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Read Ebook: Les mains propres by Corday Michel

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Ebook has 830 lines and 64666 words, and 17 pages

Release date: August 25, 2023

Original publication: Paris: Ernest Flammarion, 1919

MICHEL CORDAY

Les mains propres

ESSAI D'?DUCATION SANS DOGME

PARIS ERNEST FLAMMARION, ?DITEUR 26, RUE RACINE, 26

Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction r?serv?s pour tous les pays.

Il a ?t? tir?, de cet ouvrage, quinze exemplaires sur papier de Hollande, tous num?rot?s.

OUVRAGES DU M?ME AUTEUR

LIBRAIRIE E. FLAMMARION

Dans la m?me collection:

V?nus ou les Deux Risques. Les Embras?s. S?same ou la Maternit? consentie. Les Fr?res Jolidan. Les Demi-Fous. La M?moire du coeur. Mariage de demain. Les R?v?l?es. Les Convenus. Monsieur, Madame et l'Auto. Plaisirs d'auto. Les Casseurs de bois.

EN PR?PARATION:

Les Feux du Couchant. Les Hauts Fourneaux.

E. GREVIN--IMPRIMERIE DE LAGNY

Droits de traduction et de reproduction r?serv?s pour tous les pays.

Copyright 1919 by ERNEST FLAMMARION.

A LA M?MOIRE DE JEAN JAUR?S

LES MAINS PROPRES

PR?AMBULE

LE BUT ET LE PLAN

Cet essai s'adresse ? ceux qui ?l?vent leurs enfants en dehors des dogmes, dans un esprit de libre examen.

On a quitt? la bonne vieille grande route, si commode, si facile, si plane, et que le troupeau des g?n?rations a suivie. On a devant soi l'espace en friche, o? serpentent quelques pistes ind?cises, toutes fra?ches. O? est la bonne direction? Ici, faut-il prendre ? droite, ? gauche? Parfois, on sent l'angoisse du doute. Mais il faut avancer. Alors, on jette des vues, on s'oriente, on se d?cide. Et l'on marche, en entra?nant ses petits par la main.

Il faut que l'effort de chaque pionnier serve ? ceux qui lui succ?deront. Il faut qu'ils puissent profiter de ses recherches, qu'ils retrouvent les d?terminations qu'il a prises, les directions qu'il a suivies, l'empreinte de ses pas.

Cet ouvrage n'a pas d'autre but, ni d'autre plan. C'est un ensemble de modestes solutions aux innombrables probl?mes qui se posent au long de la route. Ce n'est qu'une suite d'opinions. Et on ne s'en ?tonnera pas. En effet, qu'est-ce qu'?duquer? C'est compl?ter, fortifier et redresser, par l'influence du milieu, les notions confuses d?pos?es dans le petit ?tre par l'atavisme et l'h?r?dit?. Or, nous ne pouvons agir sur l'enfant que par notre exemple, nos causeries, nos enseignements; et nous ne faisons alors, en toutes ces circonstances, qu'imprimer dans la jeune cervelle nos propres opinions sur toutes choses...

La premi?re partie de cet essai est pr?cis?ment un expos? des opinions g?n?rales dont nous souhaitons que les enfants soient p?n?tr?s, plus encore par les entretiens de leurs parents et l'atmosph?re du foyer que par la lecture des livres et les le?ons des ma?tres.

La seconde partie est toute d'adaptation.

Quant au titre de cet ouvrage, il est emprunt? ? l'une de ces vues morales qui se sont affranchies des anciens dogmes.

PREMI?RE PARTIE

OPINIONS

CHAPITRE PREMIER

LE BONHEUR

Quand on se lance, hors de la grande route, hors des chemins battus, poss?de-t-on une indication g?n?rale sur la direction ? suivre? La vie humaine a-t-elle une tendance? Car cette tendance devrait nous guider. Nous devrions marcher dans son sens.

Oh! Il ne s'agit pas de rechercher le destin final de l'homme. A ce sujet, disons-nous simplement que cette plan?te mourra comme les autres. Il s'agit de savoir s'il existe une aspiration commune ? tous les ?tres depuis qu'ils respirent sur la terre, un signe indicateur de la vie. H?las! La plupart des humains ne se posent m?me pas la question. Ils naissent, subsistent, meurent, sans avoir pris conscience de ce qu'ils ont tent? de r?aliser pendant leur vie.

Et pourtant, cette tendance existe. Voyez une rue fr?quent?e, vers le soir. Tous les passants courent, se h?tent, se pressent. Or, si les buts sont diff?rents, le mobile est unique. Ob?issant tout droit ? leur instinct d?brid? ou tenus en lisi?re par le devoir, cherchant l'utile ou l'agr?able, la hautaine volupt? du sacrifice ou le bas plaisir, regardant le ciel ou la terre, tous aspirent ? r?aliser leur d?sir, tous vont vers leur satisfaction. Oui, tous, malgr? des apparences contraires, malgr? de d?concertants d?tours, tous veulent leur bonheur.

C'est l'instinct primordial de toute existence. On le surprend chez le plus infime animalcule dans le champ du microscope. Il fuit la peine et cherche la joie, c'est-?-dire qu'il fuit le milieu o? il souffre et cherche le milieu o? il se pla?t. En quoi il ob?it bien ? la loi de la vie: car la joie est de la vie accrue, plus intense et plus ardente; et la douleur est de la vie diminu?e, l'acheminement vers la mort.

Mais qu'est-ce donc que le bonheur? Ce serait folie d'en donner une d?finition applicable ? tous les humains, puisque ce milliard et demi d'?tres sont diff?rents les uns des autres, puisqu'il n'y a pas deux visages--ni sans doute deux cerveaux--identiquement semblables. Il y a autant de bonheurs que d'individus.

Mais peu importe qu'on demande ces joies au pouvoir, aux honneurs, ? l'art, aux voyages, aux plaisirs de la table ou de l'amour, ? la conscience de la t?che accomplie, aux sereines recherches du laboratoire, aux ?lans de l'altruisme, aux f?licit?s du propri?taire, du collectionneur, ? de modestes travaux manuels, m?me aux ?motions de la chasse ou de la p?che. Tous ces bonheurs ont des traits communs. Ils donnent ? l'?tre sa satisfaction, le sens de la pl?nitude. Ils portent la vie ? sa plus haute tension.

Il existe dans la nature un exemple de cette tendance continuelle ? s'accro?tre. C'est le v?g?tal. Une plante, une vie humaine s'efforcent toutes deux d'atteindre leur exub?rance totale. Elles s'?l?vent, l'une vers la lumi?re, l'autre vers le bonheur.

Au surplus, la croissance de l'esprit est toute pareille ? celle de la plante, qui d'abord cherche sa subsistance de toutes parts, aveugl?ment, par ses mille racines, dans l'obscurit? de la terre, puis, s'?lan?ant au jour, se nourrit d'?l?ments plus subtils, ob?it ? ses affinit?s et enfin s'exprime et s'?panouit dans les contours pr?cis de ses verdures fleuries.

Si toutes les manifestations d'une existence, actes et pens?es, pouvaient prendre une forme sensible, s'inscrire dans l'espace comme autant de feuilles et de fleurs, l'ensemble d'une vie compl?te appara?trait comme un bel arbre, harmonieux, touffu, luxuriant, ?tendant ses branches en tous sens, dans un fr?missant d?sir de s'accro?tre encore.

Un beau rosier est l'image du bonheur.

Et, de m?me qu'il y a des v?g?taux de toutes tailles, du ch?ne au brin d'herbe, mais qui tous ont ce caract?re commun de remplir leur ligne, de tendre vers leur complet d?veloppement, de m?me il y a des vies de toutes envergures, les unes tr?s modestes, les autres magnifiques, mais qui toutes peuvent ?tre ?galement heureuses, atteindre leur plein ?panouissement. Ce n'est pas une question de dimension, c'est une question de densit?, de pl?nitude. Une destin?e heureuse, c'est une destin?e remplie.

Enfin, de ce point de vue, le but de l'?ducation appara?t. ?duquer, c'est cultiver. C'est favoriser l'expansion de la plante humaine. C'est la redresser, l'abreuver, l'?monder, la bien exposer, de fa?on qu'elle soit forte, saine, qu'elle donne toutes les qualit?s de l'esp?ce, qu'elle atteigne sa plus haute puissance.

Pour reprendre l'analogie avec le monde v?g?tal, un groupe humain ne doit plus ?tre l'inculte for?t o? les arbres s'?touffent mutuellement. Une soci?t? civilis?e doit ?tre un jardin, cultiv? avec intelligence, o? chaque plante, pour donner toutes ses fleurs et tous ses fruits, arr?te ses frondaisons aux frondaisons voisines.

Ainsi la plante reste d'un exemple total: monter bien droit, dans la clart?, s'accro?tre, s'?panouir, s'orner de fleurs, se r?pandre en parfums, donner des fruits, et ne borner son expansion qu'? l'expansion des autres.

D'ailleurs--et ceci est capital--cette limitation elle-m?me appara?t de notre int?r?t. Les preuves en abondent.

Il est bien certain que si chacun s'effor?ait d'observer cette loi restrictive, tant de heurts, de drames, de souffrances seraient ?vit?s, que l'?tat g?n?ral de l'humanit? serait meilleur. Le monde serait plus agr?able ? habiter. La vie d'un village est symbolique ? cet ?gard. L?, par une lente sagesse, tous les habitants sont parvenus ? respecter la terre du voisin. Leur bien se borne au bien d'autrui. Ne sont-ils pas plus heureux que s'ils d?passaient les limites de leur propre domaine et d?bordaient sans cesse sur les domaines adjacents? Que de querelles, de luttes, de haines abolies! Ce serait la guerre. C'est la paix.

Enfin, la notion relativement r?cente, pour ainsi dire scientifique, de la solidarit?, vient encore confirmer qu'il est de notre int?r?t de ne pas nuire. En l?sant autrui, nous ne sommes jamais s?rs de ne pas nous l?ser nous-m?mes, pr?cis?ment parce que toutes les cellules sociales sont d?pendantes, solidaires. Quand un point de l'organisme s'enflamme, tout l'organisme a la fi?vre. Tout ce qui nuit ? la collectivit? nuit ? l'individu. Celui qui, au m?pris de la prudence ou de l'hygi?ne, jette quelque virus dans la circulation, est-il jamais s?r que le mal, cheminant ? travers le monde, ne viendra pas frapper l'un des siens?

Ainsi, le souci bien compris de notre bonheur m?me, nous am?ne ? le borner. Et ceux-l? se trompent qui accusent la morale du bonheur de n'avoir ni sanctions ni freins. Elle les trouve en elle-m?me.

Au surplus, la compr?hension, le soin de notre propre bonheur, ne nous d?tournent pas seulement de nuire, de faire le mal. Ils nous incitent aussi ? faire le bien, car ces lois d'?quilibre et de r?ciprocit? jouent pour le bien comme pour le mal. Faire du bien ? autrui, c'est en faire ? soi-m?me. On fait des heureux pour ?tre heureux. On re?oit en reflet le bonheur que l'on donne.

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