Read Ebook: The Girl's Own Paper Vol. VIII No. 370 January 29 1887 by Various
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Ebook has 334 lines and 26480 words, and 7 pages
M?MOIRES DU DUC DE ROVIGO, POUR SERVIR ? L'HISTOIRE DE L'EMPEREUR NAPOL?ON.
TOME TROISI?ME.
PARIS,
A. BOSSANGE, RUE CASSETTE, N? 22.
MAME ET DELAUNAY-VALL?E, RUE GU?N?GAUD, N? 25.
CHAPITRE PREMIER.
L'Autriche menace de reprendre les armes.--Dispositions pour la contenir.--Mesures administratives.--Organisation de la Prusse.--L'empereur ?chelonne ses troupes sur la Vistule.--Pr?tentions de l'Angleterre.--Blocus continental.
Pendant que nous achevions de disperser les forces qui nous ?taient oppos?es, l'empereur s'occupait d'asseoir sa position. Nous longions la Boh?me pour courir aux Russes; l'Autriche en prit occasion d'affecter des craintes pour sa neutralit?; et, comme si nous n'eussions pas eu assez de l'hiver et des Moscovites, elle feignit de redouter que nous ne franchissions les gorges de ses montagnes que pour la chercher. L'empereur ne pouvait se m?prendre au pr?texte: l'irruption de la Bavi?re lui avait appris le cas qu'il devait faire de la foi des cabinets. Il appela une nouvelle conscription, la fit rapidement arriver sur le Rhin, admit sous ses drapeaux les troupes de l'?lecteur de Hesse, qui venaient d'?tre licenci?es. Il les envoya, partie en France, partie en Hollande et ? Naples; il les ?loigna, en un mot, des lieux o? on e?t pu les ameuter contre nous. Il ne se borna pas ? ces mesures; il fit armer les places, occuper les d?bouch?s qui couvrent l'Italie; il r?unit des troupes consid?rables ? V?rone, ? Brescia, sur l'Izonso; le roi de Bavi?re en assembla sur l'Inn. Nous f?mes bient?t en mesure sur tous les points.
Un autre objet non moins important ?tait de r?gulariser l'action de la conqu?te. L'empereur y pourvut avec la sup?riorit? de vues qui lui ?tait propre; il donna une nouvelle organisation aux vastes possessions que le sort des armes lui avait livr?es; il divisa la Prusse en quatre d?partemens, auxquels il assigna pour chefs-lieux, Berlin, Custrin, Stettin et Magdebourg. Il fixa les limites de chacun, conserva les subdivisions, les institutions qui pouvaient faciliter la marche des affaires; il ne d?pla?a aucun fonctionnaire, laissa chacun g?rer son emploi, juger, administrer, et se borna ? exiger qu'ils ne tournassent pas contre lui la portion d'autorit? dont il leur continuait l'exercice. Un administrateur g?n?ral des finances et des domaines, un receveur g?n?ral des contributions, furent charg?s de surveiller, de diriger l'action de cette vaste machine, et de prendre les mesures que les circonstances exigeraient. Chaque d?partement re?ut aussi un commissaire imp?rial, qui assistait aux d?lib?rations des chambres de guerre et des domaines, et chaque province un intendant, qui remplissait les fonctions de pr?fet. Des receveurs particuliers furent institu?s pour veiller aux recettes, constater les versemens.
Les mouvemens, les passions qui agitaient la Prusse, exigeaient des moyens de r?pression capables de r?primer le pillage et la malveillance. Des brigades de gendarmerie furent d?tach?es; le gouverneur g?n?ral devait en d?terminer l'emplacement et la force, mais elles ne pouvaient se recruter que parmi les propri?taires du pays. Les commandans particuliers conserv?rent, en outre, aupr?s d'eux, des piquets de troupes fran?aises.
Berlin, comme centre du mouvement, m?ritait une attention particuli?re. L'empereur unit sa magistrature aux ?lections: deux mille bourgeois se r?unirent, et choisirent soixante magistrats, pour les gouverner. Ils form?rent ?galement une garde nationale de seize cents hommes pour faire la police de leur ville.
Les revenus, qui s'?tendirent bient?t ? la Hesse, au Hanovre, au duch? de Brunswick, au Mecklembourg et aux villes ans?atiques, pr?vinrent le gaspillage, assur?rent des rentr?es abondantes, et pourvurent aux besoins de l'arm?e, sans fouler le peuple.
L'empereur ?tait encore occup? ? organiser la Prusse, lorsque les d?put?s du palatinat de Posen vinrent lui pr?senter les voeux de leurs concitoyens, et le solliciter de proclamer l'ind?pendance de leur patrie. Il les accueillit avec une bienveillance particuli?re, mais refusa de faire la reconnaissance qu'ils demandaient. <
Je cite cette r?ponse parce qu'elle fait voir combien sont d?nu?s de sens les reproches que l'on a faits ? l'empereur de n'avoir pas proclam? l'ind?pendance de la Pologne au d?but de la campagne de 1812. L'ind?pendance est une force; rien ne peut l'emp?cher de la reconna?tre lorsqu'elle existe, tandis que la proclamer lorsqu'elle n'existe pas, c'est prendre pour un int?r?t ?tranger un engagement dont on ne peut mesurer les suites. L'empereur r?p?ta, en 1812, ce qu'il avait dit en 1807, et ne pouvait, sans compromettre la France, faire plus qu'il n'a fait.
Je reviens aux affaires de Prusse. Avec quelque instance que Fr?d?ric-Guillaume e?t sollicit? un armistice, l'empereur n'avait mis qu'une m?diocre confiance en ses protestations. C'?tait moins d'ailleurs ce prince que l'Angleterre qu'il voulait atteindre, et il savait que celle-ci, toujours ardente ? provoquer la guerre, ?tait insensible aux malheurs de ses alli?s. Il prit ses mesures en cons?quence; il disposa ses corps de mani?re ? prendre imm?diatement possession des places dont il exigeait l'abandon, et ? marcher aux alli?s suivant que l'armistice serait ou ne serait pas ratifi?. Ses ordres avaient ?t? donn?s dans cette double hypoth?se; rien n'?tait pr?cis comme les instructions qu'il avait fait exp?dier au grand-duc de Berg.
< < < < < L'empereur, comme on vient de le voir, avait ?chelonn? les troupes avec une admirable pr?voyance. Il ?tait pr?t; que la guerre f?t suspendue ou se continu?t, il ?tait ?galement en mesure. Mais ces dispositions n'atteignaient l'Angleterre que par ricochet: c'?tait cette puissance qu'il s'agissait de toucher au vif. La victoire avait agrandi notre influence; nous disposions d'une ?tendue de c?tes immense; nous ?tions ma?tres de l'embouchure de la plupart des grands fleuves. L'empereur r?solut de la frapper avec les armes dont elle faisait usage. Elle avait mis notre littoral en interdit; elle avait proclam? un blocus que ses flottes ?taient hors d'?tat de r?aliser: il s'empara de cette conception vigoureuse, et r?solut de lui fermer le continent. La mesure ?tait s?v?re; mais l'Angleterre m?connaissait tous les droits: il fallait mettre un terme ? ses violences, la contraindre d'abjurer ses injustes pr?tentions. La marche de la civilisation a depuis long-temps assign? des bornes ? la guerre: restreinte aux gouvernemens, l'action de ce fl?au ne s'?tend plus aux individus; les propri?t?s ne changent plus de mains, les magasins sont respect?s, les personnes restent libres; les combattans, ceux qui portent les armes, sont, de toute la population vaincue, les seuls individus expos?s ? perdre leur libert?. Ces principes sont consacr?s par une foule de trait?s reconnus par tous les peuples. Cependant les Anglais affich?rent tout ? coup des pr?tentions qu'ils n'avaient jamais ?lev?es avant que la prise de Toulon et la guerre de l'Ouest n'eussent an?anti notre marine. ?riger en maximes que les propri?t?s particuli?res qui se trouvaient ? bord des b?timens de commerce sous pavillon ennemi devaient ?tre saisies et les passagers faits prisonniers, c'?tait nous ramener aux si?cles de barbarie o? paysans et soldats ?taient r?duits en esclavage, o? personne n'?chappait au vainqueur qu'en lui payant ran?on. Le ministre des relations ext?rieures, charg? de d?velopper la mati?re, fl?trit justement les odieuses pr?tentions de l'Angleterre et les consid?rations dont elle les appuyait. Ses rapports firent sur nous une impression dont je conserve encore le souvenir, le dernier surtout; il est ainsi con?u: < < < < < < < < < < < < <<... Aussit?t que l'Angleterre admettra le droit des gens que suivent universellement les peuples polic?s; aussit?t qu'elle reconna?tra que le droit de guerre est un et le m?me sur mer que sur terre, que ce droit et celui de conqu?te ne peuvent s'?tendre ni aux propri?t?s priv?es, ni aux individus non arm?s et paisibles, et que le droit de blocus doit ?tre restreint aux places fortes r?ellement investies, Votre Majest? fera cesser ces mesures rigoureuses, mais non pas injustes, car la justice entre les nations n'est que l'exacte r?ciprocit?.>> L'empereur adopta les consid?rations et les mesures que lui proposait son ministre. Il interdit tout commerce, toute correspondance avec l'Angleterre; il d?clara ce pays en ?tat de blocus, l'isola tout-?-fait du continent, et le pla?a dans une situation dont il ne tarda pas ? sentir les f?cheuses cons?quences. L'arm?e entre en Pologne.--Chute du grand-mar?chal.--Fatigues et privations des troupes.--L'arm?e prend ses cantonnemens.--Le quartier-g?n?ral revient ? Varsovie. Ces mesures prises, l'empereur se mit en route pour la Pologne. Il savait que l'arm?e russe continuait sa marche; il lui importait, pour le succ?s de ses op?rations ult?rieures, de ne pas lui laisser le temps de franchir la Vistule; autrement nous aurions ?t? oblig?s de prendre nos quartiers d'hiver dans une mauvaise position, entre l'Oder et la Vistule, ou bien de repasser l'Oder pour hiverner en Prusse. Dans ce cas, nous aurions d?couvert la Sil?sie, o? nous avions des op?rations ? suivre; nous aurions vu, en outre, l'arm?e prussienne se recruter de tous les Polonais, qui, au lieu de cela, se rang?rent sous nos drapeaux. D'apr?s ces consid?rations, l'empereur se d?termina ? mettre l'arm?e en campagne au mois de d?cembre; elle marcha ? la fois sur Varsovie, Thorn et Dirschau; elle ne rencontra ni obstacle, ni troupes russes, si ce n'est quelques centaines de cosaques, ? quinze ou vingt lieues en de?? de Varsovie, auxquels elle ne fit point attention. Elle arriva sur les bords du fleuve, dont on r?tablit les ponts de bateaux avec les moyens du pays. Celui de Varsovie venait d'?tre br?l?; il ?tait sur pilotis, on le reconstruisit en bateaux; celui de Thorn, ?galement sur pilotis, n'?tait que l?g?rement endommag?; celui de Dirschau, qui ?tait en bateaux, fut r?tabli de m?me. Nous avions trouv? dans les arsenaux de Berlin tous les moyens de la monarchie prussienne; r?unis ? ceux que nous avions, ils nous mettaient ? m?me d'aplanir en un instant des difficult?s qui paraissaient insurmontables. Par exemple, ces trois ponts furent r?tablis si vite, que les troupes ne furent pas retard?es une heure: elles eurent ? traverser des boues affreuses entre l'Oder et la Vistule. L'empereur fit ce trajet en voiture; celle qui ?tait devant la sienne versa, la nuit, dans un mauvais passage. Le mar?chal Duroc, qui s'y trouvait, eut la clavicule droite cass?e; on fut oblig? de le laisser sur la place, et de l'envoyer chercher du premier village que l'on rencontra. L'empereur arriva le lendemain ? Varsovie; son entr?e dans cette ville mit la Pologne en d?lire; il ne put y rester. L'arm?e russe s'approchait, il n'y avait pas un instant ? perdre; il fit passer la majeure partie de l'arm?e par Varsovie pour la porter sur le Bug. Le reste s'avan?a par Thorn, et vint par sa droite se mettre en communication avec ce qui avait pass? ? Varsovie; tout ce qui avait travers? la Vistule plus bas que Thorn marcha sur Marienbourg et Elbing. Dantzick, d?s ce moment, n'eut plus de communication avec sa m?tropole que par la langue de sable qui s?pare le Frisch-Haff de la mer. La droite de l'arm?e, qui avait pass? ? Varsovie, eut bient?t rencontr? les Russes; ils se retir?rent par des plaines de terre noire et l?g?re qui ?taient transform?es en ?tangs de boue: il fallait quadrupler les attelages de l'artillerie pour la faire avancer; aussi en avaient-ils laiss? une bonne partie en chemin. L'empereur faisait manoeuvrer les corps qui avaient paru ? Thorn, pour venir couper la route de Preuss-Eylau ? Varsovie, de mani?re ? faire abandonner ce chemin aux Russes; mais malheureusement ils trouvaient aussi de la boue, et ne marchaient qu'? tr?s petites journ?es pour ne pas abandonner leur artillerie. Le besoin de subsistances se fit bient?t sentir; on trouvait de quoi se chauffer et nourrir les chevaux, mais aucun chariot de vivres n'?tait encore entr? m?me ? Varsovie, et d'ailleurs il n'aurait pu arriver o? ?tait l'arm?e; il n'y avait donc que la ga?t? du caract?re du soldat qui pouvait lui donner la force de supporter toutes ces privations et toutes ces fatigues. L'empereur se montrait beaucoup au milieu d'eux dans ces momens de souffrance; il ?tait toujours ? cheval, et ne s'?pargnait ni ? la boue, ni ? la fatigue, ni aux dangers: aussi les soldats l'accueillaient-ils toujours avec plaisir. Il causait avec eux; souvent ils lui disaient les choses les plus singuli?res; un jour qu'il faisait un temps affreux, l'un d'eux lui dit: < ? force d'opini?tret? et de patience, on parvint enfin ? joindre l'arm?e russe ? l'entr?e de la for?t, au-del? de la petite ville de Pultusk, o? elle s'?tait form?e pour couvrir la route qui m?ne par Macloff ? Preuss-Eylau, ainsi que celle qui m?ne par Ostrolenka vers Grodno. L'empereur la fit attaquer sur-le-champ. On avait de part et d'autre tr?s peu de canons, de sorte que la mousqueterie fut vive; et comme ? chaque heure il nous arrivait quelque nouveau corps qui parvenait ? se tirer de la boue, nous e?mes, vers trois heures apr?s midi, une sup?riorit? num?rique si forte, que l'on attaqua de front la ligne russe, qui fut rompue et dispers?e dans les bois. On la poursuivit pendant plusieurs jours. La partie de cette arm?e qui avait pris la route de Preuss-Eylau tomba sur une suite d'?chelons de corps de troupes qui lui firent ?prouver des pertes consid?rables, et lui prirent environ cinquante ou soixante pi?ces de canon, avec sept ou huit mille hommes prisonniers. L'empereur tint parole aux troupes: il trouva qu'il y aurait eu de l'inhumanit? ? leur en demander davantage; il fit prendre des cantonnemens ? l'arm?e. Elle fut plac?e ? cheval sur la Vistule, l'infanterie le plus resserr?e possible; la grosse cavalerie sur la rive gauche. La cavalerie l?g?re eut un mauvais hiver ? passer, parce qu'elle resta dans le pays qu'avaient abandonn? les deux arm?es, et o? elle fut sans cesse harcel?e par les cosaques.
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