Read Ebook: L'Architecture Gothique by Corroyer Douard
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Vers le Nord la marche est tout aussi g?n?rale. Les ?difices d?montrent le parti que les constructeurs du temps tir?rent de la crois?e d'ogives permettant, sous tous les climats, l'emploi judicieux des mat?riaux les plus divers. Mais il ?tait donn? ? Angers, son berceau, de perfectionner encore cet ing?nieux syst?me.
L'?glise de la Sainte-Trinit?, sur la rive droite de la Maine, construite par les fils ou les disciples des architectes qui avaient b?ti Saint-Maurice sur la colline dominant la rive oppos?e, marque encore un nouveau progr?s dans la construction de ces vo?tes. La nef, unique comme ? Saint-Maurice, est divis?e en trois trav?es, carr?es ou ? tr?s peu de chose pr?s. Le syst?me des vo?tes, d?rivant de la coupole sur pendentifs, s'affine en divisant et, par cons?quent, en diminuant les
charges r?parties sur les quatre points d'appui principaux par la crois?e d'ogives, qui elle-m?me se trouve
soulag?e par un arc-doubleau soutenant les arcs-ogifs ? leur point de croisement, c'est-?-dire ? la clef.
La figure 19 donne le plan de ces vo?tes dont l'exemple fut bient?t suivi par les architectes du Nord, car la grande ?glise abbatiale de Noyon para?t avoir ?t? une des premi?res copies de la nouvelle transformation des vo?tes angevines.
L'influence de la coupole, que nous avons ?tablie au chapitre premier, s'est exerc?e directement et cons?cutivement. Elle est directe sur les ?glises ? une seule nef vo?t?es sur crois?e d'ogives, et cons?cutive dans les ?glises de l'?poque dite romane, qui furent compl?t?es ou modifi?es par le vo?tement sur crois?e d'ogives en pierre appareill?e de la nef centrale, rempla?ant la charpente. Un grand nombre d'?difices, en Angleterre, en Normandie, en Allemagne, dans l'Italie du Nord, en Suisse, dans les provinces rh?nanes et celles du nord de la France, fournissent des documents des plus int?ressants sur les transformations qu'ils ont subies apr?s l'invention de la vo?te sur crois?e d'ogives et son application g?n?rale.
CHAPITRE V
ORIGINE DE L'ARC-BOUTANT.
Le mode primitif de vo?tement adopt? dans les provinces du centre de la France pour la construction des ?glises ? trois nefs, dont la principale ?tait vo?t?e en berceau plein cintre, maintenue par des demi-berceaux, n?cessitait des formes basses et lourdes; l'?difice ?clair? seulement par les fen?tres des bas c?t?s, la nef principale ?tait par cons?quent fort sombre. Les architectes normands, en Normandie d'abord et en Angleterre apr?s la conqu?te, avaient tourn? la difficult? en ne vo?tant que les bas c?t?s ? un ou ? deux ?tages, et en ?levant librement les murs lat?raux de la nef centrale, qui ?tait couverte par une charpente apparente et permettait d'?clairer la nef principale par des fen?tres m?nag?es au-dessus des toitures en appentis couvrant les bas c?t?s.
C'est alors que les murs transversaux des bas c?t?s ou les arcs-doubleaux se modifient et deviennent des arcs de sout?nement cach?s sous la toiture des collat?raux.
Nous avons vu cette modification ? l'Abbaye-aux-Dames de Caen; la figure 24 nous en donne un exemple, et on peut, en Angleterre, la suivre dans un grand nombre d'autres ?glises, en Italie ? Pavie, en
Suisse ? Zurich, sur les bords du Rhin ? B?le, pour ne citer que quelques-unes des ?glises dans lesquelles la modification des vo?tes s'est op?r?e longtemps apr?s la construction de l'?difice m?me.
En France, Noyon pr?sente un sujet d'?tudes des plus int?ressantes, parce qu'il para?t ?tre un des premiers grands ?difices r?sumant, ? l'?poque de sa construction,
On a dit que Noyon proc?de de Tournai, sans doute parce qu'on n'en consid?re que l'aspect; mais l? s'arr?te la ressemblance, car le mode de construction n'est pas semblable. A Tournai, les transsepts semi-circulaires nord et sud sont vo?t?s par des arcs-doubleaux tr?s puissants, r?unis au centre par une clef en couronne appareill?e, et au pourtour par des vo?tains en p?n?tration reliant les arcs-doubleaux, disposition tr?s ing?nieuse qui rappelle la vo?te de la salle des Capitaines au-dessus du porche de l'?glise du Moustier, ? Moissac.
La combinaison de ces arcs-doubleaux, fortement ?tablis ? l'int?rieur et solidement maintenus par les murs tr?s ?pais du circuit formant cul?e, est tr?s particuli?re, car elle ne n?cessite aucun arc de sout?nement ni m?me de contrefort. Tournai n'a donc pas engendr? Noyon, car, dans ce dernier ?difice, les vo?tes, construites sur crois?e d'ogives, devaient ?tre contrebut?es par des contreforts ou des arcs apparents ou cach?s, pour soutenir les pouss?es de ces vo?tes au-dessus des arcs-doubleaux lat?raux.
Le transsept sud de la cath?drale de Soissons proc?de ?videmment de Noyon comme parti de construction d?termin? par les bas c?t?s ? deux ?tages et la
et, par cons?quent, de toute autorit?. Il semble que les constructeurs de ce temps, depuis Noyon, Soissons, Laon, Paris, Sens et Bourges, s'enhardissant ? Reims, ? Amiens, au Mans, jusqu'? la supr?me folie architectonique de Beauvais, se soient ing?ni?s, en rench?rissant les uns sur les autres, ? cr?er des monuments aussi ?tonnants par leurs dimensions que par les probl?mes d'?quilibre qu'ils ont pos?s, sinon r?solus.
CHAPITRE VI
L'?tude des grands ?difices du moyen ?ge est des plus attachantes, mais il faut convenir qu'elle est en m?me temps des plus difficiles. L'obscurit? qui couvre l'origine de ces monuments est profonde et souvent imp?n?trable.
L'ind?cision sur la date de leur construction doit provenir de ce que la date de fondation d'un ?difice est souvent prise pour celle de sa cons?cration; g?n?ralement il a ?t? construit, puis simplement modifi? plut?t que compl?tement r??difi? sur le m?me emplacement consacr?.
La cause principale de la destruction partielle ou totale de ces ?difices religieux ?tait la foudre. Tombant sur le clocher, sur la tour ou sur la toiture, elle incendiait la charpente de la nef centrale, ce qui n'?tait qu'un accident r?parable; mais la charpente s'?croulant, les bois incandescents calcinaient les piles et entra?naient la ruine de l'?difice; on le restaurait alors ou on le reconstruisait selon les usages du temps. De sorte que, suivant que les notes historiques sont plus ou moins authentiques ou que les faits sont traduits plus ou moins fid?lement, il r?sulte souvent une confusion pour les monuments disparus ou une contradiction entre les relations transmises et les ?difices qui existent encore.
Les savants modernes, architectes et arch?ologues les plus autoris?s, n'ont pas encore fait la lumi?re totale sur cette question; ils proc?dent la plupart du temps par des hypoth?ses ing?nieuses, par des raisonnements savamment d?duits, qui ne donnent pas cependant des dates absolument s?res. Mais ce qui ne trompe pas, c'est l'?tude architectonique qu'il faut faire de l'?difice m?me, sans n?gliger, bien entendu, les documents historiques; elle ?tablit que l'art a suivi au moyen ?ge, comme en tout temps, les lois immuables de la filiation et de la transformation; elle montre le parti adopt? par les constructeurs, leurs recherches, leurs h?sitations, leurs erreurs et leurs repentirs m?me.
A Laon, qui proc?de de Noyon et du transsept sud de Soissons, l'?glise se compose d'une nef, avec transsepts, et de bas c?t?s ? deux ?tages, vo?t?s sur crois?e d'ogives, au-dessus desquels s'?l?vent des arcs-boutants--comme ? Soissons--qui maintiennent les vo?tes sup?rieures du vaisseau central.
Cette disposition des bas c?t?s prouve la continuit?
des formules normandes, de m?me que le mode de
construction des vo?tes principales d?montre l'influence persistante de la coupole.
La vo?te centrale, admirablement construite sur plan carr? comprenant deux trav?es, selon les m?thodes angevines d?rivant directement de la coupole aquitaine, indique que, si les constructeurs de l'?glise de Laon ?taient en pleine possession de ces m?thodes, ils ?prouvaient encore quelques inqui?tudes sur les fonctions de l'arc-boutant. Celui-ci est n?cessaire au droit des piles recevant les retomb?es r?unies des arcs-doubleaux et des crois?es d'ogives, mais il n'est pas rationnel que la pile interm?diaire qui ne re?oit que l'arc-doubleau de secours, secondaire par cons?quent, soit contrebut? par un arc-boutant semblable ? celui des piles principales qui re?oivent en m?me temps les arcs-doubleaux et les crois?es d'ogives.
Cet illogisme, si frappant ? Laon, ne s'est pas manifest? ? Noyon o? les architectes--ceux de la construction primitive,--avaient accus? ext?rieurement les fonctions des piles principales par des contreforts plus saillants et plus puissants que ceux des piles secondaires.
Cet immense ?difice, compos? d'une nef et de doubles bas c?t?s de hauteur ?gale, contournant le choeur semi-circulaire, para?t ?tre une des premi?res cath?drales ? cinq nefs; il marque par son plan grandiose, par la hardiesse de ses combinaisons et la perfection de ses d?tails, de sa construction, les progr?s consid?rables r?alis?s par les architectes de l'Ile-de-France.
Le parti de construction pour les galeries hautes int?rieures, vo?t?es sur crois?e d'ogives, rampantes afin d'?clairer la galerie au-dessus de la toiture des appentis couvrant le deuxi?me bas c?t?, ainsi que la hardiesse des arcs-boutants ? grande vol?e franchissant les deux bas c?t?s contrebutant les grandes vo?tes du vaisseau central, d?montrent que les constructeurs de Notre-Dame de Paris avaient adopt?, m?me dans leurs exc?s, les diverses m?thodes en usage et qu'ils les employaient avec une habilet? et une adresse incomparables.
L'influence de la coupole s'est maintenue plus longtemps par le parti adopt? pour la construction des vo?tes. Langres le prouve par la forme bomb?e de ses vo?tes, qui, malgr? leur plan rectangulaire, semblent ?tre une copie r?duite des nefs angevines.
Les nefs de Sens et de Bourges sont encore vo?t?es
La cath?drale de Sens est un exemple d'une nouvelle transformation qui s'op?re par la suppression de la galerie haute des collat?raux. Les bas c?t?s sont vo?t?s et couverts par une toiture en appentis; l'arc-boutant ? simple vol?e s'?l?ve au-dessus et vient contrebuter les vo?tes de la nef centrale. L'?difice est solidement ?tabli; sa structure est savante, mais elle est aussi illogique qu'? Laon et ? Paris, parce que les arcs-boutants qui sont ?gaux ext?rieurement ne r?pondent pas ? leurs v?ritables fonctions, puisque les pouss?es int?rieures ne sont pas ?gales.
nef centrale ne sont plus surmont?s d'un ?tage, ni ?gaux en hauteur; les deux nefs lat?rales s'?tagent afin de m?nager des jours ?clairant l'?glise . Le vaisseau central est encore vo?t? sur plan carr? comprenant deux trav?es; mais le m?me illogisme que nous avons constat? plusieurs fois d?j?, et sur lequel nous croyons devoir insister afin de le mieux conna?tre apr?s une ?tude approfondie, s'accuse encore plus ? Bourges que partout ailleurs, en raison de l'importance extr?me des arcs-boutants dont les doubles vol?es franchissent les collat?raux.
A Bourges, comme ? Sens, la partie int?rieure comprise entre le sommet des archivoltes basses et la base des fen?tres hautes: frise, litre,--ou triforium, selon la d?signation moderne,--n'est plus qu'une d?coration traditionnelle compos?e d'arcatures formant galerie de passage et occupant ? l'int?rieur la hauteur prise ? l'ext?rieur par la toiture adoss?e des bas c?t?s. A Sens, cette galerie est simple; ? Bourges, elle
est double par la disposition tr?s particuli?re r?sultant de l'?tagement des bas c?t?s, qui para?t ?tre une application des m?thodes angevines et poitevines, tr?s habilement combin?es avec celles de l'Ile-de-France.
Les dangers de ce mode de construction apparaissent plus visiblement ? Reims que partout ailleurs, en raison des dimensions colossales de l'?difice. Cependant, la disposition des arcs-boutants est plus logique que dans les ?glises et les cath?drales de Laon, de Paris, de Sens et de Bourges, parce que les trav?es ?tant sur
Mais ce qu'il faut admirer sans r?serve ? Reims, c'est la conception grandiose de l'oeuvre et sa puissante ex?cution, c'est la magnifique ordonnance de sa fa?ade occidentale et la parfaite convenance de l'ornementation, ?tudi?e et appliqu?e avec autant de sobri?t? que de justesse, qui fait de la statuaire, des chapiteaux, des frises, des crochets et des fleurons autant d'exemples de l'art d?coratif du moyen ?ge.
La cath?drale d'Amiens, commenc?e vers 1220, l'une des plus grandes cath?drales de l'?poque dite gothique, et celle qui passe pour en ?tre le chef-d'oeuvre, proc?de directement de Reims. Le plan pr?sente le m?me parti, avec cette particularit? que le choeur a pris ? Amiens une importance tr?s consid?rable par rapport ? la nef et que les piles et les points d'appui sont plus faibles et d'une hauteur beaucoup plus grande.
pour ainsi dire, de tout l'ouvrage et
fatalement la ruine totale de l'?difice. Les dangers de ces
de secours. Ils donn?rent une hauteur exag?r?e aux archivoltes et aux grandes fen?tres en diminuant leurs ?paisseurs, afin d'obtenir plus de l?g?ret?, et la vo?te de la nef centrale s'?leva ? plus de cinquante m?tres au-dessus du sol. Cette hauteur ?norme et dont l'exag?ration, par rapport ? la largeur du vaisseau, est ?vidente, n?cessita un syst?me compliqu? d'arcs-boutants, d?passant en hardiesse tout ce qui avait ?t? fait jusqu'alors. La coupe peut donner une id?e exacte de ce qu'on a appel?, justement, une folie, et ce qui doit ?tonner, c'est que cette construction ait dur?, ?tant donn?e la disposition des piles interm?diaires portant ? faux, indiqu?e par la ligne ponctu?e X , de moiti? de leur ?paisseur sur les
piles inf?rieures qui se sont d?form?es sous la charge, qui ont d? ?tre ?tr?sillonn?es et qui devront ?tre
consolid?es.
Cependant, le choeur fut achev? vers 1270 et se maintint pendant quelques ann?es; mais des d?sordres se produisirent dans ces constructions, si l?g?rement ?tablies qu'elles semblaient ?tre un ?chafaudage de pierres, et les vo?tes s'?croul?rent le 29 novembre 1284, entra?nant dans leur chute une partie des arcs-boutants, disloquant et ?branlant le reste de l'?difice. Il fallut alors, en reconstruisant les vo?tes, doubler les points d'appui dans les trav?es du choeur et des bas c?t?s et relier les arcs-boutants par des cha?nages en fer.
mais, pour la plupart, les travaux furent continu?s p?niblement et ne prirent fin que deux si?cles plus tard. Dans un grand nombre d'?difices, les travaux de reconstruction furent interrompus par suite des guerres ou des convulsions sociales, diminuant ou supprimant les ressources des constructeurs, ?v?ques et architectes, circonstances favorables aux ?tudes arch?ologiques modernes, parce qu'elles permettent de constater les transformations qui se sont accomplies sans interruption
de l'?poque dite romane jusqu'? celle dite gothique.
Ces grands ?difices, qui portent les traces des diverses fortunes qu'ils ont suivies, se ressemblent et ne
pr?sentent que des particularit?s de d?tails variant selon l'habilet? des constructeurs.
Ind?pendamment de sa remarquable statuaire, Chartres doit retenir l'attention par des arrangements ing?nieux, comme ceux de la rose du transsept nord et surtout par l'appareil des arcs-boutants; ils sont compos?s de deux arcs superpos?s, ?tr?sillonn?s par des rayons figur?s par des colonnettes surmont?es d'arcatures appareill?es et clav?es normalement ? la courbe. Au Mans, le choeur pr?sente
une disposition d'autant plus remarquable qu'elle est plus rare--peut-?tre unique en son genre. Les arcs-boutants affectent en plan la forme d'un Y, afin de pouvoir m?nager dans l'enceinte ext?rieure des fen?tres ?clairant, en A, le vaste d?ambulatoire circulaire prenant au Mans une importance consid?rable, parce qu'il entoure le choeur d'un double bas c?t?.
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