ?tait trop pr?dispos? ? en saisir comme avec ravissement les aspects vulgaires, ou bien plut?t qui n'en pouvait comprendre que les dehors et ?tait parfaitement inapte ? en p?n?trer le fond.
M. Anatole France fut le plus dur, comme ?tant, de tous, le plus d?licat, le plus d?li?, le plus subtil, et tout au moins, aussi lettr? que tous les autres. Il dit, avec une col?re qui est peu dans ses habitudes, particuli?rement significative, par cons?quent: <
C'est ? cause de ses d?fauts. La force brutale et le d?faut de mesure ont sur les hommes ? demi lettr?s, ou qui ne sont point lettr?s du tout, un prestige incomparable. La v?rit? pla?t ? un petit nombre d'hommes, l'hyperbole ravit la majorit? des hommes. Les livres de Zola ?taient une hyperbole continuelle.
La sensualit? ?tal?e fut une des causes aussi du succ?s de ces livres. Le public aime les ouvrages o? un certain talent sert de passeport ? la pornographie et excuse de la savourer. On n'avoue pas un livre purement sensuel; on est heureux de pouvoir assurer aux autres et ? soi-m?me qu'on a lu un livre licencieux ? cause du talent qui s'y trouve. La dangereuse th?orie de M. Richepin: <
La misanthropie aussi, comme je crois l'avoir d?j? dit, flatte tellement un lecteur peu averti qui s'excepte toujours de la condamnation port?e contre le genre humain tout entier, que, si outr?e et presque maladive et folle qu'elle f?t chez Zola, elle ravissait d'aise et de joie maligne un public volontiers contempteur et prompt ? reconna?tre le prochain dans les plus noires peintures, sans songer que le prochain c'est le semblable. Enfin, une manie particuli?rement fran?aise ?tait d?licieusement chatouill?e dans les romans de Zola, le go?t d'entendre dire du mal de la France. Le Fran?ais est le seul peuple du monde qui ait ce singulier go?t; mais il est chez lui extr?mement fort. On ne peut aller trop loin, en France, dans l'expression du m?pris ? l'?gard du peuple fran?ais. Si Zola voulut faire l'exp?rience de d?passer la mesure, il dut voir qu'il ?tait ? peu pr?s impossible de la d?passer et qu'elle est, pour ainsi parler, ? l'infini.
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