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Read Ebook: Le crime des riches by Lorrain Jean

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Ebook has 876 lines and 52979 words, and 18 pages

C'?tait une haute salle en rotonde et qu'une immense glace sans tain ?clairait toute, une glace incurv?e, dont l'?paisseur ?pousait la courbe de la muraille. Le bleu du ciel et le bleu du large entraient ? la fois par la baie, on se serait cru en pleine mer. Cette chambre de bord ?tait meubl?e de confortables si?ges anglais, divans de cuir et fauteuils de Maple. Il y r?gnait une atmosph?re de maryland, de tabac turc et d'opoponax; des tr?s beaux tapis d'Orient, fond rose et fond vert, et, sur une lourde table d'acajou, d'?normes roses Paul N?ron dans une buire de cristal ?taient le seul luxe de ce fumoir.

De Bergues le parcourait d'un regard et presque en m?me temps une porte lat?rale s'ouvrait ? gauche, livrant passage ? une femme. Elle entrait d'un pas d?lib?r?, presque masculin et tendait la main au jeune homme: <>. Et la duchesse, se laissant tomber dans un fauteuil de cuir, invitait de Bergues ? s'asseoir.

Tout cela avait ?t? si prompt et si impr?vu, qu'il avait ? peine eu le temps de l'examiner. La duchesse avait crois? n?gligemment une jambe sur l'autre dans une pose abandonn?e et virile et se pr?tait maintenant ? l'examen. C'?tait une grande femme aux ?paules carr?es et aux hanches absentes, b?tie comme un uhlan et qui n'avait plus ni fra?cheur ni jeunesse; le teint g?t? par le grand air, les paupi?res meurtries et les l?vres fan?es par la fi?vre achevaient la disgr?ce d'un visage chevalin, mais elle avait des mains admirables, des mains longues et blanches aux doigts fusel?s, sans un joyau d'ailleurs...; et ses cheveux, tordus en c?ble sur une nuque violente, ?taient d'un or solide et lourd. Coiff?e par eux d'un casque de m?tal, la duchesse ?tonnait par le contraste de sa face sombre avec la clart? de cette coruscante toison.

Plus on la regardait, plus on voulait la regarder. Sa laideur n'?tait qu'apparente. Une souplesse de f?lin animait et brisait ce corps un peu massif de jeune guerrier; la vivacit? de ses gestes, leur brusquerie voulue n'en excluaient pas une langueur passionn?e et m?me dans son attitude gar?onni?re de sportswoman aux jambes crois?es, il y avait comme une ardeur offerte.

Elle ?tait sans gr?ce, mais non sans charme, inattendue et d?concertante. Ses moindres mouvements avaient de la race et, si la face ravag?e et vieillie accusait plus de quarante ans, d'inoubliables yeux vivaient sous ses paupi?res lasses, des yeux gris et changeants, couleur de sardoine, cette pierre ?trange dont l'?clat s'avive dans l'eau. Il y avait dans les prunelles de la duchesse comme une flamme sourde et, quand elle les posait sur vous, c'?tait la sensation d'une br?lure sur la peau et d'une cuisson au coeur.

Il y eut un silence. La duchesse avait baiss? les yeux pour mieux laisser de Bergues la contempler. Elle les relevait brusquement et, les plantant hardiment dans ceux du jeune homme: <> Et sa voix sifflait un peu ironique. <

<<... Et vous, vous ?tes venu. Seul entre tous, vous avez devin? mon affreuse d?tresse, mon angoisse et ma terreur! J'?tais si malheureuse ce soir-l?, si malheureuse! Et sans me conna?tre, mais ?mu de piti? pour l'?tre douloureux que vous deviniez en moi, vous avez tenu t?te ? ces brutes, vous avez dit... ce qu'il fallait dire, je ne sais plus quoi et vous m'avez offert votre bras... et le cauchemar s'est dissip? et, vingt minutes apr?s, j'?tais ? mon h?tel; en s?ret? et je pouvais croire que j'avais fait un mauvais r?ve... et voil? pourquoi je vous tends mes deux mains, monsieur, en vous disant merci du fond du coeur.>>

La duchesse s'?tait lev?e et avait pris les mains de de Bergues dans les siennes.

Elle le regardait de haut en bas, le dominant de tout son buste et semblant jouir de sa confusion. <> Et sur un mouvement irr?fl?chi de de Bergues. <

<>

Et sur un geste de de Bergues: <

<>

Et avec une flamme bleue dans ses prunelles apparues agrandies, toute sa pauvre face transfigur?e par la passion: <

Cette lettre! le coeur me chavirait sous les c?tes en la lisant, et j'avais dans les veines le froid de la mort et la br?lure de la fi?vre. Une angoisse m'?touffait, car cette lettre ?tait la preuve de la double trahison.

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IDYLLE PRINCI?RE

<<--Le duc! mais il a ?t? le mauvais g?nie de mon existence. C'est lui qui m'a faite ce que je suis! Son ombre a pes? sur toute ma vie. Si vous saviez, si vous saviez!...>> La duchesse s'?tait lev?e et, appuy?e des deux mains sur la table, regardait ?perdument de Bergues dans les yeux, puis elle se laissait retomber sur le divan, le bras gauche pos? sur un coussin; de la main droite elle s'appliquait sur la joue une grosse rose prise ? la gerbe de la buire de cristal. Elle rafra?chissait ainsi aux p?tales la fi?vre de ses pommettes; la honte les avait faites br?lantes. Elle continuait de se tamponner le visage avec la fleur; et ce mouvement machinal, le jeune homme se souvenait l'avoir d?j? surpris chez des ?tres malades de la poitrine, ? l'heure o? monte la fi?vre du soir.

La rose rouge que la duchesse appuyait sur ses joues s'?tait effeuill?e. Elle en avait pris une autre et en promenait avidement les p?tales sur son visage brun. On e?t dit qu'elle respirait le parfum du pass? dans celui de la fleur et demandait ? cette amie odorante et muette le courage de poursuivre. La duchesse continuait. <<--Mes soeurs ?taient autrement jolies que moi, mais je passais bien ? tort pour la plus intelligente. J'avais surtout plus de d?cision, j'?tais l'?nergique de la famille. Il y a du sang espagnol dans notre branche, apport? l? par une grand'm?re, n?e Toloza-Coeli, et cette goutte de sang et de soleil, j'ai tout lieu de croire que c'est moi qui l'ai dans les veines. Mes soeurs ?taient m?lancoliques et douces, moi j'?tais volontaire et taciturne et, petite fille, j'avais d?j? ce teint de bile qui jure si violemment avec le blond de mes cheveux, et ces yeux d'orage qui autrefois furent beaux. J'?tais aussi adroite ? tous les sports. La d?cision de mon caract?re, l'?nergie que l'on me pr?tait et ma r?putation d'?cuy?re accomplie fix?rent le choix du duc r?gnant de Finlande: il demanda ma main ? mon p?re pour son fils.

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La duchesse s'?tait lev?e et, saisissant la main de de Bergue, l'avait brusquement entra?n? devant la glace sans tain de la baie: La Pergola occupe la pointe du cap d'Antibes, et, de l'angle de la pi?ce o? elle l'avait conduite, la masse de l'Est?rel ravin?e d'am?thyste et cr?t?e d'iris surgissait, pos?e ? plat sur une mer d'or p?le, avec la pr?cision d'une d?coupure. Irr?elle et chim?rique, c'?tait une montagne d'?cran japonais. Un ciel ardent et tendre, d'un rose de fleur de p?cher, flambait derri?re l'arabesque violette, imposait dans le cr?puscule une vision d'Extr?me-Orient et par la glace sans tain, que la duchesse venait d'entr'ouvrir, une odeur vanill?e et sucr?e de jasmin montait, m?l?e ? des saveurs de sel; une treille enguirland?e de b?gonias et de capucines courait autour de la maison; le soir la faisait fumer comme un immense encensoir: <>

LE SECRET DE LA DUCHESSE

<> La duchesse, debout dans l'embrasure de la baie, suivait d'un regard ?perdu l'incendie du couchant et l'agonie de nuances, la changeante agonie de la montagne et de la mer. Elle continuait comme se parlant ? elle-m?me:

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