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Read Ebook: Deux contes: Le massacre des Innocents; Onirologie. by Maeterlinck Maurice

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Ebook has 134 lines and 12447 words, and 3 pages

Produced by: Laurent Vogel )

Deux contes

par MAURICE MAETERLINCK

Le Massacre des Innocents Onirologie

Avec un portrait de l'Auteur

A PARIS Chez Georges Cr?s et Cie, ?diteurs 116, Boulevard Saint-Germain, 116

Exemplaire sur papier de Rives

Les deux contes que nous publions ici ont paru dans des p?riodiques; l'un dans <> et l'autre dans la <> . Le premier a ?t? r?imprim? plusieurs fois, et son texte, l?g?rement modifi? par l'auteur, figure dans ce livre ?mouvant: <> . On nous saura gr?, nous voulons le croire, de trouver ? la suite le texte d'<>, cette oeuvre de jeunesse, fort ignor?e, ayant l'attrait de l'in?dit et offrant, de plus, une curieuse analogie avec les admirables pages publi?es r?cemment par Maurice Maeterlinck, sous ce titre: <>.

Les ?diteurs.

LE MASSACRE DES INNOCENTS

M. M.

MASSACRE DES INNOCENTS

Ce vendredi, 26 du mois de d?cembre, vers l'heure du souper, un petit vacher vint ? Bethl?em en criant terriblement.

Des paysans qui buvaient de la cervoise en l'auberge du Lion-Bleu ouvrirent les volets pour regarder dans le verger du village, et virent l'enfant qui accourait sur la neige. Ils reconnurent que c'?tait le fils de Korneliz et lui cri?rent par la fen?tre: <>

Mais il r?pondit avec ?pouvante que les Espagnols ?taient arriv?s, qu'ils avaient incendi? la ferme, pendu sa m?re, dans les noyers, et li? ses neuf petites soeurs au tronc d'un grand arbre.

Ces paysans sortirent brusquement de l'auberge, entour?rent l'enfant et l'interrog?rent. Il leur dit encore que les soldats ?taient ? cheval et v?tus de fer, qu'ils avaient enlev? les b?tes de son oncle Petrus Krayer et entreraient bient?t en for?t avec les moutons et les vaches.

Tous coururent au Soleil-d'Or, o? Korneliz et son beau-fr?re buvaient aussi leur pot de cervoise, et l'aubergiste s'?lan?a dans le village en criant que les Espagnols approchaient.

Alors il y eut une grande rumeur en Bethl?em. Ces femmes ouvrirent les fen?tres et les paysans sortirent de leurs maisons avec des lumi?res qu'ils ?teignirent lorsqu'ils furent dans le verger, o? il faisait clair comme ? midi, ? cause de la neige et de la pleine lune.

Ils s'assembl?rent autour de Korneliz et de Krayer, sur la place, devant les auberges. Plusieurs avaient apport? leurs fourches et leurs r?teaux, et se parlaient avec terreur sous les arbres.

Mais comme ils ne savaient que faire, l'un d'eux courut chercher le cur?, ? qui appartenait la ferme de Korneliz. Il sortit de sa maison avec le sacristain en apportant les clefs de l'?glise. Tous le suivirent dans le cimeti?re, et il leur cria du haut de la tour qu'il y avait des nuages rouges du c?t? de sa ferme, bien que le ciel f?t bleu et plein d'?toiles sur tout le reste de la campagne.

Ayant d?lib?r? longtemps dans le cimeti?re, ils d?cid?rent de se cacher dans le bois que les Espagnols devaient traverser et de les attaquer s'ils n'?taient pas tr?s nombreux, afin de reprendre le b?tail de Petrus Krayer et le butin qu'ils avaient fait ? la ferme.

Ils s'arm?rent de fourches et de b?ches, et les femmes rest?rent autour de l'?glise avec le cur?.

En cherchant un endroit favorable ? leur embuscade, ils arriv?rent pr?s d'un moulin, aux limites de la for?t, et virent br?ler la ferme au milieu des ?toiles. Ils s'install?rent l?, devant une mare couverte de glace, sous d'?normes ch?nes.

Un berger, que l'on appelait le nain-Roux, monta au sommet de la colline pour avertir le meunier, qui avait arr?t? son moulin en voyant les flammes ? l'horizon. Cependant il laissa entrer le paysan, et tous deux se mirent ? une fen?tre pour regarder au loin.

La lune brillait devant eux sur l'incendie, et ils aper?urent une longue foule qui marchait sur la neige. Quand ils l'eurent contempl?e, le Nain descendit vers ceux qui ?taient dans la for?t, et ils distingu?rent lentement quatre cavaliers, au-dessus d'un troupeau qui semblait brouter la plaine.

Comme ils regardaient au bord de la mare, et sous les arbres ?clair?s de neige, le sacristain leur montra une haie de buis, derri?re laquelle ils se cach?rent.

Les b?tes et les Espagnols s'avanc?rent sur la glace, et les moutons, en arrivant ? la haie, broutaient d?j? la verdure, lorsque Korneliz creva les buissons, et les autres le suivirent dans la clart? avec leurs fourches. Il y eut alors un grand massacre sur l'?tang au milieu des brebis amoncel?es et des vaches qui contemplaient la bataille et la lune.

Quand ils eurent tu? les hommes et les chevaux, Korneliz s'?lan?a dans la prairie vers les flammes et les autres d?pouill?rent les morts. Puis ils retourn?rent au village avec les troupeaux. Les femmes qui regardaient la lourde for?t, derri?re les murs du cimeti?re, les virent s'avancer entre les arbres et coururent ? leur rencontre avec le cur?, et ils revinrent en dansant de grandes rondes, au milieu des enfants et des chiens.

En se r?jouissant sous les poiriers du verger, o? le Nain-Roux accrochait des lanternes en signe de kermesse, ils demand?rent au cur? ce qu'il fallait faire.

Ils r?solurent enfin d'atteler un chariot pour emmener au village le corps de la femme et ses neuf petites filles. Les soeurs et d'autres paysannes de la famille de la morte y mont?rent, ainsi que le cur? qui marchait avec peine, ?tant vieux d?j? et fort gros.

Ils rentr?rent dans la for?t et arriv?rent en silence devant l'?blouissement des plaines, o? ils virent les hommes nus et les chevaux renvers?s sur la glace lumineuse entre les arbres. Puis ils march?rent vers la ferme qui br?lait au milieu du paysage.

En arrivant au verger et ? la maison rouge de flammes, ils s'arr?t?rent devant la grille pour contempler le grand malheur du paysan, dans son jardin. Sa femme pendait toute nue aux branches d'un ?norme noyer, et lui, montait ? l'?chelle pour grimper dans l'arbre, autour duquel les neuf petites filles attendaient leur m?re sur le gazon. Il marchait d?j? dans les vastes ramures, lorsqu'il vit tout ? coup, sur la lumi?re de la neige, la foule qui le regardait. Il fit signe de l'aider, en pleurant, et ils entr?rent dans le jardin. Alors le sacristain, le Nain-Roux, l'aubergiste du Lion-Bleu et celui du Soleil-d'Or, le cur? avec une lanterne, et beaucoup d'autres paysans mont?rent dans le noyer neigeux, au clair de lune, pour d?pendre la morte, que les femmes du village re?urent dans leurs bras au pied de l'arbre, comme ? la descente de croix de Notre-Seigneur J?sus-Christ.

Ce lendemain, on l'enterra, et il n'y eut plus d'?v?nements extraordinaires ? Bethl?em cette semaine-l?. Mais le dimanche suivant, des loups affam?s parcoururent le pays, apr?s la grand'messe, et il neigea jusqu'? midi; puis le soleil brilla soudain et les paysans rentr?rent d?ner comme d'habitude et s'habill?rent pour le salut.

A ce moment il n'y avait personne sur la place, car il gelait cruellement; seuls, les chiens et les poules vaguaient sous les arbres, o? des moutons broutaient un triangle de gazon; et la servante du cur? balayait la neige dans son jardin.

Alors une troupe d'hommes arm?s passa le pont de pierre au bout du village et s'arr?ta dans le verger. Des paysans sortirent de leur demeure, mais rentr?rent terrifi?s en reconnaissant les Espagnols et se mirent aux fen?tres afin de voir ce qui allait se passer.

Il y avait une trentaine de cavaliers couverts d'armures, autour d'un vieillard ? barbe blanche. Ils portaient en croupe des lansquenets jaunes ou rouges qui mirent pied ? terre et coururent sur la neige pour se d?gourdir, pendant que plusieurs soldats habill?s de fer descendaient aussi et pissaient contre les arbres auxquels ils avaient attach? leurs chevaux.

Puis ils se dirig?rent vers l'auberge du Soleil-d'Or et frapp?rent ? la porte. On leur ouvrit en h?sitant; et ils all?rent se chauffer pr?s du feu en se faisant verser de la bi?re.

Ensuite ils sortirent de l'auberge avec des pots, des cruches et des pains de froment destin?s ? leurs compagnons rang?s autour de l'homme ? barbe blanche qui attendait au milieu des lances.

Comme la rue ?tait d?serte, le chef envoya des cavaliers derri?re les maisons, afin de garder le village du c?t? de la campagne, et ordonna aux lansquenets d'amener devant lui les enfants ?g?s de deux ans et au-dessous, pour les massacrer, selon qu'il est ?crit en l'?vangile de Saint Mathieu.

Ils all?rent d'abord ? la petite auberge du Chou-vert, et ? la chaumi?re du barbier, voisines au milieu de la rue.

L'un d'eux ouvrit l'?table, et une bande de porcs s'en ?chappa qui se r?pandit de tous c?t?s. L'aubergiste et le barbier sortirent de leur maison et demand?rent humblement aux soldats ce qu'ils d?siraient; mais ceux-ci n'entendaient pas le flamand et entr?rent afin de chercher les enfants.

L'aubergiste en avait un qui pleurait en chemise sur la table o? l'on venait de d?ner. Un homme le prit dans ses bras et l'emporta sous les pommiers, tandis que le p?re et la m?re le suivaient en poussant des hurlements.

Ces lansquenets ouvrirent encore l'?table du tonnelier, celle du forgeron, celle du sabotier; et les veaux, les vaches, les ?nes, les cochons, les ch?vres, les moutons et les lapins se promen?rent sur la place. Lorsqu'ils enfonc?rent le vitrage du charpentier, plusieurs paysans, parmi les vieillards et les plus riches de la paroisse, s'assembl?rent dans la rue et s'avanc?rent vers les Espagnols. Ils ?t?rent respectueusement leurs bonnets et leurs feutres devant le chef au manteau de velours, en demandant ce qu'il comptait faire; mais lui-m?me ignorait leur langue et quelqu'un alla chercher le cur?.

Il s'appr?tait pour le salut et rev?tait une chasuble d'or dans la sacristie. Ce paysan cria; <> ?pouvant?, le pr?tre courut ? la porte de l'?glise, suivi des enfants de choeur qui portaient les cierges et l'encensoir.

Alors il vit les animaux des ?tables circulant sur la neige et sur le gazon, les cavaliers dans le village, les soldats devant les portes, les chevaux attach?s aux arbres le long de la rue, les hommes et les femmes suppliant autour de celui qui tenait l'enfant en chemise.

Il s'?lan?a dans le cimeti?re, et les paysans se tourn?rent avec inqui?tude vers leur pr?tre qui arrivait comme un dieu couvert d'or et l'environn?rent devant l'homme ? barbe blanche.

Il parla flamand et latin; mais le chef poussait lentement les ?paules pour exprimer qu'il ne comprenait point.

Ses paroissiens lui demandaient ? voix basse: <> D'autres, voyant le cur?, sortaient craintivement de leurs fermes, des femmes accouraient et chuchotaient dans les groupes, tandis que les soldats qui assi?geaient un cabaret, se joignaient au grand rassemblement qui se formait sur la place.

Alors celui qui tenait par la jambe l'enfant de l'aubergiste du Chou-Vert, lui trancha la t?te d'un coup d'?p?e.

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