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Read Ebook: Comment on devient écrivain by Albalat Antoine

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Ebook has 322 lines and 41660 words, and 7 pages

Balzac supprima docilement cette phrase dans toutes les ?ditions post?rieures.

Ce roman est unique. On le relira toujours; et le comble de l'art, c'est qu'avec un tel sujet l'auteur ait fait une oeuvre si chaste.

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Lire les romans anciens, remonter aux traditions classiques ne signifie pas qu'on doive n?gliger la lecture des romanciers contemporains. Il faut suivre, au contraire, avec attention le mouvement de notre ?poque, sa production, son effort d'originalit?, tout en gardant la conviction qu'aucun de nos conteurs n'est sup?rieur aux grands cr?ateurs du dix-neuvi?me si?cle.

Quelques auteurs de notre temps nous ont apport? du nouveau et m?ritent leur r?putation. Lisez Estauni?, Jaloux, Vaudoyer, Boylesve, Duvernois, Henriot et bien d'autres encore; et, pour des qualit?s d'originalit? plus aigu?, lisez aussi Giraudoux et la nouvelle ?cole humoristique et pince-sans-rire, Morand, Cocteau, Ramuz, Max Jacob, Soupault, etc... Il y a l? des ?crivains s?rieux, d'autres qui caricaturent la vie, font de l'observation comme on fait du cubisme et continuent la tradition du roman rosse de Toulet, en supprimant toute sentimentalit?, toute po?sie, tout paysage.

Ces nouveaut?s de proc?d?s et de visions sont dignes de curiosit?, d'?tude et d'estime. Mais ce sont des chemins de traverse, des sentiers dangereux, souvent des impasses. Ne quittez jamais le grand chemin de l'observation humaine, la grande route des chefs-d'oeuvre, celle qu'ont suivie Marivaux, Pr?vost, Bernardin, Constant, Balzac et Flaubert.

Il est des auteurs, comme Guy de Maupassant, qui r?sument ? la fois le r?alisme brutal et la psychologie p?n?trante . On sent un talent bien plus qu'une ?me dans l'oeuvre de Maupassant, qui ne travaillait pourtant pas beaucoup sa prose. Il avait commenc? par ?crire des vers, et Louis Bouilhet e?t fait de lui un po?te, si Flaubert ne lui e?t donn? le go?t du roman.

Mais ce n'est pas tout de lire les auteurs, les vieux et les jeunes, ceux d'autrefois et ceux d'aujourd'hui; il faut se d?cider et bien savoir quel genre de roman vous voulez ?crire, celui qui r?pond le mieux ? votre tournure d'esprit.

Le roman d'aventures semble avoir reconquis la faveur publique. A vrai dire, le go?t ne s'en est jamais perdu; il s'est m?me produit une sorte de surench?re, due ? l'influence de Wells et de Kipling et ? l'introduction de nouveaux ?l?ments modernes, torpillages, aviation, d?couvertes scientifiques, etc. Les timides audaces des Robida et des Jules Verne font aujourd'hui sourire les lecteurs des Wells, Farr?re, Bizet, Mac Orlan, Arnoux et autres amusants inventeurs de voyages dans la lune. D'autre part, Rosny, dans le genre pr?historique, a montr? que le roman d'aventures pouvait ?tre aussi une oeuvre litt?raire; et qui sait si le roman feuilleton lui-m?me n'entrera pas dans la litt?rature, le jour o? un bon prosateur se donnera la peine de l'?crire?

Le roman d'aventures, c'est le r?gne de la fantaisie et de l'invention. On peut tout imaginer, explorations fantastiques, dernier jour de la terre, les espaces astronomiques, cataclysmes, destruction du globe... Il faut du nouveau, <>. La difficult? est de donner ? l'extravagance l'apparence du vrai.

Le d?faut du roman d'aventures, c'est la digression. On bavarde, on ?parpille l'int?r?t, on oublie que la valeur d'un r?cit est dans la sobri?t? des ?pisodes. Toute description inutile doit ?tre impitoyablement bannie. La rapidit? du dialogue est ?galement une chose importante dans le roman d'aventures. On abuse du dialogue. Tout se passe en conversations; on impatiente le lecteur.

Pierre Benoit a donn? au roman d'aventures un ton de distinction auquel nous n'?tions pas habitu?s et qui rel?ve singuli?rement l'int?r?t des situations dramatiques. Le succ?s de Pierre Benoit est une spirituelle r?action contre les lourds romans psychologiques dont on a tant abus? et dont le public a si sto?quement support? l'ennui.

Un autre genre de roman tente encore les d?butants de province. C'est le roman rustique.

Quelques romanciers contemporains ont le tort de consid?rer les paysans comme des monstres de d?pravation. Le paysan n'est pas un ?tre raffin?, mais il est fonci?rement honn?te. Ne cherchez ni ? l'id?aliser, ni ? le rabaisser. Ne lui pr?tez surtout ni raisonnement, ni psychologie; il ne discute pas, il va droit son chemin.

Je voudrais mettre en garde les d?butants contre ce faux r?alisme qui va jusqu'? peindre l'inceste comme un vice particulier aux paysans. Non, quoi qu'on dise, il n'est pas encore prouv? qu'on soit un ?tre abominable parce qu'on habite la campagne, au lieu d'habiter la ville.

?vitez cette brutalit? mensong?re. T?chez de peindre chez le paysan les luttes de conscience, les r?actions passionnelles, les souffrances que d?gagent les grands sentiments naturels: l'amour, la maternit?, le travail, l'esprit de famille. Ne quittez pas les bons terrains o? poussent les belles plantes humaines. Ferdinand Fabre se contentait d'une donn?e tr?s simple et, sans rien d?former, il a fait des romans qui m?ritent de franchir le cercle des lettr?s et d'aller jusqu'au grand public. Malheureusement Fabre a abus? de la description et, pour garder le ton paysan, tout en ?vitant la grossi?ret?, il employait un dialogue hybride, faussement na?f, sorte de b?gaiement ? phrases courtes, qui consiste surtout ? supprimer les articles:

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La plupart des paysans s'exprimant en patois, le plus simple serait de traduire leur langue en fran?ais, en conservant le plus fid?lement possible les expressions originales.

En tous cas, il y a une chose aussi dont on abuse: c'est la description rustique. Les trois quarts des romanciers ne r?sistent pas ? la tentation de d?crire le milieu champ?tre, les travaux de la campagne, f?tes, saisons, r?coltes, larges fresques, tableaux plaqu?s qui paralysent le r?cit. L'art consiste, au contraire, ? distribuer habilement la description ? travers les faits, l'?pisode ou l'?tat d'?me que vous peignez. T?chez que le lecteur soit dupe et qu'il ne remarque pas le proc?d?. Rien n'est ennuyeux comme une longue description rustique.

?vitez encore, dans les peintures villageoises, de prendre vous-m?me le ton de vos personnages; ne vous croyez pas oblig? de parler en paysan, sous pr?texte que vous faites parler des paysans, et de dire ? chaque instant, par exemple: <> Cette affectation est choquante. Gardez toujours le ton d'un simple narrateur.

Voulez-vous faire de bons romans rustiques? Allez au village; ?crivez-les sur place. On ne sait pas toutes les ressources que peut offrir l'observation de la vie villageoise. Il existe dans beaucoup de communes des amateurs arch?ologues, qui consacrent leurs loisirs ? ?crire l'histoire de leur pays. C'est en groupant ces louables travaux qu'on arrivera peut-?tre un jour ? avoir un tableau complet de l'ancienne France. Mais pourquoi s'en tenir au pass?? Le r?cit des moeurs d'aujourd'hui serait tout aussi int?ressant que l'histoire des moeurs d'autrefois. J'ai connu une jeune femme tr?s intelligente, qui, habitant un village avec sa famille, a ?crit au jour le jour tout ce qui se passait dans ce bourg perdu o? il ne se passait rien. A la fin de l'ann?e, cela faisait le journal le plus curieux que j'aie jamais lu. Quel cadre pour un roman paysan!...

Si le roman rustique tente l'observateur de province, le roman mondain exerce encore plus d'attraction sur les d?butants qui viennent vivre ? Paris.

Pour faire du roman mondain, il est absolument n?cessaire d'aller dans le monde. Vous aurez beau, si vous n'y allez pas, traiter les sujets les plus aristocratiques, il vous manquera toujours ce ton d'autorit?, d'?l?gance et de distinction qui doit caract?riser le roman mondain. Paul Hervieu avait v?cu dans le monde et l'avait ?tudi? de pr?s, avant d'en devenir le peintre impitoyable.

Balzac lui-m?me, malgr? tout son g?nie, n'a pu r?ussir ? ?crire de vrais romans mondains. Ses artificielles duchesses de Langeais et de Maufrigneuse ne donnent ni la sensation de la haute ?l?gance, ni le ton des conversations aristocratiques. Balzac excelle, au contraire, dans la peinture de la vie bourgeoise, qui est ? peu pr?s le milieu naturel de la moyenne des ?crivains.

Les romans d'Octave Feuillet sont rest?s, dans ce genre, des mod?les de romans distingu?s.

On reproche ? Octave Feuillet d'?tre romanesque. <>

Ce qui est vraiment trop facile, c'est le mauvais roman mondain, le roman-snob, celui qui continue ? exploiter l'?ternel vieux jeu, la femme fatale, la contessina, l'aventuri?re, jalousies gant?es, passions tragiques, adult?res de balcon, lacs italiens, Florence, Venise, voyages en sleeping, ?trang?res ?nigmatiques, la criarde Riviera, le Br?silien exalt?, byronisme de palace et de wagons-lits, d?froque us?e et rapi?c?e dont s'habille encore de nos jours la n?o-banalit? romantique.

Cela ne veut pas dire que ce genre de roman est faux en soi. Il est simplement ridicule par sa pr?tention, et aussi parce qu'on n'y trouve jamais la moindre parcelle de v?rit? humaine. Autrement le roman mondain pourrait tr?s bien ?tre une oeuvre de talent, comme le roman rustique ou le roman bourgeois.

En somme, le roman mondain demande des dispositions particuli?res et l'exp?rience personnelle d'un genre de vie qui n'est pas ? la port?e de chacun.

Le roman historique non plus n'a rien perdu de sa vogue et peut rivaliser d'int?r?t avec le roman mondain. J'entends par roman historique un r?cit de faits accompagn? d'une reconstitution du pass?.

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M. t'Sterstevens aurait pu se contenter de bl?mer l'abus du document, et surtout du document insignifiant ou encombrant. Pense-t-il s?rieusement qu'un roman historique, purement fantaisiste et sans documentation, sera moins livresque et plus vrai qu'un roman document??

A c?t? des nouvelles n?cessit?s du roman historique, renseignements, exactitude et couleur, la formule de Walter Scott, romancier pourtant tr?s sup?rieur ? Dumas, nous para?t bien insuffisante. L'id?al serait le m?lange des deux m?thodes. On peut tr?s bien concevoir un roman genre Walter Scott, o? l'on att?nuerait le romantisme des personnages et o? l'on accorderait plus de place ? la description plastique, tout en maintenant l'int?r?t, l'action et le dialogue, choses indispensables au succ?s d'un livre. Depuis Maurice Maindron, qui a fait si voluptueusement revivre la sensualit? violente du seizi?me si?cle, on a publi? de nombreux romans historiques sur des ?poques diverses remontant jusqu'aux plus vieux ?ges; aucun ne fera oublier l'?clatante couleur de Maindron.

Il ne faut pas surtout, dans un roman historique, que le document et les tableaux de moeurs ?touffent la narration. Trop de description ?loigne le public, qui demande avant tout le drame et la vie.

Voyez l'exemple de L?on Cahun. Visionnaire du pass?, sorte de Zola ?pique, Cahun a ?voqu? avec une extraordinaire intensit? la ru?e des Barbares, les invasions mongoles, batailles furieuses, migrations des peuples, incendies des villes et des ch?teaux... Ses livres sont cependant rest?s ignor?s du public. Le r?cit se perd dans des mat?riaux en fusion. La virtuosit? seule n'a pu faire vivre de pareilles oeuvres, parce qu'elles ont ?t? ?crites, non pour plaire au public, mais pour la satisfaction personnelle de brosser de truculents tableaux de batailles. C'est un peu ce qui est arriv? ? Judith Gautier. Les ruissellements d'images, la splendeur f?erique n'ont pas suffi ? populariser ces fresques ?blouissantes, qui enthousiasmaient Heredia.

La couleur historique a ses adversaires. <> C'est possible, et on peut gloser l?-dessus. Laissons dire; tenons-nous-en aux principes. La m?thode est bonne, et on n'a pas le droit de supprimer l'effort, sous pr?texte que la r?alisation est difficile.

Mais, encore une fois, l'exactitude seule ne donne pas la vie, et la couleur seule n'est que la moiti? de la v?rit?. Il faut r?unir les deux choses, ?tablir sa documentation d'apr?s des sources de premi?re main, et se familiariser avec les moeurs d'une ?poque, de fa?on ? en ?tre satur?. Alors seulement vous aurez quelque chance de rendre la v?rit? du langage et des moeurs, telle qu'on la trouve, par exemple, dans les dialogues de Walter Scott.

Ces questions sont tr?s complexes; tous les exc?s ont leurs inconv?nients. A force d'arch?ologie, Jean Lombard a sombr? dans le peinturlurage criard. ?vitez le bric-?-brac; n'oubliez jamais que le roman historique, comme les autres romans, n'a de valeur que par la clart?, le plan, la composition, l'int?r?t, et qu'il ne faut jamais ?crire en style byzantin, m?me pour raconter l'histoire de Byzance.

Le bibliophile Jacob avait raison de dire <>.

Je crois utile de terminer ce chapitre par quelques r?flexions sur le conte et la nouvelle, qui sont, au fond, des romans en r?duction.

M. Pierre Veber a essay? d'?tablir une statistique de cette effroyable production. Il y aurait ? peu pr?s quinze grands journaux parisiens et cinq grands journaux r?gionaux qui ins?rent r?guli?rement un conte par jour. Cela repr?sente 7 200 nouvelles par an; or, comme cela dure depuis quarante ans, cela fait au total 288 000 nouvelles. <>

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Ces lignes pourraient ?tre sign?es Maupassant ou Flaubert...

Nous avons aujourd'hui quelques conteurs, comme Henri Duvernois, qui maintiennent la r?putation du genre et se sont fait une place distingu?e dans la nouvelle. Un sonnet sans d?faut vaut un long po?me. Une nouvelle parfaite vaut un long roman.

L'?rudition et le livre d'histoire

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