Read Ebook: Miracles avec une introduction de Jacques Rivière by Alain Fournier Rivi Re Jacques Author Of Introduction Etc
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Ebook has 546 lines and 46620 words, and 11 pages
Lettre du 9 novembre 1906.
Fournier aper?oit un inconv?nient grave pour lui dans toute op?ration de discernement ou m?me d'abstraction; elle isole, elle brise un contact, pense-t-il. Et c'est de contact avec les choses, avec les gens, qu'il a d'abord besoin: <
Lettre du 19 f?vrier 1906.
Au fond, c'est sa vocation de romancier qui se r?v?le ? Fournier, d?j?, au travers de son go?t pour l'ignorance. S'il se d?robe ? toute perception et ? toute ?nonciation du g?n?ral, c'est parce qu'il entend s'?tablir sur le plan m?me de la vie et dans une sorte de commun niveau avec les ?tres particuliers.
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Lettre du 23 septembre 1905.
Lettre du 15 ao?t 1906.
Lettre du 21 avril 1906.
Il r?clame le droit d'aller trouver chaque ?tre, ? sa place, sans aucune intention ni ambition pr?alables, et simplement pour l'y vivifier de son amour et de son imagination: <
Lettre du 23 septembre 1905.
D?j? l'on a vu comment il fait sortir et pour ainsi dire engendre au courant de la plume des personnages ? la fois pr?cis et myst?rieux, que sa lettre m'apporte fragilement, comme enrob?s encore de sa pr?dilection. Il y aurait de longs passages exquis ? citer.
Toute rencontre l'?meut, toute vie entr'aper?ue; il la reconstruit aussit?t, dans son paysage, sous sa lumi?re, avec sa vibration; il s'attendrit sur elle, il ?panche sur elle le flot de son admiration, pour mon go?t un peu trop compatissante et aveugle. Je lui reproche de temps en temps son exc?s de sensibilit?, que j'appelle sans m?nagement de la sensiblerie. Il se gendarme, comme si je voulais tarir une source en lui.
C'est vrai, pourtant, ? cette ?poque, qu'il a l'?motion un peu facile devant tout ce qui se pr?sente avec humilit? ou insignifiance; les profondeurs qu'il veut y voir, je n'y comprends rien. Je suis froiss? par sa tendance ? tout transfigurer; je ne sais pas y reconna?tre ce don prodigieux qui est en train de lui venir, de rendre ? chaque objet sa dose latente de merveilleux.
Lui, pourtant , le sent d?j? se former en lui et devine tout le parti qu'il pourra en tirer.
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Autant qu'? l'abstraction, il r?pugne ? la reconstruction litt?rale et int?grale de ses mod?les. En fin de compte ce n'est pas du tout l'?paisseur des objets, ni m?me le volume des ?mes qu'il va t?cher d'exprimer. Il n'en prendra que la plus mince pellicule, et tout de suite il leur fournira une autre chair, comme immat?rielle.
L'op?ration est si particuli?re et si ?trange qu'il faut all?guer le plus de textes possible pour la faire bien comprendre: <
Lettre du 9 novembre 1906.
Donc lien, par suite de perception simultan?e, du particulier et de l'id?al, autrement dit: sublimation imm?diate, sans le secours de l'intelligence, de l'objet concret. Le r?sultat sera une transposition comme automatique de tout le spectacle abord? par l'esprit du romancier dans un monde quasi-surnaturel:
< Lettre du 13 ao?t 1905. Lettre du 24 janvier 1906. Ailleurs: < Lettre du 22 ao?t 1906. Fournier instinctivement se solidarise avec ses perceptions les plus intellectuelles, mais en m?me temps les plus constructives; il veut conserver comme principal moyen de connaissance--et de cr?ation--ce regard de l'enfant qui pr?l?ve les plus impond?rables ?l?ments du monde et aussit?t les r?agence, les combine merveilleusement, jusqu'? pouvoir loger dans le ch?teau qu'il en forme tout ce que l'?me petite et pesante, par derri?re, et souffre et d?sire. Son irr?alisme est foncier; il en ferait presque un syst?me d?j?; mais non; c'est vraiment sa nature qui s'?veille et se trouve d'embl?e tout occup?e ? l'illusion: < Lettre du 22 janvier 1906. Cf.: < Il le trouve < L'expos? que nous avait fait notre professeur de philosophie, M. M?linand, de la th?orie id?aliste du monde ext?rieur, avait profond?ment frapp? Fournier; mais non pas comme une r?v?lation faite ? son intelligence, comme une permission plut?t donn?e ? tout son ?tre d'apercevoir le monde transparent, et modifiable par nos facult?s. Lui qui tout ? l'heure marquait tant de respect pour les choses et semblait vouloir prosterner devant elles sa pens?e, ou l'y laisser se perdre, c'est dans un mouvement plus sinc?re encore qu'il s'?crie tout ? coup: < Lettre du 9 d?cembre 1905. Lettre du 4 octobre 1905. On sait l'importance qu'a le mot < Avec Rimbaud , on a la sensation que toute l'?tranget? du spectacle d?pend d'un ?clairage venant du dehors, fourni par le regard du po?te. Fournier invente une mani?re de d?sorientation plus compl?te, plus sournoise, par la sympathie. Ce n'est pas en vain qu'il insiste, dans un des passages que j'ai cit?s, sur le r?le du < Le 22 janvier 1906. Se plaignant, un peu plus tard, d'une fausse interpr?tation d'un de ses po?mes en prose, < Lettre du 31 d?cembre 1908. Oui, le fantastique,--mais qui n'est pour lui qu'une r?alit? plus grande, plus essentielle du monde per?u,--est bien la fin supr?me, et le r?sultat dernier, de toute sa d?votion sentimentale. C'est ? produire un certain d?tachement sur fond inconnu de la vie tout enti?re que tendent ses admirations et ses apitoiements. Lettre du 17 f?vrier 1906. Le don qu'il se d?couvre est ici d?fini dans sa simplicit? m?me, sous la forme o? il d?fie l'analyse. C'est le don d'illumination, au sens actif du mot, le don d'allumer au sein des ?tres et des choses, sans en rien prendre de plus que < C'est d'abord qu'il rencontra de nombreux emp?chements mat?riels. En octobre 1906, il s'?tait install? ? Paris avec sa grand'm?re et sa soeur et ?tait entr?, comme externe, en rh?torique sup?rieure ? Louis-le-Grand. Et comme il voulait cette fois, ? tout prix, r?ussir au concours de l'Ecole Normale, il avait d? suspendre compl?tement son activit? litt?raire. Malgr? tous ses efforts, handicap? d'ailleurs par une fatigue c?r?brale qui l'avait afflig? au dernier moment, Fournier, admissible ? l'?crit, ne put r?ussir ? l'oral du concours. Ainsi lui fut ferm?e d?finitivement une porte qu'il ?tait fou, quand j'y repense, de s'attendre ? voir jamais s'ouvrir devant cet esprit trop sensible, trop imaginatif, et qui ne trouvait jamais faciles que les chemins inexplor?s. Le service militaire le guettait. Il ne put profiter du r?gime des < Pourtant, ce temps d'esclavage ne fut pas sans lui apporter de secrets enrichissements; il l'employa ? explorer la vie de cette fa?on ?trange et d?licate que j'ai t?ch? de d?finir, et ? en extraire ce minerai subtil qu'elle rec?lait pour lui, dont lui seul savait rep?rer les filons. Pour la premi?re fois il entrait en contact intime, familier, avec les gens du peuple, et non plus seulement avec les paysans, avec les ouvriers aussi: il les aima, fermant les yeux ? leurs d?fauts. Il sentit l'immense mis?re et le charme enivrant de la camaraderie militaire. Il traversa ? pied, de la seule allure qui permette d'y adh?rer vraiment, une foule de pays nouveaux; il apprit la France, pas ? pas; les environs de Paris d'abord, puis la Brie, la Champagne, Mailly, puis la Touraine, puis la r?gion de Laval, o? il fut ?l?ve-officier, enfin le Gers et les Pyr?n?es,--car il fut envoy?, pour ses six derniers mois, comme sous-lieutenant, ? Mirande. Mirande me para?t marquer un moment important du d?veloppement de Fournier: le moment--comment le bien d?finir?--o? sa nostalgie d?borde. Jusque-l? elle avait ?t? quelque peu contenue et comme canalis?e par ses admirations litt?raires: la voici tout ? coup qui jaillit droite, ? l'?tat pur, du fond de son ?me. Le souvenir de son amour, qui, ? mon avis, dans son essence, comme je l'ai d?j? d'ailleurs insinu?, ?tait la simple fixation d'un mal plus vague et plus profond dont il souffrait de naissance, revient ? cet instant le traverser d'une mani?re tout particuli?rement douloureuse. Le jour anniversaire de sa rencontre avec la jeune fille du Cours-la-Reine, il m'?crit: < Lettre dat?e du Jeudi de l'Ascension 1909. Oserai-je entrer dans le vif d'un caract?re?--Pour Fournier, le moment de la plus compl?te privation est aussi celui de la pl?nitude int?rieure. Il ne faut pas que sa souffrance, qui est r?elle, nous fasse illusion. Fournier n'est lui-m?me et ne trouve toutes ses forces que dans l'instant o? il se sent vide de tout ce dont il a pourtant besoin. Il a vingt-trois ans; il n'a pas su encore < Alors--c'est ici que son caract?re devient complexe et singulier--il se sent pris ? la fois de d?sespoir et d'audace; au lieu de rien r?signer, il demande tout. Sachant bien qu'il ne l'obtiendra pas, c'est un tr?sor qu'il exige, qui lui est d?.
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