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Read Ebook: La Querelle de l'Orthographe by Boulenger Marcel

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Ebook has 108 lines and 18779 words, and 3 pages

BAUME B?M'

APPLAUDISSEMENT ?-PL?-D?S'-MAN

Cette notation exige une habilet? d'oreille peu commune et l'usage d'une multitude de notes. Elle n'est pas ? la port?e du vulgaire, non plus que d'un apprentissage rapide. Elle ne simplifie pas: tout au contraire, elle multiplie et complique. Alors qu'une seule orthographe suffit pour un mot, il peut se faire que, suivant les cas, deux notations soient n?cessaires; et MM. Hatzfeld et Darmesteter, et leur continuateur M. A. Thomas, ont bien soin de montrer que dans la prose la notation ne doit pas ?tre la m?me que dans les vers:

APPOSITION En prose ?-P?-ZI-SYON En vers ...SI-ON

ARRACHEMENT En prose ?-R??CH-MAN En vers ...R?-CHE...

CHAPELET En prose CH??P'-L? En vers CH?-PE-L?

RUINE En prose RUIN' En vers RU-IN'

VIOLETTE En prose VY?-L??T' En vers VI-?-LET-TE

Mieux encore: une seule orthographe figure un mot dans la vie publique et priv?e, tandis que la notation phon?tique distingue:

BIENFAISANCE BYEN-F?-ZANS',

Et joignant l'exemple au conseil, M. Rosset nous donne, en face de l'?criture orthographique, la v?ritable et compl?te notation phon?tique:

lalbatr?s

suv? p?rsamuz? lezomoedekip?j pr?noedezalbatr?s, vastoezwaz?dem?r, kis??voet?dol?k?pan??doevway?j loenaviroeglis?s?rlegufroezam?r.

ap?noelezontildep?z?s?rlepl?c koeserw?doelaz?r, maladrwaze?toe? l?soepitoe?zoem? loe?rgr?doez?loebl?c komoedezavir? tren?rak?t?doe?.

L'ALBATROS

Souvent pour s'amuser les hommes d'?quipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils d?pos?s sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons tra?ner ? c?t? d'eux.

La notation phon?tique s'adresse ? l'ou?e; l'orthographe parle autant ? la vision, ? l'imagination, ? notre facult? de nous repr?senter les ?tres, les choses, les r?ves. C'est un dessin qui ?voque, aussit?t que vu, des souvenirs dans notre cerveau, des couleurs et des formes: il n'est pas destin? qu'? figurer des sons.

Arriv?s ? ce point de la discussion, les philologues ont des langueurs et des r?signations. <> Ainsi devaient se lamenter doucement, sous l'oeil des barbares, les derniers lettr?s du vieux monde gallo-romain, les derniers patriciens... En v?rit?, nos simplificateurs n'auraient-ils tent? de d?former le langage fran?ais et d'en briser peut ?tre ? jamais tous les contours, que pour prendre coquettement une attitude? On n'ose croire ? tant de perversit?.

Il est vrai que la plupart des philologues ne sont pas radicalement phon?tistes, et que certains d?clarent au phon?tisme, comme jadis ? l'oc?an je ne sais plus quel roi barbare: <> L'oc?an jeta sa plus grosse vague contre le roi outrecuidant, qui dut rentrer tremp? au logis. A son exemple, nos nouveaux l?gislateurs auront beau rendre d?cret sur d?cret: <> Peine perdue! Les phon?tistes encourag?s, enhardis et bient?t d?cha?n?s, r?pondront: <> Et les r?formistes mod?r?s se trouveront d?bord?s, submerg?s; ils auront m?me quelque honte de s'?tre montr?s si ti?des.

MONSIEUR LE MINISTRE,

<>

Probablement, en effet, l'Acad?mie donne-t-elle un sens politique ? cette phrase. Mais en gardant tous les termes, je serais dispos?, comme elle, ? croire que <>, alors que des ?tudes scientifiques n'ont pas encore utilis? tout ce que l'orthographe nous conserve de ce souvenir, alors que les sciences linguistiques encore ? na?tre ou ? d?velopper, dont M. Brunot nous dressait la liste, ont ? peine commenc? leur travail de catalogue, de classification et, si l'on veut, d'embaumement historique... Que l'Acad?mie pr?te un pareil sens ? sa phrase, et ce n'est plus ? elle que l'on pourrait adresser le reproche si juste d'apporter o? ils n'ont que faire <>

Il est un argument d'utilit? sociale, n?anmoins, que M. Brunot a pleine raison de mettre en lumi?re, mais d'o? peut-?tre il tire de singuli?res cons?quences:

D'autres seraient moins radicaux, et voudraient seulement diminuer le coefficient de l'orthographe dans les diverses ?preuves, de fa?on ? engager peu ? peu l'instituteur et l'?l?ve ? y pr?ter moins d'attention. De la sorte, croient-ils, apr?s une p?riode plus o? moins longue, une g?n?ration nouvelle ayant cess? d'apprendre l'orthographe, celle-ci tomberait en d?su?tude, les simplifications se feraient d'elles-m?mes, et les dictionnaires n'auraient bient?t qu'? enregistrer un usage devenu spontan?ment plus rationnel.

S?duisante au premier abord, comme toutes celles qui ont pour fondement la libert?, cette proposition ne soutient cependant pas un examen attentif. Mettons qu'un arr?t?, un d?cret, si l'on veut, soit rendu en ce sens. Quelle influence aura-t-il sur les livres et les journaux? Aucune, ?videmment. L'enseignement du ma?tre se d?sint?ressera d?sormais de l'orthographe, voil? qui va bien. Mais les livres scolaires ne seront-ils pas des professeurs muets d'orthographe? Et l'enfant n'?tant plus conseill?, n'ayant, pour lui montrer ? ?crire, que ces mod?les d'une complication o? il ne saura rien d?m?ler, ne s'appliquera-t-il pas encore ? les imiter? S'il ne le fait pas, qu'il s'en ?carte, par paresse, par m?pris, ou pour toute autre cause, qui dit qu'il simplifiera?>>

M. Brunot craint pour le peuple les <> de la libert?: il tient ? nous imposer sa simplification. Pourquoi la sienne? Pourquoi m?me une simplification? Il est assur?ment dans notre orthographe des chinoiseries qui tiennent trop de place dans l'enseignement de nos ?coles primaires: mais un d?cret minist?riel, ramenant au minimum le coefficient de l'orthographe dans les examens de cet enseignement, ram?nerait s?rement aussi nos instituteurs ? une plus juste estime des diff?rentes ?tudes inscrites dans leur programme; apprendrait l'orthographe qui voudrait, et ceux qui ne la sauraient point n'en seraient pas plus mal not?s, si en d'autres branches ils avaient mieux occup? leurs ann?es scolaires. Mais les simplificateurs veulent la simplification ? tout prix, et ce sont encore des arguments politiques qui semblent les d?cider.

Qui ne voit la cons?quence? C'est que, les pr?jug?s h?r?ditaires aidant, l'orthographe ?tant redevenue la chose de quelques-uns, elle retrouvera plus d'estime que jamais dans un certain monde. De m?me qu'en Angleterre un gentleman se fait reconna?tre ? la premi?re phrase qu'il prononce, de m?me, il y aura des gens qui se classeront d?s la premi?re ligne comme des hommes sup?rieurs, on aura fait une classe nouvelle, celle des gens qui sauront ?crire: le mandarinat.>>

Il s'agit donc d'emp?cher tout le monde d'acqu?rir cette <>, comme dit avec justesse M. Brunot. Le proc?d? est r?volutionnaire: la R?volution pensa que la <> n'?tait pas utile ? la patrie et, logique jusqu'au bout, elle supprima les chimistes, Lavoisier, ? qui nous dressons aujourd'hui des statues. Mais est-il tellement s?r que le purisme soit chez nous une coquetterie des gens <>? L'argot n'a-t-il pas trouv? autant d'adh?rents parmi ceux-ci que dans le reste de la nation et, pour ne citer qu'un exemple, le dernier des bourgeois se donnerait-il les libert?s de style, d'orthographe et de vocabulaire que prend ? chaque ligne le plus que noble chroniqueur qui signe Gyp?

Le langage d'un peuple appara?t comme une cr?ation ? laquelle collaborent, uniquement guid?s par leur instinct et par leur oreille, les plus ignorants comme les plus cultiv?s, citadins et paysans, pauvres et riches. Il en fut presque de m?me pour l'orthographe: seulement la collaboration devient plus restreinte, et ce fut l'ouvrage de quelques centaines de savants, de plusieurs soci?t?s de pr?cieuses, de ce qu'on appela jadis les <>, la bonne compagnie enfin, les classes dites ?clair?es. A certains intervalles, l'Acad?mie donne une ?dition de son dictionnaire, et tout est r?gl?.

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