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Read Ebook: La nouvelle cuisinière bourgeoise: Plaisirs de la table et soucis du ménage by Franc Nohain

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Ebook has 675 lines and 40189 words, and 14 pages

--Les montagnes, la Suisse, ont pour nous peu d'attrait,-- Voulut bien s'en ouvrir ? moi, de fort bon gr?, L'hu?tre que le hasard m'avait fait rencontrer Dans les environs de Pourville: --Quand nous fuyons la grande ville, C'est toujours au bord de la mer Que nous allons nous mettre au vert:

Ah! la mer, la mer!... On pourrait Rester devant elle, immobile. Des heures, sans penser, sans nul r?ve futile, Et l'on ne s'ennuierait jamais...

Puis nous avons l? presque toute notre famille.

--Est-ce que vous prenez des bains? --Non, cela nous ?nerve trop. --Et vous allez au casino? --Oh! Vous voulez rire, c'est certain; Nous ne voyons personne et vivons en recluses, Ce qu'il nous faut, C'est du repos: Nous en avons assez, et trop, Des endroits de plaisir, du monde o? l'on s'amuse; Nous arrivons ici l'esprit, le corps fourbus, L'estomac d?labr?, enfin n'en pouvant plus, R?sultat naturel d'exc?s de toutes sortes: Car A quel rendez-vous de f?tards Ne nous vit-on, pendant l'hiver, battant le quart, Toute la nuit, devant la porte? Vous comprenez, nous payons ?a plus tard. Ah! ce satan? boulevard!

C'est pourquoi, d?s mai, nous partons, Devan?ant d'un mois la saison, Sans quoi nous ne pourrions tenir; N'emp?che qu'aussit?t d'aplomb, On n'en a pas plus de raison, On ne songe qu'? revenir.

Croiriez-vous que la nostalgie Commence ? s'emparer de nous? Lorsqu'arrive la fin d'ao?t, Nous repartons, pas assagies, Pr?tes ? recommencer l'orgie!...--

--A tant de h?te, dis-je, d'un ton l?ger, Peut-?tre cet espoir n'est-il pas ?tranger, De retrouver la gentille ?caill?re Brune avec un foulard nou? dans les cheveux, Qui saura vous ouvrir de si dextre mani?re?--

L'hu?tre murmure:--Ouvrir...--elle ferme les yeux, Un long fr?missement nerveux Voluptueusement a secou? son ?tre; Puis, sans plus rien laisser para?tre, Elle reprend d'un ton plus doux: --Parlons d'autre chose, voulez-vous?...--

VERTE R?PONSE DU ROTISSEUR A LA FRUITI?RE PUDIBONDE

LA FRUITI?RE

Vraiment, la police est mal faite, Qui permet, monsieur mon voisin, Qu'? ta porte, aux yeux des fillettes, Des fillettes et des gamins, La peau, de plumes d?pouill?e, Et poulets et poules soient vus, Comme soldats ? la feuill?e, Alignant leurs derri?res nus...

LE ROTISSEUR

Toi qui les derri?res d?nombres A ma porte, fleur de vertu, A la tienne, que laisses-tu L'ostentation des concombres?

COQUILLES SAINT-JACQUES

Les coquilles Saint-Jacques ont vainement cherch? A s'informer aupr?s des domestiques Si on allait les servir chez Des personnes suffisamment aristocratiques;

Quand, au manteau des p?lerins, Vos a?eux eurent ce destin De vaincre en pays palestin Pour la gloire du Saint-S?pulcre, Saurait-on, sans amer chagrin, Penser figurer au festin D'un manant, d'un bourgeois enrichi par le lucre, De tout autre que prince ou duc?

Donc, d?s leur entr?e dans la salle, Elles jettent, sans en avoir l'air, Un petit regard circulaire: --Pas mal! pas mal!-- Certe, ? d?faut du f?odal, Ce style Henri II n'est pas pour leur d?plaire; Des si?ges en cuir de Cordoue Sont, ? leurs regards, les plus doux; L'amphitryon n'est pas un de ces fous Qui se meublent de laqu? vert: Aux crois?s de J?rusalem On ?pargne du moins cette angoisse supr?me: Une salle ? manger qui viendrait d'Angleterre.

De la pr?sence des coquilles, Les ch?telains sont avertis; Mais, voyons, ? quoi songent-ils? Il est d?j? pass? midi: Et les coquilles, pour patienter durant le retard,-- Car Il est au moins midi et quart,-- Et tromper une attente qui les refroidit, Fredonnent des choeurs de la J?rusalem de Verdi, Et la romance de Richard...

Bon, voici nos gens qui arrivent, Ils s'installent; mais quels convives, Sang du Calvaire! ah! vos a?eux! Coquilles des p?lerins pieux, Votre indignation est vive!

Vraiment ce n'est pas sans sujet Que vous mettez ? vous laisser manger Tant de mauvaise volont?:

Aucun n'a prononc? le b?n?dicit?!

H?ROIQUE JACTANCE D'UN LAPIN

Aux mains cruelles des g?te-sauces, , Pauvre lapin, te voil? pris; Et les m?chants gamins se gaussent De sa situation fausse, Et se font un barbare jeu De tirer ses longues oreilles, Soyeuses au poil blanc et feu, : Notre lapin est blanc et feu. A la cuisini?re on l'apporte: --Sautez, sautez, les gibelottes!--

Pr?s des fourneaux, parmi les cuivres et les broches, La cuisini?re se dresse, imposante et grave, Mais le lapin, ? son approche, Soutient son regard, et la brave. L'autre l'a saisi par les pattes; Toutes quatre S'agitent en nerveuses saccades: --Tu trembles? dit la farouche, d'un ton narquois.-- --Moi? Si je tremble, c'est donc de froid!

Vraiment, tu ne me connais gu?re: Sache que mes a?eux entra?naient ? la guerre En battant du tambour les h?ros de nagu?re; Ils ?taient ? la Grande Arm?e, Ils ont, sur les champs de bataille, R?colt? toutes les m?dailles Et d'Italie, et de Crim?e. Avec la croix qu'un jour leur remit, ? cheval, De la main ? la main, le Petit Caporal! Et bonnement, tu t'imagines, Moi, le descendant de ces preux, Qui furent d?cor?s au feu, M'impressionner avec ton cordon bleu, Et ta batterie de cuisine?

LE VEAU ET LA SALADE

En l'honneur des vrais principes d?mocratiques, Des gens sont r?unis qui, pour un prix modique, S'appr?tent ? manger le veau et la salade Jusques ? s'en rendre malades: --Crevons s'il faut en crever, camarades, Mais Vive la R?publique!--

Mais, c'est ici que je proteste: Avons-nous donc, messieurs, fait si peu de chemin Que nous soyons encor caudataires du pape? Les cl?ricaux doivent rire sous cape: Avec moi, de moiti?, admettre en vos agapes Une barbe-de-capucin!--

Ces mots ont fait, dans l'assistance, Courir un long fr?missement, Dont le pr?sident un moment, Vainement, Veut att?nuer l'importance, --A l'incident, dit-il, donnons sa juste suite; Non, tu n'es plus, salade que voil?, Barbe-de-capucin; messieurs, baptisons-la: C'est de la

Vieille-barbe-de-quarante-huit.--

POIVRE ET SEL

A la bonne heure, des sali?res, Rustiques sali?res de verre, O?, c?te ? c?te, poivre et sel M?lent, Sel marin, poivre de Cayenne, En grains, en graines, M?mes joies et communes peines, Leur existence mitoyenne.

Mais, un beau jour, fatal pr?sent, Ce sont les sali?res d'argent, O?, pour une arbitraire mode, On supprime le c?te ? c?te: Le poivre habite, maintenant, A un bout de table, et le sel ? un autre; Plus moyen m?me qu'on se cause: Coquille minuscule ou bien feuille de rose, Chacune est tenue ? l'?cart: --Sali?res en argent, Mariage d'argent,-- Sel et poivre dor?navant Font compl?tement lit ? part.

Parfois on les rapproche encore; Mais c'est qu'ils vont p?rir d'une commune mort; Alors, avec quelle m?lancolie ils se regardent: Au fond du buffet, quand on se retrouvait le soir!... Il leur resta un dernier espoir:

Recommencer la vie ? deux, dans une barbe...

LE POT-AU-FEU

Par tous les temps, sur la plage, la pauvre vieille, Avec son cabas et son ch?le, Nous l'avons vue sous la rafale, Et sous la pluie, et sous la gr?le, La pauvre vieille, Silencieuse et les yeux vagues, Qui regardait monter les vagues;

Et comme nous nous moquions d'elle, Quand le flot, ? mar?e haute, qui d?ferle Puis vient mourir sur les galets, Mouillait ses souliers ?cul?s, Et la tristesse de ses mollets Gr?les, si gr?les!

Mais la vieille agitait seulement son cabas Pour des gestes qu'alors nous ne comprenions pas.

Oh! les quolibets et les rondes, Dont l'entouraient, arm?s de pelles, Tous les petits enfants cruels, Bourreaux, bourrelles A boucles blondes!...

Maintenant je sais le myst?re, Et maintenant je ne ris plus: Je sais le petit-fils perdu, Et la folie de la grand'm?re;

Chaque dimanche, il fut un temps o?, pour son fieu, Elle mettait le pot-au-feu: Ah! le bon r?gal tous les deux, Et les belles histoires pr?s du grand pot qui fume:

--Hume! Hume-moi ?a, mon fieu, et ne te br?le pas; Vois s'il est bien sal? ? ton go?t, n'est-ce pas, Et pas trop maigre, et pas trop gras, Et si l'on sent bien la l?gume...--

Et, avec pr?caution, ?cartant l'?cume Elle tendait une cuiller?e au petit gars, Grand ordonnateur du repas, Qui, connaisseur et grave en ces cas d?licats, Faisait claquer la langue et fron?ait les narines;--

Mais un beau jour il est parti dans la marine, Le petit gars, Dans la marine de l'?tat; Un beau jour, adieu la cuisine!

Lors ensemble, un dernier dimanche, On a mang? le pot-au-feu: --Voyons, ne pleure plus, grand'maman, sacrebleu! Et pr?pare-m'en un fameux Pour quand je reviendrai, des galons plein les manches! La vieille branlait la t?te, sous sa coiffe blanche, Sans rien dire, et d'un coin de son tablier bleu, Tristement essuyait ses yeux,

La grand'm?re et le petit-fils, un dernier dimanche...

Des mois, des mois,--voil? qu'un papier est venu, Avec de gros cachets dessus: Le petit ne reviendra plus.

Et quand elle a fini de lire, La pauvre vieille se met ? trembler,--puis ? rire; Du fond de l'armoire, elle tire son beau corsage, Et son ch?le de mariage, Dit aux comm?res du voisinage: --C'est mon gars qui va revenir!-- Dit, et puis se prend ? courir, En grande h?te, vers la plage,

Et s'efforce de d?couvrir Les gros bateaux, l?-bas, au large...

Tout le jour, elle reste l?; Elle emporte, dans son cabas, Un peu de sel, une cuill?re,

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