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Words: 131867 in 58 pages

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LE M?MOIRE D'IVAN MAN?S.

Paris, avril 1871.

Puisque l'enl?vement du fils a?n? de Mme Maria-Pia, grande-duchesse de Russie, a paru ? Votre Excellence m?riter assez de curiosit? pour qu'elle souhait?t d'en lire le r?cit, plut?t que de l'entendre dans le cours d'un entretien, souvent diffus et mal en ordre, j'ob?irai d'autant plus volontiers aux d?sirs de Votre Excellence que, s'agissant d'une princesse ? laquelle je suis d?vou? depuis vingt ans, par le respect et le plus profond attachement, tout ce que j'ai ? raconter ne fera que mettre en lumi?re ses hautes vertus: comme aussi, j'ose me flatter que la narration que j'entreprends, en dissipant tous vos doutes, vous int?ressera par l? plus fortement ? celui dont elle retrace la naissance et la d?plorable aventure.

Votre Excellence est trop au fait des personnages et des cours de l'Europe, pour que j'aie besoin de lui rappeler le mariage du grand-duc F?dor, fr?re du tsar Nicolas, avec la princesse Maria-Pia, fille de dom Pedro Ier, empereur du Br?sil, et soeur de dona Maria II da Gloria, reine de Portugal. En 1843, ? l'?poque de ce mariage, impos? ? son fr?re pu?n? par l'inflexible Nicolas, Mme Maria-Pia avait dix-sept ans, et le Grand-Duc plus de quarante-cinq. C'?tait une ?trange disproportion d'?ge, et la disparate de coeur et de sentiments des nouveaux ?poux semblait plus effrayante encore. En effet, depuis des ann?es, le Grand-Duc se trouvait engag? de passion ? une ma?tresse, la princesse Sacha Gourguin. Cette Gourguin ?tait, comme l'on dit chez nous, un vrai chat noir, qui n'avait que la peau et les os; toutefois, un grand feu d'esprit, et les plus beaux yeux, avec des mani?res hautaines: dangereuse, artificieuse, accus?e de beaucoup de noirceurs; dont le mari ?tait mort brusquement, et l'on en avait mal parl?, mais qui tenait le Grand-Duc sous son joug, et l'avait comme ensorcel?. Ce mariage, tout de politique, ne rompit donc que peu de temps l'attachement des deux amants, et bient?t m?me le Grand-Duc, qui avait introduit la princesse aupr?s de Mme Maria-Pia, eut l'adresse de les lier et de les rendre ins?parables, sans ?veiller chez sa femme aucun soup?on. La Grande-Duchesse ?tait jeune, toute neuve ? P?tersbourg; elle ignorait la cour, le monde, et avait foi en son mari.

Deux ou trois mois apr?s les noces, Mme Maria-Pia crut ressentir tous les sympt?mes d'une grossesse. La nouvelle s'en r?pandit avec ?clat, et quantit? de dames de noblesse visit?rent la Grande-Duchesse, et lui firent leur cour en lui pronostiquant qu'elle accoucherait d'un gar?on. Mais on ne tarda pas ? s'apercevoir que le Grand-Duc, loin de marquer de la joie aux f?liciteurs, se montrait, sur cette mati?re, fort aust?re et m?me renfrogn?, r?pondant par monosyllabes, et parfois rompant ouvertement les compliments qu'on lui adressait. A l'entr?e m?me de l'hiver, c'est-?-dire vers la fin d'octobre, Son Altesse partit subitement pour sa terre de Bi?lo, emmenant la Grande-Duchesse, et la princesse Sacha Gourguin les rejoignit presque aussit?t.

Je me vois forc?, maintenant, d'entrer dans un d?tail quelque peu minutieux, et vous demande, en cet endroit, de la patience, si bizarre ou m?me rebutant que ce r?cit puisse vous para?tre; mais les moeurs russes sont bien loin d'?tre aussi polies que vos moeurs. De plus, je m'assure, Monsieur, que la confidence que je vous fais, pleine et enti?re, et ne cachant ni les choses, ni les noms, ni les fautes, demeurera sous un secret absolu entre nous.

Le 13 janvier 1844, Mme Maria-Pia, entendant la messe en son oratoire, car elle ?tait demeur?e catholique, par permission sp?ciale du Tsar, ressentit de violentes douleurs. On l'emporta dans son appartement; sa dame d'atour portugaise lui arrangea les cheveux comme on les arrange en Portugal aux femmes qui vont accoucher et qui ne doivent pas de sit?t changer de coiffure; le m?decin fut averti; on pr?para les langes et le berceau, et l'on coucha promptement la malade.

Le Grand-Duc, quand on lui apprit l'?v?nement, allait partir pour la chasse au loup, avec la princesse Gourguin et plusieurs gentilshommes de Novgorod. Il manifesta un violent d?pit et dit, comme en furie, ? la cam?riste, qu'elle ?tait folle et sa ma?tresse aussi. Cependant, il renvoya les tra?neaux, s'excusa aupr?s de ses invit?s, et monta chez la Grande-Duchesse.

La nouvelle y avait rassembl?, en d?sordre, la petite maison portugaise dont Maria-Pia avait ?t? suivie: le chapelain, la dame d'atour, deux femmes de chambre qui ?taient soeurs, et les favorites de leur ma?tresse. Mais, sit?t qu'elle les aper?ut, Sacha Gourguin se r?cria, dit hautement que tant de monde r?uni incommoderait la malade; enfin, prenant le ton d'autorit? comme par un tendre int?r?t, elle ordonna que tous se retirassent, ? l'exception du peu de gens indispensables; et pour ne laisser de pr?texte ? personne, elle exhorta le Grand-Duc ? donner l'exemple. Monseigneur sortit donc de la chambre, et tout le monde le suivit. Il ne demeura aupr?s de Maria-Pia que la Gourguin, Platon Boubnoff le m?decin, et une fille de service qui se nommait Agraf?na. En effet, les femmes de chambre eussent ?t? de peu de secours, la plus ?g?e ayant seize ans ? peine, et toutes deux ne faisant rien que pleurer.

Les douleurs de Maria-Pia furent si longues et si excessives que l'on craignit qu'elle ne p?t y r?sister. Le chapelain fit une exposition du saint sacrement dans l'oratoire, o? les Portugaises pass?rent le jour ? prier et ? se lamenter. Vers le soir, au milieu d'un violent acc?s, Platon Boubnoff dit brusquement que la patiente ne pourrait jamais soutenir le travail, si elle ne prenait un peu de repos, et avec son imp?tuosit?, il lui pr?senta ? boire. A peine Maria-Pia eut-elle aval? le breuvage, qu'elle tomba dans un sommeil l?thargique, qui dura jusqu'au lendemain. Le Grand-Duc ne se coucha pas. Il venait gratter par moments ? la porte, qu'on lui entre-b?illait, et parlait bas, tant?t ? la princesse, tant?t ? Agraf?na ou au m?decin. Un peu apr?s minuit, Platon Boubnoff sortit de la chambre, et il n'y rentra que le matin.

La Grande-Duchesse s'?veilla enfin. Elle se crut environn?e de tous les sympt?mes assur?s d'un accouchement, et aussit?t demanda son enfant. Boubnoff lui r?pondit, d'un air ?tonn?, qu'elle ne l'avait pas encore mis au monde. La Grande-Duchesse se prit ? pleurer et soutint vivement le contraire, en sorte que, pour apaiser l'extr?me inqui?tude qu'elle t?moigna, le m?decin finit par l'assurer que la journ?e ne se passerait point qu'elle n'accouch?t, et m?me s?rement d'un fils, ? en juger par les op?rations que la nature avait faites pendant la nuit. Cette promesse parut contenter le Grand-Duc, mais ne calma point Mme Maria-Pia, qui protestait toujours qu'elle avait accouch?.

Le ch?teau de Bi?lo avait pour h?te, ? ce moment, un certain comte Nadasti, avec sa femme. Celle-ci voulut visiter la Grande-Duchesse, et, pour ne point donner prise aux soup?ons, Sacha Gourguin l'introduisit. D?s que la comtesse s'approcha, Mme Maria-Pia fondit en larmes et lui fit part de ses angoisses, jurant qu'elle ?tait accouch?e. Mais, par un hasard singulier, cette comtesse Nadasti pr?tendit aussit?t se souvenir que dans une de ses grossesses, elle avait eu, au bout du neuvi?me mois, tous les signes avant-coureurs d'un accouchement, qui cependant n'arriva que six semaines apr?s. La princesse Gourguin approuva beaucoup ce r?cit, et il sembla s?duire aussi le Grand-Duc, mais la Grande-Duchesse ne se rendait point.


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